compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Sylvie Desmarescaux,
Mme Anne-Marie Payet.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Éloge funèbre d’André Lejeune, sénateur de la Creuse
M. le président. Madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, madame, c’est avec une profonde tristesse que j’accomplis une nouvelle fois le pénible devoir qui revient au président de notre assemblée de saluer solennellement la mémoire d’un collègue disparu. (Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, M. le ministre chargé des relations avec le Parlement, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
Cette émotion est d’autant plus forte que j’ai, durant de longues années, côtoyé et apprécié André Lejeune au sein de notre commission des affaires économiques, à laquelle il était, tout comme moi, particulièrement attaché. Fidèle en amitié, il honorait ces estimes réciproques si précieuses qui, comme vous le savez, mes chers collègues, se nouent au-delà des clivages politiques, au fil de notre travail en commission.
André Lejeune, qui fut sénateur de la Creuse pendant près de douze années, s’est éteint le 9 septembre dernier, au terme d’une longue maladie, quelques jours à peine avant la reprise de nos travaux parlementaires.
Un hommage solennel, particulièrement émouvant, lui a été rendu le 14 septembre sur le parvis de l’hôtel de ville de Guéret, dont il avait été le premier magistrat durant près de vingt ans. Cette cérémonie était à son image : simple et attachante. Deux mille personnes, de tous bords, de tous horizons et de toutes conditions, réunies devant un portrait de notre ancien collègue, entouraient l’épouse et les proches d’André Lejeune, le maire et le conseil municipal de Guéret ainsi que d’autres élus du département, dans une atmosphère émouvante, chaleureuse et profondément humaniste.
J’ai eu à cette occasion le douloureux privilège de prononcer en votre nom, mes chers collègues, l’éloge d’André Lejeune. Je l’ai fait aux côtés de plusieurs d’entre vous, en particulier le président du groupe socialiste, Jean-Pierre Bel, et le président de la commission de l’économie, Jean-Paul Emorine, ainsi que, naturellement, nos collègues de la Creuse, Jean-Jacques Lozach et Renée Nicoux, suppléante d’André Lejeune, qui nous a aujourd’hui rejoints dans cet hémicycle.
Cet adieu émouvant au milieu des siens, sur cette terre de la Creuse qui lui était si chère et qu’il avait si fidèlement servie, devait trouver aujourd'hui son écho au Palais du Luxembourg.
André Lejeune a fait face à la maladie pendant de longs mois. Il l’a fait avec le courage et la force de caractère qui le caractérisaient et qui ont marqué toute son existence.
Les épreuves de la vie avaient en effet forgé très tôt sa personnalité : son père était mort en captivité lorsqu’il n’avait que neuf ans, mais le jeune pupille de la Nation avait su très vite prendre ses responsabilités, avec volonté, énergie et ténacité.
Après des études secondaires au lycée Pierre-Bourdan de Guéret, André Lejeune accomplit à l’université de Clermont-Ferrand des études supérieures qui le conduisirent jusqu’à une licence de sciences physiques et un certificat d’aptitude professionnelle à l’enseignement technique. Il embrassa ainsi la carrière d’enseignant et fut pendant plusieurs années professeur de physique au lycée technique de Guéret.
Sa vie fut, sur tous les plans, personnel, professionnel et politique, indissociablement liée à la Creuse, qui était à la fois sa terre natale et son département d’élection.
Ses parents comme ses grands-parents étaient déjà originaires de Glénic et d’Ajain, où André Lejeune naquit le 4 juillet 1935 et où sa famille bénéficiait de fidèles amitiés et de l’estime de tous.
André Lejeune fut à la fois un homme de convictions et un élu local exemplaire, avant de devenir un parlementaire actif et respecté.
L’enracinement local, le sens des responsabilités et la force de ses convictions personnelles le conduisirent naturellement à s’engager pour la défense de ses idées et de ses concitoyens.
Il fit ses premières armes en politique au sein du parti socialiste unifié, dont il fut le secrétaire fédéral de 1964 à 1968. Il rejoignit ensuite le parti socialiste. Après le congrès d’Épinay, il anima dans le département de la Creuse, pendant plusieurs années, le CERES, le Centre d’études, de recherches et d’éducation socialiste, fondé par Jean-Pierre Chevènement, qui siège désormais parmi nous.
André Lejeune participa activement à la vie de son parti. Ses convictions en matière européenne l’amenèrent, par exemple, à s’engager activement dans le débat que nous avons mené en 2004- 2005 sur le projet de traité constitutionnel.
Toutefois, son attachement viscéral à sa terre d’origine, s’ajoutant à ses convictions politiques, conduisit André Lejeune à entamer aussi une longue carrière d’élu local.
Il fut élu dès 1971 au conseil municipal de la ville de Guéret. Il enchaîna dès lors sans discontinuer les responsabilités municipales et départementales, devenant conseiller général en 1973, conseiller régional du Limousin et premier adjoint au maire de sa ville en 1977, puis maire de Guéret en 1978.
Il occupa ce poste de premier magistrat de la ville pendant deux décennies, jusqu’en 1998, se consacrant passionnément à cette fonction qu’il jugeait la plus vibrante de toutes.
Se dévouant sans compter pour Guéret, avec un attachement aux valeurs humaines qui lui valaient à la fois l’estime de ses amis et le respect de ses adversaires, André Lejeune se consacra sans relâche, avec efficacité, à la ville dont il était l’élu et où il mena à bien de multiples projets.
Son attachement à Guéret était tel que, lorsqu’il décida d’abandonner son fauteuil de maire pour rejoindre définitivement le Palais du Luxembourg, André Lejeune ne se résolut pas à abandonner la vie de cette commune. Il demeura au conseil municipal afin de continuer à y servir ses concitoyens, tout en présidant la communauté de communes de Guéret Saint-Vaury.
Le sens de l’intérêt général et l’efficacité de l’élu local amenèrent alors André Lejeune, par un enchaînement logique pour les hommes politiques de sa dimension, à débuter une remarquable carrière parlementaire : il fut élu, en septembre 1980, sénateur de la Creuse, au côté de notre ancien collègue Michel Moreigne.
Après ce premier passage au Palais du Luxembourg, il fut appelé à siéger au Palais-Bourbon à l’occasion des élections législatives de juin 1981. Réélu à l’Assemblée nationale en 1986, puis en 1988, il retrouva notre hémicycle lors des élections sénatoriales de 1998. Il venait d’y être brillamment réélu, en septembre 2008, avec Jean-Jacques Lozach.
Tout en restant le défenseur inlassable et vigilant des intérêts de la Creuse, André Lejeune sut, dans ces murs, exprimer avec conviction et détermination sa vision des sujets engageant l’avenir du pays.
Il tenait tout particulièrement à défendre les intérêts de notre ruralité et de nos agriculteurs, soulignant sans cesse les difficultés des campagnes et des régions faiblement industrialisées ou victimes de la désindustrialisation. Il militait avec efficacité pour une politique évolutive à moyen et à long terme dans ce domaine. Ses interventions lors de l’examen annuel du budget de l’agriculture étaient écoutées et appréciées, comme l’étaient ses prises de position à l’occasion de la discussion des projets de loi d’orientation agricole.
Il s’attachait aussi aux questions de gestion locale et de coopération intercommunale. Son expertise et son expérience dans ce domaine nous manqueront particulièrement lors de l’examen des prochains projets de loi concernant les collectivités territoriales.
Il fut un membre solide, estimé et respecté de notre commission des affaires économiques. Le collègue de travail d’André Lejeune que je fus peut attester qu’il était, au sein de sa commission, l’un des piliers du groupe socialiste.
Au-delà de la commission des affaires économiques, André Lejeune démontrait toujours son expérience du terrain, sa parfaite connaissance des problématiques locales, mais aussi son humanisme et une forme de chaleur humaine mêlée de retenue.
Mes chers collègues, madame, la personnalité et l’action d’André Lejeune méritent que lui soit rendu aujourd’hui, par notre assemblée, cet hommage.
Tout au long de son parcours exemplaire, André Lejeune a consacré l’essentiel de son existence et de son énergie à son travail d’élu local et de parlementaire, au service de nos concitoyens, avec les convictions qui étaient les siennes.
Il était une figure locale d’exception, une personnalité attachante et un ami courageux, tel que l’a décrit le maire de Guéret. Jusqu’à ses derniers jours, il est demeuré fidèle à lui-même, jusqu’au bout de ses forces.
À ses collègues du groupe socialiste, éprouvé par la disparition de l’un de ses membres, j’adresse les condoléances du Sénat tout entier.
Aux membres de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, qui perdent à travers lui un collègue estimé de tous, j’exprime toute notre sympathie et, à titre personnel, en tant qu’ancien président de cette commission, je veux redire le souvenir ému que je garde d’André Lejeune lorsque nous y travaillions ensemble.
À vous particulièrement, madame, qui avez fait preuve d’un grand courage à un moment difficile, à vos enfants, Gilles, Patrick et Sylvie, à toute votre famille et à vos proches, je tiens en cet instant à exprimer notre très sincère et très profonde sympathie, à témoigner de la peine de chacun des membres du Sénat de la République et à vous dire la part personnelle que je prends à votre chagrin. Je veux vous encourager dans ces moments particulièrement pénibles.
Soyez sûre, madame, que la mémoire d’André Lejeune restera longtemps présente dans cet hémicycle et dans nos mémoires.
Madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous invite maintenant à partager un moment de recueillement. (Mme et MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs observent une minute de silence.)
La parole est à M. le ministre.
M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. Madame, monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement tient à s’associer à l’hommage que le Sénat rend aujourd’hui à André Lejeune, ancien sénateur de la Creuse, qui nous a quittés le 9 septembre dernier.
Comme vous, monsieur le président, il m’a été donné d’être, de longues années durant, le collègue d’André Lejeune au sein de la Haute Assemblée. J’ai toujours été impressionné par la passion qui l’animait et qui allait de pair avec une grande maîtrise des dossiers sur lesquels il s’engageait, ainsi que par la qualité des dialogues que nous nourrissions ensemble.
Tant à l'Assemblée nationale qu’au Sénat, sa connaissance très fine du monde agricole et son approche moderne de la ruralité apportaient aux travaux parlementaires un éclairage indispensable.
À la disparition d’André Lejeune, et même si nous le savions malade, notre premier sentiment a été celui de la tristesse. Je puis attester que ce sentiment était partagé sur les travées du Sénat comme sur les bancs de l'Assemblée nationale. Mais, derrière la tristesse, il doit y avoir aussi l’espoir. C’est ce message qui se dessine quand on se penche sur la vie d’André Lejeune et sur l’œuvre qu’il a accomplie.
En effet, à travers le parcours de ce fils d’ouvrier dont vous avez rappelé les terribles épreuves de l’enfance, monsieur le président, comment ne pas voir l’incarnation de ce que chacun d’entre nous ici attend de la République ? Comment ne pas y trouver la marque du mérite républicain qui permet, à force de travail et de volonté, à l’élève méritant de devenir le professeur brillant, au jeune élu de terrain de prendre un jour à bras-le-corps les destinées de sa ville, au maire de devenir un parlementaire écouté et respecté ?
Oui, l’itinéraire d’André Lejeune est remarquable : il est de ceux qui portent haut les couleurs de la République française.
Quant à sa personnalité, n’est-elle pas le meilleur exemple à offrir à ceux qui font le choix de s’investir au service de leurs compatriotes ? Sa nature généreuse, son humanisme de conviction et de tempérament en faisaient l’incarnation parfaite de l’élu de terrain que nos compatriotes apprécient.
Enfant du terroir et acteur enraciné, André Lejeune avait tissé avec les habitants de la Creuse, en particulier avec ceux de Guéret, une relation très profonde, empreinte de confiance et de considération mutuelles.
En venant si nombreux lui rendre un dernier hommage à Guéret, ses anciens électeurs, ses anciens administrés, ses collègues et, au-delà, de très nombreux Creusois ont montré l’étendue de sa popularité, à la hauteur de l’émotion ressentie et de l’estime dans laquelle ils le portaient.
Des femmes et des hommes de tous horizons politiques étaient présents et rassemblés, le 14 septembre dernier, à Guéret. Ils ont salué l’homme de conviction, mais également le militant toujours sur la brèche, l’énergie et la volonté inébranlables dont il ne s’est jamais départi, et cela quels que fussent les aléas de la vie politique.
C’est pour le Gouvernement français une occasion de saluer, à travers celui qui en était un représentant emblématique, le travail, la passion et, disons-le, les sacrifices consentis par les élus locaux de France pour servir nos territoires et celles et ceux qui y vivent.
Vous l’avez rappelé, monsieur le président, avec la disparition d’André Lejeune, la Creuse perd l’un de ses meilleurs représentants, l’un de ses meilleurs défenseurs. Quant au Parlement, en cet instant, il dit adieu à un élu de talent.
À vous, madame, à vos trois enfants, à votre famille, à tous ses collègues du groupe socialiste, à ses collègues de la commission de l’économie, je souhaite exprimer, au nom du Gouvernement, mes condoléances très sincères et le témoignage de notre amitié.
André Lejeune va maintenant rejoindre le prestigieux livre du Sénat, celui de la mémoire de celles et ceux qui, dans les départements, ont accepté d’assumer une charge en siégeant ici, pour le service de la France. Nous leur devons admiration et respect : c’est cela, madame, que nous voulons vous témoigner en cet instant.
M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre, de vous associer personnellement et au nom du Gouvernement à la tristesse qui est la nôtre.
Mes chers collègues, conformément à notre tradition, en signe d’hommage à André Lejeune, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quatorze heures cinquante, est reprise à quinze heures dix.)
M. le président. La séance est reprise.
3
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour un rappel au règlement.
M. Bernard Vera. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36 du règlement du Sénat.
Monsieur le président, je tiens à vous faire part de l’étonnement de mon groupe à la lecture d’un communiqué de la présidence du Sénat, disponible sur le site internet du Sénat et indiquant : « Après deux jours de débat et un travail approfondi autour de la commission des finances, de son président et du rapporteur général, le Sénat a adopté l’article 2 sur la réforme de la taxe professionnelle, dans une version largement remaniée. Fidèle à sa méthode, le Sénat a choisi une position pragmatique afin de s’assurer que la réforme engagée soit équilibrée pour les collectivités locales. Ce résultat a été possible grâce à l’implication constructive des présidents de groupe, notamment de la majorité, et de tous les sénateurs qui ont participé à la recherche d’un dispositif répondant à ces objectifs. »
Je tiens à rappeler fermement que le groupe CRC-SPG s’est opposé à la suppression de la taxe professionnelle, même aménagée par la majorité sénatoriale.
En conséquence, je demande à la présidence de bien vouloir rectifier sa communication et de ne pas se prévaloir d’un consensus qui n’existe pas.
M. le président. Mon cher collègue, je ne changerai pas ma communication, parce qu’elle correspond à l’état d’esprit qui a prévalu.
Mais le résultat du vote est extrêmement clair, et je vous donne acte que l’ensemble de votre groupe n’a pas voté cet article.
Le reste relève de mon analyse personnelle. Le président du Sénat, s’il ne vote pas, conserve sa liberté d’appréciation. En l’occurrence, il me semble que nous avons accompli un travail constructif. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Robert del Picchia. Voilà !
M. Alain Gournac. Absolument !
M. Nicolas About. Très bien !
4
Mise au point au sujet d'un vote
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Au nom de mon groupe, je souhaite effectuer une mise au point en ce qui concerne le scrutin n° 92 relatif à l’amendement n° I-181 présenté par M. Jean-Jacques Jégou et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel après l’article 8 bis du projet de loi de finances pour 2010 et à rétablir le taux de TVA sur la restauration à 19,6 % : je précise que notre collègue M. Nicolas Alfonsi souhaitait voter pour et non pas s’abstenir. Il convenait de le dire.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel.
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Démission de membres de commissions et candidatures
Mme la présidente. J’ai reçu avis de la démission de M. Gérard Collomb, comme membre de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, et de M. Roland Povinelli, comme membre de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats proposés en remplacement.
Ces candidatures vont être affichées et leur nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
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Loi de finances pour 2010
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale (nos 100 et 101).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 6.
Articles additionnels après l’article 6
M. le président. L’amendement n° I-393, présenté par MM. Maurey, Dubois et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Après l’article 200 quindecies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - 1. Les contribuables personnes physiques, fiscalement domiciliés en France au sens de l’article 4 B, et qui ne bénéficient d’aucune alternative à la route pour se rendre sur leur lieu de travail, bénéficient, sur justificatifs, d’un crédit d’impôt forfaitaire additionnel d’un montant indexé sur la valeur de la taxe carbone sur les essences et supercarburants (hors usage pour la pêche) dont il est fait mention à l’article 266 quinquies C, dans la limite d’un aller-retour par jour.
« 2. Le crédit d’impôt dont il est fait mention au 1. n’est applicable que si la distance séparant le contribuable de son lieu de travail est supérieure ou égal à une distance de 30 kilomètres.
« 3. Le crédit d’impôt mentionné au 1. est doublé pour les couples soumis à imposition commune, sauf dans le cas où il est fait mention par les contribuables de l’utilisation d’un même moyen de transport pour se rendre sur leur lieu de travail.
« 4. La qualité de contribuable est appréciée au 31 décembre de l’année d’imposition.
« 5. Le crédit d’impôt est imputé sur l’impôt sur le revenu après imputation des réductions d’impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200 bis, 200 octies et 200 decies A, après imputation des crédits d’impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. »
II. – En 2010, le crédit d’impôt mentionné au I est versé par anticipation dans les conditions suivantes :
1° Pour les contribuables compris dans les rôles de l’année 2008, selon des modalités fixées par décret. Ce versement prend la forme d’une diminution du premier acompte pour les contribuables soumis aux acomptes trimestriels mentionnés à l’article 1664 du code général des impôts ;
2° Pour les contribuables qui n’ont pas été compris dans les rôles de l’année 2008, le crédit d’impôt peut être versé par anticipation, sur demande du bénéficiaire formulée avant le 30 avril 2010 ;
« La régularisation des versements anticipés intervient lors de la liquidation de l’impôt afférent aux revenus de l’année d’imposition, après imputation éventuelle des différents crédits d’impôt et de la prime pour l’emploi. »
III. - Le I est applicable à compter de l’imposition des revenus de l’année 2009.
IV. - Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
V. - Les conséquences financières résultant pour l’État des I à IV ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Hervé Maurey.
M. Hervé Maurey. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, à l’occasion du long débat d’hier sur la contribution carbone, nous avons été un certain nombre à souligner que celle-ci n’était pas suffisamment incitative et équitable.
Par cet amendement, nous entendons justement améliorer l’équité du dispositif, en proposant que les contribuables qui ne disposent pas d’alternative à la route pour aller travailler puissent bénéficier d’un crédit d’impôt forfaitaire supplémentaire.
La mesure s’appliquerait dès lors que la distance séparant le domicile du lieu de travail est supérieure ou égale à 30 kilomètres, soit l’un des critères d’ores et déjà retenus par le législateur pour définir ce qu’est une offre raisonnable d’emploi.
Il importe d’éviter à ceux qui doivent effectuer des trajets importants d’être pénalisés encore davantage par une sorte de double peine.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, si nous comprenons bien l’esprit qui sous-tend cette proposition, celle-ci paraît complexe à mettre en œuvre.
L’examen, hier, de l’article 6 a permis, nous semble-t-il, de traiter les problématiques de déplacement de manière aussi correcte que possible. La commission est donc assez réservée sur cet amendement et s’en remet à l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État. Monsieur le sénateur, le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement, car son adoption aboutirait, au fond, à ajouter une strate supplémentaire au dispositif d’ensemble, qui, nous l’avons évoqué hier, prend déjà en compte les PTU, les périmètres de transports urbains. En la matière, nous avons fait le choix de la simplicité, car tous les contribuables français sont susceptibles d’être concernés.
Le crédit d’impôt retenu est à la fois « familialisé » et « territorialisé » en fonction de l’existence, ou non, d’un périmètre de transport urbain. Le fait d’y ajouter une condition supplémentaire rendrait sa mise en œuvre extraordinairement compliquée dans la mesure où le système deviendrait alors totalement déclaratif.
Sans doute faudra-t-il à l’avenir faire évoluer le dispositif en vue de l’améliorer et, notamment, de mieux l’individualiser. C’est dans ce cadre que votre proposition méritera d’être prise en compte, mais, pour le moment, il ne paraît pas envisageable de la retenir.
M. le président. Monsieur Maurey, l’amendement n° I-393 est-il maintenu ?
M. Hervé Maurey. Monsieur le président, je maintiens cet amendement, n’ayant pas été convaincu par les explications qui m’ont été apportées.
Monsieur le ministre, vous venez de le dire, vous avez effectivement fait le choix de la simplicité, mais, à mon sens, au détriment de l’équité. Le dispositif constitue une véritable injustice pour les contribuables qui n’ont pas d’autre choix que de prendre la route pour aller travailler, étant dans l’impossibilité d’utiliser les transports en commun soit parce qu’il n’en existe pas dans leur secteur, soit parce que leurs horaires de travail ne le leur permettent pas.
Mes chers collègues, c’est donc au nom de l’équité et même de la justice sociale, auxquelles vous devriez être sensibles sur toutes ces travées, que je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. L’amendement n° I-366, présenté par MM. Gillot, Antoinette, S. Larcher, Lise, Patient et Tuheiava, est ainsi libellé :
Après l’article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans les départements d’outre-mer, les prix des produits pétroliers sont gelés au tarif pratiqué depuis le 1er octobre 2009, et ce, jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation destinée à établir les règles de fixation et de variation du prix des produits pétroliers.
Durant cette période, le préfet, dans les départements d’outre-mer, dispose de la faculté d’adapter les prix des produits pétroliers pour tenir compte de changements substantiels portant sur la fiscalité des produits pétroliers, l’évolution du prix de baril sur le marché international, la parité euro/dollar et les marges de gros et de détail.
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. À compter de la promulgation de la présente loi de finances, sont abrogées les dispositions figurant dans le décret du 23 décembre 2003 et dans ceux du 17 novembre 1988.
Dans les départements d’outre-mer, il a été instauré une réglementation du prix de certains produits pétroliers par des décrets, un par département, en date du 17 novembre 1988, ultérieurement modifiés pour les Antilles en 2003. Par ces décrets, le préfet fixe, dans chaque département et pour chaque catégorie de produit réglementé, le prix de vente maximum en gros et au détail.
Dans le rapport sur la fixation des prix des carburants dans les départements d'outre-mer, publié en mars dernier et corédigé par l’inspection générale des finances, il est indiqué : « Depuis les décrets du 17 novembre 1988 qui organisent la dérogation au principe de liberté des prix, le cadre réglementaire a évolué de manière spécifique dans chaque département si bien qu’aujourd’hui, il est hétérogène sur l’ensemble des DOM. En pratique, ce cadre réglementaire n’est pas toujours mis à jour ni actualisé et est parfois incomplet ou caduque. »
Pour les Antilles, il est ainsi précisé dans ce même rapport : « Le prix plancher fixé en 2003, qui comprend plusieurs paramètres […] dont la part respective n’est pas détaillée dans le décret, ne peut plus aujourd'hui être audité. »
Il semble donc aujourd’hui nécessaire d’abroger ces décrets, qui sont à l’origine des dérives ayant déclenché les mouvements sociaux dans les départements d’outre-mer en 2008 et 2009.
Dans l’attente de la modification de la formule de révision permettant davantage de lisibilité et de transparence sur le mode de fixation des prix des produits pétroliers, le présent amendement a un double objet.
Il convient, d'une part, d’obtenir un gel des prix dans les quatre départements d’outre-mer au niveau du prix à la pompe constaté au 1er octobre dernier, en attendant l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation révisant les règles de fixation et de variation du prix des produits pétroliers en outre-mer.
Néanmoins, afin de tenir compte des contraintes du marché, il importe, d'autre part, de laisser au préfet la possibilité de faire évoluer le prix des carburants à la baisse ou à la hausse, si des changements significatifs apparaissent en ce qui concerne, par exemple, la fiscalité des produits pétroliers, la marge des détaillants et des grossistes, l’évolution de la parité entre l’euro et le dollar, ou tout simplement le cours du brut sur le marché mondial.