M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Cet amendement prévoit que l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris ne puisse plus accueillir les personnes faisant l’objet de soins sans consentement.

Le statut de l’IPPP pose de réels problèmes, ainsi que l’a souligné le Contrôleur général des lieux de privation de liberté dans des recommandations publiques du 15 février dernier.

Toutefois, j’estime que ce sujet est véritablement délicat et nécessite de prendre le temps de la réflexion. C’est pourquoi je proposerai, à l’article 14, un amendement prévoyant la remise d’un rapport sur le fonctionnement de l’IPPP.

L’interruption de séance a permis à la commission de se réunir ; elle a émis un avis défavorable sur cet amendement n° 43 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Nous avons été très attentifs à la suggestion du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, et c'est la raison pour laquelle, pendant le travail de commission, le Gouvernement s’est engagé à transformer cette infirmerie psychiatrique en établissement de soins.

Toutefois, il ne nous paraît pas opportun d’inscrire ce changement dans la loi. Je donnerai un avis favorable à l’amendement, que nous étudierons ultérieurement, prévoyant la remise d’un rapport sur les modalités de transformation de cette infirmerie.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Madame la secrétaire d’État, comme vous l’avez dit, ce qui est important aujourd’hui, c’est de faire évoluer l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police en un hôpital psychiatrique de droit commun. C’est effectivement un des apports de ce texte.

Jusqu’ici, l’IPPP n’était que l’un des services de la préfecture, ce qui n’apportait donc pas toutes les garanties aux personnes hospitalisées sous contrainte. Sa transformation en hôpital psychiatrique, qui est prévue par l’amendement n° 27 rectifié à l’article 3, permettra d’assurer ces garanties. Je ne voterai donc pas l’amendement n°43 rectifié.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Madame Hermange, je tiens à vous rassurer : c’est bien l’esprit de notre amendement ! Nous ne souhaitons pas fermer purement et simplement cet établissement, nous demandons juste qu’il ne puisse plus accueillir les personnes faisant l’objet de soins sans consentement, en tant qu’il fait partie de la préfecture de police.

À la suite des préconisations qui ont été faites en février dernier, nous voulons que cet établissement cesse de porter atteinte à la liberté des personnes qui y sont enfermées.

Je le répète : nous demandons non pas que ce lieu soit fermé, mais simplement qu’il évolue. Je vous rappelle que tel était également l’objet d’un vœu adopté par le Conseil de Paris : les élus parisiens aimeraient eux aussi voir ce lieu apporter une meilleure réponse aux besoins des personnes qui y sont internées.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 205 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 334
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l’adoption 151
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 86, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement dépose sur le bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi relatif à l’organisation des soins psychiatriques et à la promotion de la santé mentale. Ce projet de loi comporte les dispositions nécessaires à l’organisation des dispositifs de soins, de prévention et d’accompagnement concernant les troubles psychiatriques et les handicaps psychiques, notamment les modalités d’articulation des interventions de premier et de second recours avec les établissements et services participant à la sectorisation psychiatrique selon les dispositions de l’article L. 3221-4 du code de la santé publique.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Mme Raymonde Le Texier. Le texte que nous examinons aujourd’hui ne concerne qu’une partie, si importante soit-elle par ailleurs, de la nécessaire réforme globale de la loi de 1990. Cela a été dit à maintes reprises dans la discussion générale, et nous l’avons répété lors de la présentation de notre motion tendant à opposer la question préalable, Mme Bachelot-Narquin s’était engagée, au cours des débats sur la loi HPST, non seulement à présenter une grande loi sur la santé mentale, mais également à promouvoir la santé mentale.

Nous le savons tous, la jurisprudence du Conseil constitutionnel ainsi que les instances européennes rendent ce travail nécessaire. Qui plus est, nombreux sont les rapports de l’IGAS et des ministères des affaires sociales, de la justice ou de l’intérieur qui appellent à une réforme améliorant la prise en charge des personnes qui ont besoin de soins psychiatriques dans les cadres intra-hospitalier et extra-hospitalier. Notre collègue député Jean-Marie Le Guen tout comme ici même Alain Milon ont, depuis des années, préconisé la tenue d’états généraux de la santé mentale. La crise est générale, récurrente et le plan santé mentale 2005–2008, hélas ! n’a pas arrangé la situation.

Partout en France, depuis des années, les professionnels soignants, aux côtés des familles de patients, dénoncent la lente et continue dégradation de la psychiatrie dans notre pays.

Les fortes contraintes financières auxquelles sont soumis les établissements hospitaliers sont également un facteur important de dégradation.

Le projet de loi que nous appelons de nos vœux doit comporter les dispositions nécessaires à l’organisation des dispositifs de soin, de prévention et d’accompagnement concernant les troubles psychiatriques et les handicaps psychiques.

Les mesures simplifiant l’accès aux soins à l’hôpital et hors l’hôpital, le rôle des SAMU, les programmes post-hospitalisation, la formation de ceux qui hébergent les malades, la nécessité de diminuer le nombre de malades qui sont peu ou pas pris en charge parce qu’ils sont sans domicile fixe, dépourvus de lien familiaux, à la rue, en prison et de ceux qui font la navette avec l’hôpital, sont quelques-unes des dimensions que devrait intégrer un tel texte.

Dans cet objectif, les modalités d’articulation des interventions de premier et de second recours avec les établissements et services participant à la sectorisation psychiatrique doivent occuper une place particulière. En effet, il est essentiel que les soins de premier recours fassent l’objet d’une attention particulière. Leur inscription dans un cadre de proximité et les divers volets que sont la prévention, l’éducation à la santé, le dépistage, le diagnostic, le traitement, la surveillance et le suivi des patients doivent également être améliorés et appréhendés en fonction des possibles orientations vers le système de soins plus spécialisés ou soins de second recours.

Parce qu’il y a urgence depuis de trop nombreuses années, parce que l’attente des professionnels comme des familles n’a que trop duré, parce que la question de la santé mentale ne peut être posée uniquement au détour d’un dramatique fait divers honteusement exploité, parce qu’il s’agit d’un impératif de santé publique, nous demandons que, dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement dépose sur le bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi relatif à l’organisation des soins psychiatriques et à la promotion de la santé mentale.

M. le président. L'amendement n° 475 rectifié bis, présenté par M. Mézard, Mme Escoffier, MM. Collin, Alfonsi, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement dépose sur le bureau d'une des deux assemblées un projet de loi sur la santé mentale tournée vers la prise en charge du sujet malade dans le respect des libertés individuelles, des impératifs de sécurité et des impératifs techniques de l'exercice d'une psychiatrie moderne. »

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Au travers de cet amendement, nous proposons, nous aussi, d’ajouter avant l’article 1er un article additionnel, précisant que « dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement dépose sur le bureau d’une des deux assemblées un projet de loi sur la santé mentale tournée vers la prise en charge du sujet malade dans le respect des libertés individuelles, des impératifs de sécurité et des impératifs techniques de l’exercice d’une psychiatrie moderne ».

Je l’ai dit lors de la discussion générale, M. Jean-Louis Lorrain a indiqué dans son rapport que le présent projet de loi ne serait pas venu en discussion devant le Parlement sans la décision du Conseil constitutionnel de novembre 2010 – et c’est la réalité. Pourtant, il semble très clair que ce projet de loi n’est pas le texte que nos concitoyens attendent depuis 1990. Un nouveau projet de loi devait être présenté dans un délai de cinq ans, ce qui n’a pas été fait. Aujourd'hui, nous sommes en 2011 et nous avons déjà seize ans de retard, que l’on peut d’ailleurs imputer aux diverses majorités qui se sont succédé.

Il n’en reste pas moins que ce texte sur la santé mentale est indispensable, car la situation de la psychiatrie en France – nous le savons tous – est difficile : il n’y a pas assez de psychiatres et une nouvelle organisation moderne serait nécessaire pour aider les centaines de milliers de familles qui sont confrontées à des problèmes délicats et qui en parlent peu à l’extérieur. Cette situation justifie de manière très urgente qu’un véritable texte soit présenté. Nous le savons bien, le présent projet de loi ne répond aucunement à ces impératifs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L’avis de la commission est favorable.

Ces amendements prévoient le dépôt d’un projet de loi sur la santé mentale dans les six mois : il s’agit d’une injonction au Gouvernement, qui serait contraire à la Constitution. À titre personnel, j’émets un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Ces amendements visent à proposer le dépôt, dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, d’un projet de loi, pour l’un, relatif à l’organisation des soins psychiatriques et à la promotion de la santé mentale et, pour l’autre, sur la santé mentale. Il n’est pas d’usage qu’une loi prévoie le dépôt d’un projet de loi sur le bureau d’une assemblée.

Ce qui préoccupe les professionnels, c’est que la psychiatrie et le secteur de la santé mentale continuent en effet d’évoluer : il s’agit, avant tout, d’évolutions des pratiques professionnelles, de développement de liens entre psychiatres et médecins généralistes ou entre équipes sanitaires et équipes médico-sociales pour assurer l’accès aux soins et la continuité des prises en charge.

Tout le monde le sait bien, la qualité des pratiques ne se décrète pas, et on ne peut forcer les gens à travailler ensemble. Beaucoup d’entre eux le font d’ailleurs déjà, et la loi actuelle ne les en empêche absolument pas. La loi HPST s’est même inspirée de ce que la psychiatrie a inventé, c’est-à-dire la responsabilité géodémographique et le lien entre le sanitaire et le médico-social.

Nous devons désormais déployer les bonnes pratiques et les bonnes organisations, renforcer l’intérêt à agir en la matière et nous fixer quelques priorités clés. Cela fera l’objet du plan de santé publique, qui sera bien sûr élaboré en concertation avec l’ensemble des professionnels.

La première réunion du comité de pilotage se tiendra prochainement afin de partager un diagnostic commun. Ce diagnostic est essentiel pour dépasser les a priori. Il s’appuiera sur l’analyse des données d’activité et de démographie et les données financières disponibles. L’objectif est bien celui de la qualité – qualité de vie des patients et de leurs familles, qualité des pratiques professionnelles – et la réduction des inégalités territoriales.

Par ailleurs, la psychiatrie, comme l’ensemble des activités de soins soumises à autorisation, doit faire l’objet de décrets sur les conditions d’autorisation de l’activité, ce qui permettra de décrire les conditions d’exercice et de clarifier la place des différents établissements autorisés en psychiatrie, dont les établissements sectorisés.

À ce jour, nous ne sommes donc pas certains que la loi qui organise les soins en France ne soit pas valide pour la psychiatrie. Elle nécessite sans doute d’être complétée à la marge. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement serait favorable à ce qu’un bilan vous soit présenté sous douze mois, bilan qui, après concertation, fasse le point sur les compléments législatifs et réglementaires qui apparaîtraient nécessaires.

Pour ces raisons, je suis défavorable à ces deux amendements.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 86.

M. Guy Fischer. Les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG voteront naturellement en faveur de cet amendement qui prévoit qu’à compter d’un délai de six mois suivant la promulgation de cette loi, le Gouvernement déposera sur le bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi relatif à l’organisation des soins psychiatriques et à la promotion de la santé mentale.

Nous l’avons répété fort souvent, et la motion tendant à opposer la question préalable que nous avons déposée en commission des affaires sociales sur le présent projet de loi en est une démonstration, il n’est pas acceptable que nous légiférions sur une modalité de prise en charge des patients atteints de troubles mentaux en dehors d’un texte plus global. Nous réclamons ce grand texte sur la santé mentale.

Cette extraction des soins sans consentement d’une mesure plus globale démontre que l’objet du projet de loi dont nous discutons aujourd’hui est moins sanitaire que médical, et qu’il est, surtout, sécuritaire. Car si vous aviez réellement voulu parler de santé mentale, si vous aviez véritablement voulu aborder la question des soins, il vous aurait fallu les aborder tous, et non exclusivement les soins sous contrainte, qui doivent, logiquement, demeurer une exception.

Si une loi sur la psychiatrie est indispensable, c’est que les besoins sont grands. Selon l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, « les maladies mentales se classent au troisième rang des maladies en termes de prévalence et sont responsables du quart des invalidités ». L’OMS retient cinq maladies mentales parmi les dix pathologies les plus préoccupantes pour le XXIe siècle : la schizophrénie, le trouble bipolaire, l’addiction, la dépression et le trouble obsessionnel compulsif.

À cet égard, le texte que nous examinons aujourd’hui ne constitue pas une solution appropriée. Il est partiel et donne l’impression que la seule réponse susceptible d’être aujourd’hui formulée en matière de maladies mentales réside dans l’enfermement plus ou moins long des patients et dans l’encadrement non médical, mais médicamenteux.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous sommes opposés à ce qu’un décret en Conseil d’État puisse définir les protocoles de soins applicables. Si ces protocoles prédéfinis, dont on voudrait nous faire croire qu’ils sont duplicables sur chaque patient, trouvent effectivement leur sens dès lors qu’il s’agit d’imposer des normes et non de dispenser des soins, s’ils peuvent avoir leur raison dans un cadre judiciaire, ils constituent, selon nous, des aberrations en matière médicale puisque, par définition, chaque patient est singulier, chaque soignant est différent et chaque relation nouée entre les deux est particulière.

Tout cela, ce projet de loi l’ignore, car, précisément, il concerne non pas la psychiatrie, mais le traitement sécuritaire des troubles psychiatriques.

Aussi, nous voterons en faveur de cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 86.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 475 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Organisation de la discussion

Articles additionnels avant l'article 1er
Dossier législatif : projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge
Article 1er (début)

M. le président. Alors que nous arrivons à l’article 1er, je souhaite vous soumettre une proposition d’organisation.

À l’issue des prises de parole sur l’article 1er, nous aurons à examiner, après le premier amendement qui est un amendement de suppression, la bagatelle de quelque 130 amendements en discussion commune. En supposant que chacun de ces amendements soit présenté en trois minutes, et même si nous travaillons cette nuit jusqu’à deux heures, cela conduira à ce que les avis sur les amendements ne pourront être donnés que demain après-midi. Mes chers collègues, sans remettre en cause votre agilité intellectuelle, qui est remarquable, j’estime qu’il ne sera pas facile de vous prononcer demain après-midi sur des amendements qui auront été exposés ce soir.

Le règlement nous obligeant à une discussion commune, je voudrais proposer au Sénat de procéder de la manière suivante : après avoir écouté les prises de parole, je mettrai en discussion l’amendement n° 44 de M. Fischer, qui est un amendement de suppression, puis les amendements nos 439 rectifié de M. Mézard et 483 rectifié de Mme Escoffier, qui, tous deux, proposent une nouvelle rédaction de la totalité de l’article.

Si ces derniers ne sont pas adoptés, nous pourrions alors discuter les quelque 130 amendements restants en les découpant alinéa par alinéa, ce qui devrait rendre la discussion un peu plus simple. Il est toutefois de la pleine souveraineté du Sénat d’accepter ou de refuser cette proposition.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. La commission a considéré, à l’unanimité, que c’était effectivement une meilleure solution.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Même avis que la commission.

M. le président. Je consulte le Sénat sur cette proposition d’organisation de la discussion.

(La proposition est adoptée à l’unanimité.)

M. le président. Je me réjouis d’avoir réussi, sur un texte difficile, à obtenir l’unanimité du Sénat. (Sourires.)

La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, n’ayant pu intervenir tout à l’heure dans la discussion générale, je trouve opportun, alors que va s’ouvrir la discussion sur l’article 1er, de rappeler un certain nombre de choses.

Je souhaiterais rappeler l’attachement du Gouvernement au vote de ce projet de loi, et d’un texte équilibré. On entend sur la question beaucoup d’avis et de témoignages poignants, comme cela a encore été le cas tout à l’heure à cette tribune. Je voudrais rappeler toutefois combien ce texte est nécessaire, dans la mesure où il permet un accès à des soins immédiats pour les personnes souffrant de troubles mentaux mais ne disposant pas de tiers susceptible de formuler cette demande de soins. Je pense en particulier aux personnes isolées socialement.

Je voudrais dire aussi qu’il s’agit d’un projet de loi protecteur des libertés. Le Gouvernement en est fortement convaincu. L’article 1er nous donnera bien évidemment l’occasion d’en discuter, puisqu’il permet de répondre à la décision du Conseil constitutionnel du 26 novembre 2010 qui a fait suite à une question prioritaire de constitutionnalité. Il est en effet nécessaire, pour les patients hospitalisés à temps plein, et dont la liberté d’aller et venir est donc momentanément supprimée, que le juge des libertés et de la détention soit saisi non pas de façon facultative, comme aujourd'hui, mais de façon automatique.

Vous le savez, le projet de loi vise également à améliorer l’information des patients et des familles, ainsi que le fonctionnement des commissions départementales des hospitalisations psychiatriques. Comme Nora Berra l’a rappelé tout à l’heure, il prévoit un certain nombre de précautions supplémentaires, contrairement à ce qui a pu être dit.

Le renforcement des droits et des libertés qu’il comporte s’accompagne d’un soin particulier porté à la situation de certains patients atteints de troubles très spécifiques, pour lesquels les dangers liés à une rechute apparaissent comme plus sérieux. Je pense aux patients hospitalisés d’office, soit pour irresponsabilité pénale, soit en unité pour malades difficiles. Nous savons bien que le nombre de ces patients est très limité, qu’une procédure particulière devra être enclenchée lors de la sortie, et que l’avis du psychiatre devra être assorti de celui d’un collège pluriprofessionnel de soignants.

Vous qui attachez de l’importance à ce texte, vous savez qu’il y a eu un grand nombre d’ouvertures de la part du Gouvernement.

Aujourd'hui, on parle bien de « soins psychiatriques auxquels la personne n’est pas à même de consentir du fait de ses troubles mentaux ». C’était une attente. Le Gouvernement y a répondu. Vous savez aujourd'hui que l’on n’évoque plus les « formes » de la prise en charge, terme trop imprécis, mais bien les « lieux » de la prise en charge. Je pense notamment à « l’unité hospitalière temps plein », versus d’autres lieux. Car, si les soins psychiatriques sont les mêmes, ils s’exercent aussi dans différents lieux.

Il n’est en outre plus question de « domicile », mais bien du « lieu de vie habituel », ce qui inclut non seulement le foyer, l’accueil familial thérapeutique et l’EHPAD, l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, mais aussi la rue. La notion de « domicile » était trop restrictive et a pu faire penser à l’effraction de domicile qui n’est à aucun moment autorisée, ni prévue, sauf intervention liée à une urgence grave.

De la même manière, nous n’évoquons plus le terme de « protocole » mais bien la notion de « programme de soins ». Il en est question dans l’article 1er, et je voulais le dire en préambule. Le terme « protocole » fait trop penser à la prise de médicaments et à un caractère standard de la prise en charge. La notion de « programme de soins » est bien mieux adaptée. De plus, ce programme ne peut être modifié que par un psychiatre, en fonction de l’évolution de l’état de santé, et non pour d’autres motifs, la définition du programme s’appuyant d’ailleurs sur un entretien entre le psychiatre et le patient.

Enfin, si le programme précise les types de soins, leur lieu d’exercice et leur périodicité, c’est-à-dire leurs modalités dans le temps et dans l’espace, dans le strict respect du secret médical – j’insiste sur ce point –, il ne peut faire mention des détails du traitement médicamenteux, qui ont vocation à figurer sur une ordonnance distincte.

Voilà le cœur de l’article 1er que je voulais rappeler avant que la discussion ne s’ouvre. Comme l’a déclaré Nora Berra tout à l’heure, l’objectif du Gouvernement est que le patient soit au cœur du dispositif et des attentions, en donnant davantage de place aux élus et en s’assurant qu’une réflexion éthique soit organisée dans les établissements accueillant ces personnes, dont les capacités de consentement sont altérées du fait de leurs troubles mentaux.

En la matière, nous ne pouvons réussir seuls. Il nous faut le concours des familles et des associations, au service des seuls patients.

TITRE Ier

DROITS DES PERSONNES FAISANT L’OBJET DE SOINS PSYCHIATRIQUES