M. Philippe Dominati. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner lors de la discussion générale, le monde est en crise, la nation souffre, mais l’État se porte bien. Ces crédits le prouvent.
Malgré la crise, la France est la nation qui dépense le plus pour la sphère publique de tous les pays du G20. C’est un titre que nous avons acquis cette année, et il est incontestable !
En constatant des augmentations de crédits de l’ordre de 15 %, le parlementaire que je suis s’émeut. Je ne suis d’ailleurs pas le seul, car certains de nos collègues à l’Assemblée nationale se sont également interrogés sur la nécessité de cette progression des dépenses.
Tel est l’objet du présent amendement.
Des amendements similaires ont d'ailleurs été déposés pour les associations, les syndicats, les partis politiques.
En période de crise, il est naturel que toutes les communautés de la nation contribuent à l’effort collectif. Il est anormal, en revanche, dans un budget financé pour moitié par l’emprunt, de ne pas pouvoir diminuer les crédits sur un certain nombre de postes significatifs.
Par cet amendement, avec mon collègue Alain Milon, mais aussi avec les députés qui ont défendu un amendement analogue à l’Assemblée nationale, nous souhaitons réduire de 2 millions d'euros les quelque 560 millions d'euros de crédits d’un budget en augmentation de 15 %.
C’est un amendement symbolique, et le choix des organismes qui verraient leurs crédits limités n’est pas nécessairement juste ni justifié. Nous avons voulu mettre en valeur les budgets dont les crédits sont en augmentation de plus de 10 %, parce que l’on peut légitimement être choqué de constater des augmentations de 18 %, 50 %, 13 %.
Nous voulons donc, par cet amendement, démontrer que les services du Premier ministre et les autorités administratives indépendantes peuvent aussi réaliser des efforts. Monsieur le ministre, démontrez-nous que l’État est capable de réduire de 2 millions d'euros des crédits de 560 millions d'euros !
Nous ne remettons nullement en cause le bien-fondé de ces organismes, la nécessaire lutte contre la drogue ou le travail très utile de la CNIL. Quoi qu’il en soit, il faudrait parvenir à réaliser des économies ailleurs afin que, sur l’ensemble des programmes, on ne se retrouve plus avec des progressions aussi importantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial. Monsieur Dominati, vous proposez de réduire de 2 % le montant des crédits du programme « Protection des droits et libertés ». Je précise que ce programme s’élève non pas à 560 millions d'euros, mais à 86 millions d'euros, ce qui donne déjà une autre idée des masses en jeu.
Un amendement visant à maintenir les crédits au niveau de 2008 avait déjà été présenté l’an dernier à l’Assemblée nationale par Jean-Luc Warsmann.
C’est une manière de voir les choses.
Il en est une autre, qui s’attache à la réalité des missions. À cet égard, nous ne devons pas oublier que le nombre de saisines de la CNIL a augmenté de 1 738 % en cinq ans. La CNIL ne peut les traiter si nous ne lui attribuons pas des moyens supplémentaires. Le Gouvernement a proposé d’aller plus loin que l’augmentation progressive du nombre d’agents affectés à ces missions, car l’embouteillage reste important, tant à la CNIL que dans les autres autorités.
Il s’agit donc de savoir si nous voulons que ces autorités puissent fonctionner dans des délais acceptables, ou pas. En l’occurrence, le Gouvernement fait un effort afin de leur donner la possibilité de réagir dans les meilleures conditions.
Reste la question des loyers payés par ces autorités, qui est au cœur du débat. Nous en avions déjà abondamment parlé l’année dernière, et la question est revenue dans le débat plus encore cette année. J’ai ainsi proposé de procéder à un contrôle sur pièces et sur place à la HALDE, afin de traiter cette question au fond.
Il semble que le Gouvernement prenne en compte nos demandes. Dans ce contexte, même si elle entend bien votre message, la commission des finances est plutôt réservée sur cet amendement, monsieur Dominati.
Nous nous en remettrons donc à l’avis du Gouvernement.
À titre personnel, je ne souhaite pas que cette proposition soit retenue, non pas qu’elle soit dépourvue de légitimité, mais parce qu’elle n’est pas la bonne réponse pour des autorités administratives indépendantes soumises à l’énorme pression des demandes qui leur sont adressées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai bien compris la philosophie qui sous-tend le dépôt de cet amendement par M. Dominati.
Dans une période comme celle que nous connaissons aujourd'hui, caractérisée par la rareté des finances publiques, l’État doit montrer sa volonté de maîtriser ses dépenses, comme il le fait au travers des lois de finances de ces dernières années ou avec la révision générale des politiques publiques. Je n’y reviens pas : M. Dominati, comme les autres membres de la Haute Assemblée, le sait parfaitement.
Vous nous dites, monsieur le sénateur, que vous voulez, par cet amendement, délivrer un signal. Dans les faits, la réduction de crédits que vous proposez s’imputerait de la manière suivante : 307 843 euros sur la Commission nationale de l’informatique et des libertés, 1 414 107 euros sur le Conseil supérieur de l’audiovisuel, 270 384 euros sur plusieurs autres autorités indépendantes, dont la Commission d’accès aux documents administratifs et 11 607 euros sur l’action 7, qui concerne notamment la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité.
S'agissant de la CNIL, j’ai déjà largement anticipé la réponse que je m’apprêtais à vous faire dans mon intervention générale. L’extension des activités et du champ d’intervention de la CNIL nous conduit à augmenter ses crédits dans le présent projet de loi de finances, afin que cette autorité puisse remplir les missions qui lui ont été confiées.
Dans ces conditions, même si nous partageons votre raisonnement d’une manière générale, nous ne pouvons pas, en l’espèce, le suivre dans l’application que vous en proposez.
Concernant le Conseil supérieur de l’audiovisuel, permettez-moi de vous signaler que les crédits supplémentaires sont destinés à permettre le passage à la télévision numérique terrestre, la TNT. Si votre amendement était adopté, certains de nos compatriotes se retrouveraient alors devant un écran noir, alors même qu’ils continueraient à payer la redevance audiovisuelle !
La proposition de loi relative à la lutte contre la fracture numérique de M. Xavier Pintat, adoptée par le Sénat, doit être débattue lundi prochain à l’Assemblée nationale. Elle a précisément pour objet de mettre en œuvre tous les efforts qui ont été engagés à l’échelon national pour que 100 % de nos compatriotes bénéficient de la télévision numérique terrestre.
Si nous vous suivions, monsieur Dominati, nous serions bien incapables d’expliquer à nos compatriotes les raisons d’une politique aussi incohérente !
Le Gouvernement est très attentif et très sensible à votre message et reconnaît le sérieux de votre raisonnement, au demeurant tout à fait légitime. Il est cependant de mon devoir de vous demander de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi, à mon grand regret, je serais obligé d’émettre un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je m’associe au souhait qu’a exprimé M. le ministre.
La commission des finances a d’emblée une sympathie pour l’amendement de M. Dominati puisqu’il tend à réduire des crédits de 2 %. Cependant, nous en sommes conscients, mon collègue Yves Krattinger l’a rappelé, certaines de ces autorités administratives indépendantes doivent faire face à un afflux considérable de saisines, l’État et parfois même le Parlement étant les premiers à leur attribuer des missions nouvelles. Par conséquent, nous devons leur en donner les moyens.
Si les budgets sont assez importants, c’est notamment du fait des loyers, qui ont parfois été souscrits dans la précipitation, à une époque où France Domaine et le Conseil de l’immobilier de l’État n’existaient pas.
Le Gouvernement est aujourd'hui déterminé à reprendre en main la gestion immobilière et locative ; je ne doute pas que l’année 2010 nous apporte des satisfactions en ce domaine.
Sur un budget total de 7 millions d'euros, la HALDE acquitte un loyer de 2 millions d'euros, soit plus de 700 euros par mètre carré, ce qui est très supérieur au prix moyen du mètre carré dans les meilleurs quartiers de Paris.
Donc, si M. Dominati retirait son amendement, ce serait un soulagement pour la commission des finances.
M. le président. Monsieur Dominati, l'amendement n° II-47 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Je vais retirer mon amendement, mais les explications qui m’ont été fournies démontrent bien la difficulté dans laquelle nous nous trouvons.
L’État paie, pour ses implantations, des loyers sur plusieurs dizaines d’années - personne ne peut soutenir ici que des ministères disparaissent du jour au lendemain ! Voilà pourquoi, faute d’une gestion patrimoniale à long terme, qui serait indispensable, nous sommes confrontés à un tel délabrement de nos finances publiques. Lorsqu’une ville est obligée de payer un surloyer pour que son office municipal des sports - une installation prévue au moins pour un siècle ! - soit implanté dans un quartier attractif, on comprend les difficultés…
Je ne nie pas les efforts des autorités administratives indépendantes, des organismes concernés ou des ministères, ni de leurs agents. Aussi j’en reviens à ma démonstration initiale : tant que vous ne toucherez pas au périmètre de l’État, même une gestion vertueuse ne vous dispensera pas, monsieur le ministre, de nous présenter comme aujourd'hui des budgets en augmentation de 15 % lorsque le reste de la société est à moins 20 % !
Cela étant, je retire l’amendement.
M. le président. L'amendement n° II-47 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-42 est présenté par M. Peyronnet, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° II-43 est présenté par M. Krattinger.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Coordination du travail gouvernemental Dont titre 2 |
0 |
0 |
0 |
0 |
Protection des droits et libertés Dont titre 2 |
648 545 |
0 |
648 545 |
0 |
TOTAL |
648 545 |
0 |
648 545 |
0 |
SOLDE |
+ 648 545 |
+ 648 545 |
La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-42.
M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis. Il s’agit, par cet amendement, de rétablir les crédits qui avaient été initialement accordés par le Gouvernement pour la HALDE en 2010.
Nous ne comprenons pas très bien pourquoi la HALDE est particulièrement visée, si ce n’est pour ses loyers excessifs, mais la situation s’améliore et une négociation est en cours. En attendant le règlement de la situation, la réduction des crédits risquerait de déstabiliser financièrement cette autorité.
M. le président. La parole est à M. Krattinger, pour défendre l’amendement n° II-43.
M. Yves Krattinger. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La commission des finances avait examiné un amendement proposé par le rapporteur spécial tendant à rétablir les crédits de la HALDE. Malheureusement, ce jour-là, le rapporteur spécial n’avait pas pu être présent et transmettre toute la conviction qui l’anime aux membres de la commission...
La commission a parfois des instincts un peu rustiques et tend à considérer que toute économie est vertueuse. (Sourires.) Elle avait donc pris le parti de ne pas suivre M. le rapporteur spécial, non sans avoir le pressentiment qu’il lui faudrait bien venir devant le Sénat et entendre le Gouvernement sur ce point particulier.
Notre collègue Yves Krattinger, en sa qualité de rapporteur spécial, a pris ce soir l’engagement solennel, devant le Sénat, de procéder à un contrôle sur pièces et sur place. Comme il l’a rappelé lui-même, le loyer acquitté par la HALDE est très lourd, et Éric Woerth a confirmé qu’une négociation en cours devrait aboutir prochainement et permettre un allégement de cette charge.
M. le ministre nous a lui-même confirmé que le Gouvernement faisant le ménage pour se débarrasser d’un certain nombre de commissions créées au fil des années, quelquefois même par le Parlement. Ces propos ont également été très bien accueillis.
Je me permettrai de suggérer à M. le ministre de faire le même ménage dans les départements. (Sourires.) Je pense que le président du conseil général de l’Yonne doit, au lendemain de chaque renouvellement de son assemblée, être très impressionné par le nombre d’organismes au sein desquels il faut désigner des représentants de l’assemblée départementale.
Il y a pléthore de commissions, d’organismes qui ne se réunissent jamais, et lorsque, par hasard, ils le font, tous ceux qui participent à leurs travaux ont l’impression d’avoir totalement perdu leur temps.
Donc, nous devons consentir à des efforts importants, chers collègues, pour faire le ménage dans cet inventaire à la Prévert de commissions et organismes divers qui finissent par peser sur le budget.
Pour en revenir à la HALDE, l’avis du Gouvernement nous sera précieux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Je veux simplement rappeler les conditions dans lesquelles le débat s’est déroulé à l’Assemblée nationale, parce que nous nous trouvons ce soir, à quelques semaines d’intervalle, dans la situation exactement inverse.
L’Assemblée nationale voulait, au travers de l’amendement qu’elle a adopté, et dans le même esprit que M. Dominati à l’instant, adresser un signal fort à la HALDE, en particulier sur le montant de son loyer qu’elle jugeait sinon excessif, du moins trop élevé, probablement à raison.
J’avais répondu que je partageais ce sentiment, mais que, parce qu’il était impossible d’anticiper au 1er janvier 2010 le résultat de la négociation et une éventuelle révision à la baisse du loyer de la HALDE, il nous fallait patienter jusqu’à la clause de revoyure du loyer.
À l’issue de ce raisonnement assez simple, j’avais émis un avis de sagesse. Je ferai de même ce soir, car ce que j’ai fait dans un sens, je peux le faire dans l’autre… (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J’entends bien cet appel à la sagesse.
Nous pourrions adopter ces amendements et demander au Gouvernement de « geler » les crédits pour la partie devenue excessive, si l’on constate, à l’issue de la renégociation qui sera menée par Éric Woerth, une moins-value sur le loyer de 300 000, 400 000 ou 500 000 euros
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Henri de Raincourt, ministre. Je ne suis pas absolument certain que l’on puisse faire jouer la clause de revoyure en 2010. Le bail arrive à échéance, me semble-t-il, en 2014.
Pourrait-on obtenir une diminution par anticipation ? Ce n’est pas certain. La remarque de M. le président de la commission des finances, qui figurera au compte rendu intégral des débats, sera naturellement prise en considération, mais il faudra bien payer le loyer suivant le montant fixé correspondant aux clauses du bail.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Sous le bénéfice de cet engagement, qui est de bonne gestion, la commission des finances, ainsi éclairée, pourrait émettre un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial. Je confirme que le bail a été signé en 2005 et qu’il court jusqu’en 2014. La renégociation est engagée, mais elle n’est pas aujourd’hui aboutie. Donc, on ne peut pas considérer que cette réduction de loyer sera automatique.
Les pourparlers sont forcément difficiles, surtout quand le loyer est élevé, le propriétaire étant dans une situation favorable, puisqu’il a la signature de l’État au bas du document.
Pour ma part, je partage tout à fait la position de M. le président de la commission des finances. Je me suis engagé à procéder à un contrôle sur place pour avancer sur cette question. Il faudrait que la HALDE, de son côté, fasse de même des efforts.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-42 et II-43.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° II-78, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Coordination du travail gouvernementalDont titre 2 |
222 500 178 000 |
222 500 178 000 |
||
Protection des droits et libertésDont titre 2 |
||||
TOTAL |
222 500 |
222 500 |
||
SOLDE |
- 222 500 |
- 222 500 |
La parole est à M. le ministre.
M. Henri de Raincourt, ministre. Cet amendement a pour objet de diminuer les crédits du Premier ministre de 220 000 euros, pour prendre en compte une évolution administrative : la direction des médias, qui était rattachée aux services du Premier ministre, sera transférée, à compter du 1er janvier 2010, au ministère de la culture. Les frais de fonctionnement et de personnel sont diminués d’autant, assez logiquement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial. Avis favorable !
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ».
Pouvoirs publics
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le montant global des crédits demandés pour 2010 au titre de la mission « Pouvoirs publics » s’établit à 1,018 milliard d’euros, soit une diminution de 0,5 % par rapport à 2009.
Cette diminution s’explique, d’une part, parce qu’il est proposé de reconduire à l’euro près, ou de majorer pour des montants très faibles, les dotations affectées à la Présidence de la République ainsi qu’à l’Assemblée nationale et au Sénat, qui représentent plus de 95 % du total.
Elle s’explique, d’autre part, par l’absence d’inscription de dotations nouvelles au titre des indemnités des représentants français au Parlement européen, alors que les crédits votés l’an dernier sur cette ligne atteignaient 4,7 millions d’euros.
En effet, depuis le dernier renouvellement de l’assemblée de Strasbourg, intervenu en juin 2009, ses députés sont directement pris en charge par celle-ci.
J’en viens au sujet principal : la transparence voulue par le Président de la République sur l’utilisation des crédits qui lui sont alloués. Il s’agit d’une avancée majeure de notre démocratie. Elle se traduit par la consolidation, au sein du budget de l’Élysée, de l’ensemble des charges liées à la Présidence, à quelques exceptions près, notamment certaines charges qui restent affectées au Secrétariat général de la défense nationale.
Le Président Nicolas Sarkozy a, en outre, souhaité que l’Élysée soit soumis à un contrôle de gestion assuré dorénavant de façon permanente par la Cour des comptes. Celle-ci a remis son premier rapport au mois de juillet dernier, dans lequel elle aborde trois thèmes : la consolidation du budget, la réforme des procédures budgétaires et administratives et la mise en place d’une comptabilité analytique.
La Présidence a apporté une réponse à chacune des observations de la Cour, et elle s’est globalement engagée à respecter la plupart des préconisations du rapport, y compris sur le principal sujet de controverse, dont vous avez bien sûr tous entendu parler, celui du financement des sondages d’opinion.
Je vous renvoie à mon rapport écrit pour une analyse aussi détaillée que possible de chacun des sujets évoqués.
En résumé, je dirai que, pour l’essentiel, la Présidence de la République a décidé de recourir systématiquement aux procédures de mise en concurrence des prestataires et des fournisseurs, et de mettre ainsi un terme au règne de l’arbitraire et de l’opacité que nous avons connu par le passé.
Il aura fallu deux siècles depuis la fin de la monarchie absolue pour qu’enfin les dépenses liées à la fonction de chef de l’État soient identifiées, regroupées au sein d’un seul document, contrôlées comme aucune autre administration ne l’est, et rendues publiques. Je tiens à saluer ce constat, loin des polémiques apparues ces derniers temps.
Je serai plus bref sur les autres chapitres de la mission.
Les deux assemblées parlementaires ont décidé, pour la troisième année de suite, de demander la simple reconduction de leur dotation au regard de budgets qui doivent eux-mêmes demeurer stables.
L’effort de maîtrise des coûts, notamment ceux qui sont afférents aux traitements et salaires, doit être salué. Il permet de prendre en charge les dépenses nouvelles liées à la révision constitutionnelle de 2008, qui a consacré la fonction de contrôle et d’évaluation jouée par les commissions et qui implique un certain renforcement du rôle des groupes politiques.
Je vous renvoie encore une fois à mon rapport écrit en ce qui concerne la chaîne parlementaire et le Conseil constitutionnel, dont les dotations n’appellent pas de commentaire particulier.
Je souhaiterais, pour conclure, évoquer la Cour de justice de la République, dont les crédits sont en hausse de 11,4 %, pour des raisons essentiellement liées à ses conditions d’hébergement.
La commission des finances a publié, en juillet dernier, sur l’initiative de notre collègue Nicole Bricq, un rapport sur l’État locataire, concluant très clairement que le maintien de la Cour de justice de la République rue de Constantine, sur l’esplanade des Invalides, pour un loyer de plus de 600 euros par mètre carré, n’est pas nécessaire à son bon fonctionnement, puisque les séances de jugement où siègent les parlementaires qui en sont membres se tiennent nécessairement à l’extérieur de ses locaux, faute de place.
Les deux derniers procès se sont en effet tenus au tribunal de grande instance de Paris, dans la première chambre civile.
Le poids du poste de dépenses liées au loyer, soit 56,5 % de la dotation en 2010, justifie que de nouvelles solutions soient explorées pour l’hébergement de la Cour de justice de la République, comme le demande la commission des finances depuis plusieurs années.
Le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État a adressé, dans le courant du mois d’octobre, un courrier au président de la Cour, faisant expressément référence au rapport d’information de la commission des finances, pour lui demander soit de négocier une modification du bail qui la lie au propriétaire de ses locaux, soit d’envisager une autre implantation.
Nous resterons très attentifs à l’évolution de ce dossier au cours des prochains mois.
Sous cette seule réserve, mes chers collègues, la commission des finances vous propose d’adopter, sans modification, les crédits de la mission « Pouvoirs publics ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, au sein de la mission « Pouvoirs publics », la commission des lois a essentiellement examiné les dotations allouées par le projet de loi de finances pour 2010 au Conseil constitutionnel et à la Cour de justice de la République.
La dotation accordée en 2010 au Conseil constitutionnel est en baisse de 6,6 %, ce qui peut paraître a priori surprenant au moment où va se mettre en œuvre la « question de constitutionnalité » prévue par la révision constitutionnelle de juillet 2008.
En réalité, avec ce projet de budget, le Conseil constitutionnel prévoit d’anticiper l’exercice de ces nouvelles missions. Ainsi, au titre de la mise en œuvre de la question de constitutionnalité – la loi organique d’application est encore en discussion au Parlement –, le Conseil a décidé de créer un espace dédié aux avocats et au public, et de se doter d’un logiciel de greffe performant et adapté, tant il est vrai que ses méthodes de travail vont sensiblement évoluer.
Le Conseil constitutionnel prépare en outre la prochaine élection présidentielle en s’équipant d’un logiciel de traitement des parrainages.
Les opérations exceptionnelles, avec 4,5 millions d’euros de crédits, portent quant à elles sur la poursuite des travaux de rénovation des locaux affectés au Conseil, travaux qui sont engagés depuis l’an dernier.
Les crédits consacrés au Conseil constitutionnel, dont je tiens par ailleurs à souligner la gestion rigoureuse, n’appellent donc pas d’observations particulières.
La dotation allouée à la Cour de justice de la République pour l’année 2010 s’élèvera à 941 000 euros, soit une hausse de 11,4 %. Le rapporteur spécial ayant évoqué le montant des loyers, je signalerai que les activités de la Cour de justice de la République sont très variables d’une année à l’autre. Pour vous en donner une illustration, elle avait reçu trente-trois requêtes en 2008 et vingt-six en 2007, contre soixante-six en 2006 et quatre-vingt-dix-sept en 2005 ; depuis le 1er janvier 2009, ce sont vingt requêtes qui ont été transmises au procureur général près la Cour. Cette année, la formation de jugement va être appelée à siéger à trois reprises, ce qui explique en bonne partie la croissance de son budget.
Hormis ces quelques remarques, les crédits de la Cour de justice de la République pour 2010 n’appellent donc pas d’observations particulières de la part de la commission des lois.
Pour terminer ce bref propos, je voudrais réitérer une demande que la commission des lois formule chaque année : que la maquette budgétaire soit modifiée afin que soient intégrés dans la mission « Pouvoirs publics » les crédits du Conseil supérieur de la magistrature, le CSM. Une telle mesure concrétiserait dans le domaine budgétaire l’indépendance du Conseil supérieur de la magistrature, confortée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Les crédits du CSM sont aujourd’hui placés dans le programme « Justice judiciaire » de la mission « Justice », qui relève de la responsabilité du secrétaire général du ministère de la justice. Avouez, mes chers collègues, que cette situation n’est pas tout à fait adaptée à la position institutionnelle importante du CSM !
Avec l’ensemble de la commission des lois, je crois que la réforme du CSM qui entrera prochainement en vigueur – j’y insiste, car cette indépendance réaffirmée marque une évolution positive – doit se traduire également dans la maquette budgétaire.
Sous le bénéfice de ces observations, mes chers collègues, la commission des lois a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics ». (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)