M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, auteur de la question n° 895, transmise à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
M. Laurent Béteille. Ma question s’adressait à M. Marleix, secrétaire d’État chargé de l’intérieur et des collectivités territoriales, mais je ne doute pas de la qualité de la réponse qu’y apportera Mme Penchard.
Cette interrogation porte sur les difficultés croissantes que rencontrent les collectivités territoriales – et plus particulièrement, dans mon département, les communautés de communes – pour procéder au suivi médical obligatoire de leurs agents territoriaux.
Ce suivi médical revêt un caractère obligatoire, mais un certain nombre de collectivités se trouvent dans l’impossibilité de trouver un organisme susceptible de l’assurer, faute de médecins spécialisés en matière de médecine préventive. À cela s’ajoute le fait qu’il n’est pas possible de faire appel à un organisme privé.
Dans mon département, l’ASTE, l’association pour la santé au travail en Essonne, s’est vu enjoindre par la direction régionale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle de n’accepter ou de ne renouveler aucune convention avec un établissement de droit public, ce qui aurait pu être une solution de dépannage.
Les exécutifs territoriaux, ne pouvant respecter, en l’état actuel, l’obligation légale qui leur est faite, se retrouvent de facto dans une situation tout à fait délicate, en particulier à l’égard des compagnies d’assurance qui assurent leurs personnels.
Au-delà se pose même la question de la responsabilité pénale du maire ou du président de la communauté de communes concernée, notamment en cas d’accident du travail. Supposons, par exemple, qu’un agent travaillant dans un centre de loisirs, au contact donc d’usagers parmi les plus fragiles, se révèle porteur d’une maladie non décelée : quelle serait la responsabilité de la collectivité en cas de contamination ?
Madame la ministre, peut-être faudrait-il donner un peu de souplesse là où il y en aurait vraiment besoin. Quelles mesures l’État compte-t-il mettre en place pour remédier à une telle situation ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l’outre-mer. Monsieur le sénateur, comme vous pouvez l’imaginer au regard de mon parcours professionnel, j’ai moi-même été confrontée aux difficultés que vous évoquez.
Vous le savez, les communautés de communes sont régies par un décret du 10 juin 1985, qui impose aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics de se doter d’un service de médecine pour suivre leurs agents. Elles ont le choix entre différentes possibilités pour mettre en œuvre cette obligation : recruter un médecin, ou recourir à un service commun à plusieurs collectivités, au centre de gestion, à un service de santé interentreprises, à un service de santé en agriculture.
Les collectivités territoriales, comme le secteur privé d’ailleurs, se heurtent cependant à la pénurie de médecins du travail. Le Gouvernement s’efforce de remédier à cette situation.
Tout d’abord, pour ce qui concerne la fonction publique, la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels a modifié les règles de cumul d’activités, afin de permettre à davantage de médecins de travailler pour un employeur public tout en conservant une activité privée.
Ensuite, le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique a par ailleurs engagé une réforme de la médecine du travail. L’une des options privilégiées consisterait à recourir à titre expérimental à la médecine de ville. Cette réforme a été présentée aux partenaires sociaux lors du conseil d’orientation sur les conditions de travail du 4 décembre 2009.
Enfin, la responsabilité pénale des exécutifs territoriaux pour délit non intentionnel ne saurait être engagée à raison du non-respect de leur obligation relative au suivi des agents territoriaux. En effet, pour engager leur responsabilité, une faute personnelle doit pouvoir leur être imputée.
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille.
M. Laurent Béteille. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, qui me satisfait en grande partie.
Il est effectivement nécessaire d’introduire une certaine souplesse dans le dispositif, pour faire en sorte que, en cas de pénurie, les collectivités concernées, de petite taille, puissent trouver une solution. À cet égard, la solution que vous avez indiquée concernant la médecine de ville est probablement judicieuse. En tout état de cause, il y a urgence à agir !
Cela étant, je dois le dire, j’ai été beaucoup moins convaincu par vos propos sur le risque encouru par la collectivité sur le plan pénal. À vous entendre, celle-ci devra en effet démontrer qu’elle a été dans l’impossibilité de trouver une solution pour se dégager de toute responsabilité. Or la justice n’est pas toujours aussi compréhensive que vous ! Cela justifie que nous nous efforcions d’avancer rapidement sur le sujet.
droit de vote et d’éligibilité des citoyens de l’union européenne résidant en france et élection des conseillers territoriaux
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 837, adressée à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.
Mme Catherine Procaccia. Madame la ministre, ma question s’adressait plutôt à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales ou à M. le secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales, mais, en leur absence, je ne doute pas que vous pourrez m’apporter des éléments de réponse ! Je m’interroge en effet, dans la perspective de la création des conseillers territoriaux, sur le droit de vote et d’éligibilité des citoyens de l’Union européenne résidant en France.
La loi constitutionnelle du 25 juin 1992 a ajouté dans la Constitution un article 88-3 permettant à tout citoyen de l’Union européenne résidant en France d’être élu conseiller municipal et de voter, mais seulement aux élections municipales et européennes.
Selon l’article 3 de la Constitution, la « souveraineté nationale appartient au peuple ». Les citoyens européens ne peuvent donc logiquement voter lors des élections législatives et de l’élection présidentielle, ni être grands électeurs pour les élections sénatoriales.
À mes yeux, ces élus locaux sont d’un « autre type », puisqu’ils ne peuvent pas non plus exercer les fonctions de maire ou d’adjoint, ni de conseiller général ou régional. En revanche, l’article R. 43 du code électoral les autorise à présider un bureau de vote, et ce pour les élections aussi bien locales que nationales. Le moins que l’on puisse dire est que le droit électoral est plutôt discriminant à leur égard.
Dans un contexte où l’on parle de « citoyenneté européenne », de « non-discrimination en raison de la nationalité », où la question du droit des étrangers à participer aux élections locales est régulièrement évoquée, il m’a paru opportun de demander au Gouvernement s’il entendait modifier le droit de vote et d’éligibilité des citoyens de l’Union européenne dans le cadre du texte portant sur la création des conseillers territoriaux.
Madame la ministre, est-il envisageable que les citoyens de l’Union européenne puissent non seulement participer à l’élection de nos futurs conseillers territoriaux, mais aussi être eux-mêmes élus ? En effet, les conseillers territoriaux, comme d’ailleurs les conseillers généraux ou régionaux actuels, sont bien des élus locaux et non nationaux.
Et si l’obstacle à leur droit de vote et d’éligibilité est la souveraineté nationale, pourquoi ne pas leur transposer le régime applicable aux conseillers municipaux ? Ce faisant, les conseillers territoriaux d’origine communautaire ne seraient pas autorisés à participer à la désignation des électeurs sénatoriaux et à l’élection des sénateurs.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l’outre-mer. Madame le sénateur, vous souhaitez savoir si le Gouvernement envisage de permettre aux citoyens de l’Union européenne résidant en France de participer à l’élection de nos futurs conseillers territoriaux, et vous interrogez à cette fin le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.
Comme vous le savez, actuellement, le droit de vote et d’éligibilité aux élections européennes et municipales est accordé dans notre pays aux ressortissants communautaires qui y résident. C’est la traduction de la communauté de destin liant la France à ses partenaires de l’Union européenne.
Étendre ce droit de vote et d’éligibilité à d’autres élections se heurterait à un double obstacle : la Constitution, d'une part ; les engagements internationaux de la France, d'autre part.
En effet, aux termes de l’article 88-3 de la Constitution, il n’est prévu d’accorder le droit de vote et d’éligibilité aux ressortissants communautaires que pour les élections municipales. Il serait donc aujourd’hui inconstitutionnel d’étendre ce droit à l’occasion d’autres élections.
Permettre aux citoyens de l’Union européenne résidant en France de participer à l’élection des futurs conseillers territoriaux impliquerait donc une modification de notre Constitution. Une telle perspective nécessiterait, en outre, de faire l’objet d’un débat préalable avec nos partenaires européens. Dans l’immédiat, il n’est pas prévu que des initiatives soient prises en ce sens.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Madame la ministre, votre réponse, claire et précise, me laisse bien des regrets, d’autant que les élus communautaires sont bien intégrés dans nos conseils municipaux.
Dans d’autres pays, notamment en Grande-Bretagne, les ressortissants de pays extérieurs à l’Union européenne ont le droit de vote. En Irlande, ils peuvent même participer à des référendums. La situation en France résulte bien d’une position délibérée. À l’occasion de la réforme des conseillers territoriaux, j’aurais espéré que l’on puisse la faire évoluer !
mise en difficulté des laboratoires départementaux d’analyse
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, auteur de la question n° 900, adressée à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.
M. Yannick Botrel. Madame la ministre, je tiens à vous faire part de la situation particulièrement difficile vécue par les laboratoires départementaux d’analyse, les LDA, dont les missions sont sans cesse réduites.
Récemment, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ou DGCCRF, a invité l’ensemble des directions départementales de la protection des populations à confier les analyses relatives aux plans de surveillance et de contrôle des denrées alimentaires aux établissements du service commun des laboratoires, ou SDC, dépendant de l’État. Ces prestations analytiques seraient fournies gratuitement.
Il va de soi que cette situation est vécue par les laboratoires départementaux d’analyse comme une mesure particulièrement injuste.
Après avoir ouvert le marché de l’analyse de l’eau à la concurrence, ce qui a conduit à la fermeture d’une dizaine de laboratoires publics en quelques mois, voilà qu’aujourd’hui l’État retire aux LDA la gestion des plans de surveillance et de contrôle des denrées alimentaires. Ces décisions unilatérales ne prennent pas en compte leur large expertise en ce domaine.
Il s’agit, par ailleurs, d’une remise en cause de tous les investissements financiers lourds que ces laboratoires ont supportés. La situation est d’autant plus contradictoire que lesdits financements sont issus des budgets des conseils généraux, donc d’investissements publics.
Madame la ministre, quelle finalité recherche-t-on en opposant ainsi laboratoires nationaux et laboratoires départementaux ? Quel motif justifie cette décision, défavorable à ces derniers ?
Vous en conviendrez, la concurrence entre laboratoires de l’État et laboratoires départementaux risque de porter un coup préjudiciable à l’avenir des seconds.
Il est pourtant important pour les citoyens et les consommateurs de disposer d’organismes fiables et indépendants. Imaginez ce qui nous attend si l’on ne cesse de dépouiller les LDA de leurs missions historiques !
Il serait souhaitable de revenir à un équilibre plus satisfaisant au profit des laboratoires départementaux d’analyse afin que ces derniers puissent mener à bien leur mission sanitaire. À cet égard, les états généraux du sanitaire ont reconnu le rôle précieux des laboratoires départementaux, qu’ils considèrent comme l’un des quatre acteurs principaux pour gérer la politique de santé animale et sanitaire, au service de la population.
Je vous demande donc, madame la ministre, de clarifier la position de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes s’agissant du marché des plans de surveillance et de contrôle.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Monsieur le sénateur, depuis la décentralisation, les laboratoires départementaux d’analyse sont rattachés aux conseils généraux et subventionnés par ceux-ci, quoique certains soient devenus des établissements publics à caractère industriel et commercial. Le maillage territorial est dense puisque l’on compte quasiment un laboratoire par département.
Les LDA mettent leurs services à la disposition de l’État, en particulier du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, de collectivités et d’établissements publics – services départementaux de la protection maternelle et infantile, directions de la solidarité départementale, mairies, syndicats intercommunaux, crèches, écoles, hôpitaux – et de clients privés – industriels de l’agroalimentaire, restaurateurs, artisans, producteurs fermiers. La santé animale constitue, et de loin, la plus importante charge de travail de ces laboratoires départementaux d’analyse, qui interviennent aussi en microbiologie alimentaire.
Rattaché conjointement à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et à la direction générale des douanes et droits indirects, le service commun des laboratoires résulte de la fusion, au début de 2007, de leurs réseaux de laboratoires respectifs.
Le service commun des laboratoires analyse ainsi les échantillons de produits alimentaires et non alimentaires prélevés dans le cadre des plans de surveillance et de contrôle ou d’enquêtes ponctuelles de la DGCCRF, au titre de ses missions de qualité-sécurité et de loyauté économique ou consumériste. Il assure en outre le contrôle analytique des produits au niveau de l’importation et du dédouanement. Les laboratoires du SCL sont accrédités en vertu d’une norme qui spécifie les exigences de qualité et de compétence propres aux laboratoires d’essais et d’analyses. Ces contrôles ne sont pas facturés aux services de l’État mentionnés ci-dessus.
Dans le cadre de la réforme de l’administration territoriale de l’État, avec la création, le 1er janvier de cette année, des directions départementales chargées de la protection des populations, le SCL continue à apporter des solutions à ces nouvelles structures, pour optimiser leur fonctionnement à moindre coût et contribuer ainsi à rationaliser les procédures administratives.
Répondant aux sollicitations des directions départementales de la protection des populations sur ces conditions tarifaires et face à l’impossibilité de faire la distinction entre des agents à présent réunis dans une même unité administrative territoriale, qu’ils soient issus de la DGCCRF ou de la direction générale de l’alimentation, ou DGAL, le SCL a proposé à titre provisoire, pour 2010, d’étendre à tous les agents de la direction de la protection de la population la gratuité des analyses qui lui seront demandées.
Cette disposition provisoire doit donner lieu à un suivi permettant de mesurer réellement les besoins analytiques des services, afin de préparer de façon concertée les actions pour 2011 soumises à analyse et d’apprécier les moyens budgétaires correspondants.
Les efforts consentis par les LDA ne sont pas remis en cause par cette proposition. En effet, les domaines de compétence du SCL sont complémentaires des LDA, ainsi, d’ailleurs, que leurs champs d’accréditation respectifs. Les domaines communs aux deux réseaux de laboratoires représentent une infime partie de l’activité des LDA, ce qui ne saurait remettre en cause l’équilibre global de fonctionnement de ces LDA compte tenu du caractère multiple de leur clientèle, que je viens de décrire.
Je le répète, le dispositif de gratuité mis en œuvre cette année n’est donc absolument pas de nature à mettre en difficulté les LDA. Des discussions régulières se déroulent entre les services afin d’aboutir à une gestion équilibrée des activités analytiques permettant de concilier efficacité administrative et compétence technique des laboratoires.
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. Madame la ministre, certains faits vont cependant à l’encontre des propos que vous venez de tenir : en l’espace de deux années, un peu plus de vingt laboratoires publics ont en effet fermé leurs portes dans toute la France, et le maillage dense qui a existé a tendance à s’étioler.
La perte d’activité générée par le transfert des analyses, que vous pouvez certes considérer comme marginale, pèse en réalité de façon significative dans l’équilibre budgétaire des laboratoires. À cela s’ajoute la perte de recettes sur le marché des analyses d’eau qui étaient effectuées pour le compte des DDASS, les directions départementales des affaires sanitaires et sociales. Les laboratoires sont en outre soumis, s’agissant d’autres missions, à la forte pression de la concurrence des laboratoires privés. C’est ainsi, mais c’est également une réalité.
Évidemment, on essaie de faire face à cette situation en rationnalisant le fonctionnement des laboratoires départementaux, mais on se trouve alors confrontés à une situation paradoxale : d’un côté, l’État demande à ses laboratoires publics, qui dépendent des conseils généraux, de maintenir des équipements de veille, en particulier des laboratoires de type P3 ainsi que des équipes de techniciens et de vétérinaires dont la compétence est largement reconnue ; d’un autre côté, il n’y a aucune reconnaissance sur le plan financier.
Un certain nombre d’épisodes, que ce soit l’ESB ou encéphalopathie spongiforme bovine, la fièvre aphteuse ou la grippe aviaire, plus récemment, ont montré toute l’utilité de maintenir ces équipements.
Par conséquent, il y a là un vrai problème qui se traduit en tout cas dans les faits par les fermetures dont j’ai parlé. Compte tenu de l’utilité des laboratoires départementaux, l’État devrait se pencher sérieusement sur les partenariats qui existaient jusqu’ici et qui ont désormais tendance à disparaître – je le répète avec force –, au détriment des laboratoires publics départementaux qui ferment leurs portes.
M. Roland Courteau. Très bien !
annulation du décret relevant de 4 000 à 20 000 euros le seuil des marchés publics simplifiés
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 826, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
M. Claude Biwer. Madame la ministre, lors de l’examen, fin 2008, des différentes mesures contenues dans le plan de relance de l’activité économique, plan que nous avons soutenu et adopté, le Gouvernement nous avait annoncé une mesure de simplification administrative consistant à relever de 4 000 euros à 20 000 euros le seuil en deçà duquel les marchés publics peuvent être passés sans publicité ni concurrence préalable.
Cette mesure était très attendue par l’ensemble des élus, en particulier les maires de nos petites communes, qui considéraient ce seuil de 4 000 euros comme vraiment très faible. Ils avaient donc accueilli avec satisfaction l’annonce du relèvement à 20 000 euros.
Le contentement éprouvé à l’époque par ces élus se transforme en interrogation, car hélas, trois fois hélas, le Conseil d’État, par une décision du 10 février 2010, a annulé cette disposition, la considérant comme contraire aux « principes d’égalité d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ».
Il a ajouté que le pouvoir règlementaire ne peut « permettre au pouvoir adjudicateur de décider que le marché sera passé sans publicité, voire sans mise en concurrence, [que] dans les seuls cas où il apparaît que de telles formalités sont impossibles ou manifestement inutiles, notamment en raison de l’objet du marché, de son montant ou du degré de concurrence dans le secteur considéré ».
Cependant, madame la ministre, ce que le pouvoir réglementaire ne peut apparemment pas faire, le pouvoir législatif serait parfaitement fondé à le réaliser.
Alors que l’on parle beaucoup de simplification administrative, une telle décision n’y contribue guère ! Bien souvent, les adjudications auxquelles nous concourons pour un montant inférieur à 20 000 euros restent sans réponse, et nous constatons qu’il y a plus souvent accord entre les entreprises qu’entre les élus, auxquels on accorde bien peu de confiance.
Ma question est donc très simple : quelle initiative comptez-vous prendre afin de relever le seuil de 4 000 euros à 20 000 euros ou au-delà ?
Je précise : « 20 000 euros ou au-delà » tout simplement parce que, avant la réforme du code des marchés publics, les élus pouvaient payer jusqu’à 300 000 francs, soit 45 000 euros, sans aucune formalité de publicité ou de mise en concurrence. Ce dispositif n’a jamais souffert de contestation.
Depuis la décision du Conseil d’État, la réforme du code des marchés publics, loin de constituer un progrès, marque plutôt un recul en contraignant les maires à un formalisme dont ils se passeraient bien.
Nous en sommes donc revenus, depuis le 1er mai 2010, au seuil de 4 000 euros. Madame la ministre, il est urgent de prévoir, sinon le relèvement de ce seuil, en tout cas une modification dans le sens d’une simplification du droit.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Monsieur le sénateur, le 10 février dernier, le Conseil d’État a en effet annulé le relèvement du seuil de 4 000 euros à 20 000 euros qui avait été inscrit à l’article 28 du code des marchés publics. Il a considéré que cet accroissement, en raison de son caractère général et de son montant, était contraire aux principes de la commande publique.
Cette mesure faisait partie du plan de relance que le Gouvernement avait mis en œuvre en décembre 2008. J’observe qu’elle a produit les effets attendus au cœur de la période de crise ; elle a permis, vous l’avez rappelé, d’injecter des liquidités dans l’économie en accélérant les procédures d’achats et a donc pleinement contribué à soutenir la trésorerie des petites et moyennes entreprises.
Définir un nouveau seuil de dispense de procédure supérieur à 4 000 euros hors taxes n’est pas possible. C’est en effet la généralité du seuil de 20 000 euros hors taxes qui a été sanctionnée par le Conseil d’État, en application de l’exigence constitutionnelle d’égal accès à la commande publique. Une reprise de ce seuil par voie législative risquerait une censure du Conseil constitutionnel.
Je comprends néanmoins le souci de l’acheteur, qui éprouve le besoin d’être guidé dans ses choix pour les petits achats. Je rappelle donc qu’un guide des bonnes pratiques en matière de marchés publics a été publié à cet effet au Journal officiel du 31 décembre 2009. Celui-ci permet aux acheteurs publics d’être éclairés sur les règles applicables. Le nombre très limité de recours contentieux sur les marchés publics confirme ce respect de la réglementation.
Cependant, dans le souci de rendre encore plus aisée la commande publique et de faciliter les achats des collectivités locales, le Gouvernement réfléchit également aux précisions rédactionnelles qui, tout en respectant la décision du Conseil d’État, pourront utilement être insérées dans le code des marchés publics. Un projet de décret en ce sens fait actuellement l’objet d’une consultation interministérielle, en vue de sa publication dans les prochains mois.
Prenant acte de la décision du Conseil d’État, le Gouvernement étudie la meilleure manière d’organiser la passation des petits marchés, répondant ainsi, monsieur Biwer, à votre préoccupation.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Madame la ministre, je vous remercie de ces précisions, qui me laissent entendre que le Gouvernement se préoccupe du caractère complexe de ce qui nous est proposé.
Je rappellerai simplement que ce sont nos secteurs ruraux – souvent, le petit commerce local – qui bénéficiaient des transactions de montants inférieurs à 4 000 euros, et même au-delà, quand c’était possible, et que nous montrions par là notre volonté de les soutenir. Un tel fonctionnement ne les enrichissait pas, mais leur permettait néanmoins de survivre.
Il est regrettable que nous ne puissions pas persévérer dans cette voie, et je souhaite vivement que la réflexion menée actuellement par le Gouvernemental soit couronnée de succès et nous donne satisfaction.