M. Brice Hortefeux, ministre. Comment pouvez-vous dire que les scanners corporels sont une atteinte aux libertés ?
Sachez que mon rôle est d’anticiper tout acte possible de terrorisme. Libre à vous de refuser que nous nous en donnions les moyens. C’est votre responsabilité ! Sur ce point – je ne sais pas si vous engagez votre groupe par vos propos – nous n’arriverons certainement pas à nous mettre d’accord.
Nous, nous voulons lutter contre toutes les formes de terrorisme et surtout les anticiper et les prévenir. Le scanner corporel est clairement l’un des moyens indispensables d’y parvenir. D’ailleurs, nous ne sommes pas les seuls à le penser, et c’est le moins que l’on puisse dire ! Pour vous le prouver, il me suffirait d’égrener la liste des pays européens, sans parler des pays d’outre-Atlantique, mais nous serions encore là ce soir. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. De toute façon, monsieur le ministre, nous serons encore là ce soir. (Sourires.)
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Ce que vous venez de dire est inacceptable, monsieur le ministre, car vous n’avez pas le monopole de la lutte contre le terrorisme. (Rires et exclamations sur les travées de l’UMP.)
Nous sommes tous contre le terrorisme. Nous voulons tous nous battre contre ces actes qui mettent en danger la vie de nos concitoyens.
Malheureusement, le scanner corporel n’est pas la solution. Vous méprisez sa dangerosité, en particulier pour les femmes enceintes. C’est un manque de responsabilité de votre part.
De plus, ce qui est beaucoup plus grave, vous nous faites croire, en recourant à certains fantasmes ou à une certaine xénophobie, que vous seriez le seul à lutter contre le terrorisme alors que nous, nous serions laxistes. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Gautier, pour explication de vote.
M. Jacques Gautier. Je suis étonné par l’amendement de notre collègue, contre lequel, bien entendu, je voterai.
Il suffit de circuler en Europe et dans d’autres pays du monde pour constater la facilité d’emploi du scanner corporel. Il évite d’enlever sa ceinture, son pantalon ou ses chaussures, notamment pour les dames, et de perdre vingt minutes. En outre, il donne une vision exacte de la personne, y compris si elle a ingurgité des explosifs, ce que ne permet pas la palpation ou un passage sous le portique. La sécurité est donc accrue.
La commission, sur les recommandations de la CNIL, a encadré l’utilisation du scanner corporel. Je ne vois pas comment nous pourrions ne pas voter ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendle, pour explication de vote.
Mme Catherine Troendle. Je ne voterai pas non plus cet amendement, et ce pour deux raisons.
La première va peut-être en faire sourire quelques-uns. Moi qui prends l’avion deux fois par semaine, je trouve particulièrement désagréable et intrusif ces palpations, même si elles sont faites avec beaucoup de tact et de professionnalisme.
La seconde raison est que toute personne peut refuser de se soumettre au scanner et préférer le contrôle normal, c’est-à-dire la palpation.
Sachez que, pour ma part, le scanner me conviendra très bien.
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote.
M. Alain Anziani. Je suis très étonné du mauvais procès que l’on fait à notre collègue. Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre !
Mme Boumediene-Thiery a présenté un amendement en termes parfaitement courtois. Alors qu’elle indique que le scanner corporel pourrait poser un problème de santé à certaines personnes, on lui rétorque qu’elle n’a rien compris à la lutte contre le terrorisme.
À aucun moment, Mme Boumediene-Thiery n’a évoqué le fait que le scanner corporel était ou non adapté à la lutte contre le terrorisme. Sa question avait trait à la santé. Vous feriez mieux de lui répondre !
Je n’interviens pas ici pour donner ma position sur le fond – j’y reviendrai en présentant mes amendements –, mais pour demander que l’on fasse preuve de respect les uns vis-à-vis des autres.
M. le président. L'amendement n° 233, présenté par MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André, M. Daunis, Mme Ghali et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après le mot :
millimétriques
insérer les mots :
et n'offrant qu'une représentation schématique du corps des personnes
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 234, 235, 236 et 237.
M. le président. J’appelle donc en discussion les amendements nos 234, 235, 236 et 237.
L'amendement n° 234, présenté par MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André, M. Daunis, Mme Ghali et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
par des opérateurs
par les mots :
dans des locaux non ouverts au public par des opérateurs dont les personnels sont spécialement habilités à cette tâche,
L'amendement n° 235, présenté par MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André, M. Daunis, Mme Ghali et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après la première phrase de cet alinéa, insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette analyse doit être accomplie par une personne du même sexe que la personne qui en fait l'objet.
L'amendement n° 236, présenté par MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume, Berthou et Daunis, Mmes Ghali, M. André et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après les mots :
Conseil d'État
insérer les mots :
assure les conditions de la mise en place de mécanismes de floutage du visage et des parties intimes du corps et
L'amendement n° 237, présenté par MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume, Berthou et Daunis, Mmes Ghali, M. André et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
de trois années
par les mots :
d'une année
Veuillez poursuivre, monsieur Anziani.
M. Alain Anziani. Je le dis d’emblée, ces amendements ne visent pas à condamner le scanner corporel, mais à poser un certain nombre de questions, qui, je le pense, sont pertinentes.
Je comprends tout à fait qu’après la catastrophe qui aurait pu se produire le 25 décembre dernier sur le vol Amsterdam-Detroit, durant lequel un passager a tenté de déclencher un engin explosif qu’il portait sur lui, nous devions prendre toutes les mesures nécessaires de protection. Nous pouvons heureusement nous féliciter que cet attentat qui se voulait meurtrier ait échoué, même si les raisons en sont purement matérielles et indépendantes de la volonté du jeune homme.
Nous aimerions donc savoir si le scanner nous permettra d’atteindre les objectifs que nous nous assignons. Nous le souhaitons, je le répète.
D’abord, les modèles présentés sont-ils suffisants ? L’article 18 bis vise les modèles à « ondes millimétriques », c'est-à-dire que l’appareil s’arrête à la surface de la peau et ne pénètre pas dans le corps, contrairement à certains modèles à rayons X utilisés, me semble-t-il, aux États-Unis. Vous pourrez peut-être nous le préciser, monsieur le ministre, car vous avez plus de compétences que moi en la matière.
On met donc en place un scanner qui peut détecter certains objets – métalliques, liquides ou autres – sur un passager, mais qui ne peut pas visualiser l’intérieur du corps. Or, nous le savons, il est possible d’ingérer des capsules de drogue ou même des explosifs. Comment arriver à régler cette question de la limite du scanner, qui peut être essentielle en matière d’attentat ? Les terroristes, sachant que les objets situés à l’intérieur du corps ne peuvent pas être visualisés, seront tentés d’utiliser cette possibilité.
Vous avez vous-même reconnu le 11 février dernier devant la commission des lois, monsieur le ministre, que le scanner n’était pas la panacée. Il offre certes une garantie, mais elle n’est pas totale ; il reste une incertitude.
J’ajoute que des interrogations subsistent sur le coût du modèle. Pourrions-nous avoir des précisions sur ce point ? Le prix, estimé à un million de dollars par unité au mois de février, s’établirait aujourd'hui à environ 200 000 dollars. Vos services ont sans doute pu, depuis, affiner ces estimations.
Nous posons donc la question du rapport coût-efficacité. Finalement, ce dispositif, qui va coûter très cher, permettra essentiellement de fluidifier le passage lors des contrôles à l’aéroport – il ne sera plus nécessaire d’enlever ses chaussures, etc., comme le soulignait Mme Catherine Troendle. Toutefois, le dispositif d’imagerie ne permettant pas la visualisation interne du corps, ce coût est-il acceptable simplement pour fluidifier le passage sans assurer une sécurité maximale ?
La réponse que nous donnons est claire, sans ambigüité : nous pensons que oui. Le système doit cependant être davantage encadré. Nous comprenons tout à fait les réticences qui se sont exprimées concernant les images produites. Un représentant de la haute autorité nous indiquait d'ailleurs que l’on pouvait distinguer les silhouettes, les volumes et les formes. N’est-ce pas une atteinte à l’intimité ?
Il est vrai que des précautions ont été ajoutées, notamment par la commission des lois. Il nous semble que nous pourrions davantage nous inspirer des recommandations de la CNIL qui, après tout, n’est pas une mauvaise adresse en la matière. Tel est l’objet de la série d’amendements que nous présentons.
La CNIL recommande, par exemple, d’utiliser des représentations schématiques du corps et de rendre flous le visage et les parties intimes de l’anatomie. Quelle est l’objection, politique ou technique, qui nous empêcherait de suivre cette recommandation ?
Ensuite, elle préconise que la visualisation des images se fasse dans des locaux interdits au public et soit circonscrite à des personnes habilitées. Est-il scandaleux de reprendre cette recommandation ?
En outre, la CNIL précise que l’analyse des images doit être accomplie par une personne du même sexe que la personne qui en fait l’objet. Cette disposition existe déjà pour les palpations de sécurité. Elle pourrait s’appliquer sans difficulté en la matière.
Enfin, vous prévoyez une durée d’expérimentation de trois ans qui nous semble excessive. Compte tenu des expérimentations qui ont déjà été réalisées à Nice et à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, ainsi que des savoir-faire acquis à l’étranger, nous préférerions que cette durée d’expérimentation soit réduite à un an.
M. le président. Pour la clarté du débat, j’appelle maintenant en discussion les amendements nos 149, 150 et 325 rectifié.
L'amendement n° 149, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L'analyse des images visualisées transmises de manière sécurisée est effectuée par des opérateurs publics spécialement formés ne connaissant pas l'identité de la personne et ne pouvant visualiser simultanément celle-ci et son image produite par le scanner corporel. Aucun stockage ou enregistrement des images n'est autorisé. »
L'amendement n° 150, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. - Les troisième à cinquième alinéas du même article L. 282-8 sont applicables durant une période de six mois à compter de la promulgation de la présente loi. À l'issue de cette période, une étude d'impact devra être réalisée et soumise au Gouvernement et au Parlement.
L'amendement n° 325 rectifié, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet, Detcheverry et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 4, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
L'image produite par le scanner millimétrique doit comporter un système brouillant la visualisation du visage et des parties intimes.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter les amendements nos 149 et 150.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Personnellement, j’ai eu l’occasion de dire qu’il était préférable de faire appel à la technologie plutôt que de pratiquer des fouilles au corps. Néanmoins, je considère que les précautions et les dangers que nous évoquons ne doivent pas être traités d’un revers de main : d’une part, nous ne nous sommes pas les seuls à le dire ; d’autre part, ce n’est pas une façon de répondre à des parlementaires.
Certes, le groupe de travail sur l’article 29, la Commission européenne et la CNIL ont fait un certain nombre de recommandations très précises, mais les aspects relatifs à la santé n’ont peut-être pas été suffisamment pris en compte. Quoi qu’il en soit, il faut bien évidemment adopter ces recommandations concernant l’intimité des personnes et l’anonymat.
La CNIL, comme mon collègue vient de le rappeler, recommande ainsi de privilégier la représentation schématique du corps des personnes et non leur image réelle, de rendre flous les visages et les parties intimes du corps, de restreindre la visualisation des images par des personnels habilités, de limiter la conservation des images produites par les scanners corporels à la durée nécessaire aux contrôles, de prévoir un passage dans le sas du scanner indépendamment de tout autre contrôle afin de ne permettre en aucun cas l’identification des voyageurs. En cas de détection d’une anomalie, l’agent chargé de procéder à une fouille ne devrait pouvoir visualiser qu’un schéma indiquant la zone du corps concernée. Elle préconise également de sécuriser la transmission informatique des images des passagers, de former systématiquement les opérateurs à l’utilisation de ces dispositifs et de les sensibiliser, notamment, aux impératifs de protection de la vie privée.
On ne peut pas balayer ces questions en nous reprochant de soutenir le terrorisme, tandis que vous lutteriez contre. Franchement, ce genre de propos de meeting de quartier n’est pas de mise au Parlement ! (Mme Virginie Klès applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour présenter l'amendement n° 325 rectifié.
Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas douter que nous n’allions dans votre sens. Il est clair que nous adhérons tout à fait à ce « scanner millimétrique ». Néanmoins, nous souhaiterions que puissent être mises en œuvre les préconisations de la CNIL. Sans aller plus loin, nous avons suggéré que soit ajoutée une phrase concernant le brouillage du système de visualisation du visage et des parties intimes.
Pour le reste, je pense que le texte est suffisamment précis et que les précautions seront prises, assurément, pour protéger les personnes. Ce qui est important, je m’en expliquais il y a quelques instants, c’est de distinguer clairement la personne réelle de la personne virtuelle. Or j’ai vu, à certains moments, dans les aéroports, des agents qui, ne faisant pas la distinction, étaient amenés à avoir des comportements sinon moqueurs, du moins qui n’étaient pas de mise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Mon propos vaudra pour l’ensemble des amendements en discussion.
L’article 18 bis comporte un certain nombre de garanties et il est évident que l’évolution de la technologie devrait permettre d’appliquer plusieurs recommandations. La technologie des scanners a d'ailleurs déjà beaucoup évolué depuis leur mise en service.
En l’état actuel, je pense que les préconisations de la commission des lois sont suffisantes. Je suis malheureusement obligé d’émettre un avis défavorable, tout en souhaitant que les progrès techniques permettent de renforcer les garanties.
En ce qui concerne les problèmes de santé, je précise que les scanners utilisent les ondes millimétriques et non les rayons X. C’est une amélioration notable par rapport aux premiers scanners qui ont été installés au États-Unis.
La commission a longuement débattu de cette question et je vous rappelle sa position, à savoir que l’analyse des images visualisées doit être effectuée par des opérateurs ne connaissant pas l’identité de la personne et ne pouvant visualiser simultanément celle-ci et son image produite par le scanner. Ainsi, à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, les locaux sont situés en sous-sol et aucun contact n’est possible.
Notre texte n’est peut-être pas le meilleur du monde, mais il s’inspire de la technologie actuelle. Je souhaite, bien évidemment, que les progrès techniques améliorent les garanties.
Telles sont les raisons pour lesquelles j’émets un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre. Madame Borvo Cohen-Seat, nous ne souhaitons pas caricaturer la position des uns et des autres. C’est un sujet extrêmement sensible, mais, à un moment donné, il faut prendre une décision. On peut avoir des hésitations, mais il faut bien trancher. Il aurait fallu plus de temps pour aborder toutes les nuances.
Pour répondre à M. Anziani, il s’agit de scanners à ondes millimétriques, comme cela vient d’être indiqué. Certes, il existe d’autres systèmes, l’un d’entre eux étant notamment performant dans l’analyse des traces d’explosifs par un mécanisme de soufflerie, mais le scanner semble plus sûr.
Comme je l’ai déjà indiqué devant la Haute Assemblée, un appareil coûte aujourd'hui un peu plus de cent mille euros, contre un million de dollars initialement. Les coûts diminuent avec la généralisation de ces appareils.
J’ai été assez sensible, madame Escoffier, à votre proposition de brouiller la visualisation du visage et des parties intimes. Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a également évoqué ce point. Mais, dans le cas de la tentative d’attentat du 25 décembre, les explosifs étaient précisément cachés dans les parties intimes du terroriste. Il me paraît donc risqué d’accepter cette proposition, même si j’en comprends l’esprit.
Le floutage du visage, lui, ne soulève pas d’objection. Je serais donc favorable à l’amendement de Mme Anne-Marie Escoffier si elle le rectifiait afin de supprimer les mots « et des parties intimes ».
M. le président. Madame Escoffier, acceptez-vous de modifier votre amendement en ce sens ?
Mme Anne-Marie Escoffier. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 325 rectifié bis, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet, Detcheverry et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall, ainsi libellé :
Alinéa 4, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
L'image produite par le scanner millimétrique doit comporter un système brouillant la visualisation du visage.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L’avis est favorable.
M. le président. La parole est à M. Alex Türk, pour explication de vote.
M. Alex Türk. Le groupe de travail sur l’article 29 ainsi que la CNIL ont été évoqués à plusieurs reprises. La CNIL a procédé à un contrôle du système et le scanner est probablement ce qui la préoccupe le moins dans ce qui se passe à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.
Je ne lutterai pas contre le floutage, ce serait curieux de ma part, mais, à mon avis, il ne sert pas à grand-chose. À Roissy, je suis allé voir en zone d’embarquement et en sous-sol et j’ai regardé les images défiler. Franchement, pour reconnaître quelqu’un, il faut vraiment le vouloir ! Les images suscitent plutôt un mouvement de recul, car elles donnent l’impression de voir un film dont les acteurs seraient des zombies. Elles ne permettent pas de reconnaître qui ce que soit. Cela étant dit, si certains souhaitent flouter, pourquoi pas ?
Ce qui me paraît essentiel, c’est de respecter quatre conditions.
La première de ces conditions est la dissociation physique, matérielle. Elle est totalement réalisée à l’aéroport de Roissy, j’en témoigne, puisqu’il faut emprunter un couloir spécial et une entrée sécurisée avant d’accéder aux cabines où, m’a-t-on dit, deux personnes de sexe différent analyseront les images de personnes du même sexe qu’elles. De ce point de vue, il n’y a donc pas de difficulté.
Deuxième condition : il ne doit pas y avoir d’enregistrement. Les images doivent défiler au fil de l’eau. Si la situation reste celle-là, ce que je souhaite – et il n’y a pas de raison que cela change – il n’y aura pas de problème.
Troisième condition : le consentement de la personne. Celui-ci existe de fait, même s’il n’est pas particulièrement excitant, puisqu’il sera possible de se faire palper ou d’être scanné. Chacun ses goûts ! (Sourires.) Pour ma part, je préfère passer devant le scanner.
Donc non, on n’impose pas le scanner. On dit aux gens que s’ils veulent prendre l’avion en sécurité, en l’état actuel de la technologie, ils doivent se soumettre à la palpation ou au scanner. La CNIL, dans son rôle d’analyse de la proportionnalité, a considéré qu’il était justifié de laisser le choix aux passagers. J’ai d’ailleurs pu vérifier au cours de mes deux heures de présence à Roissy que 95 % d’entre eux – je ne connais pas le taux exact – choisissaient le scanner plutôt que la palpation.
Enfin, la dernière condition, c’est le maintien du scanner à ondes millimétriques. C’est le seul point qui me préoccupe encore aujourd'hui et sur lequel je souhaite vous interroger, monsieur le ministre.
Nous faisons là face à l’éternel problème de l’équilibre entre le respect de la sécurité et celui de la liberté. Le choix français est considéré par nombre de mes collègues européens comme étant moins performant en termes de sécurité. Certains considèrent que nous aurions dû aller jusqu’à utiliser les rayons X. Pour ma part, je trouve que le choix du gouvernement français de se contenter des dispositifs à ondes millimétriques, est, je le dis très clairement, raisonnable. Même s’il ne permettra pas de garantir la sécurité à 100 %, il l’augmentera considérablement, sans pour autant faire courir de risques aux passagers en termes de santé. Nous pensons donc qu’il s’agit d’un bon choix.
Cela étant dit, peut-être que dans quelques années la situation se sera tellement dégradée que M. le ministre viendra nous proposer de passer à un autre système, plus intrusif. Le débat sera alors de nouveau ouvert. Là se situe le véritable problème.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 236 n'a plus d'objet.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur l'amendement n° 150.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il me semble qu’il serait bon que nous puissions disposer d’une évaluation de la mise en œuvre de ce dispositif – l’amendement n° 150 vise à prévoir la réalisation d’une étude d’impact – au bout de six mois, voire d’un an d’utilisation, pour les raisons qui viennent d’être évoquées.
Les propos de notre collègue Alex Türk confirment qu’une évaluation des problèmes que peuvent poser les scanners, ainsi que de l’utilité du dispositif français par rapport à d’autres, est nécessaire. Il serait bien que nous puissions disposer d’une telle évaluation avant de constater que nous ne nous sommes pas posé les bonnes questions au bon moment.