PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
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Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur de la question de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.
Je compte sur chacun des orateurs pour respecter le temps de parole qui lui est imparti.
terrorisme lié au Hezbollah
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.
La France reçoit en ce moment, dans le cadre du programme d’accueil des « personnalités d’avenir », un représentant du Hezbollah libanais.
Je m’interroge beaucoup au sujet de cette réception : était-il obligatoire, pour dialoguer, d’inviter pendant plusieurs jours, aux frais de l’État, un membre d’une organisation terroriste dont les actions ont pris pour cibles la France et les Français ?
Peut-être M. le ministre des affaires étrangères et européennes a-t-il obtenu des contreparties à cette main tendue à un membre du Hezbollah, par exemple l’application de la résolution des Nations unies demandant le désarmement de cette organisation ?
Peut-être, au nom de la Realpolitik, dont on a entendu parler récemment, considère-t-il déjà, puisqu’il est question d’un programme d’avenir, que le Hezbollah sera demain le maître du Liban et que ce serait là, précisément, une façon de préserver l’avenir ?
J’ai bien conscience de l’avancée que représentent les accords de Doha, mais ils sont d’une extrême fragilité. Cela ne justifie pas, pour l’heure en tout cas, une invitation d’État.
C’est pourquoi je souhaiterais que l’on m’indique quelles sont les conceptions du Gouvernement en matière de lutte contre le terrorisme, quelle politique mène la France pour, in fine, protéger nos concitoyens de ce fléau, de cette menace qui, quelle qu’en soit l’origine, pèse chaque jour un peu plus sur la paix et la tranquillité du monde. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. Monsieur le sénateur, je comprends votre émotion.
Je tiens à vous préciser qu’il s’agit non pas d’une réception officielle, mais d’une invitation qui s’inscrit dans une démarche diplomatique du ministère des affaires étrangères et européennes visant à nouer des contacts avec des personnalités de tous pays afin de s’informer de la situation politique de ceux-ci et de pouvoir conduire une politique d’influence.
Ne voyez donc pas dans cette invitation une quelconque forme de reconnaissance, monsieur le sénateur. Certes, le fait que ce professeur d’université du Liban soit lié au Hezbollah peut vous interpeller, je le comprends bien, mais la France a besoin d’entretenir des contacts y compris avec cette organisation, dont je rappelle qu’elle est représentée au Parlement libanais, pour savoir ce qui se passe mais aussi transmettre un certain nombre de messages.
Tel est le sens de ce programme d’invitations de « personnalités d’avenir ». Cette réception ne vaut bien sûr pas approbation de la ligne d’action du Hezbollah. Notre pays entend avoir une diplomatie universelle, or pour pouvoir faire évoluer le monde, il faut dialoguer sans exclusive, conformément au souhait du Président de la République et du Gouvernement que conduit M. François Fillon.
L’action du ministère des affaires étrangères et européennes n’est donc motivée que par la volonté de maintenir cette diplomatie universelle, dans l’intérêt non seulement de la France, mais aussi de la paix et du monde. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
La découverte, mardi dernier, de cinq bâtons de dynamite dans un grand magasin parisien a ravivé la conscience de la menace terroriste à laquelle est confronté notre pays.
D’après ce que nous en savons, il ne s’agissait là que d’un avertissement : les explosifs en question n’étaient assortis d’aucun dispositif de mise à feu et les services de sécurité ont été avertis par une bien curieuse lettre de revendication, signée d’un groupe, le Front révolutionnaire afghan, apparemment inconnu jusqu’ici de vos services, madame la ministre, et réclamant le départ des troupes françaises d’Afghanistan d’ici à la fin du mois de février 2009.
Depuis, de nombreux spécialistes ont semblé écarter la piste islamiste.
Madame la ministre, vous avez annoncé que l’enquête avançait vite : où en est-elle ? Disposez-vous d’éléments nouveaux ?
Plus généralement, nous avons pu relever quelques dissonances au sein du Gouvernement sur le degré de risque qui pèse aujourd’hui sur le pays : la France est-elle, oui ou non, particulièrement exposée ?
Enfin, nous savons que, suite à l’incident du Printemps-Haussmann, vous avez pris des mesures de renforcement de la sécurité.
Après avoir rencontré hier les directeurs généraux de la police et de la gendarmerie, le préfet de police, les responsables des services de renseignement, des représentants de la RATP, de la SNCF, des aéroports de Paris et des grands magasins, pouvez-vous préciser la nature de ces mesures, en particulier de celles qui seront prises pour les quelques jours qui nous séparent de Noël ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, j’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises : la France n’est pas plus menacée que d’autres pays, mais cela ne veut pas dire qu’elle le soit moins.
Nous devons donc être vigilants. Cette vigilance est assurée à la fois par nos dispositifs, éprouvés d'ailleurs, de sécurisation et par nos services de renseignement.
Nous devons également toujours savoir nous adapter en fonction du risque. C’est ainsi qu’à la suite, notamment, des attentats de Bombay, j’ai décidé l’organisation d’un exercice, qui aura lieu lundi prochain, pour vérifier nos capacités de faire face, par exemple, à des prises d’otages multiples se produisant dans plusieurs villes à la fois.
En ce qui concerne l’alerte de mardi dernier, les bâtons de dynamite qui ont été découverts provenaient du domaine du génie civil ou des travaux publics et étaient d’un type relativement ancien. Comme vous l’avez dit, il n’y avait pas de danger d’explosion. Pour autant, cela doit nous conduire à réévaluer les dispositifs devant être activés en un tel cas.
C'est la raison pour laquelle j’ai pris, immédiatement après cette découverte, un certain nombre de décisions pour renforcer encore le dispositif que j’avais mis en place à compter du 1er décembre pour cette période toujours extrêmement sensible qui précède les fêtes : des forces mobiles supplémentaires sont venues renforcer les patrouilles et l’effectif des militaires déployés dans le cadre du plan Vigipirate a été accru.
La réunion d’hier matin que vous avez évoquée, monsieur le sénateur, nous a permis de faire le point et, surtout, de mettre en œuvre un nouveau dispositif de suivi : trois fois par semaine, les différentes personnalités concernées rencontreront le préfet de police à Paris, le préfet de région dans les autres grandes villes.
Nous avons pris également la décision de renforcer la sécurité dans les grands magasins, notamment en effectuant des contrôles aléatoires des sacs et en éloignant des entrées sensibles les véhicules en stationnement, ainsi que de mettre l’accent sur les contrôles avant l’ouverture des magasins ou le départ des trains.
Toutes ces mesures n’ont qu’une seule finalité : assurer la protection des Français et des touristes, afin que tous puissent faire leurs courses en vue des fêtes de fin d’année dans une complète tranquillité d’esprit. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
carte territoriale de la gendarmerie
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère. (« Ah ! » sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Louis Carrère. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Elle concerne la gendarmerie nationale et sa présence sur le territoire, donc la sécurité de tous nos concitoyens.
Pour avoir déjà longuement discuté avec vous de ce sujet, madame la ministre de l’intérieur, je connais à l’avance les réponses que vous pourriez me faire.
Plusieurs sénateurs de l’UMP. Ne posez pas la question, alors !
M. Jean-Louis Carrère. Je le dis avec beaucoup de courtoisie, mais il y a peut-être des choses que vous ignorez. Voilà pourquoi je m’adresse à M. le Premier ministre !
Voici une note émanant de votre cabinet, monsieur le Premier ministre (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP), note que certains qualifient, faute de pouvoir en nier l’existence, de « nulle et non avenue ».
Or, pour une note « nulle et non avenue », elle s’avère particulièrement intéressante ! Jugez vous-mêmes, mes chers collègues : elle annonce et prépare la fermeture, à partir de 2009, de quatre écoles de gendarmerie sur huit.
En dépit des dénégations de certains, la note en question s’est révélée juste puisque, voilà quelques jours, nous avons appris que quatre écoles de gendarmerie seront effectivement bientôt fermées. M. Raffarin nous a d’ailleurs confirmé cette information.
Or, plus grave encore, toujours selon cette note que je vous remettrai, monsieur le Premier ministre,…
M. Jean-Pierre Sueur. Il l’a !
M. Jean-Louis Carrère. … si vous ne l’avez pas lue, seraient prévues la fermeture de 175 brigades territoriales sur 1 700, soit plus de 10 % du total, ainsi que – excusez du peu ! – la suppression de 15 escadrons de gendarmerie mobile sur 128.
M. Alain Fouché. Hiroshima !
M. Ivan Renar. Ce n’est pas rien !
M. Jean-Louis Carrère. Ma question est très simple et intéresse tous les sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent : ce n’est pas une question propre à un groupe politique, c’est une question du Sénat au Gouvernement.
M. François Autain. Voilà !
M. Jean-Louis Carrère. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous assurer, ici et maintenant, qu’il n’y aura pas de fermeture de brigades ni de dissolution d’escadrons de gendarmerie en 2009 ? Sinon, donnez-nous la liste exacte et précise des fermetures qu’entraînera la cure d’amaigrissement à laquelle vous comptez soumettre la gendarmerie !
M. Alain Fouché. La gauche a fermé des brigades !
M. Jean-Louis Carrère. Tous les élus de nos territoires attendent votre réponse. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Pierre Sueur. Question très claire !
M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur Carrère, avec une courtoisie au moins égale à la vôtre, je vais vous répéter, en présence de M. le Premier ministre, ce que je vous ai dit avant-hier, hier et même en de précédentes occasions.
Effectivement, une note de travail a été rédigée en interne par un membre du cabinet du Premier ministre, aux fins de servir de base de travail. (M. Jean-Louis Carrère brandit le document.) Nous ne nions pas du tout son existence ! Vous l’avez d'ailleurs largement utilisée, d’une façon quelque peu fallacieuse – permettez-moi de vous le dire ! – quarante-huit heures avant les élections sénatoriales dans un certain nombre de départements (Exclamations et applaudissements sur les travées de l’UMP),…
M. Jean-Louis Carrère. Pas dans les Landes !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … alors même que vous saviez parfaitement, puisque je l’avais dit, qu’il s’agissait d’une simple hypothèse de travail.
La preuve en est, monsieur Carrère, que cette note cite des écoles de gendarmerie qui ne sont pas celles qui ont été finalement fermées – car la fermeture de certaines écoles était prévue depuis longtemps. Cela montre donc bien qu’il ne s’agissait que d’un document de travail, qui a été contredit par la suite, y compris d’ailleurs pour les fermetures de brigades de gendarmerie que vous avez évoquées.
J’ai pris un engagement sur ce point devant la Haute Assemblée, et vous savez que je n’ai pas pour habitude de manquer à ma parole.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est aussi ce que l’on nous a seriné pour la carte judiciaire !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je vous l’ai dit, je suis très attachée à la présence de l’autorité de l’État, et donc de la gendarmerie, sur l'ensemble du territoire, notamment dans les zones les plus fragiles.
Je vous ai également indiqué, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2009, que les missions de la gendarmerie seraient recentrées sur son cœur de métier. Les gendarmes se verront ainsi déchargés d’un certain nombre de tâches, notamment administratives, ce qui permettra de les affecter là où leur présence est le plus nécessaire, c’est-à-dire dans les brigades, en particulier dans les zones rurales. Il importe en effet d’assurer la protection de nos concitoyens.
Monsieur Carrère, ce n’est pas parce que vous répétez dix fois…
M. Jean-Louis Carrère. C’est ça, la pédagogie !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … des allégations que vous savez erronées qu’elles deviennent exactes ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste et du RDSE.)
M. Jacques Mahéas. Répondez à la question, madame la ministre : y aura-t-il, oui ou non, des fermetures ?
mouvement lycéen
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale.
Monsieur le ministre, en septembre dernier, sur France 2, évoquant la réforme du lycée, vous invitiez les lycéens à s’emparer du débat.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ils vous ont, semble-t-il, pris au mot,…
M. François Autain. Et au-delà !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … à tel point que leur mobilisation, conjuguée à celle des enseignants, des parents d’élèves et, plus largement, de toute la communauté éducative, vous conduit à reculer sur la question de la réforme du lycée.
Vous affirmez que cette réforme serait « l’otage d’un mouvement social n’ayant pas grand-chose à voir avec des questions pédagogiques ».
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ce qui vous inquiète, justement, c’est que peu à peu se révèle la cohérence de la politique conduite par le Gouvernement, dont la déconstruction du service public, en particulier de l’éducation nationale, est une étape, de même que celle du code du travail.
De fait, une aspiration à davantage d’égalité et d’équité semble se faire jour dans notre pays. Or les services publics permettent un véritable recul des inégalités.
La mobilisation prend de l’ampleur. À l’école, elle s’exprime sous plusieurs formes : des manifestations massives, comme aujourd’hui, des « réveillons revendicatifs » dans des lycées, des « nuits blanches » dans des écoles primaires, et, fait inédit, des actes de désobéissance.
Ainsi, des enseignants du primaire déclarent publiquement, au risque d’être sanctionnés, leur refus d’appliquer votre réforme. La loi instituant un service minimum d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires, votée en urgence cet été et dont mon groupe défendra d’ailleurs l’abrogation le 20 janvier prochain, n’a pas fait taire cette contestation.
Pour calmer les inquiétudes, vous annoncez notamment un plan national de formation des enseignants au traitement de la difficulté scolaire, destiné à pallier la suppression de 3 000 postes d’enseignant dans les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Mais quels moyens seront alloués à ce plan ? Les crédits pour la formation des enseignants ne cessent de baisser, budget après budget !
Vous assurez que les suppressions de postes n’affectent pas l’encadrement pédagogique. Comment expliquer alors aux parents que, à force de suppressions de postes de stagiaire, on en arrive à s’en remettre à l’ANPE pour recruter sous contrat à durée déterminée des personnels rémunérés 8,71 euros de l’heure pour assurer certains remplacements ?
M. Alain Gournac. La question !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le ministre, il faut cesser la caricature !
M. Alain Gournac. Arrêtez, vous n’êtes pas en train de vendre l’Humanité-Dimanche !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Les enseignants, les parents d’élèves, les lycéens ne refusent pas la réforme, mais ils rejettent celle que vous prônez, parce qu’elle est régressive pour l’école publique et qu’elle va à l’encontre des besoins de notre système éducatif pour assurer l’élévation du niveau de connaissances et de formation de tous et de toutes. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Posez votre question, ma chère collègue.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Mes chers collègues, je vous en prie, ne soyez pas si impatients ! (Mêmes mouvements.)
Monsieur le ministre, ma question est simple : quand allez-vous repartir de zéro, non seulement pour le lycée, mais pour toute l’école ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Darcos, ministre de l’éducation nationale. Madame la sénatrice, en ce qui concerne la réforme du lycée, je vous répondrai très clairement…
M. Jean-Pierre Sueur. Et sans hésitation !
M. Xavier Darcos, ministre. … et sans hésitation, effectivement, en répétant d’ailleurs ce que j’ai déjà dit à plusieurs reprises, que nous allons reprendre les choses de zéro. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. François Autain. Table rase !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oubliée, la réforme Fillon sur l’école !
M. René-Pierre Signé. Marche arrière toute !
M. Xavier Darcos, ministre. Nous allons, ensemble, reconsidérer complètement le dossier, en prenant le temps nécessaire, de sorte que nul ne puisse nous accuser d’agir à la va-vite, pour d’autres raisons que le seul souci de l’intérêt des jeunes de ce pays.
M. Jacques Mahéas. Vous allez ouvrir les lycées le dimanche ?
M. Xavier Darcos, ministre. Permettez-moi, madame la sénatrice, de vous rappeler les grands principes de la réforme, auxquels je reste très attaché. Je ne comprends d’ailleurs pas qu’ils puissent être discutés. (M. Jacques Mahéas s’exclame.) Attendez que je les cite, monsieur Mahéas, avant de porter un jugement !
Nous voulons que tous les lycéens aient une culture commune, que l’aide dont ils bénéficieront soit personnalisée, afin de soutenir davantage ceux qui sont le plus en difficulté.
M. Jean-Luc Mélenchon. Truismes !
M. Xavier Darcos, ministre. Nous voulons leur permettre un second choix d’option si le premier se révèle erroné et les place en situation délicate, afin d’éviter l’échec.
Mesdames, messieurs les sénateurs, d’aucuns nous accusent de vouloir instaurer un système scolaire injuste. Mais regardons la réalité de la situation actuelle : peut-on s’en satisfaire ?
M. Xavier Darcos, ministre. Voilà deux jours, l’OCDE a publié des statistiques montrant que le système éducatif le plus injuste de tous les pays développés,…
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah non, pas vous, monsieur le ministre !
M. Xavier Darcos, ministre. … c’est-à-dire celui où la réussite est le plus liée aux déterminismes sociaux,…
M. Jean-Luc Mélenchon. Ne discréditez pas le système français en vertu de critères anglo-saxons ! Vous êtes un ministre français, tout de même !
M. François Autain. Monsieur le ministre, vous exagérez !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Défendez le modèle français, monsieur le ministre, au lieu de démanteler le service public de l’éducation !
M. Xavier Darcos, ministre. En France, le milieu d’origine, social et familial, continue d’influer très fortement sur le pronostic scolaire.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ne discréditez pas l’éducation nationale !
M. Xavier Darcos, ministre. Ce n’est pas la discréditer que de dire la réalité ! Cela légitime notre objectif de mettre en place un système qui s’adapte mieux aux élèves, qui permette de répondre à leurs besoins !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce que vous faites n’est pas correct ! Un ministre de l’éducation nationale qui discrédite l’éducation nationale !
M. Xavier Darcos, ministre. D’ailleurs, madame Gonthier-Maurin, ces grands principes que je viens de rappeler sont précisément ceux sur lesquels nous nous étions mis d’accord avec les représentants des personnels et des lycéens. Nous ne les abandonnons pas !
Aujourd’hui, les circonstances imposent manifestement un surcroît d’explication et l’adoption d’une méthode de travail différente. Nous allons nous y employer, mais nous ne changerons rien à l’objectif de la réforme, car notre action est dictée par le souci de l’intérêt général, du bien de la nation. Nous travaillons pour l’avenir !
Mesdames, messieurs les sénateurs, je m’adresse aux élus que vous êtes : qui a intérêt à entretenir une confusion entre l’inquiétude des lycéens et leur besoin de dialogue, d’une part, et les événements qui se produisent çà et là dans nos quartiers, d’autre part ? Je regrette qu’un certain nombre d’élus, ainsi que le parti socialiste, qui défile aujourd’hui avec les lycéens, puissent indirectement encourager les débordements auxquels nous assistons.
M. Alain Gournac. Très bien !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Continuez ainsi : vous allez être balayés !
M. René-Pierre Signé. On ne peut pas tout accepter !
M. Xavier Darcos, ministre. Ce n’est pas ainsi que l’on défend la jeunesse ! Je vous le dis : dans quelques années, quand on fera le bilan de tout cela, les jeunes verront bien qui, du gouvernement de François Fillon ou de ceux qui défilent aujourd’hui, les a vraiment aidés ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous venez dénigrer l’éducation nationale devant le Sénat : c’est un comble !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est déshonorant !