M. Daniel Raoul. C’est la réalité !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … qui permettent d’assumer des compétences que l’État n’assumait qu’imparfaitement par le passé. Vous me rétorquerez que ce n’est pas parce que vous avez été mauvais que nous devons l’être également ! Un observatoire a été mis en place à l’époque et il appartient à ce dernier de dire si, effectivement, la compensation est ou non au rendez-vous.
Mais au-delà – et j’en appelle au ministre François Baroin et au Gouvernement –, il m’apparaît que l’on ne peut pas laisser se répandre auprès des élus locaux certaines idées qui s’apparentent à de l’intoxication. Certains cherchent à propager la psychose dans l’esprit des maires, qui ne savent plus qui croire dans cette affaire. Il faudrait, au niveau national, réussir à faire passer un message auprès des élus pour contrecarrer les propos infondés que tient l’opposition.
Bien entendu, je soutiens la position de la commission des finances, mais il faut tout de même réagir. Nous le faisons sur le terrain, mais nous avons du mal à nous faire entendre, car nous ne sommes pas suffisamment relayés par les médias.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre. Monsieur Vasselle, d’abord, vous avez raison, la problématique des collectivités territoriales passe rarement le cap du journal de vingt heures ! Bien qu’extrêmement technique et complexe, le sujet est d’une telle importance – il a trait à la définition des politiques publiques dans les bassins de proximité qui concernent l’ensemble des Français – qu’il justifierait une petite chronique quotidienne. Pourrait ainsi être abordée la réalité de l’évolution de la fiscalité locale et territoriale, matrice d’explication de la dotation globale de fonctionnement, de la dotation de solidarité rurale, de la dotation de solidarité urbaine, du fonds de compensation de la TVA, etc.
Cela étant, monsieur Vasselle, lors de mon intervention à la tribune, j’ai apporté, en réponse aux polémiques actuelles, les éléments…
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne le conteste pas !
M. François Baroin, ministre. … qui pourront être utilisés par toutes celles et tous ceux qui soutiennent l’action du Gouvernement…
M. Jean-Marc Todeschini. Sur le terrain, ils ne sont pas nombreux !
M. François Baroin, ministre. … pour contrecarrer la propagande mensongère, injuste et en conséquence irresponsable (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) sur la corrélation entre la déclinaison de la réforme de la taxe professionnelle et ses retombées concernant la taxe d’habitation. De ce point de vue, le Gouvernement a été clair.
Par ailleurs, nous pouvons préciser aussi que, dans le gel des dotations de l’État aux collectivités locales, le Gouvernement n’a pas retenu le FCTVA, et tous les investissements qui seront portés par les collectivités locales le seront grâce à cette mesure. En conséquence, aucun représentant de l’opposition se trouvant à la tête d’une collectivité territoriale ne pourra dire qu’il bloque son investissement parce que le Gouvernement l’empêche d’agir. Comme le FCTVA est en dehors du rabot, le potentiel d’investissement est maintenu. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument ! C’est la vérité !
M. François Baroin, ministre. Écoutez bien ces messages que vous n’avez pas fini d’entendre, et qui vont certainement vous énerver !
M. Daniel Raoul. Cela ne nous énerve pas !
M. François Baroin, ministre. Aux mensonges que vous ne cessez de répéter, nous allons répondre par autant de vérités ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Si, à gauche, vous voulez continuer d’augmenter les impôts locaux, conformément à la doctrine systématique qui est la vôtre (Exclamations sur les mêmes travées.),…
M. Jean-Marc Todeschini. « Qui paie ? » : voilà votre bréviaire !
M. François Baroin, ministre. … à l’échelon régional, départemental ou municipal, vous devrez assumer que c’est pour faire du fonctionnement, de l’embauche, pour dégrader les ratios de personnel par rapport aux charges de fonctionnement, mais ne dites pas que vous le faites parce que le Gouvernement vous a retiré de l’argent et que cela vous empêche d’investir !
Nous aurons donc, lors du congrès des maires, devant l’ensemble des associations départementales ou régionales, à l’occasion des débats entre l’État et les collectivités territoriales, …
M. Daniel Raoul. Vous n’allez pas être déçu !
M. François Baroin, ministre. … tous les arguments pour expliquer que nous sommes dans une logique de réduction de déficit, dans un effort partagé, mais que nous préservons l’essentiel, à savoir l’investissement local, le soutien à la commande publique, donc à l’activité économique. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. François Marc. On verra !
M. Bernard Frimat. Vous n’y croyez pas vous-même !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Je soutiens bien évidemment l’amendement du groupe socialiste. En revanche, je ne peux pas souscrire aux propos de M. le ministre sur le fait que les collectivités territoriales, aujourd’hui, comme l’a souligné notre collègue Alain Vasselle, prennent prétexte d’une situation difficile pour ne pas apporter aux autres collectivités les crédits dont celles-ci ont besoin. Ce n’est pas un prétexte, c’est une réalité !
Le nombre de bénéficiaires du RSA, le revenu de solidarité active, qui a remplacé le RMI, le revenu minimum d’insertion, est en forte augmentation ; c’est l’une des conséquences de la crise économique, on le sait bien. Les collectivités, quel que soit leur choix, apportent simplement des réponses en tant que prestataires de services à partir d’un texte qui a été voté dans les deux assemblées. C’est par conséquent la mise en œuvre d’une réponse à des ayants droit.
La situation est la même en ce qui concerne le handicap ou l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie. C’est une réponse à des ayants droit. Ce ne sont pas des dépenses que les collectivités ont la capacité de maîtriser. Dès lors que ces dépenses obligatoires ne sont pas compensées, les collectivités sont confrontées à des difficultés pour continuer à assumer les politiques qu’elles ont définies. C’est pourquoi, je le répète, je ne peux que souscrire à la formulation retenue dans l’amendement n° 1.
Monsieur le ministre, sortir la TVA de l’enveloppe normée cette année ne prêtait à aucune conséquence pour le Gouvernement : c'est la raison pour laquelle il a été facile pour lui de le faire. Une réintégration de la TVA donnerait un tout autre résultat en termes de gel de la dotation.
Mme la présidente. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. À M. le rapporteur général qui me suggérait de retirer mon amendement, je répondrai que cela ne me paraît pas souhaitable ! Je retiens d’ailleurs des explications de M. le ministre un argument supplémentaire en faveur de mon amendement. En effet, dans son intervention liminaire, M. Baroin nous a affirmé que le Gouvernement n’allait pas augmenter les impôts, ni l’impôt sur le revenu, ni celui sur les sociétés, ni la TVA. Cela me paraît quelque peu contradictoire avec les propos qu’il vient de tenir à l’instant même, lorsqu’il a dit que, pour développer les investissements locaux, il allait peut-être falloir augmenter les impôts et que, au fond, la décision revenait aux élus locaux.
M. François Marc. Voilà, monsieur le ministre, le point crucial ! Dans la loi réformant la taxe professionnelle, vous avez réduit l’autonomie fiscale des collectivités. Je le rappelle, pour les départements, cette dernière est passée de plus de 30 % à seulement 12 %. Si vous nous recommandez d’augmenter les impôts, on voit bien quel transfert d’impopularité vous nourrissez de vos vœux ! Puisque l’État n’augmentera pas la dotation, c’est aux élus locaux que reviendra la responsabilité d’augmenter les impôts.
C’est bien là que se situe le problème : le coût des compétences transférées aux collectivités, en l’espèce aux départements, augmente mécaniquement de plus de 4 % par an. Si le taux d’augmentation des recettes provenant de l’État est bloqué à 0,6 %, on ne peut que constater, année après année, un effet de ciseaux manifeste. Dans ce contexte, que vous avez vous-même créé, il est choquant de vous entendre proposer aux collectivités d’augmenter les impôts locaux.
C'est la raison pour laquelle il nous semble tout à fait pertinent d’exclure de la norme d’évolution des dépenses des collectivités territoriales toutes les compétences qui ont été transférées – et je réponds là à Alain Vasselle – depuis une dizaine d’années. Je pense par exemple à l’APA, dont le coût a progressé de façon relativement importante ces dernières années.
Je le répète, il faut exclure de la norme d’évolution toutes les dépenses qui sont imposées par l’État aux collectivités, sur lesquelles elles n’ont aucune marge de manœuvre. Si nous ne le faisons pas, ce sont elles qui en subiront les conséquences. Nous ne souhaitons absolument pas que la culpabilisation des collectivités aboutisse aujourd'hui à un transfert de fiscalité qui se ferait à leurs dépens.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, j’ai bien écouté vos propos, en particulier lorsque vous avez répondu à notre collègue Vasselle, qui doit certainement avoir besoin d’un appui solide face à la grogne des maires de son département ! On constate d’ailleurs la même chose dans tous les départements, notamment à propos de la réforme de la taxe professionnelle. Je parle de réforme, car il est faux de parler de « suppression de la TP » : il s’agit en fait d’une réforme de la contribution des entreprises. Appelez-la comme vous voulez, mais ne parlez pas de suppression !
À ce propos, je voudrais évoquer une motion qui a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée des départements de France.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cela commence mal !
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, vous prenez les présidents de conseils généraux pour des minus habens, qui ne savent pas compter, qui n’ont même pas le niveau d’un élève de cours élémentaire première année. Mais ils savent regarder leur budget ! Ils savent d’où viennent leurs recettes, qui ne proviennent pas uniquement des impôts locaux. Vous, vous voudriez acculer les départements et les communes à augmenter les impôts locaux.
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, je ne vous ai pas interrompu. Vous aurez la parole tout à l’heure.
Je tenais ensuite à évoquer le FCTVA. Le faire sortir de l’enveloppe normée permettra au Gouvernement, me semble-t-il, de faire des économies, mais cela ne changera rien aux capacités d’investissement des collectivités : leur autofinancement ne s’en trouvera pas augmenté.
Vous avez asphyxié les collectivités avec vos projets sur la DGF : l’effet de ciseaux qui va se produire entre le panier dit du maire ou le panier des collectivités, l’évolution des prix et l’évolution de la DGF aura comme conséquence une diminution importante de l’autofinancement des collectivités. Que leur restera-t-il comme possibilité ? Augmenter les impôts ou faire appel à l’emprunt, ce qui équivaudra à payer double au bout d’un certain temps !
Cher Alain Vasselle, je vous signale que les régions n’ont dorénavant plus du tout d’autonomie fiscale. Vous vous en réjouissez sans doute dans le contexte que vous connaissez ; vous devez certainement faire partie de l’opposition pour tenir ce genre de raisonnement ! En tout cas, pour le moment, il ne reste aux régions que la TIPP, qui est insuffisante pour leur permettre de faire face à tous leurs engagements, concernant notamment les lycées. Vous avez vu sur le terrain les résultats des efforts menés en matière d’éducation. Jamais l’État n’aurait été capable de faire la même chose au même coût : le rapport qualité-prix démontre l’efficience des collectivités en ce domaine.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le ministre, vous n’arriverez pas à nous convaincre que vous avez initié un cercle vertueux en ce qui concerne l’État en étant aussi péjoratif que vous l’êtes à l’égard des collectivités locales, singulièrement des conseils généraux.
Dans la Haute-Garonne, le département que je connais le mieux, le manque à gagner sur les ressources qui auraient dû leur être affectées par la décentralisation s’élève à 400 millions d’euros. Et qui pourrait dire que les investissements engagés par le conseil général, comme la construction d’un collège ou d’une route, ne sont pas pertinents ?
La politique que vous menez au plan national a fait exploser, de manière quasiment exponentielle, les dépenses sociales, alors que l’auto-investissement va faiblir. Résultat : soit nous en sommes réduits à réduire la voilure dans le champ social ou en matière d’investissements alors que les besoins sont criants ; soit nous augmentons, comme vous avez l’air de le souhaiter, les impôts.
Il est choquant et injuste de présenter les choses de façon caricaturale avec, d’un côté, un État qui se voudrait vertueux et, de l’autre, des collectivités territoriales qui seraient sur la voie de la débauche budgétaire.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je ne m’attendais pas à ce que le débat cristallise une telle crispation dans les relations entre l’État et les collectivités territoriales. Chers collègues de l’opposition, je tiens simplement à vous faire remarquer que le devoir de mise en ordre des finances publiques affecte l’ensemble de la sphère publique. Nous n’en sortirons pas en instruisant le procès des pressions qu’exercerait l’État sur les collectivités. En tant que parlementaires, il nous arrive de voter des textes aux vertus normatives qui sont des gisements de dépenses publiques supplémentaires.
Nous devons tous prendre conscience des efforts à accomplir. La RGPP s’appliquera aux collectivités territoriales, comme elle s’est imposée au sein de l’État. Ce ne serait pas un bon service à rendre aux maires que de leur laisser croire qu’on s’en sortira en harcelant l’État. C’est ainsi que l’on produit du déficit public et un effet boule de neige sur l’endettement.
Mme Beaufils et M. Raoul ont tous deux remis en cause la sortie du FCTVA de l’enveloppe normée.
Mme Marie-France Beaufils. Je n’ai pas dit cela !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est en tout cas ce que j’ai compris et ce qui ressort de l’amendement que va défendre tout à l’heure M. Marc. Nous avons tous, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, supplié le Gouvernement de sortir le FCTVA de l’enveloppe normée.
Mme Nicole Bricq. Il ne l’a pas fait !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Si, il l’a fait l’année dernière,…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Pour la durée de cette programmation !
Mme Nicole Bricq. Il l’a fait pour économiser 200 millions d’euros !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. … et personne ne peut contester que c’est une mesure de bonne administration. Nous devrions essayer de convenir de quelques principes de bonne gouvernance publique qui pourraient s’appliquer aussi bien à l’État qu’aux collectivités territoriales. C’est le meilleur service que nous pourrions rendre à nos concitoyens.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. J’entendais notre collègue Jean-Jacques Mirassou parler…
M. Bernard Frimat. Avec talent !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … de son département. Je voudrais, pour ma part, évoquer le mien, l’Oise, dont nous sommes les élus, Alain Vasselle et moi-même.
M. Daniel Raoul. Quelle chance !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce beau département a la grande chance d’avoir un conseil général…
M. François Marc. De gauche !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … qui offre à chaque collégien un ordinateur, sans conditions des ressources des parents, sans se préoccuper de l’usage qui en sera fait. Cet ordinateur servira-t-il à travailler, à jouer ou sera-t-il revendu dès le lendemain sur eBay ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Nous savons, en revanche, quel est le coût d’une telle mesure : il s’élève à 28 millions d’euros – je parle sous le contrôle du conseiller général Alain Vasselle – sur deux ou trois ans, ce qui est beaucoup au regard de la capacité d’investissement de ce département.
Par ailleurs, depuis 1790, il n’y avait jamais eu de maison du conseil général dans ce département. Dorénavant, il y en a une dans chaque chef-lieu de canton, ou à peu près, dotée du personnel correspondant. Tout est affaire de choix, comme le disait M. le ministre. La dépense publique, elle s’organise, elle s’administre, elle doit être le fruit de sélections. Au demeurant, mieux vaut sans doute que les situations soient bien tranchées, comme c’est le cas en l’espèce, car cela permet à l’opinion de se prononcer en toute clarté.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, à l’écoute de vos interventions, je me suis rendu compte que je m’étais mal fait comprendre… Il ne fallait pas interpréter mes propos comme un encouragement à l’augmentation de la fiscalité locale.
C’est en considérant les politiques locales que vous appliquez que j’en suis arrivé à la conclusion que vous aviez une manie qui s’était transformée en doctrine : vous commencez par augmenter les impôts, pour ensuite financer les politiques publiques que vous décidez de mettre en œuvre.
Vous n’allez pas pouvoir continuer à mener cette politique facile d’augmentation de la fiscalité. Les statistiques sont implacables : là où vous dirigez les régions, la hausse de la fiscalité atteint 10 à 20 points. C’est une question de choix. De même qu’en instituant les 35 heures vous avez fait appel à la figure de Léon Blum, de même vous vous assimilez à celle du Père Noël en faisant les généreux, en distribuant de-ci de-là dans les départements que vous dirigez. Mais c’est l’argent des autres que vous distribuez ! Dans ces conditions, vous allez vous retrouver face à vos responsabilités, au pied du mur d’une fiscalité toujours plus élevée que vous construisez pierre après pierre.
Vous avez en face de vous un élu local, maire depuis quinze ans et président d’agglomération : je sais donc de quoi je parle. Je n’ai pas augmenté les impôts depuis douze ans. Ayons l’honnêteté de dire que nous attendions depuis de nombreuses années ce gel de la dotation de l’État aux collectivités locales ! Compte tenu de nos objectifs et de l’état des déficits publics de l’État, de la sécurité sociale et des collectivités territoriales, l’effort doit être partagé.
Le gel de la dotation va s’inscrire dans la durée, au moins sur les quatre prochaines années. Cette politique publique va aussi s’adapter à l’évolution de la bosse démographique de la fonction publique territoriale. Comme le disait avec beaucoup de pertinence le président Arthuis, l’État a mis en place la RGPP depuis maintenant trois ans et demi et a poursuivi le mouvement en lançant une deuxième phase. Le modèle de la RGPP appliquée à l’État pourrait incontestablement servir de référence pour la gestion des collectivités territoriales, notamment en ce qui concerne les départs à la retraite, qui seront nombreux à partir de 2016-2017.
Les fonctionnaires qui partiront à la retraite à ce moment-là seront la génération de la décentralisation des années 1982 et 1983. Par conséquent, nombre de dispositifs permettront de bien gérer les collectivités territoriales, sans qu’il soit nécessaire de donner des leçons ! Je n’en donne aucune, mais je ne veux pas en recevoir.
Pour le reste, il faut avoir une logique d’investissement, ce qu’on attend d’une collectivité territoriale, et de modération sur les plans de la fiscalité et du dispositif d’embauche. Nous savons que le niveau d’embauche a été plus important dans les collectivités territoriales essentiellement depuis quinze ans ! Permettez-moi, sur ce point, de rappeler, une fois encore, cette tendance que vous aviez aux affaires, puisque, entre 1997 et 2002, ce sont 45 000 postes de fonctionnaires supplémentaires qui ont été ouverts et pourvus au niveau de l’État. Assumez-le !
Mme Nicole Bricq. Assumez aussi votre gabegie !
M. François Baroin, ministre. Assumez le fait que votre solution de facilité politique consiste à toucher aux impôts, que votre doctrine est d’embaucher des gens et que votre politique générale consiste à flatter certains corporatismes en essayant d’acheter un certain nombre de voix (Protestations sur les travées du groupe socialiste.), alors que la situation pousse tout simplement le Gouvernement à avoir une politique de responsabilité ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Nicole Bricq. Et la TVA dans la restauration, ce n’est pas du corporatisme ?
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. Je voudrais remercier M. le ministre de son propos !
M. Daniel Raoul. C’est un aveu !
M. Bernard Frimat. Effectivement, un tel aveu de volonté d’asphyxie des collectivités territoriales se salue à sa juste valeur !
Monsieur le ministre, dans ce domaine, nous, nous parlons de service rendu à la population. In fine, ceux qui jugent, ce sont les électeurs.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Sur ce point, on est d’accord !
M. Bernard Frimat. Les électeurs rendront justice.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Voilà !
M. Bernard Frimat. Nous ne savons pas quel sera leur verdict, mais nous pouvons peut-être tomber d’accord sur un point : ce verdict, nous le respecterons, comme nous respectons les élus qui sont à la tête des collectivités territoriales, et ce quelle que soit leur étiquette politique.
Ne nous demandez pas de nous excuser si le rapport de force au sein des collectivités territoriales a considérablement changé ces dix dernières années...
M. François Marc. Eh oui !
M. Bernard Frimat. ... et si l’évolution du choix des électeurs à l’échelon régional et départemental et dans les grandes villes est aujourd’hui ce qu’il est !
Effectivement, quand les électeurs votent, ils se prononcent sur la qualité de la gestion. C’est un vieux débat, à mener dans d’autres lieux me direz-vous, mais nous n’avons pas d’autre moyen de mesure que celui-là !
Vous voulez, vous l’avez dit très clairement, obliger les collectivités locales, y compris celles que vous gérez, à imposer à leurs populations des choix drastiques ou une augmentation des impôts. Mais permettez-nous de ne pas être d’accord !
Je conçois le courroux des rapporteurs généraux, tous deux élus de l’Oise, face à un conseil général dont le président n’est plus M. Jean-François Mancel et qui est donc dirigé d’une autre manière qu’autrefois.
M. Jean-Marc Todeschini. Très bien !
M. Bernard Frimat. Le fait qu’un certain type de dépenses ait retenu l’attention vigilante d’une institution que nous respectons tous, la chambre régionale des comptes, peut, je le conçois aussi, être un sujet de réflexion !
Et si le conseil général de l’Oise a décidé – je ne pense pas que ce soit le seul – de doter chaque collégien d’un ordinateur, c’est peut-être aussi un moyen pour lui de permettre à une partie de la population...
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Électoralisme !
M. Bernard Frimat. ... d’accéder au numérique, ce qui ne lui aurait pas été possible autrement.
Certes, pour une série de personnes, le fait d’acheter un ordinateur portable à leur fille ou à leur fils ne pose aucun problème d’ordre financier. Mais, dans la conjoncture actuelle, compte tenu des difficultés financières importantes qu’éprouvent un certain nombre de familles, faire en sorte que la culture numérique n’échappe à personne constitue peut-être un élément opportun de dépenses sociales !
Monsieur le ministre, je suis d’accord avec vous sur un point : c’est un choix politique. Vous nous avez expliqué pourquoi vous n’étiez pas d’accord avec nous. Mais je vous ai connu meilleur et moins agressif ; aussi, si vous pouviez renoncer à cette agressivité, nous en serions tous ravis !
Nous confronterons donc nos choix et nous nous opposerons, programme contre programme. La démocratie, finalement, c’est s’opposer sur des projets, les confronter et laisser le peuple juger ! (M. Bernard Vera applaudit.)
Mme Nicole Bricq. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est le festival socialiste !
M. Jacques Mahéas. Tout à l’heure, j’interviendrai sur les effectifs de la fonction publique. Mais très franchement, monsieur le ministre, après ce que je viens d’entendre, je ne peux rester sans réagir !
L’État serait vertueux, et les collectivités locales seraient irresponsables !
M. Jacques Mahéas. C’est ce que j’ai très nettement entendu !
Mme Nicole Bricq. Il l’a dit !
M. Jacques Mahéas. Inutile de vous dire que nous prenons ces propos pour une réelle provocation de la part d’un ministre qui devrait quand même mesurer ses propos !
En fait, les collectivités territoriales sont souvent la dernière étape du désistement de l’État, qui décentralise des compétences sans donner à ces collectivités les moyens de les assumer ! C’est ainsi qu’il doit 610 millions d’euros au département de la Seine-Saint-Denis...
Alors, commencez par payer vos dettes avant de nous faire la morale et de jouer les professeurs pour nous donner des leçons sur la façon de dépenser !
« Je ne donne aucune leçon, mais je ne veux pas en recevoir ! », nous avez-vous dit de façon provocante. En réalité, vous n’avez pas arrêté de nous donner des leçons ! Nous pourrions, nous aussi, en donner et je prendrai quelques exemples.
Dans ma commune, nous proposions auparavant une mesure tout à fait positive : l’accueil des enfants entre deux et trois ans. Sur les six cents enfants de cette classe d’âge, une moitié allait à l’école. Mais l’État a décidé qu’il n’était plus question de les accepter.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce n’est pas pour ça l’école !