M. le président. La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, je ne peux que me féliciter de l’engagement pris par le Président de la République et le Gouvernement en faveur des jeunes. C’est la première fois depuis très longtemps, en fait depuis l’époque d’un autre haut-commissaire, Maurice Herzog, qu’on a la volonté de mettre en œuvre une véritable politique en faveur de la jeunesse. L’annonce du plan « Agir pour la jeunesse » en est l’illustration.
Je tiens également, monsieur le haut-commissaire, à saluer votre implication et votre ténacité, au-delà des clivages politiques, dans la défense de l’intérêt des jeunes afin de renforcer leurs droits et leurs devoirs. Votre engagement conduit à mieux les respecter et ainsi à redistribuer les cartes pour leur donner des atouts dans une perspective d’intérêt général. Tels sont vos principes, mais aussi ceux qui ont guidé les réflexions de la mission commune d’information du Sénat sur la politique en faveur des jeunes, présidée par Raymonde Le Texier et dont j’étais le rapporteur.
Nous devrions tous nous réjouir que le programme « Jeunesse et vie associative » augmente de 61 %, passant de 120 millions d’euros à 193 millions d’euros. Ces crédits sont la traduction des engagements du Président de la République en faveur des jeunes et la preuve de votre combativité, monsieur le haut-commissaire.
En effet, le programme bénéficie de l’intégration de deux nouvelles lignes de crédit : les 45 millions d’euros du fonds d’expérimentation pour la jeunesse et les 40 millions d’euros du service civique.
Malgré le contexte actuel de finances publiques très dégradées, c’est concrètement une évolution très favorable. Celle-ci marque, à juste à titre, l’engagement fort de notre gouvernement envers la jeunesse.
Il est facile de dire que la jeunesse d’un pays est son avenir, son capital, qu’elle est confrontée au défi d’un monde en crise. Mais il est plus difficile d’agir.
C’est le rôle du Gouvernement, c’est le rôle du Parlement de leur tendre la main et de mettre en place une politique qui ne soit pas de l’assistanat, mais qui permette à chaque jeune de construire son avenir.
Pendant trop longtemps, la France n’a pas offert à sa jeunesse les perspectives d’avenir auxquelles elle pouvait prétendre. J’en veux pour preuve le nombre de jeunes chômeurs, qui est l’un des plus élevés d’Europe. Rien d’étonnant que ceux-ci ne croient pas en l’avenir ni accessoirement aux femmes et aux hommes politiques.
Nous devons tourner cette page et bâtir pour eux une politique qui leur donnera à tous une chance, et ce quels que soient leur origine, leurs talents, leurs aspirations.
Notre mission sénatoriale en faveur des jeunes a réfléchi à ce que pourrait être cette nouvelle politique de la jeunesse. Nous avons défendu l’idée d’une politique digne de ce nom, qui permettra et qui facilitera leur insertion sociale et professionnelle ainsi que leur autonomie.
Comme vous le savez, mes chers collègues, nous avons voté ici, au Sénat, en faveur d’un service civique ambitieux : 10 000 jeunes dès 2010 pour atteindre à terme 10 % d’une classe d’âge, soit 70 000 jeunes. Ce service civique sera consacré à des activités utiles pour l’intérêt général. Je souhaite qu’il devienne une étape normale, mais indispensable, dans leur parcours de vie.
Cohésion sociale et mixité sont ses deux objectifs majeurs.
L’action 1 du programme « Développement de la vie associative et promotion de l’engagement citoyen » est dotée de 51,6 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2010, contre 16 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2006, soit une hausse de 222 %.
Rappelons qu’il existe déjà aujourd’hui non seulement un dispositif relatif au service civil volontaire, qui concerne principalement des volontaires associatifs, mais aussi le volontariat civil de cohésion sociale et de solidarité, le volontariat civil à l’aide technique ou encore le volontariat de prévention, de sécurité et de défense civile.
Le montant de 40 millions d’euros pour la dotation au service civique n’a pas été établi à la légère : c’est le coût réel du dispositif.
La réforme du service civique a pour objet : de rassembler les principaux dispositifs actuels de volontariat sous un statut homogène pour le rendre plus lisible, et donc plus visible et attractif ; de rationaliser le fonctionnement administratif et technique du volontariat ; de valoriser le service civique dans les parcours des jeunes ; enfin, de le faire monter en puissance afin d’y insérer davantage de jeunes.
Les articles 4 et 8 de la proposition de loi relative au service civique tendent à prévoir le soutien financier de l’État aux organismes d’accueil de volontaires.
Il est vrai que le dispositif n’a pas encore été adopté par l’Assemblée nationale et j’espère, monsieur le haut-commissaire, que vous allez fortement insister pour qu’il soit inscrit rapidement à son ordre du jour. Je rappelle d’ailleurs que nous en avons débattu à marche forcée au Sénat pour qu’il soit applicable dans les meilleurs délais. Il faut que les 40 millions d’euros inscrits au budget servent effectivement à accueillir ces jeunes.
Par conséquent, monsieur le haut-commissaire, loin de suggérer une baisse des crédits de cette action, je vous demande d’insister pour que l’Assemblée nationale examine ce texte le plus promptement possible.
M. Charles Pasqua. Très bien !
M. Christian Demuynck. Nous avons, avec ces 40 millions d’euros, les moyens d’agir. Saisissons cette opportunité !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. Absolument !
M. Christian Demuynck. Je souhaite également évoquer un point relatif au programme « Sport ».
J’ai appris ce matin la décision du Gouvernement de déposer un amendement tendant à supprimer l’article 60 du projet de loi de finances. Au moment de l’élaboration du budget, le Gouvernement avait en effet prévu de majorer la taxe qui frappe les droits de retransmission des compétitions sportives, couramment appelée « taxe Buffet ». Il y renonce aujourd’hui pour tenir compte d’une autre mesure, issue d’une initiative parlementaire prise dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, à savoir la suppression du droit à l’image collective, lequel atténuait les charges sociales versées par les clubs employant des sportifs professionnels.
Je comprends parfaitement que le Gouvernement souhaite éviter une accumulation de mesures défavorables au sport professionnel, qui donnerait l’impression d’un acharnement et qui pourrait menacer l’équilibre économique de ce secteur d’activité. Je me réjouis donc du retrait de cette disposition.
La question qui se pose aujourd’hui est de savoir comment sera financée en 2010 l’Agence française de lutte contre le dopage, l’AFLD, à laquelle devaient être affectés les moyens tirés de la majoration de la taxe, évalués à 4 millions d’euros. Je ne sais pas quelles sont, en ce domaine, les intentions du Gouvernement, mais une solution vient spontanément à l’esprit. La suppression du DIC doit dégager d’importantes économies, d’environ 26 millions d’euros, correspondant à ce qui était jusqu’à présent remboursé aux organismes de sécurité sociale sur le programme « Sport ». Il serait bon d’affecter à l’AFLD une partie des sommes ainsi rendues disponibles. Je sais bien qu’il y a un décalage dans le temps et qu’il reste des sommes à rembourser, mais on peut étaler une partie des remboursements, ce qui permettra de financer l’AFLD sans prélever sur les crédits nécessaires au monde sportif.
Tels sont les points que je souhaitais aborder devant vous, madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues. Bien sûr, je voterai le projet de budget de cette mission, car il va dans le sens d’une prise en compte de notre jeunesse. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, chers collègues, je ne partage pas l’enthousiasme et l’optimisme de notre collègue Christian Demuynck, car l’état d’esprit des acteurs du secteur de la jeunesse et de la vie associative est plutôt à la morosité.
En effet, à périmètre constant, ce ne sont manifestement pas les crédits affectés au programme « Jeunesse et vie associative » qui creuseront le déficit des finances de l’État en 2010. Ceux-ci sont en diminution de 7,2 %, malgré l’effet d’optique que crée leur présence dans un programme gonflé de 60 % par l’introduction des crédits affectés à la mise en place du fonds d’expérimentation pour la jeunesse, d’une part, et du service civique, d’autre part.
La question qu’il convient alors de se poser est de savoir si les « bénéfices sociaux » de ces nouvelles mesures, au regard des actions menées par les associations et des publics touchés, compenseront les diminutions de moyens affectant le monde associatif de la jeunesse et de l’éducation populaire… On est d’autant plus fondé à en douter que la politique du Gouvernement, à travers les règles qu’il tend à imposer et la réforme qu’il envisage pour les collectivités territoriales, ne leur est pas favorable, sans que cela soit d'ailleurs clairement assumé dans les discours.
Il convient donc de rétablir quelques vérités concernant les chiffres en considérant la situation à périmètre constant.
Comme en 2009, l’État va une nouvelle fois économiser, en 2010, environ 10 millions d’euros sur le dos des associations de jeunesse et d’éducation populaire. À périmètre constant, les crédits consacrés au développement de la vie associative diminuent de plus de 4 %, alors qu’ils ont déjà subi une réduction de 12 % en 2009.
Le désengagement de l’État dans le domaine de la formation des bénévoles est particulièrement préoccupant. Les crédits qui y sont consacrés reculent encore de 6 %, quand le besoin est estimé à 20 millions d’euros. L’État octroie « généreusement » 23 euros par journée de stage… Par comparaison, le coût journalier est de 36 euros pour la fonction publique territoriale et de 50 à 150 euros dans le secteur privé.
Les budgets des associations ont donc tendance à baisser, après avoir connu une évolution chaotique les années précédentes. Faut-il rappeler que les actions efficaces des associations se construisent dans la durée et que l’arrêt d’un financement signifie non pas une économie mais, au contraire, le gaspillage des efforts consentis auparavant ?
Le Gouvernement doit assumer son partenariat historique avec les associations, et je pèse mes mots !
Les projets sont souvent développés dans la durée grâce à des programmations pluriannuelles. Le Gouvernement ne doit pas prétexter une pseudo-mise en conformité avec la réglementation européenne pour précariser les conventions pluriannuelles d’objectifs, voire les supprimer purement et simplement.
Du fait de la baisse des crédits pour la formation des bénévoles, les associations se retrouvent dans une impasse. L’inquiétude est particulièrement vive pour les associations proches de l’éducation nationale, notamment en milieu rural et dans les zones urbaines défavorisées.
Le Gouvernement nous explique que les associations s’y retrouveront avec le développement du service civique. Nous ne pouvons que l’espérer… Nous avons néanmoins deux motifs d’inquiétude.
L’un est lié aux réorganisations que la mise en place du service civique va nécessairement entraîner pour le secteur associatif. Celles-ci doivent s’accompagner d’un effort soutenu pour être réussies. Or nous avons vu que, pour l’heure, le compte n’y était pas.
L’autre concerne la philosophie générale des politiques en faveur de la jeunesse que le Gouvernement entend promouvoir. Dans le contexte de crise économique que nous connaissons, celles-ci se fondent sur une vision « très sociale ». Cette approche est bien sûr nécessaire, car l’augmentation considérable du nombre de chômeurs, et particulièrement de jeunes chômeurs, plonge notre pays dans une crise sociale bien réelle, cruelle pour chacun de ceux qu’elle touche et angoissante pour tous.
Pour autant, les politiques de remédiation sociale et d’insertion ne doivent pas reléguer au second plan les notions de citoyenneté, de culture, de loisirs. Que signifient ces notions pour le Gouvernement ? Leur relégation n’est pas le fruit du hasard ni même de la seule contrainte financière.
À cet égard, des pans entiers de la rhétorique officielle ne laissent d’inquiéter. Le chef de l’État multiplie des interventions qui sont autant de contresens culturels sur ce qu’a signifié l’engagement d’hommes comme Guy Môquet, Marc Bloch ou Albert Camus. Ces contresens, qui servent une propagande fondée sur la récupération, illustrent une incompréhension profonde des valeurs de l’engagement altruiste et désintéressé sur lesquelles se fonde l’esprit associatif.
Parallèlement, le temps libre est stigmatisé par des slogans simplistes martelés sur la valeur travail, tel le « travailler plus pour gagner plus ». Tout est vu sous l’angle de la marchandisation de la vie quotidienne. À cet égard, la diminution de 10 % des crédits des sous-actions « accès à des loisirs de qualité » et « protection des jeunes » est particulièrement symptomatique et préoccupante.
Outre la diminution des crédits, les difficultés auxquelles se heurtent les associations concernent la mise en concurrence générale de l’offre associative avec celle du secteur privé. La Ligue de l’enseignement considère que cette mise en concurrence la pénalise encore plus que la baisse de ses crédits. Des représentants d’associations nous faisaient remarquer voilà quelques jours que ce n’était pas simplement technique et que cela dénotait une certaine manière de considérer le monde associatif.
Monsieur le haut-commissaire, comment pouvez-vous rassurer les associations qui s’interrogent sur les intentions du Gouvernement à leur égard ?
Mme Bernadette Bourzai. La suppression progressive des mises à disposition des personnels détachés de l’éducation nationale soulève également des difficultés. Elle prive le monde de l’éducation nationale des liens avec les associations qui l’entourent.
Je voudrais conclure en évoquant les dangers que représente, pour les associations, la suppression de la clause de compétence générale des collectivités territoriales, dont a déjà parlé mon collègue Jean-Jacques Lozach. Sa disparition va rompre les liens de financement et du fonctionnement et des investissements avec de multiples associations à vocation sociale, culturelle, sportive et les collectivités.
Monsieur le haut-commissaire, je connais votre attachement aux missions locales et je le partage. Mais comment allons-nous financer les missions locales si la compétence générale n’est pas attribuée à la fois aux communes, aux communautés de communes, aux départements et aux régions ? Voilà un exemple bien concret !
Pour les associations comme pour les élus locaux dévoués à la vie de leur commune, ces mesures sont ressenties comme des marques de mépris. C’est tout le maillage de proximité indispensable aux quartiers et aux territoires ruraux qui est mis à mal ; cela, nous ne pouvons l’accepter ! C'est la raison pour laquelle nous voterons l’amendement n°II-25, présenté par notre collègue Michel Sergent, au nom de la commission des finances, visant à abonder les crédits dédiés aux postes FONJEP et aux projets éducatifs locaux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, je m’associe aux préoccupations exprimées par MM. Lozach et Sergent, relevant après eux que l’augmentation globale des crédits de la mission est essentiellement due au fonds d’expérimentation pour la jeunesse et au financement du service civique.
Pour ma part, je m’arrêterai sur un thème spécifique qui mérite toute notre attention : l’égal accès des enfants aux loisirs, aux vacances. J’évoquerai également, par voie de conséquence, l’éducation populaire.
Pour étayer mon propos, je m’appuierai sur la proposition de loi déposée en juillet 2008 par le député Régis Juanico, qui n’a toujours pas été inscrite à l’ordre du jour parlementaire. Je considère que le projet de loi de finances est une excellente occasion de donner un écho à cette proposition, dont nul ne peut contester la pertinence.
La convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989, que la France a ratifiée, prévoit, dans son article 31, que « les États parties reconnaissent à l’enfant le droit au repos et aux loisirs, le droit de se livrer aux jeux et à des activités récréatives propres à son âge et de participer librement à la vie culturelle et artistique ». Malgré cet engagement international, chaque année, en France, 3 millions d’enfants ne partent pas en vacances et, parmi eux, ils sont 2 millions, âgés de cinq à dix-neuf ans, à ne jamais s’évader de leur environnement quotidien, pas même le temps d’un week-end.
Au-delà de l’évidente injustice que dénoncent de tels chiffres, on peut aussi déplorer le manque d’ouverture que cela signifie pour les enfants en question. J’ai rappelé, lors des débats sur la mission « Culture », combien l’éducation artistique et culturelle était un gage d’ouverture d’esprit. Je ferai le même constat pour les vacances, qui représentent pour nos jeunes une nécessaire ouverture au monde et aux autres, en favorisant la compréhension mutuelle et la lutte contre le repli sur soi.
Je crois donc nécessaire que nous examinions rapidement le texte du député Juanico, car il répond à un enjeu aussi important que celui de la démocratisation de l’art et de la culture : je veux parler de l’égalité des chances et de l’émancipation des jeunes.
Aujourd’hui, des associations d’éducation populaire comme La Jeunesse au plein air accomplissent un important travail pour donner corps à cet objectif et ne reçoivent, en contrepartie de leurs efforts, ô combien méritoires, que des diminutions de budget. Ces efforts se caractérisent notamment par l’identification au cas par cas des besoins de l’enfant et son accompagnement grâce aux nombreux relais – établissements scolaires, travailleurs sociaux… – avec lesquels elles œuvrent sur tout le territoire, urbain aussi bien que rural.
Concevoir des formules spécifiques, bien adaptées à la situation de l’enfant et de sa famille, permet de mieux cibler les dépenses qu’avec les chèques-vacances, qui obéissent davantage à une logique de guichet, mais aussi de faire des vacances un outil d’aménagement du territoire.
Cent cinquante-trois enfants du Finistère ont bénéficié de ce dispositif en 2009. Et point n’est besoin de prévoir des formules dispendieuses : plus de la moitié de ces jeunes sont restés dans le département. Partir en vacances n’implique pas forcément un éloignement géographique.
Ces associations se sont engagées depuis fort longtemps dans une contractualisation avec l’État et les collectivités autour de projets territoriaux pour les enfants et la jeunesse. Elles participent ainsi à l’action publique à destination des enfants. Elles ont capitalisé des savoir-faire en matière d’organisation, de formation et surtout d’accompagnement individuel des enfants, mais aussi d’accompagnement des collectivités dans la mise en œuvre d’actions socio-éducatives à l’échelle du territoire.
Ces partenariats sont essentiels pour le mieux-vivre ensemble, et il faut prendre cela en compte. Au lieu de quoi, dans ce budget, on décharne les crédits alloués aux actions partenariales locales en faveur de l’éducation populaire, au risque de décapiter celle-ci. Ces crédits passent en effet de 5 millions d’euros à 4,5 millions d’euros, alors qu’ils s’élevaient à 6,4 millions d’euros en 2006.
Tout cela s’inscrit dans l’action « Promotion des actions en faveur de l’éducation populaire et des métiers de l’animation », dont les crédits subissent, à périmètre constant, une baisse de 8 % par rapport à 2009.
Non seulement l’indifférence croissante à l’égard de l’éducation populaire et les coupes budgétaires que subit ce secteur menacent la qualité de l’action publique en faveur des jeunes, mais elles ont des conséquences redoutables pour les finances locales, qui, déjà malmenées par les réformes, fondent comme neige au soleil.
Monsieur le haut-commissaire, votre nomination à la jeunesse avait fait naître beaucoup d’espoir, car ce secteur était auparavant un domaine soit partagé soit complètement négligé, selon la volonté des collectivités puisqu’il ne relevait de la compétence d’aucun niveau en particulier. Après la suppression de la clause de compétence générale et des financements croisés, qui va s’en occuper ? Qu’adviendra-t-il des projets éducatifs locaux, conjointement soutenus par les villes, les départements et les caisses d’allocations familiales, par exemple ?
Comment continuer à organiser des actions en faveur de la jeunesse si l’État pratique une politique de la terre brûlée ? D’une part, l’État se retire financièrement, d’autre part, il prive les collectivités locales des leviers de financement dont elles peinent à disposer localement !
Tout cela traduit, selon moi, un terrible manque de considération envers les associations d’éducation populaire et une méconnaissance du rôle fondamental qu’elles jouent dans le dialogue civil. Et ce n’est pas la diminution des crédits alloués à la formation des bénévoles qui contredira ce sentiment !
Certes, me direz-vous, monsieur le haut-commissaire, une Conférence de la vie associative va avoir lieu…
Mme Maryvonne Blondin. … le 17 décembre prochain. Mais que va-t-on y dire aux associations ? « Faites plus avec moins », alors que les besoins augmentent. Ou bien : « Comment faire mieux ensemble pour reconnaître et valoriser votre engagement, y compris d’un point de vue financier ? »
Monsieur le haut-commissaire, vous qui connaissez bien l’engagement et l’utilité des associations, ne les décevez pas, ne nous décevez pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie MM. les rapporteurs du travail extrêmement approfondi qu’ils ont effectué, ainsi que les orateurs qui viennent de s’exprimer et qui ont soulevé des points tout à fait cruciaux concernant la programmation budgétaire pour 2010 dans le domaine des sports.
Je laisserai évidemment à mon collègue Martin Hirsch le soin de présenter les orientations stratégiques des crédits de son programme et de répondre aux questions concernant plus particulièrement son action.
En premier lieu, je reviendrai sur l’appréciation générale de l’évolution des moyens dédiés aux sports, évolution qu’ont évoquée MM. les rapporteurs Michel Sergent et Pierre Martin, mais aussi M. Jean-François Voguet.
En ce qui concerne les moyens consacrés aux sports, il convient d’avoir une vision globale. Les discussions budgétaires ont en effet abouti à une augmentation significative de ces moyens pour l’année prochaine.
En 2010, l’État consacrera 666,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et 679 millions d’euros en crédits de paiement aux politiques du sport, si l’on ajoute aux crédits du programme 219, « Sport », les 228 millions d’euros affectés au Centre national pour le développement du sport et les dépenses de personnel du programme « support » 210, « Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative ».
Les moyens financiers progresseront donc de 22 millions d’euros, soit une augmentation de 3,5 % en 2010 par rapport à 2009 pour les autorisations d’engagement et de 2 % pour les crédits de paiement.
Au total, on peut porter une appréciation positive sur l’évolution des moyens publics en faveur des sports.
Au-delà de ces augmentations de moyens, comment la programmation pour 2010 traduit-elle les orientations de la politique publique en faveur du sport et des sportifs ?
Pour répondre à la préoccupation exprimée par Jean-François Voguet, je tiens à affirmer que mon action est d’abord guidée par la volonté de renforcer la pratique du sport pour tous. Cet axe prioritaire de ma politique en tant que secrétaire d’État chargée des sports vise nos concitoyens les plus modestes, les personnes handicapées et les femmes, dont le taux de pratique sportive est très inférieur à celui des hommes, mais aussi les territoires qui rencontrent des difficultés particulières, comme les zones rurales et les territoires d’outre-mer.
Les moyens consacrés au sport pour tous seront en augmentation l’année prochaine : ils représenteront en effet 229,4 millions d’euros, dont 26,1 millions d’euros, contre 25,6 millions d’euros en 2009, de subventions accordées par l’État aux fédérations sportives dans le domaine du sport pour tous. Ces crédits représentaient 222,4 millions d’euros en 2009. La progression des moyens est donc très nette puisqu’elle est supérieure à 3 %.
Cette augmentation est obtenue grâce au concours du CNDS, sur lequel je compte bien évidemment m’appuyer.
M. Voguet a aussi évoqué les conséquences financières sur le budget du sport de la concession du stade de France. Malheureusement, une concession est un contrat qui engage la parole de l’État. Toute modification unilatérale engagerait gravement la responsabilité, et donc les finances, de l’État.
MM. Pierre Martin et Michel Sergent ont souligné, à juste titre, le travail de redéfinition du rôle respectif du ministère et du CNDS, qui devient l’opérateur quasi exclusif pour le soutien aux actions territoriales en matière de sport pour tous.
Le budget pour 2010 poursuit en effet la clarification de l’utilisation des crédits du CNDS par rapport aux crédits d’État. Les compétences de l’État, traduites dans le programme « Sport », et celles du CNDS ont conduit à des financements croisés d’une trop grande complexité. Il faut revenir à des idées simples et recentrer l’action du CNDS sur ses compétences premières, notamment le développement du sport pour tous à l’échelon territorial. Parallèlement, les crédits de l’État doivent poursuivre leur recentrage sur les compétences essentielles du ministère, notamment le pilotage national du développement du sport pour tous.
Je voudrais également vous rassurer complètement, cher Michel Sergent, en ce qui concerne les moyens dont bénéficiera le CNDS en 2010.
Les ressources affectées à l’établissement s’élèvent à 227,6 millions d’euros dans le projet de loi de finances : 96 % de ces ressources devront être consacrées au sport pour tous.
Le CNDS bénéficiera l’année prochaine de recettes nouvelles, à hauteur de 30 millions d’euros, issues des paris sportifs, ce qui lui permettra d’abonder à hauteur de 16 millions d’euros un fonds de concours de l’État dédié aux actions en faveur du sport pour tous.
Si l’entrée en application du projet de loi relatif à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne prenait du retard et n’était effective qu’en milieu d’année, le CNDS bénéficierait tout de même d’un surplus de recettes de 20 millions d’euros issus des paris sportifs, soit seulement 10 millions d’euros en moins par rapport au budget prévisionnel de l’établissement. L’abondement du fonds de concours n’aura donc pas d’impact sur la programmation du CNDS, dont le fonds de roulement devrait s’établir à 56,5 millions d’euros à la fin de l’année 2010.
Mme Escoffier a évoqué le caractère aléatoire de ces recettes nouvelles assises sur les paris sportifs en ligne. Je me suis battue pour obtenir la majoration de ces recettes, dont la Haute Assemblée sera bientôt appelée à débattre, dans le projet de loi sur les jeux d’argent et de hasard en ligne. Bien sûr, le montant de ces recettes est difficile à prévoir, mais elles seront un supplément pour le sport pour tous.
Je précise, pour répondre à MM. Jean-Jacques Lozach et Pierre Martin, que nous allons bien entendu poursuivre nos efforts afin de permettre à la France de figurer parmi les nations les plus compétitives dans le sport de haut niveau, dans la perspective des jeux Olympiques de Londres et de Rio de Janeiro.
Les moyens qui seront consacrés au sport de haut niveau s’élèveront ainsi à 178,6 millions d’euros en 2010, soit une augmentation de 18 % par rapport à 2009. Cette augmentation des moyens permettra de maintenir les financements des fédérations sportives au titre de la préparation et de la participation des équipes de France aux compétitions internationales. Elle permettra également d’accompagner le déploiement des parcours d’excellence sportive, en particulier dans les établissements du ministère.
Enfin, un important programme de rénovation des écoles et des centres régionaux d’éducation populaire et de sport, les CREPS, sera mis en œuvre en 2010, à hauteur de 18 millions d’euros.
M. Lozach s’est interrogé sur la situation des CREPS. Cinq d’entre eux ont été fermés l’année dernière dans le cadre de la RGPP. Seize ont été renforcés dans leurs missions.
À mon arrivée au secrétariat, il y a moins de six mois, j’ai eu à traiter plus particulièrement le cas de trois CREPS. La situation de celui de Corse fait en ce moment l’objet d’une évaluation et d’une concertation. Quant aux CREPS de Dinard et de Voiron, j’ai décidé de ne pas les fermer, afin de préserver l’activité de ces deux régions très sportives que sont la région Rhône-Alpes et la Bretagne. Cependant, ils ne seront pas non plus maintenus en l’état, car ils ne permettent plus d’atteindre les objectifs fixés aux CREPS par la RGPP. Vous le savez, les CREPS doivent désormais se recentrer sur l’accueil des sportifs de haut niveau et sur la mise en place d’actions de formation non concurrentielles.
J’ai donc proposé aux régions concernées une solution originale et ambitieuse, comme celle qui a permis le maintien du CREPS de Bourges, où j’ai d’ailleurs passé la journée d’hier. Cette solution passe par la mise en place d’une convention État-région, à l’issue d’une période de négociation. Cette proposition a été bien reçue par les régions concernées et la négociation avec elles est actuellement en cours. (Mme Maryvonne Blondin s’étonne.)
MM. Michel Sergent et Jean-Jacques Lozach se sont émus de l’évolution du coût des travaux de rénovation de l’Institut national du sport et de l’éducation physique.
Comme vous le rappelez dans votre rapport, cher Michel Sergent, l’INSEP a vocation à être le lieu de préparation des athlètes, dans le cadre d’une politique du haut niveau rénovée et conquérante. C’est pourquoi l’INSEP doit être rénové dans son statut, mais aussi dans son organisation et dans ses murs !
Il est vrai que le coût global des travaux a connu des dépassements importants dans la zone sud, c'est-à-dire le pôle sportif : il est passé à 97,9 millions d’euros, contre 55,2 millions d’euros initialement budgétés. Cet accroissement global du coût des travaux s’explique, d’une part, par la reconstruction du centre aquatique, qui a été entièrement détruit à la fin de 2008 par un incendie, d’autre part, par le relèvement de l’ambition initiale du projet, qui prévoyait au départ une rénovation a minima des équipements sportifs conservés. Le programme aujourd’hui retenu permettra une amélioration des conditions d’entraînement de tous les sportifs présents sur le site, qui représentent tout de même 60 % de nos espoirs de médailles aux jeux Olympiques d’été.
Je vous indique par avance, cher Michel Sergent, que s’il était adopté, votre amendement visant à supprimer 1 million d’euros afin de limiter la dérive des coûts liés à cette rénovation n’aurait aucun effet sur le coût total du projet. Il en rendrait seulement le financement plus difficile. Je vous remercie d’avoir soulevé cette question, car elle m’a permis de vous fournir des explications, et j’espère que celles-ci vous convaincront de retirer cet amendement. (Sourires.)
En outre, monsieur le rapporteur spécial, vous vous interrogez sur les moyens pour les petites fédérations sportives de compenser la hausse attendue des tarifs de l’INSEP.
L’évolution tarifaire de l’INSEP était nécessaire pour plusieurs raisons : l’ancienne grille était complexe, peu lisible voire incohérente ; l’externalisation de certaines prestations permet un recentrage de l’INSEP sur son cœur de métier ; la livraison des travaux dans la partie sud a permis un saut qualitatif dans les prestations servies ; enfin, l’INSEP a besoin de recettes pour accompagner sa transformation.
Toutefois, je comprends les préoccupations des fédérations, notamment des plus petites, dont l’un des amendements que vous présentez à l’article 35 se fait l’écho. Je souhaite donc vous rassurer.
En premier lieu, les prestations de l’INSEP ne sont pas facturées à prix coûtant. Sinon, les tarifs auraient été décuplés. Les recettes tarifaires représentent moins de 10 % du coût complet du fonctionnement de l’établissement et de ses pôles. En d’autres termes, le coût de fonctionnement de l’établissement sera peut-être important – si l’on tient compte des salaires des cadres sportifs, il s’élèvera à 45 millions d’euros par an –, mais la part de la participation des fédérations sportives sera seulement de 4 millions d’euros par an, soit 8,8 % des coûts de fonctionnement. On peut donc constater que l’État maintient son effort financier.
En deuxième lieu, l’objectif de la transformation de l’INSEP en grand établissement est bien de soutenir la filière du sport de haut niveau, et non l’inverse. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les fédérations auront toute leur place dans la gouvernance de l’établissement, ce qui n’était pas le cas auparavant.
M. Pierre Martin a également soulevé la question du financement de la lutte contre le dopage.
Ma troisième priorité dans le domaine des sports est effectivement de lutter plus efficacement contre le fléau du dopage et, d’une manière plus générale, contre les violences et les discriminations dans le sport.
Les subventions aux fédérations sportives pour le suivi médical réglementaire des sportifs de haut niveau et l’encadrement sanitaire des équipes de France seront maintenues à hauteur de 7 millions d’euros. Les autres crédits consacrés à la recherche, à la prévention du dopage, à la lutte contre les trafics de produits dopants, à la promotion de la santé par le sport et à la lutte contre la violence et les incivilités dans le sport sont également reconduits, à hauteur de 5,1 millions d’euros.
Cher Pierre Martin, vous vous êtes exprimé dans un sens très favorable à l’attribution d’une ressource affectée à l’AFLD, qui est prévue par l’article 60 de ce projet de loi de finances. Le contexte a toutefois évolué depuis nos échanges en commission élargie sur la politique publique du sport, le 4 novembre dernier. Il nous faut donc désormais tenir compte de la suppression du dispositif du droit à l’image collective des sportifs professionnels, qui a été décidée par le Parlement dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.
La suppression de ce dispositif, que les trois rapporteurs ont évoquée dans leur intervention, a suscité de larges débats. En tant que secrétaire d'État chargée des sports, je n’ignore pas que certains clubs pourront être mis en difficulté par un tel changement du contexte juridique dans lequel ils évoluent. Je souhaite donc que nous trouvions des solutions pour éviter de mettre en péril l’équilibre du sport professionnel.
Le Gouvernement a déjà donné son accord pour repousser la suppression du DIC au 30 juin 2010, afin d’éviter qu’elle ne s’applique avant le terme de la saison sportive en cours.
D’autres démarches ont également été entreprises pour le sport professionnel. Je pense notamment à la rénovation de nos enceintes sportives, auxquelles nous allons consacrer plus de 150 millions d’euros, dans le cadre de l’organisation de l’Euro de football 2016 et, d’une manière générale, de toutes les compétitions que nous pourrons accueillir.
Nous travaillons également sur des solutions de renforcement de la compétitivité du sport professionnel, conformément à la demande du Président de la République, après la suppression du DIC.
Mais nous devons aller plus loin encore. C’est pourquoi le Gouvernement a déposé un amendement dont l’objet est de supprimer la hausse de la taxe dite « Buffet » prévue par l’article 60.
Le financement de l’AFLD sera intégralement assuré par le budget du ministère, selon des modalités qui seront affinées tout prochainement. Parmi les solutions qui méritent d’être étudiées, peut être évoqué un redéploiement au sein du programme « Sports », à partir de la ligne budgétaire correspondant à la compensation en 2010 du coût du DIC. D’ailleurs, ce souhait rencontre le vœu émis par M. Christian Demuynck.
En outre, et pour répondre à la question de Michel Sergent, les arbitrages rendus par le Premier ministre vont dans le sens d’un apurement des dettes de l’État vis-à-vis de la sécurité sociale. Nous connaîtrons le coût réel du DIC dans la prévision qui sera réalisée en début d’année prochaine. Comme vous le faites remarquer, monsieur le rapporteur spécial, des ouvertures exceptionnelles sont prévues en collectif de fin d’année.
Il s’agira d’apurer la dette antérieure au titre du droit à l’image collective des sportifs pour un montant d’un peu plus de 20 millions d’euros d’ouverture de crédits. Bien entendu, ces moyens seront fléchés avec précision. ((Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. le président de la commission des finances et Mme Anne-Marie Escoffier applaudissent également.)