M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, pour explication de vote.
M. Claude Biwer. Je suis un peu surpris que ce débat aille si loin.
Ce matin, nous nous battions pour que le courrier soit distribué même en l’absence de numéros apposés sur les maisons – dans les campagnes, tout le monde se connaît -, et maintenant il est question de déposer les colis à la mairie en l’absence de leur destinataire. Cela va rendre inutile toute vérification. Que l’on dépose tout le courrier à la mairie et qu’on n’en parle plus ! (M. Didier Guillaume rit.)
Sur ce sujet, je resterais très prudent, mes chers collègues.
Par ailleurs, je considère que le groupe La Poste aura besoin de se diversifier. (Brouhaha sur les travées de l’UMP.)
On ne m’écoute pas à ma gauche… (L’orateur désigne la droite de l’hémicycle.)
M. Didier Guillaume. Mais on vous écoute à votre droite ! (Rires.)
M. Claude Biwer. La meilleure façon d’avoir raison, c’est d’empêcher les autres de parler ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Toutes les gauches posent des problèmes, que ce soit la vôtre ou la mienne, monsieur le président ! (Rires.)
Monsieur le ministre, mes chers collègues, La Poste aura besoin de se diversifier. Comme les autres, elle cherchera à offrir de nouveaux services aux usagers. Si nous cherchons à trop en mettre dans la loi, nous prenons le risque de bloquer toute évolution et d’empêcher La Poste de se diversifier, laissant ainsi le champ libre à d’autres...
Parce que cet amendement est une erreur, je voterai contre.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 186 rectifié ter.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 43 :
Nombre de votants | 334 |
Nombre de suffrages exprimés | 320 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 161 |
Pour l’adoption | 156 |
Contre | 164 |
Le Sénat n'a pas adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.- M. Claude Biwer applaudit également.)
L'amendement n° 290, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« 3°Avant le 1er janvier 2011, il est instauré des conseils du service public postal. Ils sont constitués au niveau des communautés de commune et des communautés d'agglomération. Ces conseils sont composés, par tiers de représentants des conseillers municipaux, élus par le collège des élus municipaux ; de représentants des organisations de consommateurs et d'utilisateurs professionnels représentatives, élus par les habitants ; de représentants des syndicats, élus par les salariés de La Poste. Des représentants des dirigeants de La Poste peuvent y siéger avec simple voix consultative.
« Ces conseils émettent des avis et des recommandations consultatifs et suspensifs sur l'offre de service et sa qualité, l'accès au service des usagers en difficulté ou situés dans les zones défavorisées ou isolées, la mise en œuvre des principes d'égalité d'accès, d'adaptation, de qualité et d'efficacité, de solidarité sociale et territoriale, la contribution du service public aux politiques publiques, au développement durable, à l'emploi et à la protection de l'environnement. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Comme je l’ai déjà dit ce matin, pour les écologistes, la modernisation de La Poste passe également par sa démocratisation. Dans la perspective d’un service public renouvelé, nous souhaitons mettre en place des structures de concertation.
Avec le temps, les services publics, et les entreprises publiques qui les assurent, se sont éloignés des usagers- citoyens qu’ils doivent servir. Trop souvent, ils ne se sont pas adaptés à l’évolution des besoins, notamment en matière d’accueil et d’écoute. Ils ne sont pas en mesure d’apporter des réponses personnalisées, particulièrement aux usagers les plus vulnérables et dans les zones, rurales et urbaines, les plus défavorisées.
Pour que les citoyens, les élus, les usagers et les salariés de La Poste participent activement au devenir de l’entreprise, il faut mettre en place une structure qui permette la concertation.
Nous proposons que soient instaurés, avant le 1er janvier 2011, des conseils du service public postal, constitués au niveau des communautés de communes et des communautés d’agglomération.
Ils regrouperaient des représentants des conseillers municipaux, élus par le collège des élus municipaux ; des représentants des organisations de consommateurs et d’utilisateurs professionnels, élus par les habitants ; des représentants des syndicats, élus par les salariés de La Poste, ainsi que, bien sûr, des représentants des dirigeants de La Poste.
L’avenir de La Poste est certes lié à son statut, mais il est avant tout lié à l’évolution de la nature de ses liens avec notre territoire, ses élus et ses habitants. Le renforcement de la démocratie locale va pour nous de pair avec la défense, la protection et la modernisation des services publics.
Nous proposons notamment que ces conseils soient au cœur de la nouvelle identité des services publics. Nous proposons qu’ils émettent des avis et des recommandations à la fois consultatifs et suspensifs sur l’offre de services et sur sa qualité, sur l’accès aux services des usagers en difficulté ou situés dans les zones défavorisées ou isolées, qu’elles soient urbaines ou rurales, sur la mise en œuvre des principes d’égalité d’accès et d’adaptation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. M. Desessard souhaite instaurer un conseil du service public postal dans chaque intercommunalité.
Je vous rappelle, monsieur Desessard, que la loi de 2005 prévoit une commission de présence postale territoriale par département. Avant 2005, La Poste était majoritaire dans les commissions départementales et les élus, minoritaires, mais ce rapport a été inversé depuis. Aujourd'hui, ces commissions sont composées d’un représentant de La Poste, de quatre représentants des conseils municipaux, donc des collectivités locales, de deux représentants du conseil général et de deux représentants du conseil régional, donc des collectivités territoriales.
Je vous indique, cher collègue, que cette commission fonctionne globalement de manière satisfaisante. La loi de 2005 a prévu un statu quo de trois mois en cas de blocage au sein de la commission. Dans cette hypothèse, on appelle pour conciliation le représentant de l’État dans le département. Pour information, le préfet n’a été appelé en conciliation que dans 1 % des cas.
Aujourd’hui, le système à périmètre départemental fonctionne bien.
Par ailleurs, l’Observatoire national du service public postal, que j’ai l’honneur de présider, réunit à périodicité régulière les présidents de commissions départementales et les directeurs départementaux pour une journée de travail en commun. Cela permet aux uns et aux autres d’évoquer leurs difficultés et d’échanger sur les solutions qui donnent de bons résultats.
Même si je comprends bien l’intérêt de votre amendement, cher collègue, il n’y a pas de superposition entre le périmètre de l’intercommunalité et l’organisation territoriale de La Poste. Peut-être cela évoluera-t-il dans le temps, en particulier si la future loi fait obligation aux intercommunalités de terminer la couverture territoriale, mais tel n’est pas le cas aujourd'hui.
C'est la raison pour laquelle la commission émet, au moins pour le moment – nous aurons peut-être l’occasion d’en rediscuter à l’occasion de l’examen d’un autre texte –, un avis défavorable sur cet amendement.
Encore une fois, nous ne rejetons pas votre proposition, monsieur Desessard, mais le périmètre départemental est, pour l’instant, le seul qui permette une superposition avec l’organisation postale.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Pour ma part, je voterai l’amendement n° 290.
Les explications de M. le rapporteur sont, certes, pertinentes, mais nous visons un autre objectif. Je souhaite vous démontrer la pertinence des conseils que cet amendement vise à instaurer.
Le bon service public, c’est celui qui est défini par la loi, suivi par les élus – jusque-là, ce que vous nous avez répondu nous convient parfaitement, monsieur le rapporteur –, mais amélioré en permanence par l’intelligence locale des professionnels et des usagers.
L’amendement fait référence aux « organisations de consommateurs », qui figurent déjà dans notre droit, et non aux « organisations d’usagers », car on nous aurait probablement reproché une définition trop floue.
Dans ma région, l’installation des comités de ligne pour le TER et l’institutionnalisation du dialogue entre usagers, élus et professionnels ont permis de faire évoluer positivement le service public du transport de voyageurs, d’augmenter la fréquentation en ajustant les horaires du service, de rentabiliser des horaires adaptés et d’apporter des réponses techniquement performantes et socialement satisfaisantes aux attentes des habitants.
La démocratie de proximité, ce n’est ni du luxe ni du temps perdu. C’est de l’intelligence partagée et de la performance, au sens noble du terme.
Monsieur le rapporteur, vous nous avez expliqué que l’échelon pertinent était le département, et non l’intercommunalité. Or, pour les comités de ligne, l’échelon retenu est celui du bassin d’usagers ! (M. Jean Desessard applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote sur l'article.
M. Michel Teston. L’article 2 du texte initial prévoyait simplement de regrouper les quatre missions de service public confiées au groupe La Poste au sein de l’article 2 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Télécom.
En effet, ces quatre missions de service public étaient déjà décrites, mais dans différents textes.
Les travaux de la commission ont abouti à l’adjonction d’un article 2 bis nouveau, précisant notamment que le réseau postal « compte au moins 17 000 points de contact répartis sur le territoire français en tenant compte des spécificités de celui-ci. » La précision est nécessaire, mais elle n’est pas suffisante.
En effet, nous n’avons aucune garantie quant au maintien d’un nombre suffisant de bureaux de plein exercice et à l’obligation d’une amplitude satisfaisante des heures d’ouverture des bureaux sur l’ensemble du territoire. Je ne reviens pas sur ces deux points, que nous avons largement abordés ce matin en présentant nos amendements, sinon pour constater que la majorité sénatoriale n’a pas souhaité adopter ces amendements, dont l’objet était pourtant de compléter et de préciser les missions de La Poste.
Par conséquent, au lieu de voter contre cet article 2 bis, nous allons simplement nous abstenir.
Au demeurant, nous ne sommes pas d'accord avec le cinquième alinéa de cet article, qui débute ainsi : « Le contrat pluriannuel de la présence postale territoriale fixe les lignes directrices de gestion du fonds postal national de péréquation territoriale. » De notre point de vue, comme nous l’avons rappelé ce matin, ce n’est pas dans ce document que les lignes directrices doivent être fixées.
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote sur l'article.
M. Daniel Dubois. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si j’ai bien compris, pour certains, les 17 000 points de contact consacrés par le projet de loi constituerait une régression par rapport aux 17 091 points de contact actuels (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG), étant rappelé que ce dernier chiffre tient à l’existence de bureaux de poste militaires !
Chers collègues, maintenir ces 17 000 points de contact sur le territoire permet véritablement d’atteindre l’objectif que nous partageons tous : sauvegarder le maillage territorial, notamment dans nos territoires ruraux.
Le groupe de l’Union centriste se félicite d’avoir pu, en commission, garantir une telle présence postale territoriale dans le projet de loi.
Par ailleurs, le texte vise à affiner le maillage territorial en assurant une présence postale à moins de cinq kilomètres du domicile pour 90 % de la population.
Certes, nous aurions aimé que le maillage soit encore plus fin.
En effet, et je pense que nous serons tous d'accord sur ce point, le problème de la présence postale ne se pose pas en milieu urbain, à l’exception peut-être de quelques zones sensibles, et encore, car des efforts ont été consentis pour augmenter leur attractivité et faciliter le recrutement et la motivation des agents qui, il est vrai hésitaient à aller travailler dans ces zones.
En revanche, la problématique a toute sa pertinence en milieu rural. C’est pourquoi nous proposions de modifier le mode de calcul des 90 % de la population résidant à moins de cinq kilomètres d’un point Poste en excluant la population urbaine, qui, elle, ne connaît pas de difficulté de cette nature. Cette méthode permettait de mieux appréhender la problématique de la présence de La Poste en milieu rural. Si notre amendement avait été adopté, le nombre de « zones blanches » aurait été réduit dans plus d’une soixantaine de départements. Je regrette que cela n’ait pas été le cas.
Notre démarche était, en quelque sorte, une fusée à trois étages. Il s’agissait, d’abord, de préserver les 17 000 points Poste, ensuite, d’affiner le calcul pour que la présence postale soit sécurisée en milieu rural et, enfin, d’inscrire le principe du j+2 pour l’acheminement du courrier dans le projet de loi.
Ainsi, nous aurions assuré la présence postale et la distribution du courrier. Le seul problème qui serait demeuré en suspens aurait été celui de l’évaluation du surcoût par un organisme indépendant.
Vous le voyez, adopter nos amendements aurait permis d’apporter des réponses à des problèmes que nous connaissons tous. Et cela dépassait complètement le débat EPIC ou SA. En effet, La Poste est actuellement un EPIC, mais ce statut ne nous empêche pas de constater, dans les territoires ruraux, un certain nombre de problèmes de présence postale.
Il faut dépasser ce débat. En effet, et je pense que vous en serez tout d’accord, que l’on soit en EPIC ou en société anonyme, l’important, c’est l’optimisation des moyens, notamment dès qu’il s’agit de fonds publics. Après tout, si une personne privée gère mal ses propres fonds, c’est à ses risques et périls, mais, lorsqu’il s’agit de fonds publics, nous sommes tous concernés.
Par conséquent, savoir si l’on est en EPIC ou en société anonyme est secondaire. L’essentiel, c’est que l’argent public soit correctement géré et que les moyens soient optimisés.
Voilà quelle était notre démarche, et elle était stratégique, sur la question de la présence de La Poste dans les territoires ruraux. Nous n’avons pas tout à fait abouti. Malgré tout, nous considérons que l’essentiel est préservé, notamment grâce à la garantie du maintien de 17 000 points de contact sur le territoire. C’est pourquoi nous voterons l’article 2 bis. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste.)
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote sur l'article.
Mme Odette Terrade. Nos concitoyens sont très attachés aux services publics en général, et au service public postal en particulier. Pour l’égalité d’accès de tous, pour la réponse aux besoins, pour le développement économique, il faut des services publics de qualité partout et pour tous.
Pour cela, il faut, nous semble-t-il, reconquérir la maîtrise publique des services publics et des entreprises nationales, que vous vous acharnez au contraire à livrer au marché.
Même si nous nous félicitons que les 17 000 points de contact soient en passe d’être consacrés dans cet article 2 bis, n’oublions pas que 1 060 bureaux de plein exercice de La Poste ont été fermés depuis le mois de janvier 2008 ! Certes, dans le même temps, 6 183 partenariats ont été mis en place, mais c’est un subterfuge pour remplacer ces bureaux de plein exercice par des points de contact.
Je le rappelle, nous venons d’échapper à la création d’une quatrième catégorie de points de présence postale, celle des « points de retrait d’objets postaux ».
Actuellement, il reste seulement 3 600 bureaux de plein exercice et 7 000 bureaux de proximité, en général avec un agent, mais dont la moitié sont ouverts une demi-journée ou quelques heures par semaine.
L’article 2 bis, qui concerne les points de contact de La Poste et le maillage du territoire, consacre donc les 17 000 points de contact, même améliorés à la marge.
Pour notre part, nous pensons que cet article entraîne la mise en œuvre de la première étape de la privatisation. C’est pourquoi nous y resterons opposés. Nous avons besoin de véritables services publics et de bureaux de plein exercice, car nous voulons que La Poste, entreprise publique, soit présente partout, et dans de bonnes conditions.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié.
M. Michel Teston. Le groupe socialiste s’abstient !
Mme Françoise Laborde. Le groupe du RDSE également !
(L'article 2 bis est adopté.)
Article 2 ter (nouveau)
I. – Le premier alinéa du 3° du I de l’article 21 de la même loi est ainsi modifié :
1° À la première phrase, le pourcentage : « 85 % » est remplacé par le pourcentage : « 100 % » ;
2° La seconde phrase est ainsi rédigée :
« La perte de recettes éventuelle pour les collectivités territoriales et leurs groupements résultant de cet abattement est compensée à hauteur de 15 % par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement. »
II. – Le 3° du II de l’article 1635 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, le pourcentage : « 85 % » est remplacé par le pourcentage : « 100 % » et les mots : « cet exploitant » sont remplacés par les mots : « cette société » ;
2° La seconde phrase du même alinéa est ainsi rédigée :
« La perte de recettes éventuelle pour les collectivités territoriales et leurs groupements résultant de cet abattement est compensée à hauteur de 15 % par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement. » ;
3° Au second alinéa, le pourcentage : « 70 % » est remplacé par le pourcentage : « 100 % » ;
4° Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La perte de recettes éventuelle pour les collectivités territoriales et leurs groupements résultant de cet abattement est compensée à hauteur de 30 % par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement. »
III. – La perte de recettes éventuelle pour les collectivités territoriales résultant du I et du II est compensée par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.
La perte de recettes éventuelle pour l'État résultant de l’alinéa précédent ainsi que du I et du II est compensée par la majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, sur l’article.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, n’allez pas juger de l’intérêt de cet article 2 ter au nombre limité d’amendements dont il fait l’objet. Au contraire, cet article, qui a été ajouté par la commission, constitue l’un des points clés de ce texte : il constituera, si le Sénat le décide, l’un des principaux apports de la Haute Assemblée au projet de loi dont nous discutons depuis lundi après-midi.
Vous l’avez constaté, le Gouvernement a déposé un amendement tendant à réécrire intégralement cet article. Je dois donc vous présenter la position de la commission de l’économie. En son nom, je vous proposerai d’adopter l’amendement du Gouvernement, modifié par certains sous-amendements déposés par des membres de notre commission.
Nous venons d’adopter l’article 2 bis, lui aussi présenté par la commission, qui a consolidé le réseau de points de contacts de La Poste. Je sais que certains ont encore des doutes à ce sujet. Ils n’ont pas entièrement tort, car il manque à ce dispositif une brique essentielle, celle du financement, qui constitue le « nerf de la guerre » !
Or nous devons éviter deux écueils.
Nous devons d’abord éviter le sous-financement, qui placerait La Poste en situation de faiblesse face à la concurrence. À terme, un sous-financement de cette mission remettrait en cause la capacité de La Poste à maintenir et à améliorer encore le maillage territorial auquel nous sommes tous attachés.
Mais nous devons éviter aussi le sur-financement, incompatible avec les règles communautaires.
M. Marc Daunis. Ça, il n’y a pas de risque ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je m’attendais à une remarque de ce genre, je la prends avec le sourire !
Si l’on donnait à La Poste plus que ce que coûte réellement son réseau de points de contact, cela constituerait une subvention illégitime à l’entreprise face à ses concurrents.
M. Marc Daunis. Vraiment, le risque est faible !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission avait donc décidé, il y a deux semaines, de porter à 100 % l’abattement dont bénéficie La Poste sur sa fiscalité locale. Cela devait permettre de financer de manière quasi-intégrale cette mission pour environ 220 millions d’euros, sur un coût total estimé par La Poste à 250 millions d’euros.
C’était un pas en avant.
Toutefois, nous étions conscients que le coût d’une mission de service public devait être établi de manière objective et transparente. C’est indispensable au regard des critères européens, notamment de la jurisprudence dite « Altmark ».
C’est aussi tout simplement un principe de bonne gestion des deniers publics. M. Daniel Dubois vient de nous le rappeler de façon claire il y a quelques instants.
D’une part, ce coût doit être évalué de manière indépendante. J’avais évoqué lors de la première réunion de la commission la possibilité que cette tâche soit confiée à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP. Après y avoir réfléchi et avoir notamment consulté le président de cette autorité, je suis favorable au sous-amendement n° 624 rectifié du groupe de l’Union centriste, qui porte sur cette question.
D’autre part, il ne suffit pas de publier une évaluation, il faut également expliquer ce que l’on va en faire. C’est pourquoi je soutiendrai également le sous-amendement n° 625 de M. Bruno Retailleau.
Je vous proposerai également, avec les sous-amendements nos 631 rectifié et 632 rectifié, de garantir que l’allégement de la fiscalité locale dont bénéficie La Poste se fasse bien sur la base de l’évaluation fournie par l’ARCEP. Aujourd’hui, cet allégement de fiscalité locale est inscrit dans la loi, mais n’est pas lié au coût réel de la mission.
Il faut que les deux paramètres soient coordonnés pour assurer à la fois que le montant de ce financement est suffisant par rapport aux besoins réels de La Poste et qu’il est conforme aux règles communautaires.
Nous nous sommes bien compris sur le sujet, en particulier avec les membres de la commission des affaires européennes.
Telle est l’économie des dispositions dont la commission vous proposera l’adoption. De la sorte, La Poste demeurera armée pour continuer à proposer son réseau de points de contact sur tout le territoire national. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet, sur l'article.
M. Jean-François Voguet. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, l’article 2 ter du projet de loi a été ajouté sur proposition de la commission de l’économie et porte sur la question du traitement fiscal de La Poste.
Il est vrai que cela pose question, notamment du point de vue de ce que nous devons encore appeler la taxe professionnelle et dont on sait – c’est d’ailleurs l’une des limites de l’exercice auquel nous nous livrons ce jour – qu’elle sera supprimée de par la volonté du Président de la République.
La Poste, vous le savez, est soumise de plein droit à la taxe professionnelle, mais selon des modalités qui lui sont propres, c’est-à-dire tenant compte de la réalité des missions d’aménagement du territoire qui lui ont été assignées par la loi de 1990 et qui ont été confirmées depuis.
Reprenons les termes de l’enjeu.
La loi de 1990 dispose, en son article 21, que les bases d’imposition de La Poste « font l’objet d’un abattement égal à 85 % de leur montant, en raison des contraintes de desserte de l’ensemble du territoire national et de participation à l’aménagement du territoire qui s’imposent à cet exploitant. L’abattement ne donne pas lieu à compensation par l’État. »
C’est ce que traduit l’article 1635 sexies du code général des impôts, qui est ainsi rédigé : « Les bases d’imposition de La Poste font l’objet d’un abattement égal à 85 % de leur montant, en raison des contraintes de desserte de l’ensemble du territoire national et de participation à l’aménagement du territoire qui s’imposent à cet exploitant. L’abattement ne donne pas lieu à compensation par l’État ;
« À compter de 1999, la valeur ajoutée retenue pour l’application de l’article 1647 E fait l’objet d’un abattement de 70 % de son montant ; ».
Vous aurez sans doute remarqué l’exacte coïncidence des deux textes, celui de la loi de 1990 et celui du code général des impôts.
L’article 2 ter n’appréhende qu’une partie des questions posées.
Il s’agit, d’une part, d’accroître l’abattement sur les bases en vue de le porter à la totalité de la valeur des biens imposables, ce qui ne manquera pas d’avoir des conséquences sur les ressources fiscales des collectivités.
Il s’agit, d’autre part, de mettre un terme à l’assujettissement de La Poste à la cotisation minimale de taxe professionnelle au titre de la valeur ajoutée, ce qui ne manquera pas de poser quelques difficultés aux groupements et collectivités disposant de ressources alimentées par cette imposition spécifique.
Qu’on le veuille ou non, l’article 2 ter est assez original. Il est présenté comme l’une des manifestations les plus évidentes de l’apport du Sénat au texte, le surplus de ressources dégagé par le processus de double exonération étant estimé à quelque 83 millions d’euros.
Tout cela est sans doute appréciable, mais apparaît, hélas, comme d’ores et déjà contrebattu par la réalité, cette dure réalité qui veut que le projet de loi de finances pour 2010 n’ait pas tout à fait prévu la disposition dont nous discutons.
On notera, d’ailleurs, que le Gouvernement, constant sur sa position, a décidé, avec toute la latitude que lui permet le règlement des assemblées parlementaires, de procéder au dépôt d’un amendement de réécriture intégrale de l’article qui n’évoque plus l’évolution du régime fiscal de La Poste, mais commence par revenir sur la question paraissant essentielle, celle du coût pour l’exploitant public de ses contraintes d’aménagement du territoire, ou, pour le dire plus vite, de ses obligations de service public.
Nous exprimerons plus avant dans la discussion ce que nous pensons de l’attitude du Gouvernement et de l’ensemble de la problématique fiscale de La Poste, qui ne s’arrête pas à la seule taxe professionnelle ou à toute autre taxe qui en tiendrait lieu à l’avenir.