Mme Virginie Klès. Je m’associe pleinement aux arguments qu’ont développés mes collègues MM. Anziani et Mézard, mais je souhaiterais y ajouter quelques remarques.
Parmi les motivations de ce durcissement du code pénal, j’ai entendu l’idée selon laquelle il fallait rétablir un certain respect envers les forces de l’ordre. C’est là un objectif parfaitement louable : oui, le respect est dû à ces hommes et à ces femmes qui risquent quotidiennement leur vie pour notre sécurité. Mais il s’agit, d’une manière plus générale, de rétablir le respect vis-à-vis de l’ensemble des détenteurs de l’autorité publique.
Or il me semble que, plutôt que par des peines incompressibles, cela passe d’abord par le respect, au plus haut niveau de l’État, de ces détenteurs de l’autorité publique que sont les élus et par le respect du Parlement. Tout cela irait plus de soi si l’on gouvernait dans le respect des fonctions et missions de chacun, et non avec un autoritarisme orgueilleux, qui s’exerce solitairement ; si l’on respectait la justice et son indépendance, sans se permettre de commenter ses décisions ; si l’on adoptait une attitude mesurée, au lieu de se complaire dans la déclamation, notamment quand il s’agit de délinquance ; si l’on évitait les jugements publics à l’emporte-pièce et les condamnations par voie de presse.
En un mot comme en cent, l’éducation et l’apprentissage du respect se font d’abord par l’exemplarité et la mesure des propos, des attitudes et des décisions, notamment lorsqu’il est question de délinquance. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Louis Nègre, pour explication de vote.
M. Louis Nègre. Là encore, ce que je viens d’entendre me sidère. Car vous avez beau être près des victimes, vous n’en parlez jamais ! (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Jean Desessard. Tiens, ça, c’est une nouveauté !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les victimes sont à droite, c’est bien connu !
M. Louis Nègre. Puis-je vous prier, pour la seconde fois, chers collègues, de me laisser parler ?…
M. Jean Desessard. Au contraire, nous aimons beaucoup vous écouter !
M. Louis Nègre. Cela montre, là encore, le manque de respect qui peut exister…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous discréditez votre camp !
M. Louis Nègre. En écoutant les orateurs précédents, je me disais que nous étions vraiment à la Haute Assemblée, et même à la « très haute assemblée », car nous planions dans des sphères très élevées ! (Sourires sur certaines travées de l’UMP.) Eh bien, à cette très haute assemblée je conseille de descendre un petit peu sur le terrain. Elle y verra ce que font actuellement nos policiers, nos gendarmes et même l’administration pénitentiaire, qui se trouvent face à des personnes déterminées et capables des pires violences, comme l’actualité le montre. S’il y a une LOPPSI, c’est justement pour adapter notre législation à une délinquance de plus en plus violente !
Nous avons tous constaté l’augmentation des violences contre les personnes. Alors, que faisons-nous ? J’attends vos réponses, chers collègues... (Nouvelles exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
On nous dit : « N’en rajoutez pas ! Il n’y a pas d’exemplarité de la peine et l’augmentation du quantum de la peine ne servira à rien ! » Si l’on suit votre raisonnement, il suffit de les bénir, et on n’en parle plus !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est proprement scandaleux d’entendre ça !
M. Louis Nègre. Eh bien, contrairement à ce que vous pensez, la peine incompressible existe, elle est même perpétuelle : c’est celle qui est infligée à la victime ! La victime, elle, elle est morte ! Et cette peine incompressible qu’elle purge ne prête à aucune discussion parce qu’il n’est pas possible de ressusciter les gens !
Alors, face à cette délinquance violente, quels sont les moyens qu’a la société pour faire passer, non pas un message médiatique, comme le prétendait M. Mézard, mais un message tout simple, consistant à dire que notre société n’accepte pas cette violence-là, que notre société prendra les dispositions nécessaires pour la combattre ? Moi, je considère que le Président de la République a bien raison de fixer les orientations qui sont traduites dans ce qui nous est proposé ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Desessard. Monsieur Nègre, gardez votre discours pour dans deux ans : vous pourrez tenir exactement le même !
M. Jean-Jacques Hyest. Espérons que non !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. M. Nègre nous a demandé ce que nous proposions, nous, de faire.
J’observe que la droite est au pouvoir depuis un certain temps et qu’elle parle beaucoup de sécurité. Alors, j’ai regardé les statistiques : le nombre de policiers n’a-t-il pas baissé de 10 % ?
M. Alain Fouché. Le ministre a déjà répondu, mais vous n’étiez pas là ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Desessard. S’il a déjà répondu, je m’en tiendrai là… Il a sans doute fait remonter le nombre depuis que j’ai lu ces statistiques ! (Rires.)
Mme la présidente. En conséquence un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 23.
L'amendement n° 375, présenté par M. Zocchetto, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 706-154 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Art. - 706-154 - Par dérogation aux dispositions de l'article 706-153, l'officier de police judiciaire peut être autorisé, par tout moyen, par le procureur de la République ou le juge d'instruction à procéder, aux frais avancés du Trésor, à la saisie d'une somme d'argent versée sur un compte ouvert auprès d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôts. Le juge des libertés et de la détention, avisé par le procureur de la République, ou le juge d'instruction se prononce par ordonnance motivée sur le maintien ou la mainlevée de la saisie dans un délai de dix jours à compter de sa réalisation.
« L'ordonnance prise en application du premier alinéa est notifiée au ministère public, au titulaire du compte et, s'ils sont connus, aux tiers ayant des droits sur ce compte, qui peuvent la déférer à la chambre de l'instruction par déclaration au greffe du tribunal dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance. Cet appel n'est pas suspensif. Le titulaire du compte et les tiers peuvent être entendus par la chambre de l'instruction. Les tiers ne peuvent pas prétendre à la mise à disposition de la procédure.
« Lorsque la saisie porte sur une somme d'argent versée sur un compte ouvert auprès d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôts, elle s'applique indifféremment à l'ensemble des sommes inscrites au crédit de ce compte au moment de la saisie et à concurrence, le cas échéant, du montant indiqué dans la décision de saisie. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Je le reprends, madame la présidente.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 424, présenté par M. Courtois, au nom de la commission des lois, dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 375.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à modifier à la marge la loi du 9 juillet 2010 sur les saisies et confiscations en matière pénale. Lors de l’examen de cette loi, le Sénat avait souhaité, sur proposition de notre collègue François Zocchetto, rapporteur de cette loi, que les saisies les plus importantes soient autorisées par le JLD en enquête préliminaire ou en flagrance.
Une telle procédure ne paraît pas tout à fait adaptée aux saisies sur comptes courants, qui nécessitent d’agir très rapidement. C’est pourquoi le présent amendement adapte à la marge le dispositif de la loi de juillet 2010 pour prévoir que, pour les seules saisies sur comptes courants, l’OPJ pourra être autorisé par le procureur de la République. L’équilibre souhaité par le Sénat n’est pas bouleversé puisque le JLD devra se prononcer dans un délai de dix jours sur le maintien ou la levée de la saisie.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 23.
L'amendement n° 102 rectifié, présenté par MM. Vasselle et Hérisson, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 721 du code de procédure pénale est abrogé.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 103 rectifié, présenté par MM. Vasselle et Hérisson, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article 721-1 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de mauvaise conduite du condamné en détention, le juge de l'application des peines peut être saisi par le chef d'établissement ou sur réquisition du procureur de la République aux fins de retrait, à hauteur de trois mois maximum par an et de sept jours par mois, de cette réduction de peine. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 391, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article 723-29 du code de procédure pénale, après les mots : « pour lesquels le suivi socio-judiciaire est encouru » sont insérés les mots : « ou d'une durée supérieure ou égale à cinq ans pour un crime ou un délit commis une nouvelle fois en état de récidive légale ».
La parole est à M. le ministre.
M. Brice Hortefeux, ministre. Cet amendement concerne l’extension de la surveillance judiciaire, c’est-à-dire, en clair, les bracelets électroniques.
Comme vous le savez, cette mesure de surveillance judiciaire est actuellement limitée aux personnes condamnées à une peine supérieure ou égale à sept ans d’emprisonnement pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est en cours. Ces conditions excluent donc qu’elle soit appliquée à des délinquants condamnés pour des délits de violences, de vol ou de trafic de stupéfiants.
La dangerosité de ces personnes justifie, aux yeux du Gouvernement, qu’elles soient soumises à des mesures de contrôle à l’issue de leur détention. L’objectif est très simple : il s’agit de limiter les risques de récidive.
Le Gouvernement propose donc, par cet amendement, d’étendre le champ de cette mesure à toutes les personnes condamnées une nouvelle fois en état de récidive légale à une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans.
Concrètement, cela signifie que ces condamnés, s’ils n’ont bénéficié d’aucun aménagement de peine et si une expertise a conclu à leur dangerosité, pourront être placés sous le contrôle d’un juge dès leur libération. Ils pourront se voir imposer un certain nombre d’obligations, notamment le port d’un bracelet électronique. L’objectif, vous le comprenez, est d’éviter une sortie « sèche » de délinquants condamnés pour des infractions graves en prolongeant leur surveillance hors des murs de la prison.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Le présent amendement prévoit d’élargir le champ de la surveillance judiciaire aux personnes condamnées à une peine de prison effective de cinq ans ou plus lorsque ces personnes ont précédemment été condamnées pour un même crime ou un même délit commis pour la troisième fois.
Dans la mesure où la surveillance judiciaire est strictement limitée dans le temps à une durée équivalente aux réductions de peines obtenues par le condamné et qu’elle constitue une « modalité d’exécution de la peine », comme l’a souligné le Conseil constitutionnel dans sa décision du 8 décembre 2005, cette extension de son champ aux multirécidivistes ne paraît pas soulever de difficulté juridique. Elle constituera, en outre, un outil supplémentaire permettant à l’autorité judiciaire de mieux lutter contre la récidive.
La commission des lois a donc donné un avis favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote.
M. Alain Anziani. Au fond, il s’agit là d’une peine qui succède à la peine. Certes, cela existe déjà, mais, avec cet amendement, on étend le champ d’application puisqu’on abaisse le seuil. Autrement dit, on en « rajoute » encore un peu.
Cela m’inspire deux réflexions.
Premièrement, à quoi sert la prison ? Finalement, ce qu’on nous dit, c’est que, lorsqu’une personne est libérée après sept ou, désormais, cinq ans de prison, il faut lui mettre un bracelet électronique pour continuer à la surveiller, ce qui signifie que toutes les actions qu’on a pu conduire à l’intérieur de la prison n’ont servi à rien.
Ce débat avait déjà eu lieu dans cet hémicycle il y a un peu plus d’un an, au sujet de la loi pénitentiaire. Nous avons alors été quasiment unanimes à souhaiter que la prison ne serve pas seulement à punir – car elle doit servir à punir, je le dis nettement –, mais qu’elle serve aussi à prévenir, et que donc, notamment, elle favorise l’insertion.
C’est tout de même un aveu d’échec que de maintenir une surveillance au bout de tant d’années de prison. C’est admettre que ce qui s’est passé en prison n’a eu, en termes d’insertion, aucun résultat.
Ma seconde observation concerne la démarche même du Gouvernement. Je ne comprends pas – ou je comprends trop bien – pourquoi on ne veut pas conserver une vision générale du code de procédure pénale. Il est tout de même assez extraordinaire que, d’un côté, le garde des sceaux soit en train de travailler à une réforme du code de procédure pénale, et que, de l’autre, par petits morceaux, on modifie plusieurs dispositions de ce même code, alors qu’il n’y a pas d’urgence manifeste à ravaler certaines parties de ce code avant d’avoir l’architecture d’ensemble de sa réforme.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il est effectivement tout à fait déplorable que le code de procédure pénale soit modifié ainsi par petits bouts.
Là, il ne s’agit plus d’une horreur contre laquelle nous devrions à tout prix faire quelque chose ; il s’agit seulement d’en mettre encore un peu plus dans la peine après la peine.
Au fond, il y a quelques membres de la majorité qui ont pensé qu’il était possible d’améliorer les prisons, de les rendre plus efficaces, c’est-à-dire de faire en sorte qu’on n’y entre pas pire qu’on y est entré. Ils ont été mollement suivis… Du reste, on ne peut pas dire que la loi pénitentiaire, qui contient donc malgré tout quelques avancées, soit mise en œuvre rapidement.
À côté de ceux-là, il y a tous ceux qui ne croient nullement à une amélioration de la prison et qui, au contraire, réclament toujours plus de prison, ou de surveillance après la prison, et le plus longtemps possible.
Quoi qu’il en soit, puisque la garde des sceaux prépare depuis déjà pas mal de temps une réforme du code de procédure pénale, nous n’allons pas, ici, commencer à le détricoter ou le retricoter !
Je dirai la même chose au sujet de l’amendement suivant, qui est franchement « fort de café » puisqu’il tend, par le biais de cette loi, à casser la justice des mineurs alors même qu’une discussion globale doit s’engager sur ce thème.
Permettez-nous de vous rappeler, monsieur le ministre, que nous sommes le législateur. N’agissez donc pas comme si nous étions quasiment inutiles ! Nous allons bientôt être appelés à examiner une réforme de la procédure pénale et de la justice des mineurs, ce qui prendra nécessairement un certain temps. Alors, de grâce, ne nous forcez pas la main en cherchant à nous faire adopter sans attendre des dispositifs qui, une fois encore, n’ont pas fait la preuve de leur efficacité.
Mme la présidente. La parole est à M. Louis Nègre, pour explication de vote.
M. Louis Nègre. Cet amendement vise à limiter le risque de récidive. Il est donc bienvenu.
Nous ne parlons pas ici de primo-délinquants, mais de délinquants d’habitude, ceux-là mêmes qui amènent la population à douter de l’efficacité de l’action des pouvoirs publics : comment ces gens-là, qui ont déjà été sanctionnés une fois, deux fois, trois fois, peuvent-ils continuer ?
Nous, nous sommes pour l’action. Nous ne sommes pas pour la philosophie ou la théorie.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous êtes pour l’idéologie !
M. Louis Nègre. Nous sommes pour la protection de nos concitoyens, notamment en nous opposant à ceux qui ont déjà commis une infraction grave, qui ont été sanctionnés, mais qui recommencent. Ne trouvez-vous pas légitime que, contre ces gens-là, la société prenne un certain nombre de dispositions ?
Cet amendement est particulièrement équilibré puisqu’il vise des personnes en état de récidive légale et dont – condition supplémentaire – une expertise a établi la dangerosité.
Vous êtes donc en train de nous expliquer que, bien qu’une expertise ait conclu à leur dangerosité, il faudrait les relâcher dans la nature sans prendre aucune précaution ! C’est contraire au bon sens et à la raison !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pitié !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 23.
L'amendement n° 388 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est ainsi modifiée :
1° La deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 5 est complétée par les mots : « ou par la procédure de convocation en justice prévue par l'article 8-3 » ;
2° Après l'article 8-2, il est inséré un article 8-3 ainsi rédigé :
« Art. 8-3. - Le procureur de la République peut poursuivre un mineur devant le tribunal pour enfants dans les formes de l'article 390-1 du code de procédure pénale si des investigations sur les faits ne sont pas nécessaires et si des investigations sur la personnalité du mineur ont été accomplies, le cas échéant, à l'occasion d'une procédure antérieure à un an.
« La convocation précise que le mineur doit être assisté d'un avocat et, qu'à défaut de choix d'un avocat par le mineur ou ses représentants légaux, le procureur de la République ou le juge des enfants font désigner par le bâtonnier un avocat d'office.
« La convocation est également notifiée dans les meilleurs délais aux parents, au tuteur, à la personne ou au service auquel le mineur est confié.
« Elle est constatée par procès-verbal signé par le mineur et la personne visée à l'alinéa précédent, qui en reçoivent copie. »
La parole est à M. le ministre.
M. Brice Hortefeux, ministre. Il est nécessaire, dans les affaires les plus simples et pour les mineurs dont la personnalité a déjà fait l’objet d’investigations, notamment à l’occasion de procédures remontant à moins d’un an, que le procureur de la République puisse saisir directement le tribunal pour enfants.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 422, présenté par MM. Longuet et J. Gautier, est ainsi libellé :
Alinéa 5 de l'amendement n° 388 rectifié.
Après les mots :
pénale si des investigations
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
supplémentaires sur les faits ne sont pas nécessaires et si ce mineur a déjà été jugé dans les six mois précédents pour des infractions similaires ou assimilées et qu'à cette occasion, tous les renseignements utiles sur sa personnalité et son environnement social et familial ont déjà été recueillis.
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Ce sous-amendement vise à préciser que le procureur de la République peut convoquer un mineur délinquant directement devant le tribunal pour enfants sans passer par une phase préalable de mise en examen par le juge des enfants dès lors que le mineur a été jugé dans les six mois précédents pour des infractions similaires ou assimilés.
L’intervention du juge des enfants permet de mieux connaître la personnalité du mineur délinquant. En effet, le juge s’efforce de trouver dans son mode de vie et son environnement les raisons qui peuvent expliquer sa fragilité, sa faiblesse, ses tentations. On peut considérer que, si le mineur a été jugé pour des infractions similaires ou assimilées dans les six mois précédents, le dossier est le même : cela permet de gagner du temps. Tous les pénalistes savent en effet que la rapidité de la justice – sans que cette justice soit pour autant expéditive – permet aux délinquants les plus jeunes et les plus faibles de mieux établir le lien entre le délit et la peine.
Je saisis l’occasion qui m’est ici donnée pour répondre à notre collègue Jean-Pierre Sueur.
J’ai été membre de la commission des lois à l’Assemblée nationale, puis au Sénat. Je peux donc comprendre et partager la culture juridique des commissaires.
Cela étant, je préside un groupe que les électeurs ont voulu important – c’est même le plus important du Sénat –, mais dont tous les membres ne siègent pas à la commission des lois. Le fait qu’ils s’expriment avec conviction et parfois même avec passion, comme notre ami Louis Nègre, montre leur volonté d’apporter rapidement des solutions aux problèmes qui préoccupent nos compatriotes.
Vous le savez, monsieur Sueur, ces situations sont vécues douloureusement dans un trop grand nombre de villes, même si, comme M. Hortefeux l’a rappelé, le taux d’élucidation a singulièrement progressé et les actes violents ont nettement diminué. Il faut dire que, depuis 2002, il y a une cohérence dans l’action dont vous êtes aujourd’hui le prolongateur, monsieur le ministre.
Il n’est pas donc pas anormal, cher collègue, que nous recherchions des synthèses. Les membres de mon groupe se sont efforcés, comme c’est leur responsabilité et leur devoir, de travailler avec l’exécutif pour essayer de rapprocher les points de vue. Ce n’est pas désavouer ou abaisser la fonction parlementaire que de débattre au sein d’un groupe à partir du texte de la commission – j’imagine que le groupe socialiste a aussi des débats –, puis de rechercher des solutions constructives permettant aux uns et aux autres de mieux se comprendre. Si nous n’agissions pas ainsi, vous pourriez nous accuser d’être suivistes vis-à-vis de l’exécutif ou d’être indifférents à son action. Nous ne sommes ni l’un ni l’autre. Notre groupe défend simplement ses convictions.
Je voudrais terminer par une observation.
Nous sommes, vous et nous, par définition, puisque nous sommes sénateurs, défenseurs du bicamérisme. Nous entendons être respectés par l’Assemblée nationale, mais nous devons également respecter celle-ci, notamment en lui permettant d’avoir un débat dont la jurisprudence, dite « de l’entonnoir », du Conseil constitutionnel pourrait la priver.
C’est parce que nous avons nos convictions et que nous respectons l’Assemblée nationale que nous avons présenté des amendements qui, ne vous en déplaise, monsieur Sueur, permettent de faire progresser le travail législatif au service de nos compatriotes. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L’amendement n° 388 rectifié tend à étendre aux mineurs la procédure de convocation par officier de police judiciaire – OPJ – aujourd’hui applicable aux seuls majeurs.
Pendant longtemps, le seul mode de poursuite possible contre les mineurs était l’ouverture d’une information judiciaire afin que le juge d’instruction ou le juge des enfants puisse mettre en œuvre, avant le jugement, des investigations sur la personnalité du mineur et des mesures éducatives provisoires.
Face à l’évolution de la délinquance des mineurs et à l’exigence de sanctionner rapidement les infractions commises par ces derniers, des procédures ont été créées afin d’accélérer les procédures de jugement.
Depuis 1996, la convocation par OPJ aux fins de jugement permet au parquet de convoquer par OPJ un mineur devant le juge des enfants, ce dernier ne pouvant toutefois prononcer que des mesures éducatives.
La loi du 5 mars 2007 a réformé la procédure de présentation immédiate, inspirée de la procédure de comparution immédiate applicable aux majeurs, mais en l’assortissant d’un certain nombre de garanties supplémentaires.
L’amendement n° 388 rectifié vise à étendre les outils dont dispose le parquet pour obtenir le jugement rapide d’un mineur délinquant par le tribunal pour enfants en ouvrant au procureur de la République la possibilité de convoquer un mineur par OPJ lorsque les faits sont clairs et que le parquet dispose déjà d’éléments récents sur la personnalité du mineur.
Cet amendement a posé un certain nombre de difficultés à la commission des lois.
Sur le fond, il étend à l’ensemble des mineurs, sans aménagement ni distinction d’âge, la procédure de convocation par OPJ applicable aux majeurs.
Le sous-amendement n° 422 apporte une amélioration en restreignant le champ de l’amendement au cas où le mineur a déjà été jugé pour des faits similaires au cours des six mois précédents.
À titre personnel, je suis très favorable à ce sous-amendement. Cependant, je dois dire que la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 422 ?
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote.