Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. La droite est en train de montrer son vrai visage ! (Rires sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Jean-Pierre Fourcade. La gauche aussi !
M. Guy Fischer. Je disais à l’instant qu’elle avançait à visage masqué, mais avec M. Fourcade, le masque vient de tomber ! (Nouveaux rires sur les mêmes travées.)
M. Jean-Jacques Mirassou. Bas les masques !
M. Jean-Pierre Fourcade. Je dis toujours ce que je pense.
M. Guy Fischer. Monsieur Fourcade, j’ai beaucoup de respect pour vous, mais vous venez de sortir la Grosse Bertha ! (Protestations amusées sur les mêmes travées.)
Vous venez de demander à la commission et au Gouvernement d’appliquer l’article 41,…
M. Guy Fischer. Monsieur Fourcade, si M le ministre ou M. le rapporteur répondait à votre injonction, cela aurait pour effet de faire disparaître immédiatement, sans aucune discussion, des amendements…
M. Nicolas About. Oui !
Mme Isabelle Debré. Des amendements qui n’ont rien à voir avec le texte !
M. Guy Fischer. …qui ont déjà traversé le filtre de la commission.
M. Nicolas About. Filtre bienveillant !
M. Guy Fischer. Ces amendements ont été présentés à la commission, qui en a débattu. Ni le président de la commission, ni le rapporteur ne les ont fait tomber. C’est bien parce qu’ils souhaitaient que le débat puisse avoir lieu.
Aussi, chers collègues de la majorité, si vous voulez qu’en cette matinée le débat commence de cette manière, croyez-moi, nous allons utiliser d’autres moyens pour le retarder !
M. Jean-Pierre Fourcade. D’accord !
Mme Isabelle Debré. Retarder le débat n’est pas très constructif !
M. Guy Fischer. Jusqu’à présent, ce n’est pas nous qui avons retardé le débat, c’est vous. Pendant quarante-huit heures, vous avez été en nombre inférieur aux représentants de l’opposition, ce qui nous a valu une suite de scrutins publics. (Protestations sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
C’est la vérité ! Vous étiez incapables d’avoir la majorité en séance.
M. Alain Gournac. Au début, oui ! Après, non !
Mme Isabelle Debré. Vous ne nous donnez pas envie de venir quand vous faites de l’obstruction !
M. Guy Fischer. Ce faisant, vous avez traduit le trouble des campagnes, car, pour vos élus des territoires ruraux aussi, ces problèmes sont une préoccupation quotidienne !
M. Alain Gournac. Nous, nous défendons La Poste !
M. Guy Fischer. Vous ne défendez rien du tout ! Vous démolissez La Poste !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je suis d’accord avec vous, monsieur Fischer, nous ne sommes pas du tout en retard ! Le dérouleur que j’ai reçu ce matin porte l’intitulé « La Poste, procédure accélérée ».
Nous sommes donc en procédure accélérée : ce n’est pas moi qui le dis, c’est écrit sur les documents officiels du Sénat !
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Cornu, vice-président de la commission.
M. Gérard Cornu, vice-président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Puisque la commission vient d’être interpellée, je tiens à présenter mes excuses, en son nom, à nos amis internautes qui suivent nos travaux. Le Sénat et La Poste méritent franchement un meilleur débat. (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. Alain Gournac. Oh oui !
Mme Isabelle Debré. C’est vrai !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ces propos sont inacceptables !
M. Gérard Cornu, vice-président de la commission. Le groupe communiste a décidé de pourrir le débat en déposant des amendements hors sujet, ce qui n’est pas le cas du groupe socialiste.
M. Alain Gournac. Les socialistes, eux, parlent de La Poste !
M. Gérard Cornu, vice-président de la commission. D’habitude, le Sénat légifère différemment, au cours de vrais débats. Or, aujourd’hui, le groupe communiste a malheureusement décidé de prolonger notre discussion en présentant des amendements qui n’ont rien à voir avec la défense de La Poste et du service public. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Alain Gournac. C’est exact ! Ils n’ont rien à voir avec La Poste !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.
M. Michel Teston. Je souhaite que la sérénité revienne dans cet hémicycle. Le changement du statut de La Poste et la suppression du secteur réservé, qui peuvent avoir des conséquences extrêmement lourdes sur le financement du service universel postal, méritent un vrai débat.
Encore faut-il que ce débat puisse avoir lieu ! Nous devons pouvoir échanger nos arguments. Vous êtes favorables à un changement de statut, comme vous l’avez exprimé hier ; nous y sommes opposés.
M. Nicolas About. On a compris!
M. Michel Teston. J’ai, moi aussi, un profond respect pour Jean-Pierre Fourcade, mais je me demande ce que signifie réellement son intervention ?
Votre intention, mon cher collègue, est-elle d’essayer d’abréger le débat, car vous pensez qu’il ne va pas assez vite ? Devons-nous interpréter vos propos comme des signes annonciateurs de décisions susceptibles d’être prises dans cette assemblée, voire en dehors par le Gouvernement ? Qu’en est-il vraiment ?
Nous souhaitons, pour notre part, poursuivre sérieusement l’examen de ce projet de loi…
M. Nicolas About. Ne faites pas l’innocent !
M. Michel Teston. ... et nous nous en tiendrons à cette position.
M. Nicolas About. Nous travaillerons jusqu’à lundi s’il le faut !
Mme la présidente. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Vous auriez dû adresser vos propos véhéments, monsieur Cornu, à ceux qui nous obligent à travailler dans des conditions déplorables !
Est-il normal que nous abordions des sujets aussi graves que le changement du statut de La Poste, l’aménagement du territoire et l’avenir de la plus grande entreprise publique française dans le cadre d’une procédure accélérée ? Vous ne voudriez tout de même pas que nous abordions à la vitesse grand V les dossiers de la présence postale, du service public et du secteur réservé, sous prétexte que quelques hommes pressés veulent transformer le Parlement en une simple chambre d’enregistrement !
Vous ne devriez pas accepter, monsieur Cornu, que de tels projets de loi soient examinés en procédure accélérée ! Quelles que soient nos opinions politiques, nous pouvons convenir que certains dossiers méritent que l’on prenne le temps d’en débattre.
M. Guy Fischer. Il a raison !
M. Roland Courteau. C’est vrai !
M. Martial Bourquin. Il est profondément regrettable que tous les projets de loi soient systématiquement examinés en procédure accélérée. J’espère, monsieur Fourcade, que vous le déplorez également !
M. Jean-Pierre Fourcade. Oui !
M. Martial Bourquin. Je vous en remercie, mais faites-le savoir ! (M. Alain Gournac s’esclaffe.)
M. Jean-Pierre Fourcade. Je l’ai dit !
M. Martial Bourquin. Cela ne peut plus durer. Ce n’est plus du travail parlementaire !
M. Martial Bourquin. Nous allons aborder l’examen d’amendements fondamentaux qui auront des répercussions dans tous nos territoires. Nous n’allons pas en débattre à toute vitesse, simplement parce que le temps presse !
M. Roland Courteau. C’est toujours ainsi !
M. Martial Bourquin. Nous allons, certes, siéger ce week-end. Mais nous ne pouvons pas examiner à l’emporte-pièce des amendements, au motif que certaines personnes au-dessus de nous traitent le Parlement d’une façon qui n’est pas normale dans une démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Roland Courteau. On travaillera jusqu’à lundi !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Est-il utile de préciser que je suis tout à fait d’accord avec les déclarations de Michel Teston et de Martial Bourquin ?
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte. Il est vrai que M. Estrosi, qui est le ministre le plus concerné par ce texte, était, dans une autre vie, un homme rapide !
Mme Isabelle Debré. Il l’est toujours !
M. Jean-Jacques Mirassou. Voilà qu’il devient pressé !
Nombre des propos tenus jusqu’à présent tendent à accréditer la thèse selon laquelle La Poste doit distribuer le courrier six jours sur sept ; c’est même écrit noir sur blanc dans le projet de loi. Nous pouvons bien, en faisant preuve d’un peu de souplesse, consacrer sept jours à ce débat ! C’est la demande que nous vous adressons, en toute sérénité.
Les amendements qui ont été déposés sur l’article 2 ont un rapport, peut-être pas direct, mais en tout cas puissamment indirect avec le texte. (Sourires.) Puisqu’il s’agit de revendiquer le statut de service universel de La Poste, ces amendements trouvent, de fait, toute leur place dans ce débat.
Permettez-moi, monsieur Cornu, de vous donner un conseil amical : gardez-vous bien de reprendre à votre compte la sémantique en cours depuis deux jours dans cet hémicycle ; vos propos risquent de produire l’effet inverse de celui que vous recherchez, ce qui serait parfaitement contre-productif.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Nous ne sommes pas des personnes pressées ; nous sommes des sénateurs patients !
Hier soir, la séance a repris à vingt-deux heures pour entendre douze orateurs inscrits sur l’article 2. Nous avons commencé la discussion des amendements à vingt-trois heures vingt-cinq. Quand la séance a été levée vers minuit, nous avions voté deux amendements seulement. Je tenais à rappeler ces faits après l’intervention de Jean-Pierre Fourcade, qui n’a duré que cinq minutes. Nous sommes donc très patients !
M. Jean Desessard. Dans le cadre d’une procédure lente, ce serait tout à fait normal ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roland Courteau. Il faut prendre le temps de la réflexion !
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Giudicelli, pour explication de vote.
Mme Colette Giudicelli. M. Fischer est bien plus sympathique en commission quand il ne s’adresse pas à nous en nous qualifiant de droite ! (Brouhaha sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Nicolas About. C’est son vrai visage ! (Sourires.)
M. Roland Courteau. Et alors, il y a bien une gauche et une droite !
Mme la présidente. Mes chers collègues, n’interrompez pas l’oratrice !
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Colette Giudicelli. Pour nous, La Poste est très importante ! Certains ont déclaré, et c’est ce qui a probablement faussé le débat : « On va vous pourrir la semaine ! ». (Vives dénégations ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Jacques Mirassou. Il ne faut pas dire n’importe quoi !
Mme Colette Giudicelli. Laissez-moi parler !
Nous pourrions donc vous soupçonner, mes chers collègues, de mettre en œuvre une stratégie ou, pire, une tactique. Pour le groupe de l’UMP, La Poste est un sujet très important, plus encore que vous ne le pensez. (Ah !sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. Roland Courteau. Pour nous aussi !
Mme Colette Giudicelli. De même, la politique est trop sérieuse pour que l’on prenne des attitudes théâtrales, car nos décisions influent sur la vie de dizaines de milliers de personnes.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Justement !
Mme Colette Giudicelli. La Poste, selon moi, c’est encore davantage : c’est une tradition, au sens étymologique du terme. Il s’agit de transmettre. Les facteurs, dont le sort nous importe beaucoup, sont des personnes qui transmettent.
J’ai été très touchée d’entendre l’un de nos collègues évoquer avec émotion le merveilleux métier de facteur, qu’exerçait son père.
M. Guy Fischer. Moi aussi, j’ai été facteur !
Mme Colette Giudicelli. La tradition, pour moi, est un progrès qui a réussi. Plutôt que de lire des interventions qui traitent de tout, sauf de la Poste et de ses personnels, je propose que nous avancions ensemble pour faire de La Poste une très belle réussite ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. J’aimerais, moi aussi, que l’on en revienne au fond du sujet. Chaque fois que nous proposons des amendements constructifs, il se trouve un sénateur de la majorité pour brandir un quelconque argument de procédure qui retarde le débat. (M. Nicolas About s’esclaffe.)
Ainsi ai-je déposé, hier, un amendement tendant à mettre en place une évaluation sérieuse et comptable. M. le doyen Gélard m’a alors expliqué qu’il était normal que cet amendement soit rejeté, car la commission de l’économie, qui est souveraine et à laquelle je n’appartiens pas, avait émis un avis négatif.
Le présent amendement du groupe CRC ayant, quant à lui, été présenté en commission, on nous dit maintenant que celle-ci a oublié d’invoquer l’article 41. La majorité doit cesser de retarder le débat sur le fond du texte ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. Je ne peux pas vous laisser tenir de tels propos, madame Giudicelli ! Vous dites qu’à l’UMP, vous êtes sérieux. Mais nous aussi ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Mme Colette Giudicelli. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit !!
M. Roland Courteau. Comme nous sommes aussi sérieux que vous, nous voulons prendre le temps de la réflexion et du débat. Ce projet de loi est particulièrement important. Souffrez que l’on y consacre le temps nécessaire !
Si vous estimez que les débats s’éternisent, vous ne pouvez vous en prendre qu’à vous-même, comme l’a dit M. Fischer : pendant deux jours, vous avez été physiquement minoritaires ! Alors, à qui la faute ?
M. Gérard Cornu, vice-président de la commission de l’économie. Ce n’est pas vrai !
Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.
Mme Odette Terrade. Il s’agit bien d’un débat de fond ! Le groupe La Poste, dont l’article 2 définit les missions, regroupe quatre entités, parmi lesquelles figure l’activité bancaire. Il est important de définir ces entités.
La collecte du livret A entraîne de nombreuses répercussions, notamment en matière de logement social. C’est donc un sujet grave, auquel il faut consacrer du temps !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 205 rectifié.
Je suis saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 35 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 170 |
Pour l’adoption | 151 |
Contre | 188 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 204 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 194 rectifié, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
I. - Avant l'alinéa 1
Insérer sept alinéas ainsi rédigés :
... - Les deuxième à cinquième alinéas du I de l'article 6 de la loi n° 90-568 sont ainsi rédigés :
« Pour remplir cette mission, La Poste adapte et développe son réseau de bureaux de plein exercice, en concertation avec les collectivités territoriales en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale.
« Cette efficacité peut passer par la mise à disposition de locaux, la définition d'objectifs décentralisés de qualité de service public.
« Un décret en Conseil d'État précise les modalités selon lesquelles sont déterminées, au niveau départemental et après consultation de la commission départementale de présence postale territoriale visée à l'article 38 de la présente loi, les règles complémentaires d'accessibilité au réseau de La Poste au titre de cette mission. Ces règles prennent en compte :
« - la distance et la durée d'accès au service offert dans le réseau de bureaux de plein exercice ;
« - les caractéristiques démographiques, sociales et économiques des zones concernées et, notamment, leur éventuel classement en zones de revitalisation rurale ou en zones urbaines sensibles mentionnées à l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée ;
« - les spécificités géographiques du territoire départemental et des départements environnants, en particulier dans les zones de montagne. »
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement porte sur la consistance du service universel postal, tel qu’il est défini par l’article 6 de la loi de 1990 consolidée et qui comporte quatre composantes.
L’article 2 de ladite loi est essentiel, puisqu’il porte sur une donnée fondamentale, à savoir les obligations de La Poste en matière d’aménagement du territoire.
En France, La Poste est la seule structure devant faire face à ces obligations, qui résultent de la spécificité de notre pays.
Le contrat de service public entre l’État et La Poste 2008-2012 précise le cadre d’exercice de la mission.
« La loi a posé le principe de la participation de La Poste à l’aménagement du territoire au moyen de son réseau de points de contact, en complément de ses obligations de service universel et dans le respect du principe de concertation avec les partenaires concernés ». Si tous les élus – ils sont plus de 500 000 – sont attachés à ce service postal universel, il y a une raison.
« La France est le seul pays d’Europe dans lequel l’opérateur prestataire du service universel des envois postaux est chargé de contribuer à l’aménagement du territoire. » C’est une spécificité française. Si d’aucuns n’en veulent plus, qu’ils nous le disent franchement !
« Pour remplir cette mission, La Poste adapte son réseau de points de contact, notamment par la conclusion de partenariats locaux publics ou privés, en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale. »
Enfin, est mentionnée la règle d’accessibilité au titre de l’aménagement du territoire fixée dans la loi du 20 mai 2005.
J’insisterai sur l’implantation d’une part importante des points de contact dans les zones urbaines sensibles, sujet que je connais bien. Ils sont plus de 1 000. En France, les inégalités territoriales, géographiques, économiques sont de plus en plus nombreuses. La présence postale dans les zones de revitalisation rurale ou dans les zones de montagne comme dans les zones urbaines sensibles contribue au développement territorial local et à la politique de la ville.
On ne saurait mieux présenter la situation que ce qui est écrit dans le contrat de service public.
La France ne ressemble à aucun autre pays européen, puisque, pour aller vite, 15 % du territoire sont occupés par 85 % de la population. Nous devons donc assurer aux habitants de tous les territoires de notre pays, quelle que soit la densité de peuplement de ces derniers, la même qualité de service postal, qui passe notamment par l’affectation des moyens humains nécessaires au bon déroulement du service public et par la variété et la diversité des prestations et produits proposés aux usagers.
Comment ne pas insister sur le fait que le développement économique et social harmonieux de l’ensemble du territoire passe par un maillage renforcé des services publics, outil de l’ouverture avec l’extérieur et de progrès ?
Nous pouvons sinon être d’accord, du moins nous interroger ensemble sur un point. La mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques a pour conséquence une désertification de nos campagnes des principaux services publics appréciés par la population. La Poste en est un exemple essentiel.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Afin d’éviter toute provocation, je vais prendre le temps de l’explication.
L’amendement n° 194 rectifié, très long, semble tendre à supprimer les relais poste chez les commerçants ainsi que les agences postales communales. Or ces points de contact offrent des prestations bien utiles en zone rurale et des horaires d’ouverture d’une amplitude souvent plus intéressante que celle que proposent les bureaux de plein exercice.
Monsieur Fischer, la commission, ne pouvant être favorable à l’amendement n° 194 rectifié, comme elle l’a déjà expliqué antérieurement, vous demande de bien vouloir le retirer. Sinon elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. Monsieur Fischer, je suis très surpris que vous souteniez cet amendement. J’ai pris le temps de le lire pour que nous ayons un vrai débat de fond. Vous écrivez que l’efficacité du service public « peut passer par la mise à disposition de locaux » par les collectivités territoriales. En fait, votre amendement tend à créer une dépense pour ces collectivités…
M. Jacques Mahéas. Il est écrit « peut », monsieur le ministre !
M. Michel Mercier, ministre. Monsieur le sénateur, j’arrive à lire tout seul ! Je vous remercie beaucoup de l’aide que vous m’apportez dans le cadre de la lutte contre l’illettrisme, dont vous êtes un spécialiste !
M. Jacques Mahéas. Aide gratuite !
M. Michel Mercier, ministre. Restez donc dans la gratuité ! Je souhaite pouvoir répondre comme je l’entends à M. Fischer !
Une dépense supplémentaire serait créée à la charge des collectivités locales. Même s’il est indiqué qu’une collectivité « peut » mettre à disposition des locaux, dans les faits, la pression sera suffisante pour que le « peut » devienne « doit ». Je suis très hostile à la création d’une dépense supplémentaire pour les collectivités locales, alors que, dans le système actuel, c’est La Poste qui apporte une recette à ces collectivités.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Monsieur le ministre, on sait bien que La Poste n’apporte rien !
Mme Janine Rozier. Enfin, quelque chose de vrai !
M. Guy Fischer. Aux Minguettes, l’un des plus grands ensembles français, la présence postale est misérable. Il faut voir dans quelles conditions fonctionne le bureau de poste. Il a fallu que la municipalité rachète les locaux…
M. Guy Fischer. … avec l’aide du département, certes, et les mette gratuitement à la disposition de La Poste. Ce serait, selon vous, une non-participation des collectivités locales ? Maintenant, si l’on veut améliorer le réseau postal, les collectivités locales sont systématiquement appelées à mettre la main à la poche, d’une manière ou d’une autre.
Je prendrai un exemple. Dans le Gers, département d’un peu plus de 180 000 habitants, les activités économiques sont encore fortement marquées par l’agriculture ainsi que la transformation de ses produits et certaines productions ont une réputation parfois flatteuse. Sans vouloir vous mettre trop longtemps l’eau à la bouche, mes chers collègues, je citerai le vieil Armagnac, le foie gras de canard et d’oie, notamment.
Bien que ce département connaisse depuis quelques années un regain démographique, le nombre de bureaux de poste est inversement proportionnel à cette évolution. Hier, M. Bel avait pris l’exemple de l’Ariège. Dans le Gers, la même procédure a été suivie. Autrement dit, plus la population augmente, plus on assiste à une résorption quasi drastique de la présence postale dans les départements ruraux.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous tenons à nos amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Aujourd’hui, lorsque les collectivités territoriales, contraintes et forcées, décident de suppléer à la fermeture du bureau de poste, elles perçoivent un dédommagement maximal de 3 000 euros. Dans mon département, une commune a voulu pallier le désengagement de La Poste. Mais les frais occasionnés par les travaux qu’elle devait réaliser à l’intérieur de la mairie étant très supérieurs aux 3 000 euros susvisés, elle n’a pu mener à bien son projet.
Comme je l’ai indiqué lundi, j’ai visité deux points de contact samedi dernier. Le commerçant accueillant un tel relais reçoit 257 euros à titre de dédommagement. Parallèlement, quelle somme La Poste économise-t-elle ? On nous dit que ces structures offrent des horaires d’ouverture élargis. Effectivement ! Dois-je rappeler qu’avant de fermer le bureau de poste avait proposé des horaires totalement incompatibles avec les besoins des usagers ?
Afin de repousser l’amendement n° 194 rectifié, on ne peut pas soutenir que les points de contact répondront aux besoins et que les dédommagements existent. En présentant cet amendement, nous avons soulevé des questions de nature démographique, sociale, économique. Nous avons visé les zones de revitalisation rurale et les zones urbaines sensibles, éléments importants de l’aménagement du territoire.
Tout à l’heure, nous avons été accusés d’être hors sujet et maintenant que nous sommes au cœur du sujet, vous ne traitez pas les questions posées, ce qui, pourtant, nous permettrait d’être plus efficaces en matière d’aménagement du territoire.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. On peut s’associer, d’une certaine manière, à l’intervention de M. Guy Fischer puisqu’il a soulevé le cœur du problème, à savoir le partenariat avec les collectivités territoriales. On peut envisager ce dernier sous plusieurs angles, comme l’a rappelé M. le ministre tout à l’heure.
Le nombre de 17 000 bureaux de poste et points de contact est très important et traduit la présence de La Poste et surtout la présence humaine sur le territoire.
Le partenariat avec l’ensemble des communes qui s’impliquent peut prendre la forme de la création d’une agence postale dans un local communal.
Il peut jouer également pour l’adressage, notamment dans les villages qui ne disposent pas encore de plaques de rue, même s’il est vrai que, aujourd'hui, presque toutes les communes en sont équipées, parce qu’elles sont obligées de mettre en place une signalétique compatible avec le système d’adressage informatisé.
Comme Guy Fischer l’a rappelé à juste titre, les élus, qui sont plus de 500 000, sont sensibilisés aux problèmes de La Poste. Toutefois, plus largement, ce sont tous les habitants, sur tout le territoire, qui se sentent concernés !
S'agissant des trajets parcourus par les facteurs ou les véhicules de La Poste pour desservir les habitations, certains de nos collègues du groupe socialiste ont prononcé des interventions de qualité – il faut le reconnaître en toute objectivité –, notamment hier soir, puisqu’ils raisonnaient en fonction non pas seulement de la distance, mais aussi du temps nécessaire pour la parcourir, en particulier dans certains départements situés en zone de montagne.
Des idées intéressantes ont été apportées, me semble-t-il. Notre débat est tout à fait constructif, et nous devrions parvenir à un consensus.