Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement a pour objet de revenir au terme « vidéosurveillance » pour l’intitulé de cette section. Ce débat a déjà été tranché en première lecture, le terme « vidéoprotection » exprimant mieux les attentes de nos concitoyens à propos de cette technologie. L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 81.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 17
L’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité est ainsi modifié :
1° Les deux premiers alinéas du II sont remplacés par onze alinéas ainsi rédigés :
« La transmission et l’enregistrement d’images prises sur la voie publique par le moyen de la vidéoprotection peuvent être mis en œuvre par les autorités publiques compétentes aux fins d’assurer :
« 1° La protection des bâtiments et installations publics et de leurs abords ;
« 2° La sauvegarde des installations utiles à la défense nationale ;
« 3° La régulation des flux de transport ;
« 4° La constatation des infractions aux règles de la circulation ;
« 5° La prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés à des risques d’agression, de vol ou de trafic de stupéfiants, ainsi que la prévention, dans des zones particulièrement exposées à ces infractions, des fraudes douanières prévues par le second alinéa de l’article 414 du code des douanes et des délits prévus à l’article 415 du même code portant sur des fonds provenant de ces mêmes infractions ;
« 6° La prévention d’actes de terrorisme ;
« 7° La prévention des risques naturels ou technologiques ;
« 8° Le secours aux personnes et la défense contre l’incendie ;
« 9° La sécurité des installations accueillant du public dans les parcs d’attraction.
« Après information du maire de la commune concernée, les autres personnes morales peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéoprotection aux fins d’assurer la protection des abords de leurs bâtiments et installations, dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme ou particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol. » ;
2° Le III est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsque le système comporte des caméras installées sur le territoire de plusieurs départements, l’autorisation est délivrée par le représentant de l’État dans le département dans lequel est situé le siège social du demandeur et, lorsque ce siège est situé à Paris, par le préfet de police, après avis de la commission départementale de vidéoprotection compétente. Les représentants de l’État dans les départements dans lesquels des caméras sont installées en sont informés. » ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « images », sont insérés les mots : « et enregistrements » et il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Le visionnage des images peut être assuré par les agents de l’autorité publique ou les salariés de la personne morale titulaire de l’autorisation ou par ceux des opérateurs publics ou privés agissant pour leur compte en vertu d’une convention. » ;
c) Après le même deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’une autorité publique ou une personne morale n’exploite pas elle-même son système de vidéoprotection de voie publique, la convention qu’elle passe avec un opérateur public ou privé est agréée par le représentant de l’État dans le département et, à Paris, par le préfet de police, après information du maire de la commune concernée, et conforme à une convention type fixée par voie réglementaire après avis de la commission nationale prévue à l’article 10-2. Par ailleurs, les salariés de l’opérateur privé chargés de l’exploitation du système sont soumis aux dispositions du titre Ier de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité, à l’exception de ses articles 3 à 3-2 et 10, et sont tenus au secret professionnel.
« Lorsqu’une autorité publique n’exploite pas elle-même le système, les salariés de la personne privée qui y procèdent sous son contrôle et pour son compte ne peuvent pas avoir accès aux enregistrements des images prises sur la voie publique. » ;
d) Aux première et troisième phrases du troisième alinéa, après le mot : « nationales », sont insérés les mots : « ainsi que des douanes et des services d’incendie et de secours » ;
e) Au quatrième alinéa, après les mots : « arrêté ministériel », sont insérés les mots : « après avis de la Commission nationale de la vidéoprotection » ;
f) Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Seuls sont autorisés par la Commission nationale de l’informatique et des libertés en application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée les systèmes, installés sur la voie publique ou dans des lieux ouverts au public dont les enregistrements sont utilisés dans des traitements automatisés ou contenus dans des fichiers structurés selon des critères permettant d’identifier, directement ou indirectement, des personnes physiques. » ;
g) L’avant-dernier alinéa est remplacé par huit alinéas ainsi rédigés :
« La commission départementale prévue au premier alinéa du présent III peut à tout moment exercer, sauf en matière de défense nationale, un contrôle sur les conditions de fonctionnement des systèmes de vidéoprotection répondant aux conditions fixées au II. Elle émet, le cas échéant, des recommandations et propose la suspension ou la suppression des dispositifs non autorisés, non conformes à leur autorisation ou dont il est fait un usage anormal. Elle informe le maire de la commune concernée de cette proposition.
« La Commission nationale de l’informatique et des libertés peut, sur demande de la commission départementale prévue au premier alinéa du présent III, du responsable d’un système ou de sa propre initiative, exercer un contrôle visant à s’assurer que le système est utilisé conformément à son autorisation et, selon le régime juridique dont le système relève, aux dispositions de la présente loi ou à celles de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée. Lorsque la Commission nationale de l’informatique et des libertés constate un manquement aux dispositions de la présente loi, elle peut mettre en demeure le responsable d’un système de le faire cesser dans un délai qu’elle fixe et qui ne peut excéder trois mois. Si le responsable ne se conforme pas aux termes de la mise en demeure, elle peut prononcer un avertissement public à son égard. Si ces mesures ne permettent pas de faire cesser le manquement constaté, la Commission nationale de l’informatique et des libertés peut demander au représentant de l’État dans le département et, à Paris, au préfet de police, d’ordonner la suspension ou la suppression du système de vidéoprotection. Elle informe le maire de la commune concernée de cette demande.
« Les membres de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, les agents de ses services habilités dans les conditions définies au dernier alinéa de l’article 19 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée ainsi que les membres des commissions départementales de vidéoprotection ont accès de six heures à vingt et une heures, pour l’exercice de leurs missions, aux lieux, locaux, enceintes, installations ou établissements servant à la mise en œuvre d’un système de vidéoprotection, à l’exclusion des parties de ceux-ci affectées au domicile privé. Le procureur de la République territorialement compétent en est préalablement informé.
« En cas d’opposition du responsable des lieux, la visite ne peut se dérouler qu’avec l’autorisation du président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter ou du juge délégué par lui. Ce magistrat est saisi à la requête du président de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ou du président de la commission départementale de vidéoprotection. Il statue par une ordonnance motivée, conformément aux articles 493 à 498 du code de procédure civile. La procédure est sans représentation obligatoire. La visite s’effectue sous l’autorité et le contrôle du juge qui l’a autorisée. Celui-ci peut se rendre dans les locaux durant l’intervention. À tout moment, il peut décider l’arrêt ou la suspension de la visite.
« Les personnes mentionnées au onzième alinéa du présent III peuvent demander communication de tous documents nécessaires à l’accomplissement de leur mission, quel qu’en soit le support, et en prendre copie ; elles peuvent recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement et toute justification utiles ; elles peuvent accéder aux programmes informatiques et aux données, ainsi qu’en demander la transcription par tout traitement approprié dans des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle.
« Elles peuvent, à la demande du président de la commission, être assistées par des experts désignés par l’autorité dont ceux-ci dépendent.
« Il est dressé contradictoirement procès-verbal des vérifications et visites menées en application du présent article.
« À la demande de la commission départementale prévue au premier alinéa du présent III, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ou de sa propre initiative, le représentant de l’État dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent fermer pour une durée de trois mois, après mise en demeure non suivie d’effets dans le délai qu’elle fixe, un établissement ouvert au public dans lequel est maintenu un système de vidéoprotection sans autorisation. Lorsque, à l’issue du délai de trois mois, l’établissement n’a pas sollicité la régularisation de son système, l’autorité administrative peut lui enjoindre de démonter ledit système. S’il n’est pas donné suite à cette injonction, une nouvelle mesure de fermeture de trois mois peut être prononcée. » ;
h) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Les autorisations mentionnées au présent III et délivrées avant le 1er janvier 2000 expirent le 24 janvier 2012. Celles délivrées entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2002 expirent le 24 janvier 2013. Celles délivrées entre le 1er janvier 2003 et le 24 janvier 2006 expirent le 24 janvier 2014. » ;
3° Le III bis est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La même faculté est ouverte au représentant de l’État dans le département ou, à Paris, au préfet de police, informé de la tenue imminente d’une manifestation ou d’un rassemblement de grande ampleur présentant des risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens. L’autorisation d’installation du dispositif cesse d’être valable dès que la manifestation ou le rassemblement a pris fin. » ;
b) Au début du second alinéa, sont ajoutés les mots : « Sauf dans les cas où les manifestations ou rassemblements de grande ampleur mentionnés à l’alinéa précédent ont déjà pris fin, » ;
4° Le IV est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’autorisation peut prévoir un délai minimal de conservation des enregistrements. » ;
5° Le deuxième alinéa du V est ainsi rédigé :
« Toute personne intéressée peut saisir la commission départementale mentionnée au III ou la Commission nationale de l’informatique et des libertés de toute difficulté tenant au fonctionnement d’un système de vidéoprotection. » ;
6° Au VI, après les mots : « commission départementale », sont insérés les mots : « ou de la Commission nationale de l’informatique et des libertés » ;
7° Au VI bis, après le mot : « libertés », sont insérés les mots : « et à la Commission nationale de la vidéoprotection » ;
8° À la première phrase du VII, après les mots : « décret en Conseil d’État », sont insérés les mots : «, après avis de la Commission nationale de la vidéoprotection, ».
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Ries, sur l'article.
M. Roland Ries. Le présent article tend à promouvoir et encadrer l’utilisation de la vidéosurveillance.
Son adoption permettrait ainsi aux autorités publiques d’installer des caméras dans les lieux exposés aux risques d’agression, de vol ou de trafic de stupéfiants ou pour prévenir toute une série d’autres risques. En outre, – c’est là le point important – les personnes morales de droit privé seraient autorisées à installer, elles aussi, après information du maire et autorisation du préfet, des systèmes de vidéosurveillance sur la voie publique afin de protéger les abords de leurs bâtiments dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme ou à des risques d’agression ou de vol.
En conséquence, l’article vise à modifier substantiellement le cadre juridique actuel de la vidéosurveillance. Les images pourront en effet être visionnées par les agents de l’autorité publique, les salariés de la personne morale ou ceux des opérateurs publics ou privés agissant pour leur compte. Elles pourront être partiellement contrôlées, a posteriori, par la Commission nationale de l’informatique et des libertés – la CNIL – ou par des commissions départementales de vidéosurveillance.
Globalement, le groupe socialiste est favorable au principe de l’utilisation de nouveaux instruments pour garantir plus de sécurité aux citoyens. La vidéosurveillance, comme technologie de pointe, en fait bien sûr partie.
Toutefois, nous considérons que la vidéosurveillance n’est pas la panacée ou le remède miracle en matière de lutte contre l’insécurité. En particulier, elle ne peut remplacer les acteurs de terrain que sont la police et la gendarmerie ni les personnels de prévention dont la présence humaine sur les territoires est évidemment indispensable à toute politique de sécurité efficace.
Elle doit donc être envisagée comme un outil parmi d’autres, d’autant que, comme tout instrument technique neutre en lui-même, elle peut rapidement conduire à des dérives si elle n’est pas correctement encadrée.
Par conséquent, nous considérons que la vidéosurveillance doit être strictement encadrée dans son usage par les pouvoirs publics, afin de respecter scrupuleusement les libertés publiques, constitutionnellement garanties, et nous proposons d’encadrer de manière plus contraignante son usage.
De notre point de vue, afin de conserver la maîtrise du système, de son utilisation et, plus particulièrement, des données, la vidéosurveillance ne doit être utilisée que par les autorités publiques.
Ouvrir son champ aux personnes morales de droit privé, ou même confier sa gestion et son contrôle à des prestataires privés, conduit à une forme de privatisation de la vidéosurveillance et à un désengagement de l’État sur l’une de ses missions régaliennes. Nous n’y sommes pas favorables.
De même, si le groupe socialiste est favorable à un accroissement du rôle des acteurs locaux en matière de sécurité, il n’entend pas confondre coproduction de sécurité et désengagement progressif des pouvoirs publics. Le financement des installations doit donc être assumé par l’État ou, à tout le moins, aidé par lui et non délégué purement et simplement aux collectivités locales, comme c’est, hélas ! le cas aujourd’hui.
En outre, pour que le dispositif soit lisible et efficace, une seule et même autorité doit être compétente pour contrôler les systèmes de vidéosurveillance. Nous proposons que ce contrôle revienne à la CNIL, institution déjà existante, plutôt qu’à une nouvelle autorité, dont le coût pèsera sur les finances publiques.
Enfin, nous souhaitons que les collectivités territoriales soient au cœur du dispositif. En effet, la vidéosurveillance doit être un outil au service des élus, dans le cadre d’une politique de sécurité locale et totale. Son installation doit être laissée à l’appréciation des maires, après un débat au sein du conseil municipal. Il s’agira alors de déterminer, sur le territoire dont ils ont la responsabilité, la place de la vidéosurveillance dans la politique locale : nombre de caméras, localisation, habilitation du personnel, mise en place d’un comité d’éthique, etc.
Toutes ces décisions doivent être traitées en étroite concertation avec les élus locaux. Il faut qu’ils soient associés au maximum au processus de décision dans ces domaines sensibles.
Voilà les messages que je souhaitais exprimer au nom du groupe socialiste sur l’encadrement nécessaire et rigoureux de la vidéosurveillance, qui, je le répète, doit être considérée comme un outil parmi d’autres dans la mise en œuvre des politiques de sécurité publiques. Et c’est en ce sens que nous présenterons des amendements sur cet article. (Mmes Virginie Klès et Gisèle Printz applaudissent.)
Mme la présidente. L'amendement n° 82, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Insinuer que la vidéosurveillance est protectrice revient à dire – si vous permettez que nous nous amusions, nous aussi, à jouer avec les mots – qu’elle interviendrait en amont, ce qui est proprement absurde, d’autant que l’expérience nous prouve exactement le contraire.
Par exemple, quand, l’été dernier, M. Xavier Bertrand nous avait présenté les caméras comme la solution miracle aux problèmes de la violence à l’école, il avait omis de préciser que les trois agressions d’élèves qu’il s’empressait de commenter avaient eu lieu dans des lycées du Val-de-Marne équipés de caméras !
Le fait qu’une infraction soit filmée n’empêche pas qu’elle ait lieu et nous pensons – l’expérience le prouve – que la vidéosurveillance ne fait que déplacer la délinquance.
La vidéosurveillance intervient, en effet, la plupart du temps a posteriori, une fois que les infractions sont commises, pour en éclairer le déroulement ou, éventuellement, comme cela s’est passé après le drame qui a eu lieu dans le métro en décembre dernier, pour permettre l’identification des auteurs. Il n’en demeure pas moins que la dame est morte.
Outre son inefficacité, la vidéosurveillance a un coût. Vous qui aimez tant les chiffres, ce qui suit devrait vous plaire !
La chambre régionale des comptes de la région Rhône-Alpes, autorité indépendante, a récemment révélé l’impact négligeable sur la sécurité publique des caméras de vidéosurveillance installées dans les villes de Lyon et Saint-Etienne. À Saint-Etienne, la mairie investit depuis 2001 de 1,3 million à 1,5 million d’euros par an dans la vidéosurveillance. Celle-ci, est-il estimé, permet de repérer entre 1 % et 2 % des crimes et des délits commis dans la commune et poursuivis par la police. Reste à noter que Saint-Etienne est classée au 143e rang des circonscriptions les moins sûres de France…
Depuis 2003, alors que Lyon dépense annuellement entre 2,7 millions et 3 millions d’euros dans ces équipements, elle voit la délinquance sur la voie publique baisser beaucoup moins rapidement que dans la ville contiguë de Villeurbanne, qui refuse la vidéosurveillance et enregistre une diminution de 48 % alors qu’elle n’est que de 33 % à Lyon. La chambre régionale des comptes conclut qu’« on peut observer que l’outil est suffisamment coûteux pour qu’une évaluation globale de son intérêt soit entreprise ».
Ces exemples montrent, me semble-t-il, l’incurie que dissimule mal votre discours et qui est un témoignage supplémentaire du mépris affiché à l’égard de la sécurité de nos concitoyens et de leurs droits et libertés fondamentales.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer l’article 17. Or, cet article est tout à fait nécessaire puisqu’il fixe l’ensemble du régime de la vidéosurveillance sur la voie publique. L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Éliane Assassi. C’est tout ?
M. Brice Hortefeux, ministre. Mme Assassi souhaitant que je réponde à son intervention, je vais le faire, sans toutefois reprendre tout le raisonnement sur la vidéoprotection.
Madame, vous avez évoqué plusieurs faits divers. D’abord, je vous précise que le ministre de l’éducation est non pas Xavier Bertrand mais Luc Chatel.
Mme Éliane Assassi. Ça change tout le temps !
M. Brice Hortefeux, ministre. Sur l’éducation, reconnaissez que c’est assez stable !
Je ne vous ferai pas l’injure de vous rappeler que, quand M. Besancenot, qui est, comme vous, très hostile à la vidéoprotection, a perdu son téléphone portable, il a finalement été assez satisfait que la vidéoprotection ait permis qu’il puisse être retrouvé. (Mmes Éliane Assassi et Nicole Borvo s’exclament.)
Vous avez évoqué le drame qui s’est récemment produit dans le métro. Il y a eu deux agressions, dont les médias ont à juste titre parlé et qui ont naturellement frappé l’opinion. Dans ces deux cas, c’est quasi exclusivement grâce à la vidéoprotection qu’ont pu être identifiés les agresseurs, ce qui a facilité leur interpellation. Dans le cas qui s’est produit au printemps dernier, les services de police ont pu remonter de station en station jusqu’à une gare située en Seine-et-Marne, me semble-t-il – M. président de la commission des lois rectifiera si je me trompe –, grâce à la vidéoprotection. C’est donc un élément très important dans l’élucidation.
Enfin, je suis en désaccord avec vous sur le fait que cela ne favoriserait pas la prévention. Il y a, on le sait bien, une certaine forme de petite délinquance qui est attentive à la présence ou non de caméras de vidéoprotection. (Mme Éliane Assassi s’exclame de nouveau.)
Donc, pour ces deux raisons, je vous confirme que le Gouvernement est totalement engagé et mobilisé pour le développement de la vidéoprotection.
Mme la présidente. Je suis saisi de quinze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 83 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 128 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 13
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour défendre l’amendement n° 83.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Je présenterai en même temps les amendements nos 83, 84 et 85.
Cet article 17 prévoit que les entreprises privées seront habilitées à placer des caméras de vidéosurveillance dans la rue mais les autorise aussi à visionner les images recueillies.
Vous leur confiez, monsieur le ministre, des prérogatives exorbitantes puisqu’elles pourront échapper aux obligations imposées dans le cadre de l’installation de caméras dans les espaces privatifs : information par voie d’affichage ou de panneaux indiquant les nom, qualité et numéro de téléphone du responsable, pour permettre à toute personne intéressée d’exercer son droit d’accès. Il s’agit d’une privatisation rampante du domaine public, que nous persistons à dénoncer.
La vidéosurveillance a, de fait, un caractère intrusif au regard du droit au respect de la vie privée. Elle est en outre susceptible de mettre en cause la liberté d’aller et de venir des citoyens, ainsi que celle des salariés d’une entreprise concernée, qui verront leurs faits et gestes sur la voie publique surveiller par des sociétés privées et pour des intérêts eux-mêmes privés.
Ce faisant, le Gouvernement cherche à se défausser d’une mission de service public sur le secteur privé.
Nous savons que la vidéosurveillance a un coût. Au lieu d’assumer sa politique, le Gouvernement souhaite confier à d’autres le soin d’investir et de payer, et ce au mépris des libertés.
Je rappellerai d’ailleurs que c’est Alain Peyrefitte,…
Mme Nathalie Goulet. Aïe !
Mme Josiane Mathon-Poinat. … qui, le premier, avait fait un rapport entre sécurité et liberté. La sécurité est peut-être un droit, mais plus les mesures prises envers la sécurité augmentent, plus nos libertés diminuent, et notre degré de sécurité reste très faible ; nous n’avons vraiment rien à y gagner.
Je citerai ici la recommandation n° 3 du groupe de travail sénatorial sur la vidéosurveillance, inscrite dans le rapport d’information que vous avez coécrit, monsieur Courtois : « Ne pas déléguer la vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées, ni permettre aux autorités publiques de vendre des prestations de vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées. » Ce sont vos propres termes, monsieur Courtois. Or, en l’occurrence, il me semble que vous vous en écartez.
L’article 17 du projet de loi prévoit en effet l’inverse puisqu’il permet, d’une part, le visionnage des images par les utilisateurs privés et, d’autre part, la possibilité pour l’autorité publique de déléguer au secteur privé le visionnage d’images filmées sur la voie publique.
Que les personnes morales de droit privé ayant installé des caméras de surveillance puissent visionner les images que celles-ci ont prises, cela paraît logique, mais seraient désormais concernées les images filmées sur la voie publique. C’est cet espace-là qui devient le plus inquiétant.
Les garde-fous sont insuffisants au regard des enjeux des libertés publiques. Aussi, nous estimons que la convention déléguant à un opérateur public le visionnage des images recueillies aussi bien sur la voie publique que dans des lieux ouverts au public ne doit pouvoir être conclue qu’après avis conforme de la CNIL, ce que nous proposons donc par voie d’amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 128 rectifié.
M. Jacques Mézard. Cet amendement nous tient à cœur. Nous ne sommes pas, nous, opposés au principe de la vidéosurveillance et, dans de nombreux cas, ces installations peuvent apporter un plus au niveau de la sécurité. Je reviendrai sur le principe de la vidéosurveillance dans une explication de vote, ce qui me permettra d’ailleurs de répondre à M. le ministre sur ce que mes électeurs peuvent attendre dans mon département en matière de sécurité.
Le présent amendement vise à supprimer, au sein de l’article 17, l’alinéa 13 qui dispose : « Après information du maire de la commune concernée, » – il s’agit uniquement d’information, il y a dans cet hémicycle beaucoup de maires et d’élus locaux – « les autres personnes morales » – l’expression est particulièrement vaste – « peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéoprotection aux fins d’assurer la protection des abords de leurs bâtiments et installations dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme » – dans les départements ruraux, normalement, il ne devrait pas y en avoir beaucoup ! – …