M. le président. Madame Giudicelli, je vous remercie de chercher à me simplifier la vie en me faisant juge de cette question ! (Sourires.)
Ce qui caractérise un Parlement, c'est que la parole y est libre et que le vote l’est tout autant, sur les amendements comme sur l’ensemble du texte. Les commissions qui sont saisies d’un texte s'organisent et votent.
Il est vrai que nous nous trouvons ce soir dans une situation un peu particulière – nous y survivrons, rassurez-vous ! –, mais cela ne tient pas au fait que la commission n'a pas adopté de texte. Malgré tout, il reste un projet de loi, dans la version qui nous vient de l'Assemblée nationale, et c’est pour examiner les amendements déposés sur ce texte que la commission s’est réunie ce matin.
Ce qui rend ce débat singulier, c’est que la commission a pris ce matin, dans sa majorité, des positions qui ne correspondent pas à l’avis qui s'exprime majoritairement ce soir dans cet hémicycle. Il n'en demeure pas moins que, aux termes du règlement du Sénat, le rôle du rapporteur est d’exprimer l'avis de la commission et de dire pourquoi elle a adopté telle ou telle position.
M. Jean Desessard. Voilà !
M. le président. Si, à titre personnel, il souhaite ensuite préciser que la commission a pris des positions contraires à ses vœux, il peut le faire, mais il doit d’abord mettre en avant la position de la commission.
Les membres de la commission qui étaient majoritaires ce matin estiment que les avis de la commission ne sont pas étayés d’arguments assez développés. Mais je m’en tiendrai là, ma chère collègue, sauf à sortir de mon rôle de président, ce dont je me garderai bien.
Quant à ma position personnelle, elle est la suivante : en tant que président, je ne prends pas part au vote. Cela ne m’empêche pas d’avoir mon opinion sur ce qui se passe, et c’est avec beaucoup d’intérêt que j’assiste au déroulement de nos travaux. (Sourires.)
La parole est à M. Jacques Blanc, pour un rappel au règlement.
M. Jacques Blanc. Je tiens simplement à procéder à un certain nombre de rappels nécessaires.
De quoi est-il question ce soir ? Il s'agit de protéger non pas la société, mais des personnes atteintes d'une maladie psychiatrique...
M. Guy Fischer. C’est là que nous sommes en désaccord !
M. Jacques Blanc. ... qui les empêche d’avoir même conscience de leur état. Je pense, par exemple, à des cas de délire.
Mme Annie David. C’est une explication de vote, pas un rappel au règlement !
M. le président. Mon cher collègue, je vous ai donné la parole pour un rappel au règlement.
M. Jacques Blanc. C’est bien un rappel au règlement, monsieur le président, j’y viens.
M. le président. Le plus tôt sera le mieux, mon cher collègue !
M. Jacques Blanc. Dans cette situation, l'intérêt du malade exige que nous trouvions des réponses adaptées afin de lui permettre de sortir de son état, notamment en lui imposant des soins.
Par chance, et c’est l’objet de mon rappel au règlement, la commission, qui a accompli un travail difficile, car le sujet est complexe, a émis sur l'amendement n° 280 de M. Milon un avis favorable qui rejoint la position personnelle du rapporteur et celle du Gouvernement. Nous pourrions donc nous retrouver autour de cet amendement et ainsi montrer que le Sénat cherche à réaliser des avancées.
Cet amendement répond à une interrogation qui nous est commune : comment permettre à ces malades de sortir de leur état, d’être bien pris en charge et d'avoir la certitude de bénéficier d'un programme élaboré pour eux ? Dans ces conditions, monsieur le président, ne serait-il pas possible de mettre d’emblée aux voix cet amendement, que tout le monde pourrait voter ?
Ce faisant, nous montrerions que, dans ce débat difficile, le Sénat apporte une contribution très positive pour répondre à un problème délicat et aller de l'avant. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous donne acte de ces différents rappels au règlement, laissant chacun juge de l’étroitesse du rapport qu’ils entretiennent avec ledit règlement…
Article 1er (suite)
M. le président. Nous en revenons aux amendements faisant l’objet d’une discussion commune et portant sur les alinéas 2 à 20 de l’article 1er.
La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 45 rectifié et 87.
M. Guy Fischer. Les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG voteront naturellement ces deux amendements, qui visent à supprimer les soins sans consentement en ambulatoire et dont je rappelle qu’ils ont, à deux reprises, reçu un avis favorable de la commission des affaires sociales.
Cette proposition récurrente, présentée comme devant permettre une diversification des modalités de soins face à l’hospitalisation complète, constitue, je le répète, une mauvaise réponse à une bonne question.
Si nous ne doutons pas que l’hospitalisation complète puisse être inappropriée pour certains patients, nous ne croyons pas que l’extension de la contrainte à domicile, qui peut être celui des patients ou de la famille, soit pour autant une bonne mesure.
Cette diversité nécessaire à la bonne prise en charge de tous les patients doit d’abord, et avant tout, reposer sur une politique de secteur qui soit susceptible de répondre aux attentes des personnes atteintes de maladies mentales, au quotidien comme dans les périodes de crise, lorsqu’elles surviennent. Convenez qu’en l’état actuel des moyens dédiés à la psychiatrie, et aux secteurs en particulier, nous en sommes loin !
Il y a un véritable fossé entre la théorie et le pratique, et le seul mode diversifié que vous préconisez tend à favoriser le « tout médicament » par rapport au processus psychanalytique, évidement nécessaire.
Par ailleurs, et cela n’est pas sans lien avec ce dont nous venons de parler, nous avons appris ce matin, à l’occasion d’une table ronde que nous organisions avec des représentants des professionnels de la psychiatrie et des représentants de patients ou anciens patients, que, dans de nombreuses villes, les consultations psychiatriques au sein des centres médico-psychiatriques étaient devenues payantes.
Elles étaient jusqu’alors gratuite. Cette gratuité permettait à tous les patients en souffrance de venir parler et, par voie de conséquence, de désamorcer d’éventuelles crises. Dans ma commune existe un centre de thérapie brève qui joue un rôle important à cet égard.
Rendre ces consultations payantes revient à prendre le risque que les publics concernés, très souvent démunis du point de vue financier, désertent ces consultations et qu’ils ne soient plus traités, demain, qu’à l’occasion des périodes de crise.
Nous en revenons donc à notre critique principale de votre conception de la psychiatrie, une conception sécuritaire destinée à faire cesser les crises et les troubles et non à soigner les patients. Jusqu’à la fin de ce débat, nous continuerons à porter cette critique.
Mes chers collègues, il aurait été souhaitable que le Gouvernement s’en tienne strictement à la décision du Conseil constitutionnel, sans aller plus loin, en limitant le contenu du texte à un article prévoyant l’intervention du juge des libertés et de la détention. Cela nous aurait évité d’aborder la question des formes de soins en dehors d’une loi plus large relative à la psychiatrie dans son ensemble.
Nous voterons donc ces amendements identiques, considérant que la suppression des soins sans consentement en ambulatoire présenterait l’avantage d’écarter le dispositif le plus décrié, par les professionnels concernés comme par les patients.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Je précise d’emblée qu’à titre personnel je ne voterai pas ces amendements.
Les soins ambulatoires sous contrainte méritent d’être approuvés, à condition, et elle est importante, qu’ils fassent bien diminuer le nombre des hospitalisations sans consentement et qu’ils ne viennent pas s’ajouter à elles.
Ils méritent d’être approuvés dès lors qu’ils constituent une alternative à l’hospitalisation complète, et donc une alternative à une mesure privative de liberté, et, en outre, que cette alternative à l’enfermement est entourée de garanties, en particulier lorsqu’elle prend la forme d’une hospitalisation partielle.
Je vous fais observer que c’est précisément ce qu’a voulu la commission des lois en adoptant un amendement instaurant un contrôle systématique du juge en cas d’hospitalisation partielle, à compter du 1er septembre 2012.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. Je voudrais d’abord rappeler que ces deux amendements identiques ont été approuvés deux fois, la semaine dernière et ce matin, par la commission des affaires sociales, n’en déplaise à Jean-Louis Lorrain, que je ne peux pas appeler rapporteur, puisqu’il ne rapporte pas ce que la commission a décidé !
La proposition de loi signée par mes collègues Jean-René Lecerf, Christiane Demontès et Gilbert Barbier, que j’avais rapportée ici même l’an dernier, prévoyait des soins sous contrainte, obligatoires, ambulatoires, mais pour des malades mentaux délinquants qui, en contrepartie d’une libération précoce, se voyaient imposer une obligation de soins, à l’image d’une obligation de contrôle judiciaire.
Ce dispositif nous paraissait cohérent. D’ailleurs, le Sénat a voté cette proposition à l’unanimité, contre l’avis du Gouvernement. Comme vient de le rappeler Jean-René Lecerf, il s’agissait de prévoir une alternative à l’enfermement et à l’emprisonnement. Cette obligation de soins était de surcroît assortie d’une sanction : si le malade délinquant ne s’y soumettait pas, il retournait en prison ! Voilà pour les malades mentaux délinquants.
Mais, dans le cas présent, il s’agit des malades mentaux en général. Or, on le sait bien, et Mme la secrétaire d’État l’a reconnu elle-même, le malade mental doit d’abord prendre conscience de sa maladie. Tous les psychiatres et les thérapeutes s’accordent sur ce point : faire accepter le soin par le malade, et donc lui faire prendre conscience de l’état dans lequel il se trouve, est déjà un soin en soi, le début de la thérapie.
Précisément, cette démarche ne sera pas possible en ambulatoire. En effet, qui va contrôler le respect de l’obligation de soins ? Les infirmiers des centres médico-psychiatriques ou des établissements du type de celui dont parlait notre collègue Guy Fischer tout à l’heure en prenant l’exemple de sa commune ? Nous savons très bien qu’ils sont trop peu nombreux.
Et quand bien même le contrôle serait possible, quelle serait la sanction d’une violation de l’obligation ? Il n’y en a pas ! Ce ne peut pas être le retour vers l’hospitalisation d’office, qui constitue un soin et non une sanction !
Ces soins ambulatoires sans consentement pour des malades mentaux qui n’ont pas été jugés pour des délits ou des crimes sont donc totalement impraticables. Aucun des psychiatres interrogés – pour ma part, j’ai questionné les psychiatres de l’établissement que je préside -, n’arrive à comprendre le sens d’une telle mesure. Comment va-t-on contraindre un malade à des soins en dehors d’un établissement ? Où contraindre ? Quand ? Avec quels moyens ? Tout cela est totalement impraticable.
Enfin, quand bien même le dispositif entrerait en application, qui sera responsable dans le cas où un malade, astreint à des soins sans consentement et en ambulatoire, aura commis une infraction grave ?
M. Guy Fischer. La famille…
M. Jean-Pierre Michel. Qui sera responsable ? Le choc dans l’opinion publique sera bien pire que s’il agissait d’un malade s’étant enfui de l’établissement où il était hospitalisé. Dans le cas de l’obligation de soins sans consentement et en ambulatoire, les contrôles étant de facto impossibles, nous serons à la merci de dysfonctionnements graves, qui pèseront sur l’opinion publique et qui accroîtront l’insécurité. Cette mesure ne sera alors plus appliquée.
Et quid des sorties d’essai ? Elles disparaissent ! Lorsqu’un malade est hospitalisé, d’abord sans consentement puis en dehors du cadre de la procédure d’hospitalisation d’office, le psychiatre peut lui accorder une sortie d’essai, en fonction de son évolution, pour voir comment il va se comporter en milieu libre. Progressivement, le malade sort ainsi de plus en plus souvent de l’hôpital, et l’on peut envisager plus. Or le texte supprime cette possibilité, qui existe aujourd’hui.
Non, vraiment, tout cela est totalement incohérent, totalement inapplicable. C’est la raison pour laquelle nous voterons ces amendements identiques de suppression, comme nous l’avons déjà fait deux fois en commission, et que nous demandons au Sénat de se prononcer par scrutin public.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Mon intervention sera courte, car je souscris pleinement aux arguments que mes collègues Guy Fischer et Jacky Le Menn ont développés en présentant leurs amendements.
L’obligation de soins est un contresens clinique. En effet, on peut obliger un patient à être hospitalisé, mais pas à se soigner, et encore moins hors les murs d’un établissement adapté. Le travail d’un psychiatre est d’amener le malade à vouloir se soigner. Rien n’est précisé, dans le projet de loi, sur la forme que prendront ces soins hors de l’hôpital.
Il est impensable qu’il s’agisse exclusivement de l’administration de médicaments, car la guérison vient surtout de la relation entre le patient et son médecin. La prise de médicaments ne doit pas être le principal axe thérapeutique.
Le rôle du psychiatre ne saurait se limiter à la surveillance de la bonne prise des médicaments. N’aborder la psychiatrie que sous l’angle pharmacologique revient à ne considérer l’humain que comme un être végétatif, que l’on traite comme tel, sans chercher à aboutir à un changement psychique profond.
On ne réglera pas les problèmes de la psychiatrie à grand renfort d’injections ! La solution réside aussi dans la création de places en accueil de jour, l’ouverture de nouveaux lits et la création de postes dans les hôpitaux.
Tel est le véritable enjeu, madame la secrétaire d’État. La mise en place des soins sous contrainte en ambulatoire vous permet de faire des économies, en évitant de répondre aux besoins des hôpitaux.
M. Jacques Blanc. Ce n’est pas le problème !
M. Jean Desessard. Ce faisant, vous fragilisez encore davantage des patients atteints de troubles psychiques graves. C’est pourquoi je voterai ces amendements identiques de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.
Mme Valérie Létard. Je souhaite expliquer la position de mon groupe, sans retracer dans le détail le cheminement des amendements qui ont été défendus par Muguette Dini, lors de l’examen en commission mercredi dernier, ainsi que des positions que j’ai prises personnellement, de même qu’Alain Milon et d’autres de mes collègues, dont une bonne partie de gauche.
Nous avons tous soutenu ces amendements à l’article 1er, mais, lorsqu’il s’est agi de voter le texte, nous n’étions plus aussi nombreux. (Mme Christiane Demontès proteste.) Je n’accuse personne, je résume ce qui s’est passé en commission, chère collègue. Le texte n’a donc pas été adopté et nous sommes revenus à la version de l’Assemblée nationale.
Nous essayons donc de réfléchir à des amendements qui permettraient d’améliorer le texte, en tenant compte des positions exprimées lors de la dernière réunion de commission.
Il me semble qu’Alain Milon, au terme d’un important travail, nous fournit une solution qui permet d’encadrer ce qui peut se passer à l’extérieur de l’établissement, lorsque le malade est suivi soit en mode ambulatoire soit en mode alternatif, c’est-à-dire dans des cadres autres que les unités d’hospitalisation à temps plein.
L’amendement n° 280 présenté par Alain Milon, sous-amendé par Jean-Louis Lorrain, me semble constituer une amélioration du dispositif. Il est cependant indispensable que Mme la secrétaire d’État nous garantisse la mise en œuvre de moyens suffisants pour assurer une bonne application de ce texte. Je joins ici ma voix à celle de tous mes collègues pour estimer qu’il faudra recruter des personnels paramédicaux, des infirmiers psychiatriques supplémentaires.
En effet, un programme de soins du patient à domicile, établi par un psychiatre de l’établissement d’accueil, nécessite le concours d’infirmiers psychiatriques susceptibles d’agir à l’extérieur de l’établissement. Il faudra donc des moyens supplémentaires pour que soient respectés les quotas précis de personnels prévus au sein des établissements, en fonction du nombre de patients. Si des infirmiers accompagnent des patients à l’extérieur, il manquera donc du personnel dans les établissements.
Les décrets et les mesures prises pour appliquer cet amendement, s’il est voté, devront traduire l’engagement du Gouvernement d’augmenter les moyens humains dans les établissements concernés. Il faudra également autoriser des personnels paramédicaux et des infirmiers psychiatriques à sortir de l’établissement, en tant que de besoin.
Je félicite une nouvelle fois M. Milon d’être parvenu à sortir par le haut de la situation de blocage dans laquelle nous nous sommes trouvés en commission, tout en améliorant le texte de façon remarquable.
M. Guy Fischer. Mauvais texte !
Mme Valérie Létard. Cela étant, le Gouvernement devra nous apporter des garanties quant à la mise en œuvre de ce dispositif de prise en charge.
Le groupe de l’Union centriste s’est rallié à cette solution de compromis et n’a donc pas redéposé ses amendements en séance publique. Toutefois, je le répète, le Gouvernement doit faire un geste et s’engager à consacrer les moyens nécessaires. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, pour explication de vote.
M. Jacky Le Menn. Je voudrais tout de même remettre les pendules à l’heure !
On reproche à notre groupe de n’avoir pas voté le rapport de Mme Dini la semaine dernière, alors que nous avions soutenu certains de ses amendements, notamment celui qui visait à supprimer les alinéas 2 à 20 de l’article 1er, amendement que nous avons repris, comme d’autres, parce qu’il nous semblait pouvoir être profitable aux malades.
Si nous nous sommes abstenus en commission, c’est que plus des trois quarts de nos amendements avaient été rejetés ! Cependant, nous n’avons pas voté contre – contrairement à nos collègues du groupe CRC-SPG –, afin de prendre acte des avancées réalisées et que nous avions votées.
Cependant, la plupart de nos amendements ayant été écartés, nous n’allions tout de même pas accorder nos suffrages à ce texte ! La responsabilité du vote final incombe à la majorité sénatoriale, car c’est en son sein que tout s’est détérioré, avec le résultat que l’on sait.
Par conséquent, avant même de prendre connaissance de l’amendement de notre collègue Milon, qui pourra effectivement constituer une solution de repli, nous avons présenté en séance publique des amendements qui reprenaient ceux qui avaient été défendus par Mme Dini, à l’époque rapporteur du texte, et que nous avions soutenus en commission. Nous sommes donc tout à fait logiques avec nous-mêmes !
Encore une fois, mes chers collègues, ne confondons pas vitesse et précipitation. Nous ne sommes pas complètement démunis : l’hospitalisation sans consentement existe, avec des sorties d’essai qui pourraient éventuellement être mieux encadrées mais qui ont le mérite de fonctionner, alors que le texte vise à les supprimer. Il est donc urgent d’attendre un meilleur texte, une loi d’ensemble sur la maladie mentale. Telle est notre position ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Je sollicite une brève suspension de séance, monsieur le président.
M. le président. Nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante, est reprise à zéro heure cinq, le mercredi 11 mai 2011.)
M. le président. La séance est reprise.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 45 rectifié et 87, qui visent à supprimer les alinéas 2 à 20 de l’article 1er.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public, émanant, l’une, du groupe CRC-SPG, l’autre, du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 207 :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 337 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 169 |
Pour l’adoption | 151 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 477 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 490 rectifié.
Mme Annie David. Nous sommes tout à fait défavorables au sous-amendement présenté par M. Lorrain.
Nous pourrions trouver quelque intérêt à voter l’amendement n° 280 de notre collègue Alain Milon, mais pas modifié par le sous-amendement de M. Lorrain, qui revient à réintroduire dans le texte une disposition dont nous avons estimé dès le début qu’elle était très mauvaise.
Ce sous-amendement tend en effet notamment à renvoyer à un décret en Conseil d’État pour préciser « les conditions dans lesquelles le programme de soins et ses modifications sont notifiés au patient et transmis au représentant de l’État dans le département. » Notre collègue Alain Milon avait lui, par sa rédaction, réglé le problème en faisant disparaître le décret en Conseil d’État.
Sans aller jusqu’à dire, comme M. Lorrain et Mme la secrétaire d’État, que l’amendement n° 280 est très bon, je dirai qu’il est plus acceptable en l’état, sans le sous-amendement n° 490 rectifié, que nous ne pouvons évidemment pas voter. Si ce sous-amendement était adopté, il remettrait totalement en cause notre vote sur l’amendement de M. Milon.
Le sous-amendement n° 490 rectifié ne répond en rien aux questions qu’a posées tout à l’heure Mme Valérie Létard, et j’ignore si Mme la secrétaire d’État nous en dira plus ce soir sur les moyens.
Je la vois mal nous déclarer tout de go qu’elle ne dégagera pas les moyens nécessaires à la mise en œuvre de ce texte. Mais quand bien même elle s’engagerait dans le sens que nous souhaitons, ce ne seraient encore que des mots. Au-delà, nous aimerions savoir quels moyens humains et financiers elle entend concrètement proposer pour le secteur psychiatrique, que ce soit en termes de recrutement d’infirmiers psychiatriques ou d’ouvertures de lit dans les hôpitaux. Va-t-elle octroyer pour la santé psychiatrique tous les moyens que nous avons les uns et les autres réclamés,…
M. Guy Fischer. La droite ? À peine !
Mme Annie David. … surtout sur les travées de la gauche, mais un peu aussi sur celles de la droite ? (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Je ne vous ferai pas ce mauvais procès, chers collègues de la majorité.
Je le répète : nous ne voterons pas le sous-amendement n° 490 rectifié proposé par M. Lorrain. De son adoption ou non dépendra notre vote sur l’amendement n° 280.
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, pour explication de vote.
M. Jacky Le Menn. Je suis dans le même état d’esprit que notre collègue Annie David.
Pour ma part, comme je l’ai dit assez longuement en commission ce matin et tout à l’heure encore, j’étais prêt à voter l’amendement de compromis de notre collègue Alain Milon. Or le sous-amendement présenté par M. Lorrain tend à faire rentrer par la fenêtre ce que l’on avait évacué par la porte !
M. Guy Fischer. C’est tout à fait cela !
M. Jacky Le Menn. Il n’apporte pas de réponse aux questions que nous posons depuis longtemps.
Nous n’avons pas de réponses non plus aux questions qui ont été posées tout à l’heure par Mme Valérie Létard sur les moyens, questions auxquelles j’espère que Mme la secrétaire d’État va répondre.
On peut dire tout ce que l’on veut, s’il n’y a pas de moyens, il n’est pas possible de dispenser de bons soins, de même d’ailleurs qu’il n’est pas possible d’assurer une bonne sécurité. On ne fait pas de bonne médecine sans médecins, sans infirmiers, sans moyens, sans lits d’hospitalisation, sans lits de repli. Faire croire le contraire, c’est vouloir faire passer des vessies pour des lanternes !
J’ai géré des établissements hospitaliers pendant des années et je puis vous dire que l’on a beau porter la bonne parole, il n’est pas possible de soigner si l’on n’a pas d’infirmières et de médecins à inscrire sur les tableaux de service !
Quant aux problèmes des fugues, de ces malades qui ne prennent pas leurs médicaments, il nous faut des réponses claires, mais on ne nous les a toujours pas fournies.
Notre collègue Jean-Pierre Michel a très précisément soulevé le problème de la responsabilité en matière de soins ambulatoires sans consentement : qui sera responsable en cas de problème, en cas d’accident ? J’attends toujours la réponse à cette question.
Une catégorie juridique nouvelle est créée sans que soient apportées aux acteurs des soins, à ceux qui s’occuperont de ces malades, les garanties nécessaires en termes de responsabilité. Cela va donner lieu à des procès sans fin. Mais nous n’avons pas plus de réponse sur ce sujet.
Pour ces différentes raisons, et pour bien d’autres, trop longues à évoquer ce soir, nous ne pouvons voter le sous-amendement de notre collègue Jean-Louis Lorrain. C’est une question de bon sens. Or, lorsqu’on fait une loi, il faut faire preuve de bon sens, aussi.
Pas de moyens, pas de soins, pas de sécurité juridique en termes de responsabilité : autant de signes de danger pour ceux qui s’occupent des malades !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je suis très intéressé – moi aussi – par la réponse à la question posée par Mme Létard à Mme la secrétaire d’État sur les moyens mis en œuvre pour l’application de la loi. J’attends que Mme la secrétaire d’État nous indique quels sont ces moyens, et je suis sûr que Mme Létard ne manquera pas d’être alors rassurée...
Oui, mes chers collègues, le Gouvernement qui, par ailleurs, multiplie les économies dans tous les domaines, en particulier dans la santé, va sans doute débloquer de l’argent pour la mise en place des soins ambulatoires… J’attends cette révélation, j’attends l’annonce de ce changement de politique gouvernementale ! (Sourires.)
Je suis très attentif, donc, à la réponse de Mme la secrétaire d’État. Je suis persuadé que c’est aussi votre cas, mes chers collègues !
M. Milon prévoit dans son amendement qu’une personne faisant l’objet « de soins psychiatriques sans son consentement est prise en charge par tous les outils thérapeutiques de la psychiatrie adaptés à son état ». M. Lorrain, qui ne veut pas qu’apparaisse la mention « sans son consentement » la remplace, dans son sous-amendement, par les mots : « auxquels elle n'est pas à même de consentir du fait de ses troubles mentaux ». Alors là… !