Mme Catherine Morin-Desailly. Néanmoins, je souhaite ici me faire le relais des parents adoptants, qui vivent dans l’angoisse, dans l’attente de pouvoir accueillir au plus vite leurs enfants. Évidemment, et malgré l’urgence de la situation, il est indispensable de respecter scrupuleusement l’ensemble des règles juridiques et des procédures en vigueur. En l’occurrence, il s’agit de familles identifiées, dont les dossiers d’adoption sont avancés, qui souhaitent simplement que la procédure puisse aboutir le plus rapidement possible.
Aujourd’hui, neuf cent quatorze dossiers ont fait l’objet d’un jugement et trois cent vingt-trois enfants haïtiens ont déjà rejoint leur famille française d’adoption.
L’actualité nous a démontré que nous devons être particulièrement attentifs et rigoureux dans les procédures administratives. La plus grande vigilance s’impose notamment quant au risque d’adoptions illégales et autres trafics d’enfants, lesquels seraient alors brutalement déracinés.
À cet égard, l’UNICEF a salué la position française. Il est indispensable de continuer de collaborer au mieux avec les autorités haïtiennes pour éviter l’écueil inadmissible de voir le malheur d’Haïti être transformé en aubaine pour des candidats à l’adoption « prêts à tout ».
Vous avez évoqué, mardi dernier, l’instauration d’une commission mixte franco-haïtienne spécialement consacrée à la question de l’adoption pour prendre en compte les autres procédures. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner des précisions à ce sujet, notamment sur la composition de cette commission et sur le délai de sa mise en place ?
Quelles réponses les élus que nous sommes peuvent-ils apporter à des parents qui s’inquiètent de la lenteur des procédures ?
Monsieur le ministre, dans cette configuration particulièrement urgente et douloureuse, outre la commission mixte franco-haïtienne, quelles autres dispositions seraient envisageables ? (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Je vous remercie du ton de votre question, madame le sénateur. Comme vous l’avez souligné, nous devons suivre les procédures internationales en dépit des difficultés que nous rencontrons du fait du désarroi de l’administration haïtienne, dont une partie est inexistante, en raison de la mort de certains de ses membres.
Notre pays a proposé aux autorités haïtiennes la création d’un comité de suivi. L’ambassadeur en charge de l’adoption internationale s’est rendu sur place voilà plusieurs jours pour tenter de faire accepter la mise en place de cette instance. Mais cela ne dépend pas de nous. Les ONG spécialisées, les membres des organisations et du dispositif national sont prêts à participer à cette commission. Nous attendons la réponse des autorités haïtiennes.
Je vous remercie d’avoir rappelé que trois cent vingt-trois enfants, sur les neuf cent quatre ou neuf cent cinq qui sont concernés, sont déjà arrivés sur notre territoire. Mais encore faut-il savoir qui sont ces enfants.
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Bernard Kouchner, ministre. Après les faits que vous avez rappelés, notamment les rapts d’enfants, il faut être très vigilants. Si certains responsables de ces rapts ont été arrêtés, c’est par chance (M. le Premier ministre opine), car, la plupart du temps, les bateaux accostent sur les rives de l’île et enlèvent des enfants sans qu’il soit possible, compte tenu de la situation, d’exercer le moindre contrôle.
Nous avons élaboré un dispositif très précis de signalement. Chaque fois que, par chance, pour lui et pour nous, un enfant est découvert, il faut signaler son identité sur le fichier central de l’UNICEF. Mais parfois nous ne la connaissons même pas.
Nous travaillons jour et nuit pour que d’autres enfants soient accueillis. Cependant, il nous faut prendre des précautions. Un enfant n’est pas une marchandise. Un enfant, même petit, a une histoire, des souvenirs. On pense souvent qu’il est orphelin alors que ce n’est pas le cas.
Il existe un centre de crise. Si un enfant est repéré, signalé, ou s’il se manifeste, les gendarmes se saisissent du dossier. Néanmoins, certains enfants errent encore dans les rues. Nous sommes toujours dans la période d’urgence. Nous faisons ce que nous pouvons, avec les agences des Nations unies car, ne l’oublions pas, cette organisation chapeaute toutes les opérations. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
fonctionnement et indépendance de la justice
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Ma question s'adresse à Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
L’actualité nous montre que la dépendance du parquet à l’égard du pouvoir exécutif pose de vrais problèmes pour l’indépendance de la justice et pour la sérénité dans laquelle celle-ci est rendue.
Vous le savez, madame le garde des sceaux, la Cour européenne des droits de l’homme a adopté, le 10 juillet 2008, un arrêt déclarant que les procureurs et les parquets de notre pays n’étaient pas des autorités judiciaires au sens de la jurisprudence de cette cour.
Dès lors, je souhaite vous poser trois questions.
Premièrement, quelles conclusions entendez-vous tirer de cette décision de la Cour européenne des droits de l’homme ? Envisagez-vous de maintenir le projet de loi qui, en supprimant les juges d’instruction, renforcerait les prérogatives de parquets qui sont placés sous l’étroite dépendance du pouvoir exécutif ?
Deuxièmement, s’il apparaît légitime que vous donniez des instructions à caractère général sur la politique pénale, pouvez-vous vous engager à ne donner aucune instruction particulière lorsque certains sujets particuliers sont soumis à la justice ?
Enfin, troisièmement, en ce qui concerne le statut des magistrats du parquet, souscrivez-vous à l’idée que la nomination et la promotion de ces magistrats ne devraient plus relever du pouvoir exécutif, c’est-à-dire du Gouvernement, mais exclusivement du Conseil supérieur de la magistrature ? Seriez-vous prête à proposer une réforme en ce sens, de telle sorte que le pouvoir exécutif n’exerce aucune influence, directe ou indirecte, sur le déroulement de la carrière des magistrats du parquet ?
Nous vous remercions, madame le garde des sceaux, des réponses que vous apporterez sur ces sujets importants pour l’indépendance de notre justice. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mme Jacqueline Gourault applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre d'État. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur Sueur, il faudrait sans doute plus de deux minutes trente pour répondre à l’ensemble de vos questions. Je me contenterai donc de vous donner quelques indications.
En ce qui concerne l’indépendance du parquet, je vous rappelle que l’arrêt Medvedyev, rendu par la Cour européenne des droits de l’homme le 10 juillet 2008, ne traite que d’un cas particulier. En conséquence, il ne délivre aucune appréciation globale sur le parquet, ne fixe aucune règle générale, et il est inutile de vouloir lui faire dire plus que ce qu’il ne dit.
M. Dominique Braye. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. S’agissant du projet de loi de réforme du code pénal, il est totalement faux de prétendre qu’il a pour but de supprimer le juge d’instruction. Son remplacement par un juge de l’enquête et des libertés est une conséquence d’une réforme beaucoup plus globale, et indispensable, de la procédure pénale, qui vise notamment à renforcer aussi bien les droits de la défense que les droits des victimes.
M. Simon Sutour. Il n’est pas supprimé, mais remplacé… La nuance est subtile !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Aujourd’hui, le juge d’instruction, pour les 3 % d’enquêtes qui lui reviennent,…
M. Jean-Pierre Sueur. Mais elles sont importantes !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. … est, comme le procureur, à la fois juge et partie, ce qui veut dire qu’il porte lui-même un jugement sur les actes qu’il délivre. Croyez-vous que ce soit équitable ? Nous ne le pensons pas !
Il est donc effectivement prévu que le parquet mène toutes les enquêtes, au lieu de 97 % actuellement, et que tous ses actes soient placés sous le contrôle d’un juge de l’enquête et des libertés, un magistrat du siège qui aura le même statut que le juge d’instruction, avec des compétences élargies.
En ce qui concerne les instructions particulières, la Constitution et la loi me donnent le droit d’en prendre. Je ne vous ai pas entendu contester les instructions que j’ai données dans l’affaire Fofana, pour que le parquet fasse appel. C’est aussi mon rôle, au nom de la société et du peuple Français !
M. Roland du Luart. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. De même, lorsque j’ai demandé que tous les dossiers de la catastrophe des Comores soient regroupés au même endroit, car les familles de victimes sont dispersées sur tout le territoire, il s’agit bien d’une instruction particulière, mais je suis dans mon rôle de ministre de la justice ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. René-Pierre Signé. D’autres instructions sont moins avouables !
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre d’État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Enfin, sur les nominations, si nous avons absolument besoin, dans le système actuel, de réformer la procédure pénale, nous ne sommes pas pour autant obligés de réformer le statut du parquet. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, ma question concerne les déficits budgétaires.
Le 28 janvier dernier s’est tenue, au palais de l’Élysée, la première session de la conférence sur les déficits.
M. Jean-Louis Carrère. Il ne fallait pas voter le budget !
M. Jean-Pierre Fourcade. La question d’un retour à l’équilibre de nos finances publiques est désormais au centre des préoccupations du Président de la République et du Gouvernement (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG),…
M. Jean-Louis Carrère. Tu parles !
M. Jean-Pierre Fourcade. … et nous nous en félicitons. C’est un enjeu essentiel tant pour alléger le fardeau de la dette que pour préserver la capacité de notre pays à emprunter à des taux les plus bas possibles et assurer la stabilité de l’euro.
M. Jean-Louis Carrère. C’est surtout une grande comédie !
M. Jean-Pierre Fourcade. J’ai deux questions à poser.
M. Jean-Pierre Fourcade. La première concerne les niches fiscales et sociales. J’ai noté votre volonté de mieux évaluer leur efficacité.
M. Jacques Mahéas. Elles sont efficaces pour les riches !
M. Jean-Pierre Fourcade. À cet égard, je souhaiterais que l’on s’intéresse aussi aux remboursements et aux dégrèvements de l’État, qui atteignent près de 100 milliards d’euros et se caractérisent par une très grande opacité.
Je voudrais savoir si vous êtes plutôt favorable à un écrêtement général de ces niches ou à une réduction sélective, en fonction de leur efficacité.
Ma seconde question porte sur les dépenses des collectivités territoriales. (M. David Assouline s’exclame.)
Bien sûr, nous regrettons que les représentants des départements et des régions n’aient pas répondu présents à ce rendez-vous, car la question de la réduction du déficit public est une question d’intérêt national qui doit dépasser les clivages politiques.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam et M. Dominique Braye. Très bien !
M. Didier Boulaud. Vous n’avez qu’à rétablir la taxe professionnelle, monsieur Fourcade, vous qui en êtes un spécialiste !
M. Jean-Pierre Fourcade. Nous partageons l’idée que l’État, la sécurité sociale et les collectivités territoriales doivent prendre leur part dans cet effort collectif, mais à la condition que l’on tienne compte de leurs spécificités,…
M. Jean-Louis Carrère. Eh oui !
M. Jean-Pierre Fourcade. … au premier rang desquelles figure l’obligation pour les collectivités territoriales de voter leur budget en équilibre.
M. Jean-Louis Carrère. Exact !
M. René-Pierre Signé. Ce n’est pas le cas de l’État !
M. Jean-Pierre Fourcade. Il s’agit pour nous d’un point essentiel. En effet, nous ne pouvons accepter aucun jugement sur les dépenses des collectivités territoriales tant qu’une évaluation précise et complète n’aura pas été faite des dépenses contraintes qui leur sont imposées, soit par la loi, soit par le règlement.
Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Raymonde Le Texier et M. Robert Hue. Très bien !
M. Jean-Pierre Fourcade. Cela concerne aussi bien les nouvelles normes techniques que certaines compétences transférées.
À une plus grande maîtrise des dépenses des collectivités territoriales doit correspondre une réduction des dépenses contraintes. C’est la condition indispensable du retour à un dialogue équilibré entre l’État et les élus locaux,…
M. Jean-Louis Carrère. C’est l’heure !
M. Jean-Pierre Fourcade. … et nous devons tous réfléchir sur ces deux points essentiels. La conférence sur les déficits est un bon point de départ, elle honore le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – M. Jacques Mézard applaudit également.)
M. René-Pierre Signé. Il a dit quelques vérités quand même.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Je vous remercie, monsieur Fourcade, d’avoir posé cette question et de partager la détermination du Gouvernement qui, derrière le Premier ministre François Fillon, considère que la question des déficits publics est fondamentale pour remettre notre économie sur le chemin de la croissance.
M. Simon Sutour. C’est l’avis de spécialistes !
M. Didier Boulaud. C’est le sapeur Camember : ça creuse, ça creuse !
Mme Christine Lagarde, ministre. Comme vous l’avez souligné, monsieur Fourcade, le Président de la République a convoqué, le 26 janvier dernier, une conférence sur les déficits publics à laquelle tous étaient conviés.
M. Simon Sutour. C’est une opération politicienne !
Mme Christine Lagarde, ministre. Étaient présents, les représentants de l’État, un certain nombre de sénateurs – je voudrais, en particulier, rendre hommage au président Jean Arthuis et au rapporteur général Philippe Marini, qui se sont beaucoup exprimés sur cette question...
M. Jean-Pierre Bel. La brosse à reluire !
Mme Christine Lagarde, ministre. … –, les représentants des maires de France. Malheureusement, les représentants des départements et des régions n’ont pas souhaité y participer…
M. Dominique Braye. Absolument ! Ils ne sont pas républicains ! C’est honteux !
Mme Christine Lagarde, ministre. … ce qui est regrettable car il s’agit d’une question de responsabilité collective.
Vous avez évoqué, monsieur le sénateur, la question du groupe de travail formé à l’occasion de cette réunion, sous l’autorité de M. Carrez et du préfet Pierre-René Lemas, chargé d’étudier très précisément l’évolution des dépenses locales, qui ont une dynamique forte, peut-être trop forte.
M. Didier Boulaud. Et le Rafale ?
Mme Christine Lagarde, ministre. À cet égard, il conviendra, lors de la prochaine conférence sur les déficits qui se tiendra au mois d’avril, d’établir un diagnostic, en examinant les composantes de cette croissance des dépenses locales, et, à cet égard, il n’y aura aucun tabou.
M. Didier Boulaud. Il est inconcevable d’entendre des choses pareilles !
Mme Christine Lagarde, ministre. La question du transfert des compétences, que vous avez évoquée, fera partie du diagnostic, de même que celle des normes, que vous avez également mentionnée. Plusieurs d’entre vous, notamment M. Longuet, ont d’ailleurs insisté sur ce dernier point.
Il faudra évidemment s’engager sur un chemin de réduction de la dépense, qui devra s’appliquer à tous.
M. Didier Boulaud. Alors que le déficit du budget de l’État atteint quelque 140 milliards d’euros, elle évoque le déficit des collectivités locales ! Elle ne manque pas d’air !
Mme Christine Lagarde, ministre. Il conviendra de fixer un objectif de réduction de la dépense locale, comme le rapport Balladur l’avait suggéré.
M. Didier Boulaud. On croit rêver !
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Le deuxième point que vous avez évoqué, monsieur Fourcade, concernait les niches fiscales et sociales.
M. Didier Boulaud. Pour faire des niches, vous êtes forts !
Mme Christine Lagarde, ministre. À cet égard, le Président de la République a été très clair : il est impératif d’évaluer chacune des niches et d’envisager une réduction de celles qui n’ont plus aucun effet et qui n’ont donc plus d’intérêt.
M. le président. Concluez, madame la ministre !
Mme Christine Lagarde, ministre. Par conséquent, ce sujet figurera à l’ordre du jour de la prochaine conférence, qui se tiendra au mois d’avril. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé du logement.
Ce lundi, la fondation Abbé Pierre présentait son rapport annuel. Son témoignage précis, et à l’argumentation incontestable, est qu’en 2010 l’un des besoins fondamentaux des personnes, celui de vivre en sécurité dans un logement décent que l’on a les moyens de payer, est mis à mal dans notre société.
Nous pouvions croire, à l’ouverture de votre conférence de presse hier, que vous aviez entendu le signal de détresse de cette sentinelle. Hélas, vous avez aligné les millions d’euros devant les journalistes, un peu comme un joueur de poker étale ses jetons sur la table et bluffe avec talent pour épater ses adversaires ! (M. Dominique Braye s’exclame.)
Mme Catherine Tasca. Très bien !
M. Thierry Repentin. Vous annoncez une somme de 4,7 milliards d’euros comme une décision nouvelle, alors qu’il ne s’agit que d’un décompte de vieilles mesures hélas très insuffisantes !
M. Didier Boulaud. Eh oui !
M. Thierry Repentin. Vous vous en félicitez, mais est-ce vraiment une somme considérable ? Non, deux fois non !
Non, parce que, en comparaison, la déduction des intérêts d’emprunt dans le cadre de la loi TEPA sur le paquet fiscal coûtera à elle seule, en année pleine, 5 milliards d’euros à l’État, sans produire un logement abordable supplémentaire. Voilà, monsieur Fourcade, un exemple de niche fiscale !
Non, parce que vous valorisez dans votre bilan la forte croissance des allocations logement. Mais c’est comme si le ministre chargé du travail se félicitait de l’explosion des prestations des ASSEDIC ! (M. David Assouline acquiesce.) Car les allocations logement, comme celles qui sont versées par les ASSEDIC, ne sont qu’une conséquence mécanique de la mauvaise santé économique et sociale de notre pays.
M. Didier Boulaud. Eh oui !
M. Thierry Repentin. Il n’y a donc pas de quoi se réjouir d’un tel bilan, sauf à vouloir vraiment le revendiquer pour le Gouvernement.
Parmi toutes ces fausses bonnes nouvelles, je ne vois rien pour réaliser des logements sociaux supplémentaires. La fondation Abbé Pierre l’écrit dans son rapport : « Le logement social ne représente plus une priorité gouvernementale ».
Les bons chiffres de production pour 2009, auxquels vous faisiez référence, ne sont pas le fait du soutien de l’État, dont les aides à la pierre sont passées de 800 millions d’euros en 2008 à 480 millions d’euros cette année.
La construction sociale est le fruit de l’effort de la nation : l’effort des ménages tout d’abord, qui, à travers le Livret A et son niveau de rémunération ridiculement bas, financent le logement social ; l’effort des collectivités locales et des opérateurs de logement ensuite.
C’est grâce aux collectivités locales que la France continue de construire des logements économiquement accessibles à nos concitoyens.
M. Didier Boulaud. Prenez-en bonne note, madame Lagarde !
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Repentin.
M. Thierry Repentin. Monsieur le secrétaire d’État, l’argent ne manque pas dans les caisses de l’État…
M. Dominique Braye. Ah bon ?
M. Didier Boulaud. Proglio !
M. Thierry Repentin. Les cadeaux fiscaux le démontrent tous les jours ; tout est affaire de choix !
La question est donc la suivante : souhaitez-vous utiliser l’argent public pour répondre aux besoins de logements abordables des Français ? Et par quoi allez-vous entamer ce rétablissement de la politique du logement, souhaité par près de 1,3 million de ménages en attente d’un toit ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Françoise Laborde et M. Jacques Mézard applaudissent également.)
M. Didier Boulaud. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.
M. René-Pierre Signé. Il est quelque peu embarrassé.
M. David Assouline. Ça va être dur !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. Monsieur Repentin, oui, le logement, notamment le logement social, constitue une priorité budgétaire du Gouvernement. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jacques Mahéas. Qu’est-ce que ce serait, sinon !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est faux !
M. René-Pierre Signé. Il ne suffit pas de le dire !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. J’ai eu l’occasion de résumer les chiffres tout à l’heure. Les dépenses de l’État ne se réduisent pas aux seules aides à la pierre. Il faut aussi comptabiliser les 2 milliards d’euros d’exonération de TVA, ainsi que les exonérations de taxe foncière.
Nous avons évidemment besoin de construire davantage de logements sociaux en France, et nous en construisons.
M. Didier Boulaud. Mais non !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ainsi, en 2009, nous avons battu tous les records de financement de logements sociaux depuis trente ans.
Je vais répéter les chiffres. En 2000, lorsque M. Jospin était Premier ministre, vous avez financé 40 000 logements sociaux. Cette année, nous en avons financé 120 000 (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Pierre Hérisson applaudit également), et nous prévoyons d’en financer 140 000 l’année prochaine. Voilà la réalité !
M. René-Pierre Signé. Comparaison n’est pas raison !
M. Didier Boulaud. Et vous, qu’avez-vous fait depuis 2002 ? Qu’a fait Raffarin ? Qu’ont fait vos amis ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Vous voulez vraiment que l’on compare nos politiques : prenons l’exemple de la capitale.
La Ville de Paris a financé avec l’État 6 000 logements sociaux cette année : 4 000 sont des constructions nouvelles ; 2 000 sont des logements déjà occupés, qui ne constituent donc pas une offre nouvelle pour ceux qui attendent un logement social. (Mme Raymonde Le Texier et M. Didier Boulaud s’exclament.)
La proposition que j’ai formulée hier est une proposition de bon sens : …
M. David Assouline. C’est incroyable ! Regardez Neuilly et toutes les autres villes que vous dirigez : elles ne sont même pas à 2 % !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. … achetons des logements vacants et n’achetons pas des logements déjà occupés.
C’est cela innover, monsieur le sénateur ; vous le savez en tant que président de l’Union sociale pour l’habitat, l’USH. C’est ensemble, le monde HLM, les collectivités locales et l’État, que nous construirons une politique du logement et que nous ferons de celui-ci une priorité.
M. David Assouline. Personne ne vous croit !
M. Didier Boulaud. Des promesses, des promesses !
M. René-Pierre Signé. À Neuilly !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Pour ce qui nous concerne, nous y sommes prêts. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Dominique Braye. Très bien !
utilisation des moyens publics pour communiquer contre les réformes du gouvernement
M. le président. La parole est à M. André Trillard. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. André Trillard. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.
En octobre dernier, le groupe de la gauche de l’Assemblée des départements de France a mis à disposition de ses élus responsables de départements un plan de communication, destiné à contrer deux des réformes indispensables, difficiles et courageuses auxquelles le Gouvernement s’est attelé,…
M. Yves Daudigny. La suppression des départements !
M. André Trillard. … je veux parler de la suppression de la taxe professionnelle et de la réforme territoriale.
M. René-Pierre Signé. Très profitables aux collectivités !
M. André Trillard. Meilleur élève de la classe, le département de la Loire-Atlantique, que j’ai l’honneur de représenter ici, s’est engagé dans cette entreprise avec un enthousiasme et un déploiement de moyens confondants !
Un sénateur de l’UMP. C’est vrai !
M. André Trillard. Un magazine du conseil général, à couverture noire,…
M. David Assouline. Noire !
M. André Trillard. … intitulé Danger sur le service public local (Exclamations sur les travées du groupe socialiste), des encarts dans la presse, une pétition « Mon département, j’y tiens »,…
Mme Raymonde Le Texier. Pas vous ?
Mme Nicole Bricq. Jaloux !
M. André Trillard. … que chacun peut renvoyer sans la timbrer,…
M. David Assouline. Ils savent communiquer !
M. André Trillard. … un site internet consacré à la réforme des collectivités,…
M. David Assouline. Prenez-en de la graine !
M. André Trillard. … des courriers aux élus du département et aux associations soulignant qu’avec la réforme plus aucun financement ne sera possible,…
M. René-Pierre Signé. C’est vrai !
M. Dominique Braye. C’est l’argent du contribuable !
M. André Trillard. … autant d’actions financées par le département et donc par le contribuable. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mais nous avons mieux : « Sans le conseil général, ce bus risque de disparaître »,…
M. David Assouline. C’est vrai !
M. André Trillard. … peut-on lire à l’arrière des bus dans le département du Val-d’Oise.
M. David Assouline. Effectivement !
M. André Trillard. Efficace comme campagne,…
M. Dominique Braye. Démagogie !
M. André Trillard. … mais extrêmement coûteuse !
M. Dominique Braye. Mensonge et démagogie !
M. André Trillard. L’arrêt de ces plans de communication est prévu trois semaines avant les élections régionales,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. À côté de la communication de l’Élysée, ce n’est rien !
M. David Assouline. Sarkozy à la télé, on est des amateurs à côté !
M. Robert Hue. Et les sondages du Président ?
M. André Trillard. … concomitance pour le moins troublante. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Monsieur le ministre, mes chers collègues, lorsqu’un exécutif départemental utilise de l’argent public pour critiquer le Gouvernement sur des sujets qui seront au cœur de la campagne pour les élections régionales,…
M. René-Pierre Signé. Il y a tellement de sujets !
M. André Trillard. … cela peut s’apparenter à du financement de campagne déguisé ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et les sondages de l’Élysée ?
M. André Trillard. Lorsque le message qu’il cherche à faire passer est que c’est l’État qui est à l’origine de l’explosion des impôts locaux, cela peut s’appeler de la désinformation ! (Bravo ! sur plusieurs travées de l’UMP.)
M. Paul Raoult. Et les sondages de Sarkozy ?
M. Simon Sutour. C’est terminé !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le sénateur.
Mme Annie David. Son temps de parole est dépassé !
M. André Trillard. Lorsque ledit exécutif annonce la fin de la décentralisation, il peut s’agir d’une intimidation !
Mme Odette Terrade. Le temps de parole est dépassé !
M. Jacques Mahéas. C’est terminé !