M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca, auteur de la question n° 1019, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Mme Catherine Tasca. Madame la secrétaire d'État, la confirmation de la fermeture de l’unité de cardiologie interventionnelle du centre hospitalier de Mantes-la-Jolie suscite une forte incompréhension au sein de la population de ce bassin de vie.
Cette incompréhension est partagée par les élus locaux et les professionnels de santé qui ont rapidement constitué un comité Cœur Hôpital Mantes, dont je salue la délégation conduite par Patrick Lefoulon, premier adjoint au maire de Mantes-la-Ville.
L’hôpital public de Mantes s’était vu autorisé en 2008 par l’Agence régionale de l’hospitalisation, l’ARH, à se doter d’une salle de coronarographie. Cette autorisation a été prise sur la base de plusieurs études portant sur la nécessité pour ce bassin de vie et les départements limitrophes de disposer d’un tel équipement. L’implantation de ce matériel performant pour un coût de 1,2 million d’euros s’est accompagnée du recrutement de deux médecins et de la formation des personnels nécessaires. Une équipe a été mise en place pour assurer le service vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Moins de six mois après l’ouverture de cette unité, l’Agence régionale de la santé, l’ARS, en décrète la fermeture. Cette décision reste incompréhensible à plus d’un titre.
Tout d’abord, cette fermeture constitue un véritable gâchis humain et financier au vu des moyens investis tant au niveau du personnel que du budget alloué à la rénovation du service.
Mais, surtout, elle repose sur une application rigide de l’arrêté du 14 avril 2009 : elle part du constat comptable d’un nombre d’actes inférieur au seuil fixé par le décret, ce qui apparaît pourtant assez normal pour un service opérationnel depuis seulement six mois.
Or, on observe sur cette même période une augmentation ininterrompue des actes réalisés. Ainsi, les examens pris globalement ont crû de 29 %, les coronarographies de 14 % et les dilatations coronaires en urgence de 304 %, ce qui devait assurer à cette unité d’atteindre, au plus tard au premier semestre de 2011, l’objectif des 350 actes.
Enfin, nous avons appris mercredi dernier la fermeture de l’unité de soins intensifs cardiologiques. L’ARS avait pourtant assuré que la fermeture de l’unité de cardiologie interventionnelle ne remettait pas en cause l’unité de soins intensifs cardiologiques.
On nous affirme que cette fermeture est temporaire, mais il est manifeste que c’est l’ensemble du service de cardiologie de l’hôpital public de Mantes-la-Jolie qui est aujourd’hui menacé.
Madame la secrétaire d'État, le Gouvernement entend-il demander à l’ARS de revenir sur cette fermeture et de proroger l’ouverture du service de cardiologie interventionnelle pour une période de dix-huit mois, seule décision à même de permettre une évaluation objective de la pertinence de cette offre de soins ?
Le Mantois, pauvre en structures de santé publique, est un bassin de vie qui regroupe des populations souvent défavorisées, mais qui connaît une réelle expansion démographique et pour lequel les élus travaillent à dessiner de nouvelles perspectives de développement.
Votre réponse nous éclairera sur la volonté réelle du Gouvernement de soutenir ou non le développement de ce bassin de vie, trop longtemps laissé pour compte.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. Madame la sénatrice, vous interrogez la ministre de la santé et des sports sur le devenir du service de cardiologie interventionnelle du centre hospitalier de Mantes-la-Jolie.
De nouveaux décrets définissant les conditions techniques de fonctionnement conditionnent désormais l’autorisation d’activité de cardiologie interventionnelle à un seuil minimal d’activité fixé à 350 actes de cardiologie interventionnelle par an. L’Agence régionale d’hospitalisation d’Île-de-France a logiquement intégré cette condition dans son nouveau schéma régional d’organisation sanitaire portant sur l’activité de cardiologie. Les établissements souhaitant assurer une activité de cardiologie interventionnelle ont été invités à déposer, au cours de l’été 2010, un dossier de demande d’autorisation.
Pour sa part, le centre hospitalier de Mantes-la-Jolie avait développé, depuis 2007, une activité dans ce domaine, sans obtenir l’accord préalable de l’ARH d’Île-de-France. Il a, de ce fait, pris la décision de ne pas déposer de dossier de demande d’autorisation auprès de l’Agence régionale de santé d’Île-de-France. L’établissement, conscient de ne pas être à même d’atteindre le seuil fixé, a renoncé à ce projet. Cette activité a certes progressé entre 2007 et 2009, mais sans atteindre le seuil requis : 86 actes d’angioplastie coronarienne en 2007, 83 en 2008 et 136 en 2009. L’activité se situe par conséquent en dessous du seuil réglementaire et, au regard des conditions d’implantation, l’ARS d’Île-de-France n’aurait pu autoriser cette activité.
Elle l’aurait d’autant moins autorisée que le département des Yvelines comprend quatre centres pratiquant l’activité de cardiologie interventionnelle, qui garantissent une prise en charge en urgence des patients de façon satisfaisante : deux centres publics – Versailles et Poissy-Saint-Germain-en-Laye – et deux centres privés – Evecquemont et Parly 2.
La sécurité des soins est donc assurée pour les habitants du territoire de Mantes-la-Jolie, et nous n’avons de problèmes ni d’aménagement du territoire ni d’accessibilité à une offre de soins publique.
Une coopération active peut, d’ailleurs, être engagée par le centre hospitalier de Mantes-la-Jolie avec le centre d’Evecquemont, situé à vingt-sept kilomètres. Elle permettrait aux praticiens du centre hospitalier qui le souhaitent de poursuivre une activité de cardiologie interventionnelle.
Cette action, outre qu’elle renforcera les liens entre les structures au bénéfice des patients, sera de nature à maintenir l’attractivité du centre hospitalier pour le recrutement de nouveaux cardiologues. Roselyne Bachelot a demandé à l’ARS d’Île-de-France de solliciter le centre d’Evecquemont pour connaître ses projets dans ce domaine et l’inciter à mettre en place une telle coopération.
Le centre hospitalier de Mantes-la-Jolie a donc logiquement cessé son activité de cardiologie interventionnelle en juillet 2010, sans qu’il en résulte de manquement à la continuité des soins, et poursuit ses activités d’hospitalisation complète et de soins intensifs en cardiologie.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.
Mme Catherine Tasca. Madame la secrétaire d’État, votre réponse ne nous rassure pas et, de surcroît, vous n’apportez aucun élément d’explication. Nul ne peut croire que la création d’un service de cette importance à l’hôpital de Mantes-la-Jolie s’est faite sans autorisation : il est bien évident que le service avait obtenu le feu vert de l’Agence. Nous avons donc véritablement la démonstration de l’impéritie de la gestion du secteur public de la santé.
Les règles ont changé. Nous demandons au Gouvernement de suspendre la décision de fermeture et de donner une chance réelle à l’établissement de respecter le contrat, c'est-à-dire d’atteindre le nombre d’actes requis. L’établissement était prêt à le faire. Claude Évin, le directeur de l’ARS, a d’ailleurs lui-même reconnu que le nombre d’actes était en progression constante.
Vous devez savoir que la carte de santé du département des Yvelines est très pauvre en structures publiques. L’hôpital de Mantes-la-Jolie a été inauguré en grande pompe par le président Chirac il n’y a pas si longtemps. Il dessert une population particulière, nombreuse, en expansion, et souvent très défavorisée. La décision qui a été prise et la réponse que vous venez de me faire démontrent que l’État et l’Agence ont choisi de favoriser le développement des structures privées.
Vous nous renvoyez sur l’hôpital d’Evecquemont, structure privée, qui couvre d'ailleurs un territoire beaucoup moins bien desservi que celui de Mantes-la-Jolie. Il est clair que le Gouvernement n’a pas comme objectif d’étendre le secteur public de santé. Il en va d’ailleurs de même à Trappes, où un hôpital privé assure le service aux habitants.
Nous ne sommes donc absolument pas satisfaits de l’option qui semble être la vôtre dans ce domaine. Toute confirmation de la fermeture de l’unité de cardiologie interventionnelle équivaudrait pour le département des Yvelines à creuser un peu plus les inégalités d’accès aux soins et la fracture territoriale.
état d'avancement du projet de branche sud du tgv rhin-rhône
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, auteur de la question n° 1022, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, mes chers collègues, le projet Rhin-Rhône, né dans les années quatre-vingt-dix, avait pour vocation de réaliser une desserte ferroviaire verticale allant de l’Alsace à Barcelone, ce qui aurait permis de réaliser le premier TGV ne reliant pas Paris.
Le 11 décembre 2011, la branche Est du TGV Rhin-Rhône sera mise en service. Les deux autres branches, Est et Sud, ont toujours figuré au projet et devaient, notamment pour la branche Sud, avancer concomitamment ou dans la foulée de la branche Est. On m’a toujours assuré que la branche Sud ne serait, en aucun cas, remise en cause. Or, depuis quelque temps, il n’est plus possible de parler de cette branche sans entendre : « Si elle se fait... ».
Certes, il y a eu les études préalables, l’enquête publique avec des propositions de tracés, notamment pour la partie nord, dans le département du Jura, pour lequel j’ai toujours pensé que le tracé longeant l’autoroute A 39 n’était pas la bonne option.
Pourtant, Réseau ferré de France vient seulement de remettre sa copie au préfet de région coordinateur, alors qu’il aurait dû le faire au début de l’année. Par ailleurs, il semble que des études socio-économiques complémentaires aient été commandées. Doit-on y voir un enterrement de la branche Sud ? Beaucoup le murmurent et les opposants se frottent déjà les mains.
Il faut dire que ni l’Union européenne, ni l’État, ni RFF, ni les collectivités n’ont encore chiffré leur participation financière à ce projet. Pis, tout en se disant favorable à celui-ci, la présidente de la région Franche-Comté a laissé entendre qu’elle n’envisageait pas de le financer, arguant des difficultés financières de la région.
Il semble aussi que la branche Sud ne figure plus parmi les axes prioritaires du schéma européen des infrastructures de transport.
Je peux comprendre que les estimations portant sur la rentabilité d’une telle ligne – 1 000 à 1 100 voyageurs par jour – ne soient guère enthousiasmantes pour d’éventuels financeurs. En tant qu’élu jurassien, il est donc de mon devoir d’insister : sans cette branche, sans oublier les gares, il n’y aura plus de TGV à long terme dans le Jura !
Les Jurassiens comme les élus des communes concernées par les différents tracés sont dans l’attente. Ils aimeraient rester optimistes, mais ils sont légitimement inquiets devant les rumeurs qui, elles, circulent à grande vitesse.
Dans ce dossier, il est temps de trancher, d’autant que des sommes importantes ont déjà été englouties dans des études. Si cette branche est jugée non rentable, si personne n’envisage de la financer, qu’on le dise franchement au lieu d’ordonner des études complémentaires.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous, sans utiliser la langue de bois, apporter une réponse à tous ceux qui soutiennent le projet de branche Sud ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. Monsieur le sénateur, vous avez souhaité appeler l’attention du secrétaire d’État chargé des transports sur l’état d’avancement du projet de branche Sud du TGV Rhin-Rhône.
Comme vous le savez, la branche Sud de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône doit relier la branche Est entre Dijon et Mulhouse, qui est en cours de construction depuis 2006 et sera mise en service à la fin de 2011, à l’agglomération lyonnaise. Ce projet vise à réduire les temps de parcours vers la vallée du Rhône et l’ensemble de l’arc méditerranéen ; il vise également à permettre la circulation d’un plus grand nombre de trains de fret sur l’axe nord-sud.
Dans le cadre des études préliminaires de la branche Sud, Réseau ferré de France, maître d’ouvrage de l’opération, a étudié différents fuseaux de passage. Une consultation formelle de l’ensemble des acteurs concernés, et donc des élus, a été menée jusqu’au 31 décembre 2009. Le préfet de région Franche-Comté, préfet coordonnateur du projet, remettra à Jean-Louis Borloo le bilan de cette consultation et son avis dans les toutes prochaines semaines.
Comme vous le soulignez, cette consultation a donné lieu à de nombreuses contributions et à de multiples prises de position de la part de tous les acteurs concernés. Il en sera fait une analyse approfondie dès que les conclusions du préfet de région auront été transmises. Le Gouvernement sera donc en mesure de décider des suites à donner à l’étude de ce projet après avoir pris connaissance des conclusions des études préliminaires, des résultats de cette consultation et du rapport du préfet.
Je souhaite également vous préciser que ce projet est inscrit au programme des 2 000 kilomètres de lignes ferroviaires nouvelles à grande vitesse, à lancer d’ici à 2020, figurant dans la loi Grenelle I. Ce projet est d’ailleurs inscrit dans l’avant-projet du schéma national des infrastructures de transport publié au mois de juillet.
Vous le savez, le schéma sera soumis au Parlement dans le cadre d’un débat sans vote, qui doit intervenir, au sein de votre assemblée, d’ici à la fin de l’année. Vous aurez alors l’occasion de rappeler l’attachement que vous portez à ce projet.
Je vous confirme également que, comme la branche Est, la branche Sud de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône fait bien partie de l’axe prioritaire n° 24 du réseau transeuropéen de transport, qui relie notamment Lyon aux ports de Rotterdam et d’Anvers via Bâle.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de cette réponse. Cependant, j’entends ce discours depuis des mois sans que le dossier avance.
Ainsi, le point de savoir si la branche Sud sera ou non une ligne mixte fret et voyageurs n’a toujours pas été tranché. Or créer une ligne mixte ou une ligne à grande vitesse est totalement différent.
En outre, vous m’indiquez que ce projet fait toujours partie de l’axe prioritaire du réseau transeuropéen de transport. Or, quand on se renseigne directement auprès de Bruxelles, il semble en avoir disparu.
Nous aurons l’occasion de soulever à nouveau ce problème lors du débat que vous avez évoqué, qui devrait avoir lieu d’ici à la fin de l’année. En attendant, je ne peux me satisfaire de cette réponse.
fiscalité du floc de gascogne
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, auteur de la question n° 920, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la fiscalité des vins de liqueur est toujours prohibitive. Le Floc de Gascogne, comme le Pineau des Charentes, fait partie de cette catégorie taxée à 1,63 euro la bouteille, alors que les deux autres catégories, les vins doux naturels et les vins aromatisés industriels, qui ont des caractéristiques similaires, sont respectivement taxés à 40 centimes et à 3 centimes la bouteille.
Quand les vins aromatisés industriels comme le Martini augmentent de 1 centime, le Floc de Gascogne augmente de 63 centimes, ce qui crée une distorsion de concurrence considérable et génère de l’injustice. Cette disparité de taxation entre des vins apéritifs qui ont tous un degré d’alcool compris entre quinze et dix-sept degrés est, je le répète, totalement injuste, et donc inacceptable.
Le produit de cette taxe rapporte 3 millions d’euros à l’État. Certes, dans une période où les recettes sont maigres, le moindre euro compte. Mais, dans un avenir très proche, ces recettes disparaîtront avec les producteurs de Floc.
Dans une région où l’esca fait des ravages, où les revenus des viticulteurs, comme ceux de l’ensemble de la population agricole, sont en forte chute, où les contraintes environnementales sont lourdes et les rendements bas, une fiscalité à un tel niveau stérilisera l’économie. Pour alerter l’État et l’opinion sur leurs difficultés, les producteurs de Floc et de Pineau, rejoints par ceux du Macvin du Jura, ont été conduits à décider, ce qui est grave, une grève fiscale.
Représentants, eux aussi, de la viticulture française, les producteurs de vins de liqueur n’acceptent pas la taxation démesurée et discriminatoire de leurs produits, discrimination dont ils attendent toujours la justification.
En décembre 2002, Alain Lambert, alors ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, avait mis en place un plan quinquennal de soutien en faveur des vins de liqueur AOC. Le Gouvernement compte-t-il reconduire ce plan ? Envisage-t-il de prendre d’autres mesures ?
Madame la secrétaire d’État, essayez donc de justifier cette fiscalité discriminatoire. Je sais que vous ne pourrez y parvenir. En conséquence, quand le Gouvernement remédiera-t-il à cette injustice en taxant de la même façon des produits similaires ?
M. Gilbert Barbier. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. Monsieur le sénateur, la fiscalité applicable au Floc de Gascogne relève en effet de l’application de la section IV relative aux produits intermédiaires de la directive du 19 octobre 1992 concernant l’harmonisation des structures des droits d’accises sur l’alcool et les boissons alcooliques.
Ces produits comprennent, d’une part, les boissons fermentées ne résultant pas entièrement d’une fermentation et ayant un titre alcoométrique volumique excédant 5,5 % par volume pour les boissons non mousseuses, comme par exemple le Floc de Gascogne ou le Pineau des Charentes, et 8,5 % par volume pour les boissons mousseuses et, d’autre part, les boissons fermentées résultant entièrement d’une fermentation, dont le titre alcoométrique volumique est supérieur ou égal à 15 % et inférieur à 22 %.
Certains produits industriels dont l’alcool résulte entièrement d’une fermentation, et dont le titre alcoométrique volumique ne dépasse pas 15 % par volume, bénéficient d’une fiscalité inférieure applicable aux boissons fiscalement assimilées au vin. Ces produits, considérés communément comme des apéritifs et fabriqués traditionnellement à base de vin aromatisé muté à l’alcool, ont adapté leur processus de fabrication pour bénéficier d’une fiscalité réduite.
Conscientes des conséquences préjudiciables qui peuvent naître de cette différence de taxation entre des produits similaires pour le consommateur, les autorités françaises ont évoqué cette question lors du Comité des accises de l’Union européenne de janvier 2010. Dans ce cadre, tous les nouveaux processus de fabrication des boissons font actuellement l’objet de travaux issus d’une étude communautaire.
Toutefois, les vins de liqueur et ces produits industriels étant des catégories distinctes, il ne sera pas possible d’amener le tarif applicable aux produits intermédiaires à un niveau comparable à celui des vins. En effet, le taux minimum communautaire applicable aux produits intermédiaires reste fixé à un niveau beaucoup plus élevé que celui applicable aux vins. Conscient des problèmes des vins de liqueur AOC, le Gouvernement a engagé une réflexion sur la fiscalité applicable aux vins de liqueur.
Il est à noter cependant que toute modification brutale de la structure de taxation nationale risquerait de provoquer des déséquilibres préjudiciables à l’ensemble du secteur des boissons alcooliques.
S’agissant de l’indexation annuelle des droits d’accises sur les prix à la consommation qui s’applique à tous les produits alcooliques, elle ne fait que compenser l’érosion monétaire des taxes qui n’évoluent pas avec la valeur des produits.
Dans ces conditions, et compte tenu de leur impact, les évolutions de fiscalité sur ces produits ne peuvent intervenir sans une concertation interministérielle associant, d’une part, le ministère de l’agriculture et, d’autre part, le ministère de la santé.
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Madame la secrétaire d’État, je comprends la distinction que vous opérez entre les vins de liqueur et les autres boissons alcooliques. Reste que vous ne justifiez pas leur différence de taxation, qui est prohibitive et totalement injuste. D’ailleurs, aucun membre du Gouvernement n’est parvenu à justifier cette disparité.
Cependant, je constate que vous laissez la porte ouverte en indiquant que le Gouvernement réfléchit à une façon de réparer cette injustice. Il est vrai que, en France, comme souvent, on se contente de procéder à des aménagements quand on constate qu’une situation est anormale. En l’occurrence, il vaudrait mieux repartir de zéro et voir comment on peut taxer de la même façon des produits similaires.
réforme de la formation des enseignants
M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle, auteur de la question n° 1003, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
M. Philippe Madrelle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis la rentrée scolaire, de très nombreux rapports sur l’éducation ont été publiés dans notre pays. Leurs conclusions sont extrêmement alarmantes.
La gravité de tels constats exigerait des réponses fortes, capables de mettre un terme à ces échecs et de redonner au service public de l’éducation nationale un rôle prioritaire. On en est malheureusement très loin avec la réforme de la formation des enseignants, qui risque d’avoir des conséquences particulièrement néfastes sur l’ensemble du système éducatif.
La loi Fillon du 23 avril 2005, qualifiée de loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, précisait le rôle des IUFM, les instituts universitaires de formation des maîtres. Faisant alterner des périodes de formation théorique et de formation pratique, les cours dispensés par les IUFM donnaient satisfaction. Dès lors, pourquoi avoir imposé une telle réforme souvent qualifiée d’« aberrante » par les professionnels eux-mêmes ?
Les lauréats des concours de 2009 – avant cette réforme, donc – ont accompli une année de formation en alternance, alors que les lauréats des concours de 2010 sont passés directement des connaissances théoriques universitaires à une classe. Vous serez d’accord, monsieur le ministre, pour dire que le tout jeune enseignant que l’on plonge ainsi brutalement dans une classe doit être doté de solides qualités et équilibré psychologiquement pour réussir à se faire respecter.
Pourquoi avoir pris le risque d’accroître les difficultés des enseignants débutants, qui doivent assurer un service d’enseignement aussi lourd que celui des enseignants chevronnés ?
Pour passer les épreuves orales et écrites d’un master 2 effectué en deux ans ou plus, les étudiants devront faire face à un programme d’études ambitieux, avec de très nombreuses heures de cours, sans bénéficier d’une formation pédagogique digne de ce nom. Loin de les préparer au terrain, cette « universitarisation » subite et précipitée de la formation constitue une prise de risque dangereuse pour l’étudiant qui aura à participer à une course d’obstacles particulièrement difficile. En outre, cette « universitarisation » renforcera et amplifiera les inégalités sociales en raison de temps d’études de plus en plus longs, de coûts de plus en plus lourds, sans oublier une sélection de plus en plus sévère, voire cruelle.
Monsieur le ministre, permettez-moi de souligner le caractère paradoxal de telles mesures au moment où l’on assiste à la multiplication de dispositifs d’admission préférentielle destinés à aider les élèves les plus défavorisés. Hélas, ces dispositifs ne sont que cosmétiques, largement insuffisants pour ne pas dire inopérants !
Les étudiants qui se retrouvent dans ce parcours de mastérisation mi-universitaire, mi-professionnel ne bénéficient plus de véritable formation en alternance. Ils doivent se contenter de « compagnonnage » et de « stages en responsabilité ». On peut donc s’interroger sur les modalités de formation et de rémunération de ces « compagnons ». Selon quels critères les professeurs expérimentés seront-ils appelés à exercer ce tutorat sur les étudiants ? Aucun contenu précis ni aucune définition n’ont été apportés à cette formation.
Monsieur le ministre, vous en conviendrez, cette réforme a été décidée dans la plus grande confusion. Les textes d’application restent vagues, très flous et obscurs en ce qui concerne les orientations. Chaque académie va être libre d’interpréter les textes : on peut alors craindre que la mise en concurrence des universités, déjà effective par endroits, n’accentue les inégalités entre les rectorats, les départements et les régions. Une telle réforme peut engendrer de très bons étudiants, futurs précaires de l’éducation nationale, et non pas de bons enseignants. Enseigner est un métier, un métier qui s’apprend.
Lourde à mettre en œuvre, contraire à l’égalité républicaine, une telle réforme remet en cause la continuité du service public. Force est de constater que l’éducation nationale n’échappe pas elle non plus à cette idéologie de l’ultralibéralisme qui réduit les services publics et supprime les fonctionnaires. La politique d’éducation nationale est loin d’être à la hauteur des ambitions affichées.
Comme le remarque fort justement l’écrivain, réalisateur mais aussi professeur Philippe Claudel, « quand une société n’est plus capable de reconnaître le rôle civilisateur de l’éducation, de comprendre que cette fonction est essentielle et qu’elle doit s’exercer dans des conditions satisfaisantes, elle marche sur la tête. »
M. le président. Monsieur Madrelle, je vous rappelle que le temps de parole dont dispose l’auteur de la question est de trois minutes.
La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Madrelle, le recrutement et la formation des enseignants sont des enjeux essentiels pour la performance de notre système éducatif. C’est ce qui nous a poussés à prolonger d’une année la formation de ceux-ci. Une telle mesure traduit la haute ambition que nous avons pour l’école ; nous avons ainsi aligné la durée de formation de nos enseignants sur celle de la plupart des pays développés.
Cette évolution se traduit d’abord par une exigence disciplinaire – il s’agit de recruter les meilleurs dans leur matière – mais aussi par une capacité d’adaptation à l’évolution des connaissances.
Je le dis clairement, l’excellence académique et la transmission des savoirs ne sont pas contradictoires. Le nouveau concours que nous avons instauré reflète d’ailleurs cette complémentarité : les épreuves écrites attestent de la maîtrise des savoirs à enseigner, tandis que les épreuves orales d’admission valorisent la capacité à concevoir et à développer une séquence d’enseignement.
Cependant, comme vous l’avez indiqué, l’apprentissage du métier d’enseignant passe d’abord par la pratique. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de mettre en place des séquences à la fois d’observation et de mise en situation pendant les études.
Dorénavant, en première année de master, les étudiants qui se préparent au concours effectueront 108 heures de stage d’observation et de pratique accompagnée. Lors de leur deuxième année de master, c’est-à-dire en cinquième année d’études, ils pourront même exercer la totalité des missions confiées à un enseignant à l’occasion de stages de mise en situation de 108 heures également. De plus, ils seront encadrés par des professeurs expérimentés tout au long de leur formation.
Une fois le concours obtenu, les professeurs stagiaires effectuent dorénavant des stages de formation au sein de leur académie d’accueil. C’est une nouveauté mise en place à la rentrée dernière. Ils sont ensuite accompagnés et encadrés par un professeur expérimenté dans le cadre d’un tutorat. S’effectuant sur la base du volontariat, ce tutorat est valorisé puisque chaque enseignant-tuteur perçoit une rémunération. Dans le premier degré, l’accompagnement est d’ailleurs très actif puisque ces tuteurs sont présents dans les classes, en doublon avec les professeurs stagiaires, jusqu’aux vacances d’automne.
En outre, tout au long de l’année scolaire, les professeurs stagiaires bénéficient d’une formation complémentaire sur mesure dont les heures peuvent être réparties au cours de la semaine ou groupées par séquence de formation au cours de l’année.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, nous avons pris toutes les dispositions pour relever le niveau de formation de nos enseignants, afin qu’il y ait une complémentarité entre le savoir disciplinaire et la pédagogie.
L’année 2010-2011 constitue une année transitoire, vous le savez, puisque les élèves qui ont été reçus au concours ont commencé leurs études sous l’ancien système. Nous ferons un premier bilan au cours du mois de novembre et, si cela était nécessaire, nous pourrions apporter des améliorations au dispositif pour la rentrée prochaine.