M. Michel Mercier, ministre. Voyez, monsieur Braye, au bout de quinze ans, on obtient ce que l’on souhaitait ! J’espère donc que vous voterez sans difficulté les dispositions proposées par le Gouvernement.
Nous devons en avoir conscience, l’élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct constitue plus qu’une innovation : c’est un changement profond de l’intercommunalité. Elle fait entrer l’élection des conseillers communautaires dans un cadre juridique nouveau, sur lequel je souhaite dès à présent m’exprimer.
Selon l’article 34 de la Constitution, « la loi fixe les règles concernant […] le régime électoral […] des assemblées locales ».
Le régime électoral des conseils municipaux relève, en application de cet article, de la compétence exclusive du législateur. Il en ira de même du régime électoral des conseillers communautaires, qui seront élus en même temps que les conseillers municipaux. La composition des conseils communautaires fait donc partie intégrante de ce régime électoral, puisqu’elle déterminera, pour chaque commune, le nombre de conseillers municipaux qui seront élus simultanément conseillers communautaires.
Désormais, il revient donc à la loi de fixer les règles de calcul de la composition des conseils communautaires. Une loi qui donnerait la primauté à l’accord local et n’appliquerait le cadre légal qu’à défaut de cet accord local ne serait donc pas conforme à l’article 34 de la Constitution et fragiliserait, de ce fait, l’ensemble de la réforme.
L’article 3 de la Constitution, que M. Hyest a rappelé de très nombreuses fois dans cet hémicycle, dispose que le suffrage, qu’il soit direct ou indirect, est toujours « universel, égal et secret ».
Le Conseil constitutionnel a d’ores et déjà clairement indiqué que le principe d’égalité du suffrage s’applique à la composition des conseils communautaires, qui doit respecter un principe général de proportionnalité par rapport à la population de chaque commune.
Pour être très clair, j’invoquerai, monsieur le rapporteur – je sais que vous avez fait la même chose dans plus de quarante réunions qui se sont tenues sur le territoire de la République –, les dispositions de la décision n° 94-358 du 26 janvier 1995 du Conseil constitutionnel.
J’attire votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur un point essentiel, dont je vous donne lecture : « Considérant qu’il résulte de ces dispositions que dès lors que des établissements publics de coopération entre les collectivités locales exercent en lieu et place de ces dernières des compétences qui leur auraient été sinon dévolues, leurs organes délibérants doivent être élus sur des bases essentiellement démographiques ; que s’il s’ensuit que la répartition des sièges doit respecter un principe général de proportionnalité par rapport à la population de chaque collectivité locale participante, il peut toutefois être tenu compte dans une mesure limitée d’autres considérations d’intérêt général et notamment de la possibilité qui serait laissée à chacune de ces collectivités de disposer d’au moins un représentant au sein du conseil concerné. »
Cette décision a été rendue alors que les délégués communautaires n’étaient pas élus au suffrage universel direct. Les exigences qu’elle rappelle s’imposent avec encore plus de force dans le cadre du suffrage universel direct.
Enfin, pour finir de délimiter le cadre juridique dans lequel se situent les propositions du Gouvernement, je rappelle que, en vertu de l’article 72 de la Constitution, « aucune collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre », dont découle la règle générale selon laquelle aucune des communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale ne peut disposer de plus de la moitié des sièges au sein de l’organe délibérant de l’EPCI.
La récente réforme de la fiscalité locale, votée par le Parlement, aura une conséquence pratique immédiate : désormais, toutes les communautés de communes, les communautés d’agglomération et les communautés urbaines auront une fiscalité mixte, …
M. Pierre-Yves Collombat. Belle réussite !
M. Michel Mercier, ministre. … ce qui justifie pleinement l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires.
M. Gérard Collomb. C’est la meilleure !
M. Michel Mercier, ministre. C’est dans ce cadre que le Gouvernement définira sa position sur les divers amendements déposés à l’article 3.
Je souhaitais simplement, pour que la situation soit la plus claire possible, rappeler le cadre juridique constitutionnel dans lequel le Gouvernement se situe,…
M. Nicolas About. Autrement dit : défavorable, défavorable, défavorable…
M. Michel Mercier, ministre. … toute autre possibilité étant bien sûr susceptible d’entraîner la censure du Conseil constitutionnel.
M. le président. Pour la clarté des débats, je vous rappelle, monsieur le ministre, mes chers collègues, que l’article 2 n’a pas été adopté à l’unanimité, puisque le groupe CRC-SPG a voté contre.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 140 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 572 est présenté par M. Retailleau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l’amendement n° 140.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je vous remercie, monsieur le président, d’avoir rappelé que l’article 2 n’avait pas été voté à l’unanimité.
Nous sommes favorables à l’établissement d’un lien étroit entre les communes et l’intercommunalité. Or ce texte ne dissipe pas le flou qui existe dans ce domaine et qui résulte de deux conceptions opposées. Certains, dont nous sommes, sont partisans d’une coopération intercommunale, alors que d’autres appellent de leurs vœux une intercommunalité forcée destinée à remplacer, au bout de peu de temps, les communes autonomes.
Malheureusement, le texte reflète une telle antinomie. En ce qui nous concerne, nous ne pouvons accepter d’en rester à ce flou artistique, qui, en l’absence de décisions plus précises, demeure inacceptable.
J’en viens aux raisons précises pour lesquelles nous avons déposé l’amendement n° 140. Vous avez, monsieur le ministre, en citant la Constitution, rappelé le fait que le mode d’élection des conseillers communautaires rendait obligatoire l’introduction de nouvelles règles, le volontariat n’étant plus une solution adaptée. Toutefois, je l’ai dit précédemment, d’une part, aucun mode d’élection précis n’a été fixé, d’autre part, l’article 3 va plus loin, puisqu’il vise non seulement à encadrer la répartition des sièges, mais aussi à réduire le nombre de conseillers communautaires. L’étude d’impact évoque une réduction de 22 % des effectifs.
Vos arguments sont connus. Nous les jugeons inacceptables, car démagogiques : il y aurait trop d’élus, et il serait donc nécessaire de limiter leur nombre. Par ailleurs, on le sait très bien, il ne s’agit pas d’un problème de coût, puisque les dépenses engendrées par ces élus représentent 0,4 % des budgets locaux.
Nous souhaiterions donc que l’on nous explique les raisons d’une telle décision ! Quant à sa conséquence, nous la connaissons ! En effet, en réduisant le nombre d’élus, on réduit mécaniquement leur diversité et, donc, le contrôle démocratique.
Monsieur le ministre, le projet de loi, que vous le vouliez ou non, nuit au pluralisme, à la démocratie et à la proximité des élus et des citoyens, autant de principes que nous défendons.
Je ferai une digression, pour dire à quel point il est stupéfiant d’entendre les parlementaires dénigrer sans arrêt la politique ! Nous sommes suffisamment critiqués par nos concitoyens, que nous représentons pourtant, pour que vous n’en rajoutiez pas vous-même ! Dans votre bouche, tout ce qui est politique serait mauvais.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous n’acceptons pas que l’on porte atteinte au pluralisme en réduisant le nombre d’élus. Ne serait-ce que pour cette raison, nous sommes défavorables à l’article 3, ce qui ne nous empêchera pas de défendre des amendements de repli visant à éviter le pire.
M. le président. L’amendement n° 572 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 140 ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’article 3, afin de maintenir les règles actuelles pour la détermination du nombre de délégués communautaires et la répartition des sièges au sein des conseils communautaires.
Or il paraît nécessaire, dans la perspective du renforcement de l’intercommunalité et de l’élection des délégués communautaires au suffrage universel dans le cadre des élections municipales, de garantir le respect du caractère essentiellement démographique de la représentation des communes, comme le prévoient d’ailleurs deux amendements que je défendrai sur cet article et qui s’inspireront bien évidemment de la décision du Conseil constitutionnel.
La commission des lois a donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 140.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. Comme je viens de le rappeler, l’un des aspects majeurs de ce texte est de prévoir l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires.
L’amendement n° 140 de suppression de l’article 3 allant à l’encontre de l’intention du Gouvernement, je ne peux qu’y être défavorable.
M. le président. La parole est à M. Gérard Collomb, pour explication de vote.
M. Gérard Collomb. M. le ministre a rappelé ce que nous venons de voter à l’article 2, je l’espère de manière consciente, pour chacun d’entre nous, à savoir que désormais le mode d’élection des délégués dans le cadre de l’intercommunalité est le suffrage universel direct.
Il a également souligné la nécessité pour nous, législateurs, de nous conformer à la décision rendue par le Conseil constitutionnel dans son arrêt de 1995, qui dispose que « les organes délibérants [des EPCI à fiscalité propre] doivent être élus sur des bases essentiellement démographiques ».
M. Gérard Collomb. Ensuite, la possibilité nous est laissée d’apporter des corrections à la marge pour permettre une représentation de tous les territoires.
À cet égard, aux yeux de certains, l’amendement que je défendrai tout à l'heure, identique à celui de M. Hérisson, tend à surreprésenter les villes-centres et à écraser les petites communes. Afin de déterminer si l’objection est fondée et pour que le Sénat puisse délibérer en toute connaissance de cause, nous avons réalisé un tableau retraçant la situation qui résulterait du système que nous proposons pour cent cinquante villes, de tailles différentes, classées par ordre alphabétique. En voici quelques exemples : pour Aix-en-Provence,…
M. le président. Mon cher collègue, permettez-moi de vous rappeler que nous en sommes au stade des explications de vote sur l’amendement n° 140 visant à supprimer l’article 3.
M. Gérard Collomb. Monsieur le président, j’explique pourquoi je suis contre cet amendement et pourquoi nous ne pouvons pas le voter. Mais comme je ne disposerai que de quelques minutes tout à l’heure pour donner lecture de ce tableau, je me permets d’utiliser plusieurs temps de parole, comme l’autorise le règlement du Sénat (Sourires.),…
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Curieuse interprétation du règlement !
M. Gérard Collomb. … ce qui me permettra de démontrer la cohérence de notre raisonnement.
M. le président. Dans ces conditions, veuillez poursuivre, mon cher collègue !
M. Gérard Collomb. Je reprends la lecture du tableau : la ville d’Aix-en-Provence, dont la population représente 40,19 % de celle de la communauté du Pays d’Aix, se verra attribuer, selon notre système, 38,78 % des sièges. Elle n’écrase donc pas le reste du territoire ! Angers, dont la population abrite 57,40 % de la communauté d’Angers, recueillera 49,45 % des sièges. La ville de Bar-le-Duc, avec 60,41 % de la population de la communauté de Bar-le-Duc, élira 50 % des représentants, compte tenu de la règle du seuil. Là encore, on ne peut pas dire qu’elle va écraser les autres communes ! De même, Bayonne, avec 40,84 % de la population de la communauté de Bayonne, recevra 40,82 % des sièges, toujours selon le système que nous proposons. Et je pourrai poursuivre la lecture des cent pages que compte ce tableau.
En tout état de cause, la démonstration est faite que ceux qui s’opposent à notre système qui vise à instaurer une représentation un tant soit peu équitable de la ville-centre, veulent précisément, comme l’a excellemment décrit Mme Goulet, que la ville-centre se trouve totalement piégée en continuant par ses impôts à alimenter la communauté de communes, la communauté d’agglomération ou la communauté urbaine, alors que les décisions seraient prises par les représentants des autres communes. (Mme Nathalie Goulet acquiesce.)
Il faut tout de même veiller à garantir la justice et l’équilibre au sein du système que nous allons instaurer.
Voilà pourquoi je suis évidemment contre l’amendement n° 140.
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. L’heure est grave !
La quasi-totalité des membres de mon groupe ont dit leur attachement à l’accord local et ont souhaité que les décisions soient prises dans ce cadre.
M. Gérard César. Très juste !
M. Dominique Braye. J’ai interrogé le président de la commission des lois et son rapporteur au sujet de la constitutionnalité de l’accord local. Ils avaient oublié que, à une époque, ils l’avaient supprimé, peut-être parce qu’ils l’estimaient inconstitutionnel. Toujours est-il qu’ils ne m’ont pas répondu. Je suis étonné que d’aussi éminents juristes que le président et le rapporteur de la commission des lois n’aient pas pu nous éclairer sur ce point.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. On ne va pas faire un débat constitutionnel !
M. Dominique Braye. Si je comprends bien, vous nous dites, monsieur le ministre, que l’accord local fondé sur les trois critères – répartition tenant compte de la population, attribution d’au moins un siège à chaque commune, interdiction pour toute commune de disposer de plus de la moitié des sièges – est inconstitutionnel.
M. Dominique Braye. Si l’accord local selon les trois critères que je viens de rappeler est constitutionnel, cela signifie que les élus dans l’intercommunalité pourront ensemble répartir les sièges comme ils le souhaitent, en tenant compte de ces trois critères. (M. le ministre fait un signe de dénégation.)
C’est donc ce que je pensais initialement : cela n’est pas constitutionnel ! Dans ce cas, nous sommes confrontés à un véritable problème, qui remet en cause la totalité du tableau.
Nous sommes d’accord sur la nécessité de prendre en compte à la fois le critère territorial et celui de la population. L’important est de savoir où l’on met le curseur entre ces deux critères.
S’agissant du critère de la population, les systèmes qui nous sont proposés conviennent très bien à la communauté urbaine de Lyon, mais cette dernière n’est peut-être pas l’alpha et l’oméga de l’intercommunalité française, d’autant que c’est la technostructure qui commande là-bas, comme l’a dit mon ami Michel Charasse. Or, dans nos petites intercommunalités, c’est plutôt nous qui tirons les rênes.
Ensuite, en ce qui concerne le critère territorial, je présenterai un certain nombre d’amendements.
M. le président. Monsieur Braye, je vous rappelle que nous en sommes aux explications de vote sur l’amendement de suppression ! Nous risquons de revenir sur tous les points que vous évoquez au moment où nous examinerons vos propositions.
M. Dominique Braye. Monsieur le président, je suis encore indécis par rapport à l’amendement n° 140 et je réfléchis à voix haute pour savoir si je vais le voter ou non ! En quelque sorte, j’essaye de me convaincre ! (Sourires.) Le sujet est tout de même important !
Je le répète, le problème est de savoir où l’on va mettre le curseur. Nous devons voter l’accord local et nous verrons bien, ensuite, comment le Conseil constitutionnel se prononcera.
Compte tenu du fait que le tableau est extrêmement défavorable aux petites communes,…
M. Gérard Collomb. Ce n’est pas vrai !
M. Dominique Braye. … soit nous supprimons le tableau, soit nous déplaçons le curseur, en portant la représentation des territoires de 10 %, tel qu’il est proposé, à 30 %. Comment des sénateurs pourraient-ils s’y opposer ? La population compterait naturellement pour 70 %.
M. Gérard Collomb. Et allez donc !
M. Dominique Braye. Telles sont les propositions que je ferai.
Mes chers collègues, nous sommes en train de prendre des décisions qui vont complètement transformer la gouvernance territoriale, et, plus on avance, plus je m’aperçois que nous votons actuellement la première étape de la disparition programmée des communes ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il s’en aperçoit maintenant !
M. le président. Mes chers collègues, bien que les explications de vote soient toujours fort intéressantes, il n’est pas indispensable qu’elles portent sur un autre amendement que celui qui est en discussion… Je rappelle que nous en sommes pour le moment aux explications de vote sur l’amendement de suppression n° 140.
La parole est à M. le ministre.
M. Michel Mercier, ministre. Monsieur le président, après ces paroles que j’approuve, j’ai quelques scrupules à répondre à M. Braye, mais la clarté du débat l’exige.
M. Dominique Braye. Nous aurions apprécié d’avoir ces précisions plus tôt !
M. Michel Mercier, ministre. Tout au long de la discussion, je me suis volontairement limité à rappeler l’encadrement constitutionnel dans lequel nous nous situons.
Je rappelle que l’un des apports de la Constitution de 1958 est d’avoir encadré la loi et d’avoir établi une hiérarchie des normes juridiques au sommet de laquelle se trouve la Constitution. Cette dernière s’impose à tous, au Parlement, au Gouvernement, à chacun d’entre nous.
En l’occurrence, le Conseil constitutionnel rappelle que, aux termes de la Constitution, les assemblées locales doivent être constituées sur des bases essentiellement démographiques et selon un principe général de proportionnalité.
Néanmoins, dans son arrêt du 26 janvier 1995, le Conseil constitutionnel indique qu’il peut être tenu compte, dans une mesure limitée, d’autres considérations d’intérêt général et notamment de la possibilité qui serait laissée à chacune de ces collectivités de disposer d’au moins un représentant au sein du conseil concerné. Cela signifie, pour être clair et pour répondre à votre question, monsieur Braye, que, constitutionnellement, le tableau peut prévoir un représentant par collectivité.
Par ailleurs, l’article 72 de la Constitution, qui dispose qu’aucune collectivité locale ne peut exercer une tutelle sur une autre, justifie, à nos yeux, qu’aucune commune dans un ensemble intercommunal ne dispose de plus de la moitié des sièges de façon qu’elle ne puisse pas imposer à toutes les autres sa vision.
Entre ces deux limites, c'est-à-dire qu’aucune commune ne puisse disposer de plus de la moitié des sièges et que chaque commune se voie attribuer au moins un siège, la décision du Conseil constitutionnel du 26 janvier 1995 a posé la règle suivante : les sièges sont répartis suivant le principe général de proportionnalité entre les communes, en tenant compte toutefois des deux limites précitées.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Nous sommes opposés à l’article 3 dans sa rédaction actuelle. Nous attendons donc la suite des débats pour déterminer notre vote.
Monsieur le ministre, je veux vous remercier de votre intervention. Est-ce un accès de franchise, ou l’inconscient qui transparaît ? Ce que vous avez dit est très clair ! L’intercommunalité, pour vous, c’est l’antichambre de la disparition des communes !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Évidemment !
M. Michel Charasse. Ce n’est pas de sa faute : l’intercommunalité a été inventée par les socialistes !
M. Pierre-Yves Collombat. Vous nous avez dit que l’élection des délégués au suffrage universel direct changeait tout, et vous avez cité les articles de la Constitution faisant référence aux collectivités territoriales. Mais, pour nous, l’intercommunalité n’est pas une collectivité territoriale !
La question qui se pose est de savoir si les collectivités territoriales ont le droit de contractualiser. Vous nous dites qu’elles n’en ont pas le droit, au simple motif que, si elles le font, il faut qu’elles respectent certaines règles. Or c’est conforme à la Constitution.
Par conséquent, contrairement à ce qui a été dit, l’élection des délégués au suffrage universel direct ne changera pas les choses, car le nombre de délégués sera fixé par des règles et des statuts, dans la limite des contraintes constitutionnelles. Ne mélangeons donc pas tout !
Notre position est de donner la primauté à l’accord local, dans le respect de la Constitution, et, si cet accord ne prévaut pas, de laisser la loi trancher en prenant en considération la dignité et l’importance de chacune des collectivités.
Je n’aurais certainement jamais soutenu l’élection des délégués communautaires au suffrage universel direct si j’avais pensé qu’elle impliquait la conception de l’intercommunalité que vous avez décrite !
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.
M. Rémy Pointereau. On ne pourra pas régler le problème à partir d’un tableau additionnant les communautés de communes uniquement rurales, les communautés de communes possédant un centre urbain, les communautés d’agglomération et la communauté urbaine de Lyon, la COURLY. À cet égard, je défendrai tout à l'heure un amendement tendant à une suppression partielle de l’article.
Je souhaite d’ailleurs que l’on puisse revoir ce problème, peut-être à l’occasion de la deuxième lecture, car il me paraît impossible d’inscrire dans un tableau fixant des nombres de délégués la diversité des territoires et des EPCI. C’est complètement ridicule !
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Mes chers collègues, il convient de garder une certaine sérénité, car, sans aller jusqu’à dire qu’il n’y a rien de changé sous le soleil, je rappelle que la jurisprudence du Conseil constitutionnel remonte à 1995,...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oui !
M. Charles Guené. … ce qui n’a pas empêché les accords locaux d’être maintenus.
M. Gérard César. Absolument !
M. Charles Guené. Le texte de l'article 3 s’aligne en quelque sorte sur cette jurisprudence. En 1995, le Conseil constitutionnel a précisé que ces accords devaient tenir compte non seulement de la population des communes, mais aussi des cas extrêmes. Il a ainsi posé deux principes : chaque commune doit être représentée et la plus peuplée ne peut disposer de plus de la moitié des sièges.
Certes, une nouvelle organisation qui serait soumise au contrôle de légalité encourrait éventuellement la censure du Conseil constitutionnel.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Éventuellement !
M. Charles Guené. Néanmoins, les dispositions que nous avons votées jusqu’à présent n’ont, à ma connaissance, rien changé.
Si nous votons l'article 3 en l’état, seul le tableau y figurant serait susceptible de s’attirer les foudres du juge constitutionnel au regard de la jurisprudence de 1995. Je ne porte pas de jugement sur son contenu, je m’interroge simplement sur la méthode employée, qui pourrait, à partir du moment où elle met en œuvre un processus de répartition, encourir une sanction ou même, tout simplement, un commentaire de la part du Conseil constitutionnel.
Mais, en aucun cas, j’y insiste, les accords existants ne pourraient être sanctionnés en vertu de ce texte.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de trente et un amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 72 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Bailly, Revet, Pillet, Pinton, Mayet, Trillard et Houel et Mme Rozier, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 23
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Nous proposons, par cet amendement, une suppression partielle de l’article 3.
Autant il est utile de réglementer le nombre de vice-présidents dans les EPCI pour éviter les débordements qui ont pu se produire ici ou là, autant il n’est pas souhaitable, comme je le disais tout à l’heure, de fixer, à la place de l’intercommunalité concernée – communauté composée de communes uniquement rurales ou comprenant un centre urbain, communauté d’agglomération ou communauté urbaine –, le nombre de délégués titulaires et suppléants, ainsi que la répartition des sièges.
Dans ce domaine également, chaque intercommunalité doit pouvoir s’administrer librement et préciser, dans un tableau, un nombre minimum et maximum de délégués par commune, après avoir reçu l’accord des deux tiers des conseils municipaux représentant au moins la moitié de la population.
Le système proposé à l'article 3 présente un double inconvénient.
D'une part, il réduit trop fortement le nombre de délégués et s’avère très complexe à mettre en œuvre au regard des différents types d’EPCI. De nombreuses communautés de communes rurales comptent deux délégués titulaires et un délégué suppléant par commune. Cela permet d’assurer une représentativité suffisante de chacune d’entre elles : tel a été justement l’objectif recherché dans les accords locaux, le ciment de l’intercommunalité.
D'autre part, en supprimant une telle possibilité, il risque d’engendrer des difficultés entre petites et grandes communes, qui, jusque-là, avaient trouvé un consensus.
Il est donc regrettable de figer les règles de représentation dans un tableau. Mieux vaut d’abord savoir si, oui ou non, l’accord local est constitutionnel. Vous répondez aujourd'hui par l’affirmative, mais il serait bon d’en avoir l’assurance. D’ici à la deuxième lecture, il conviendrait donc de disposer d’un tableau mieux adapté aux différents types d’EPCI.
M. Gérard César. Absolument !