M. Robert del Picchia. Très bien !
M. Laurent Wauquiez, ministre. C’est ce qui fait la maturité du couple franco-allemand. Nous ne cherchons pas à défendre nos intérêts nationaux, nos différences ou nos divergences, mais nous cherchons toujours à faire prévaloir un intérêt communautaire construit ensemble.
Non, il n’y a pas une Allemagne germano-centrée ! Mais une Allemagne qui assume les efforts qu’elle a faits. Non, il n’y a pas une France rabougrie ! Mais une France qui plaide et qui fait avancer ses idées. Tout cela est au bénéfice commun et mutuel de l’Europe.
Au sujet de la politique migratoire et de la politique en faveur des réfugiés, je demanderai que l’on vous transmette tous les éléments de nature à vous informer de façon précise.
En la matière, nous n’avons pas attendu : des investissements très importants ont été faits par l’Europe pour que les réfugiés égyptiens en Tunisie et que les réfugiés tunisiens en Égypte fassent l’objet de transferts croisés entre les deux pays. L’Europe a été présente, par une politique de soutien, pour éviter le drame humanitaire qui aurait pu se produire.
Cela dit, il faut distinguer la politique migratoire de la politique des réfugiés. Ce n’est pas le même sujet. Quelles sont nos craintes concernant la politique migratoire ?
La Libye est le cône de déversement de flux migratoires massifs venant d’Afrique, notamment d’Afrique noire. Compte tenu des turbulences et des évolutions actuelles, pouvons-nous compter sur les coopérations nécessaires à la régulation de cette politique migratoire ?
Compte tenu des changements qui sont intervenus en Tunisie, pourrons-nous continuer à travailler et à collaborer avec le nouveau régime pour essayer de réguler l’immigration illégale ?
Vous avez raison, pour l’instant, le pire n’a pas eu lieu, mais c’est que nous avons su anticiper. Au moment où je vous parle, l’opération européenne « Hermès », déployée dans les eaux territoriales entre l’Italie et la Tunisie, veille à nous protéger.
Je crois que par là nous obéissons à un devoir simple : nous veillons à faire respecter nos règles migratoires tout en travaillant pour la démocratie dans ces pays qui ont besoin de nous.
Je pense avoir répondu à l’ensemble des questions posées par M. Pierre Bernard-Reymond.
Je vous dirai simplement, monsieur le sénateur, que le fonds de stabilité peut souscrire des obligations sur le marché primaire mais qu’il ne peut pas les revendre à prix cassé à l’État émetteur, que le pacte pour l’euro fera l’objet d’un calendrier et d’un engagement chiffré. Tout commence maintenant, il faut savoir faire vivre ce pacte.
La régulation financière a donné lieu à des opérations d’encadrement du trading haute fréquence et du shadow banking, auxquels vous avez fait référence. Les retours nous parviendront à travers un rapport de l’OCDE sur les avancées réalisées concernant les paradis fiscaux. Vous le verrez, ces avancées sont nombreuses.
Monsieur Dassault, il s’agit d’un pacte pour une gouvernance économique commune. En ce qui me concerne, je vous invite à poser vos questions au gouverneur de la Banque centrale européenne. Le débat ne peut être qu’intéressant.
Pour l’instant, la convergence fiscale concerne l’impôt sur les sociétés.
À propos de l’Europe de la défense, je vous répondrai qu’il existe certes des différences d’approches au sujet de la Libye, mais que nous devons assumer nos différences ! L’Europe est faite de convergences et de divergences d’approches. Cela ne tue en rien le projet de défense européenne. La meilleure preuve en est que nous œuvrons – j’ai travaillé, hier, très tard, avec mon collègue allemand – pour une relance de la politique européenne de défense à travers le « triangle de Weimar ». Nous ne devons pas abandonner : une difficulté passagère ne saurait enterrer un projet de long terme.
J’en viens aux questions d’ordre institutionnel posées par M. Adrien Gouteyron, qui vient d’un excellent département (Sourires.) et qui connaît parfaitement ces questions de politique étrangère.
Le Service européen pour l’action extérieure, le SEAE…
M. Yves Pozzo di Borgo. Il existe seulement depuis deux mois !
M. Laurent Wauquiez, ministre. Cela explique effectivement très bien la situation : on demande beaucoup au SEAE, dans un domaine très difficile alors qu’il n’a encore qu’une durée de vie très courte.
On lui demande beaucoup dans la mesure où il s’agit d’un domaine qui incarne la souveraineté. N’ayons pas d’exigence excessive à l’égard de ce que peut faire, dans un premier temps, la politique européenne étrangère ! Il ne faut pas demander à l’Europe de sauter deux mètres : elle peut parfois sauter un mètre vingt mais pas deux !
Ayons des ambitions raisonnables ! Ce qu’a fait le SEAE est loin d’être négligeable : saisine du Comité de coordination de la politique internationale de l’environnement, le CCPIE, position commune sur les embargos, saisine des avoirs libyens, position commune lors du dernier Conseil.
Souvenons-nous, au milieu des années quatre-vingt-dix, des difficultés sans nom que nous avons rencontrées lors d’une crise qui se déroulait pourtant au cœur de notre continent !
Du chemin a été parcouru. Certes, l’aboutissement n’est pas complet et le SEAE reste un projet en construction, mais il est toujours valide et se renforce au fil du temps.
J’espère avoir répondu à vos questions, mesdames et messieurs les sénateurs. Messieurs Jacques Blanc et del Picchia, je n’ai rien à ajouter à vos deux interventions, qui ont renforcé mes propos sur le rivage sud de la Méditerranée.
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous remercie de ce débat de grande qualité.
Comme vous l’avez dit en préambule, monsieur le ministre, la réunion des chefs d’États de la zone euro du 11 mars et le Conseil européen des 24 et 25 mars feront date. Je suis persuadé que nous assistons en ce moment à l’édification des fondements de la gouvernance économique de l’Union européenne.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à seize heures cinquante-cinq.)