Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Eux, ils tiennent un double langage !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Mercier, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je comprends que vous cherchiez des sources de financement pour le fonds de péréquation. Toutefois, nous vivons dans un système juridique où les normes communautaires priment le droit interne, et la troisième directive postale interdit de faire financer le fonds national de péréquation par les opérateurs postaux.
M. Pierre-Yves Collombat. Mais non !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur le ministre, parlez-vous du système play or pay ?
M. Michel Mercier, ministre. Je ne parle jamais anglais ! (Sourires. – MM. Alain Fouché et Jacques Legendre applaudissent.)
M. Jean Desessard. Monsieur le ministre, parlez-vous du système « participer et payer », dans lequel certains accomplissent une mission de service public tandis que les autres les rémunèrent pour ce faire ?
M. Pierre-Yves Collombat. C’est un système qui évite les distorsions de concurrence.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 545 rectifié.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 39 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 323 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l’adoption | 137 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 418.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote sur l'amendement n° 464.
M. Roland Courteau. Je me permets d’insister tout particulièrement sur cet amendement, car, avec ces dispositions, nous touchons véritablement au cœur de ce débat.
Il est indéniable que La Poste, pour accomplir ses missions, doit être présente sur l’ensemble du territoire. À ce titre, il s'agit d’un service public structurant dans le paysage local, que celui-ci soit urbain ou rural. Il faut d'ailleurs bien mesurer l’importance que sa présence peut avoir sur un territoire.
En effet, La Poste, c’est aussi, de plus en plus fréquemment, le dernier service public de proximité. Dans les campagnes, quand l’école est fermée, le bureau de poste demeure souvent l’ultime symbole de la présence de l’État.
De manière croissante, la présence d’un bureau de poste revêt une importance capitale pour les communes, surtout rurales, puisqu’il incarne le dernier rempart avant la désertification institutionnelle. À ce titre, La Poste joue un rôle majeur non seulement par les services qu’elle met à la disposition du public, mais aussi en tant que symbole du lien entre l’État et les citoyens.
C’est pour cette raison, d'ailleurs, que ce projet de loi inquiète les Français : ils sentent bien que ce qui est en jeu, c’est non pas seulement l’acheminement et la distribution du courrier ou l’accès à des services bancaires, mais aussi et surtout, une forme de lien social qu’ils voient se déliter peu à peu. C’est également la disparition de repères et – pourquoi ne pas le dire –, une perte de sens quant au « vivre-ensemble ».
Ce qu’ils craignent, c’est qu’en changeant de statut La Poste n’accentue sa mue marchande, au détriment de son contact avec les citoyens et de cette structuration du territoire qui font d’elle l’un des services publics les plus présents et les plus appréciés dans notre imaginaire collectif.
Cet amendement a donc pour objet d’introduire dans le projet de loi une disposition permettant de préserver un niveau important d’accessibilité aux services postaux, et cela d'abord parce qu’il s'agit d’une condition essentielle pour respecter le principe d’égalité des citoyens. De fait, il n’y a aucune raison pour que des Français vivant dans les campagnes ou dans les zones urbaines sensibles soient défavorisés en raison de leur lieu d’habitation.
Cet amendement vise aussi à réaffirmer avec vigueur que le service public postal est un symbole de La République et que, à ce titre, il se doit d’être présent et visible sur tout le territoire.
Il revient donc également à La Poste de participer pleinement à la mission d’aménagement du territoire, que son statut lui impose, et, par ce biais, de préserver, autant que nécessaire du point de vue de la collectivité, une présence sur des territoires qui ont besoin de se sentir reconnus, et non pas abandonnés par l’État.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Mercier, ministre. Monsieur Courteau, nous sommes bien sûr favorables sur le fond à cet amendement. Toutefois, il est déjà satisfait.
L'article 6 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications, modifié par la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales, puis par la loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale, dispose que « les caractéristiques démographiques, sociales et économiques des zones concernées et, notamment, leur éventuel classement en zones de revitalisation rurale ou en zones urbaines sensibles mentionnées à l’article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 » sont prises en compte.
Ainsi, la condition que vous souhaitez poser, et à laquelle j’adhère, figure déjà dans les textes. C’est pourquoi je ne peux accepter cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, malheureusement, des faits aux actes, il y a un précipice, dans les zones rurales comme dans les zones urbaines sensibles !
J’évoquerai le cas des zones urbaines sensibles, que je connais plus particulièrement. Pour qu’une zone urbaine sensible soit sauvée, il faut non seulement une mixité sociale, mais aussi des services publics et une municipalité qui mette en place toute une panoplie d’activités et d’équipements.
Or le gouvernement auquel vous appartenez mène actuellement une attaque frontale sur le terrain de l’éducation nationale, notamment : la remise en cause de la carte scolaire provoque le départ des bons élèves vers d’autres collèges ou d’autres groupes scolaires situés ailleurs que dans les zones urbaines sensibles.
À cela s’ajoute le fait que les postes de police de proximité disparaissent. Ainsi, celui de Neuilly-sur-Marne, ville dont je suis le maire depuis de nombreuses années, est quasiment vide !
Certains commerces se paupérisent et les banques quittent ces quartiers pour les quartiers anciens, plus bourgeois, où la vie est plus tranquille. Même l’agence du Crédit mutuel a disparu de la zone urbaine sensible de mon secteur !
La présence des services publics est nécessaire, celui de La Poste plus encore ! En effet, de la même façon qu’ils créent un lien social dans les milieux ruraux, ces services publics sont autant de lieux de rencontre qui permettent une sociabilité dans les zones urbaines sensibles.
Bien sûr, ce n’est pas facile tous les jours. Ainsi, la semaine dernière, le bureau de poste de ma ville a subi une attaque à main armée. Néanmoins, il faut absolument empêcher la disparition des services publics dans nos quartiers.
Et je peux vous dire que, parmi les quarante communes qui composent le département de la Seine-Saint-Denis, on en compte au moins vingt-cinq à trente qui sont dans cette situation. Monsieur le ministre, il y a les intentions louables dont vous avez fait état, mais il y a, en face, la réalité des faits !
Croyez bien que, si nous insistons sur le maintien du service postal dans les zones urbaines sensibles, c’est parce que nous estimons qu’il crée du lien. Si les bureaux de poste disparaissent malgré tout, vous aurez beau jeu, ensuite, de dire qu’il existe des « quartiers de non-droit », livrés à l’abandon, et cela fait, malheureusement, quelquefois, le jeu politique de la droite.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Je souscris tout à fait aux propos de mon collègue. En tant qu’élu de la Haute-Garonne, je suis confronté aux réalités d’un territoire qui comprend aussi bien une grande ville, avec des zones ou des quartiers « sensibles », que des communes périurbaines et des campagnes « profondes ».
Aucune séance du conseil général, par définition moment d’expression des doléances de l’ensemble des élus locaux, ne se déroule sans que certains de ses membres pointent les dysfonctionnements des bureaux de poste dans les quartiers populaires. D’autres, comme moi, voient leur territoire confronté à une croissance démographique exponentielle et le nombre de bureaux de poste rester identique. Enfin, dans les zones rurales, plus difficiles d’accès, les services publics fondent comme neige au soleil !
Monsieur le ministre, vous aurez beau répéter que l’ensemble des amendements que nous avons déposés sur ce sujet sont satisfaits, cela ne suffira pas à faire disparaître les plaintes légitimes de nos concitoyens, qu’ils vivent dans des zones urbaines, périurbaines ou rurales !
Du reste, alors que le réseau de La Poste compte actuellement 17 091 points de contact, le texte de la commission en prévoit 17 000. Ce qui signifie qu’on anticipe déjà une baisse...
Je vous conjure de prendre en compte cette réalité et, surtout, de ne pas vous contenter d’un déni systématique. Ce ne sera pas suffisant pour contenter les élus et la population qu’ils représentent. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. L’amendement n° 281 a été rectifié par M. Desessard conformément à la suggestion de M. le rapporteur. L’amendement n° 281 rectifié sera donc examiné lors de la discussion de l’article 2 bis.
Je mets aux voix l'amendement n° 43.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Danglot, pour explication de vote sur l'amendement n° 44.
M. Jean-Claude Danglot. Malgré les allégations de certains sur le fait que La Poste demeurera une entreprise publique, la rédaction du projet de loi montre à l’évidence qu’il n’en est rien. Certes, les mots sont simples, mais les engagements qu’ils sont censés porter n’engagent, à la vérité, que ceux qui y croient.
Si l’on se fonde sur les données fournies par le document associé à la conclusion du contrat de service public entre La Poste et l’État 2008-2012, l’accessibilité bancaire représente un coût similaire à celui de 2006 et qui, pour La Poste, est loin d’être négligeable : « Ces coûts peuvent être approchés à travers celui de la mission d’accessibilité bancaire remplie par le Livret A. La Poste estime ce coût à 550 millions d'euros, tandis que la Commission européenne l’a, pour sa part, estimé à environ 430 millions d'euros. Ce coût est composé du coût net des "opérations d’intérêt général", du coût net des "livrets d’intérêt général" et du coût net des "comportements non rentables". »
La spécificité de La Poste est d’avoir affaire à une clientèle assez spécifique, dont la composition n’a pas été modifiée depuis la banalisation du Livret A, le 1er janvier dernier, bien au contraire.
Nous le savons, compte tenu de la réalité de l’encours, la commission perçue pour le moment par la Poste s’est redressée au-delà de 760 millions d’euros en 2008. Pour autant, l’extinction progressive du taux de commissionnement spécifique à l’échéance 2015, telle qu’elle est prévue par la loi de modernisation de l’économie, rendra ce service moins directement rentable.
Au-delà du discours convenu sur le service public que l’on défendrait contre vents et marées, il reste les faits. La commission versée à La Poste pour la gestion du Livret A se réduira d’un quinzième à compter de 2012, de 2 points à 1,95 point, puis à 1,90 point en 2013, enfin, à 1,85 point en 2014, sur le modèle des autres réseaux bancaires. Cela signifie que, si le niveau de la rémunération du Livret A n’est pas revu pas d’ici là, ce qui peut très bien se produire, La Poste perdra très certainement le peu qui lui restait pour équilibrer ses coûts de gestion.
Que l’on ne s’y trompe pas : la chute de la rémunération du réseau historique, passée de 1,3 à 0,75 point au-dessus du taux de rémunération des livrets avec la loi de modernisation de l’économie, a fait perdre à La Poste des sommes importantes, qui lui sont nécessaires pour faire face à ses charges de structure.
C’est donc aussi pour ces raisons que nous ne prenons pas pour argent comptant les termes du projet de loi, qui ne visent, dans les faits, qu’à sanctuariser des services financiers structurellement déficitaires.
Mme la présidente. L'amendement n° 584 est-il maintenu ?
Mme Anne-Marie Escoffier. Nous le retirons, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 584 est retiré.
La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote sur l'amendement n° 197.
Mme Odette Terrade. Nous avons eu l’occasion de souligner, en présentant cet amendement, que ce qui était menacé, à moyen terme, avec la filialisation des activités financières de La Poste, c’était le sens même du service public bancaire qu’elle est censée mettre en œuvre, au titre de son cœur de métier.
Ce qui est en phase de déperdition, c’est un savoir-faire, un sens particulier de la relation, notamment avec une clientèle qui intéresse beaucoup moins les autres établissements de crédit.
Aujourd’hui, les salariés de la Banque postale continuent d’être majoritairement des titulaires de la fonction publique. Notons d’ailleurs que la procédure de mise à disposition de longue durée des postiers fonctionnaires au sein de cette filiale est directement conditionnée par la durée – quinze ans au maximum – et que ceux-ci seront habilités, sous certaines conditions, à réintégrer leur corps d’origine. La question se pose alors : si ces fonctionnaires, qui se sont spécialisés en conseil financier, demandent à quitter la filiale à vocation financière, parce qu’elle irait vers la privatisation, comment pourra-t-on leur proposer un poste répondant aux compétences qu’ils auront acquises et développées au sein de la Banque postale ?
De fait, les conditions sont créées pour mener, de manière systémique, une politique de changement de cible en matière de clientèle, une politique de stricte banalisation du service financier fourni par La Poste, à l’instar des autres établissements de crédit, une politique de gestion des ressources et des moyens permettant de majorer sur la durée la rentabilité apparente du travail, voire, dans certains cas, une politique d’externalisation d’un certain nombre de fonctions.
En effet, dans la logique où l’on place, dès aujourd’hui, les services financiers de La Poste, on peut tout à fait concevoir que l’on soit amené, dans des délais plus ou moins rapprochés, à sous-traiter le traitement des formules de paiement ou la recherche de clientèle.
À la vérité, il est une autre réalité qu’il conviendrait de ne pas taire.
Certains auront beau jeu, dans le cadre du débat, d’affirmer que le changement de statut n’empêchera aucunement La Poste de conserver des implantations suffisamment nombreuses dans le pays, ce que l’on veut en quelque sorte « sacraliser » par le biais du nombre magique des 17 000 points de contact répartis sur l’ensemble du territoire national.
Le problème, dans cette affaire, c’est que circulent, au plus haut niveau de la direction de La Poste, des études diverses et variées sur la réduction des implantations et la transformation progressive de nombre de bureaux dont l’activité est trop faible en simples relais Poste et autres agences postales communales.
Pour tout dire, d’aucuns pensent qu’un nombre de bureaux de poste de plein exercice compris entre 2 800 et 4 000 suffirait amplement pour assurer le service postal aujourd’hui, tout simplement parce que ces bureaux seraient ceux qui enregistreraient suffisamment d’opérations financières pour être « rentables » au regard des critères strictement comptables déclinés, là encore, à l’infini.
Ce dévoiement de La Poste, qui risque fort d’inscrire son action dans les pas d’une filiale financière de plus en plus autonome, de moins en moins porteuse d’une « culture de service public » et de plus en plus sujette à la perspective d’une fusion avec un établissement de crédit privé, nous n’en voulons pas.
C’est bien parce qu’il faut mettre un terme à tout cela que je voterai en faveur de cet amendement et que je vous propose, mes chers collègues, d’en faire autant.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 197.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 40 :
Nombre de votants | 224 |
Nombre de suffrages exprimés | 208 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 105 |
Pour l’adoption | 23 |
Contre | 185 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mme Catherine Procaccia. Vingt-trois voix pour l’adoption : quel beau score ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. L'amendement n° 203, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 221-6 du code monétaire et financier, la référence : « L. 518-25-1 » est remplacée par la référence : « L. 518-25 ».
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement concerne également la Banque Postale.
L’article 2 du présent projet de loi procède à une forme de toilettage des dispositions contenues dans l’article 2 de la loi de 1990 telle que consolidée depuis sa promulgation.
Permettez-moi de souligner d’emblée comment les choses ont évolué de ce point de vue.
En 1990, s’agissant des activités bancaires, l’article 2 indiquait : « La Poste a pour objet […] D’offrir, dans le respect des règles de la concurrence, des prestations relatives aux moyens de paiement et de transfert de fonds, aux produits de placement et d’épargne, à la gestion des patrimoines, à des prêts d’épargne-logement et à tous produits d’assurance. La Poste gère le service des chèques postaux et, pour le compte de l’État, la Caisse nationale d’épargne dans le respect des dispositions du code des caisses d’épargne. »
Cela nous amène au texte consolidé actuel, qui précise : « Elle exerce ses activités financières dans les conditions prévues à l’article L. 518–25 du code monétaire et financier. »
Quant au texte du projet de loi, nous avons vu qu’il nous invite à faire référence à l’article L. 518–25–1 du code monétaire et financier, c’est-à-dire l’article qui consacre l’existence de la Banque Postale.
Or nous sommes clairement opposés, pour l’heure et pour l’avenir, à l’existence même de cette filiale dédiée, qui, soit dit en passant, est elle-même matrice d’autres sous-filiales – nous l’avons vu ce matin lorsque nous avons énuméré la liste des filiales. Ces sous-filiales seront créées, en tant que de besoin, sur certains des métiers « naturels » de toute banque banalisée. Ainsi, on va avoir, en fonction de la banalisation intensive des activités de la Banque Postale, une filiale dédiée aux activités de marché, une filiale consacrée à la gestion de prêts immobiliers, que sais-je encore ?
La Banque Postale est aujourd’hui, sans trop de surprise, le vecteur essentiel de profits pour l’ensemble du groupe La Poste, ne serait-ce que, pour donner un seul exemple, par les 763 millions d’euros tirés de la rémunération de La Poste en qualité d’opérateur de la collecte du livret A.
L’examen des comptes du premier semestre 2009 confirme d’ailleurs la situation.
Au premier semestre de 2008, le produit net bancaire de la Banque Postale s’établissait à 2 366 millions d’euros et le résultat d’exploitation atteignait 239 millions d’euros, soit une rentabilité de 10 %, ou peu s’en faut. Pour les six premiers mois de l’année 2009, la Banque Postale annonce un produit net bancaire de 2 458 millions d’euros, soit une légère progression, mais un résultat d’exploitation de 305 millions d’euros, c’est-à-dire une rentabilité nette supérieure à 12 % !
Tout cela intervient dans un contexte global où le groupe La Poste a enregistré, entre le premier semestre 2008 et le premier semestre 2009, un mouvement inverse quant à son résultat d’exploitation.
En clair, en 2009, la Banque Postale apporte pour le moment les deux tiers du résultat d’exploitation de l’ensemble du groupe. Une telle situation peut susciter des convoitises que le changement de statut de La Poste ne manquera pas d’aiguiser.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons cet amendement, mes chers collègues.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous comprenons bien vos préoccupations, madame Terrade.
Toutefois, dans la mesure où c’est la Banque Postale elle-même qui propose le livret A, il nous paraît logique qu’elle perçoive la rémunération complémentaire pour compenser cette obligation de service public. C’est une juste rémunération pour un service rendu.
MM. Alain Fouché et Daniel Soulage. Oui !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. On ne peut pas mettre dans la loi que l’un fait le travail tandis que l’autre perçoit la compensation. Je le répète : il faut être logique.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. La Banque Postale étant un vrai succès, le Gouvernement entend la protéger. Aussi, il émet un avis défavorable sur cet amendement.
MM. Alain Fouché et Daniel Soulage. Très bien !
Mmes Éliane Assassi et Odette Terrade. Cela n’a rien à voir !
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 48, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
M. Jean-Claude Danglot. Lors d’une réunion de la commission de l'économie sur le projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales, M. Estrosi a fait remarquer que deux ministres participaient au débat en commission, celui qui est en charge de l’industrie, mais aussi celui qui est chargé de l’aménagement du territoire et de la ruralité, ce qui montrait bien quels sont les enjeux du texte.
Nous partageons son analyse. Nous assistons, ces dernières années, à l’aggravation des inégalités sociales et territoriales.
Monsieur Mercier, vous nous proposez des assises des territoires ruraux avec l’objectif d’établir un plan d’action apportant des réponses concrètes pour favoriser l’attractivité des territoires ruraux sur les plans économique, social et patrimonial, et pour répondre aux besoins et aux attentes des habitants, notamment en termes d’accès aux services et aux commerces.
Commencez par cesser de fermer des hôpitaux, des écoles et des bureaux de poste pour revitaliser ces territoires ! Il n’est pas nécessaire d’attendre les résultats des consultations dans le cadre de ces assises.
En ce qui concerne plus spécialement La Poste, déjà on entend dire que la distribution du courrier à j + 1 pourrait être remise en cause. Or nous sommes très attachés à la possibilité de recevoir le courrier tous les jours, d’effectuer les opérations sans devoir parcourir dix ou quinze kilomètres en voiture. Alors que nous sortons à peine du Grenelle de l’environnement, nous allons accroître la circulation automobile en mettant sur la route des véhicules supplémentaires en raison de la suppression des bureaux de poste dans les campagnes !
Avec La Poste, n’en déplaise à M. Braye, il n’est pas question de modernes ou d’anciens, voire d’archaïques ! Il s’agit de trouver des solutions vivables socialement et pas seulement économiquement pour répondre à l’intérêt général.
Il ne s’agit pas de défendre La Poste en l’état. Elle est déjà bien abîmée par les politiques menées par sa direction et par l’ouverture du marché à la concurrence.
Il s’agit de poser la question de la nécessité d’un grand service public postal qui réponde aux besoins et revienne aux engagements qu’il tenait voilà quelques années.
Une partie des activités de La Poste est déjà soumise au droit commun. Les missions de service public, notamment du fait du désengagement financier de l’État, ne sont pas assurées correctement sur l’ensemble du territoire. En changeant de statut, on va soumettre l’exploitant public à des logiques de rentabilité toujours plus fortes.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.
M. Alain Fouché. Il est constant dans le discours !
Mme Éliane Assassi. C’est normal et cohérent !
Mme la présidente. L'amendement n° 381, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après les mots :
La Poste assure
insérer les mots :
du lundi au samedi, dans le respect des intérêts des usagers
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Si cet amendement était adopté, le début de l’alinéa 8 de l’article 2 serait ainsi rédigé : « La Poste assure du lundi au samedi, dans le respect des intérêts des usagers, selon les règles de droit commun, toute autre activité de collecte… »
Cet amendement est cohérent avec celui que nous avons fait adopter ce matin et que la majorité a donc voté, prévoyant que les missions de service public s’exercent du lundi au samedi.
Il s’agit de rappeler que La Poste ne doit pas privilégier la rentabilité à court terme au détriment d’un volume horaire de présence et d’activité.