M. le président. L'amendement n° 68, présenté par M. Lise, est ainsi libellé :
Alinéas 146 à 148
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Les candidatures aux postes de conseillers exécutifs sont déposées auprès du président de l’Assemblée de Martinique. Si, à l’expiration du délai d’une heure, une seule candidature a été déposée pour chaque poste à pourvoir, les nominations prennent effet immédiatement et il en est donné lecture par le président.
« Dans le cas contraire, les membres du conseil exécutif sont élus au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel.
« Chaque conseiller de l’Assemblée de Martinique ou groupe de conseillers à l’Assemblée de Martinique peut présenter une liste de candidats dans l’heure qui suit l’expiration du délai susmentionné.
« Les sièges sont attribués aux candidats d’après l’ordre de présentation sur chaque liste. Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l’attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d’égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d’être proclamés élus. Si le nombre de candidats figurant sur une liste est inférieur au nombre de sièges qui lui reviennent, le ou les sièges non pourvus sont attribués à la ou aux plus fortes moyennes suivantes.
« Le président du conseil exécutif de la Martinique est le candidat figurant en tête de la liste ayant obtenu le plus de sièges.
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Par cet amendement, il s’agit de modifier le mode d’élection des conseillers exécutifs pour atténuer l’impact considérable de minoration des oppositions qu’induit l’ensemble du dispositif prévu par ce projet de loi.
En effet, ce dispositif minorera à l’excès, voire éliminera des formations politiques dont on ne peut sous-estimer l’importance au sein de la population martiniquaise.
D’une part, tous les sièges du conseil exécutif seront attribués à une seule liste.
D’autre part, la prime de majorité accordée à la liste arrivant en tête des élections à l’Assemblée de Martinique sera très importante, même si la commission des lois l’a ramenée à neuf sièges.
Enfin, il faut rappeler que, au second tour des élections à l’assemblée, la loi fixe des seuils de 10 % de voix nécessaires pour qu’une liste se présente et de 5 % pour qu’elle fusionne avec une autre liste.
Le parti ou la coalition de partis de la liste gagnante bénéficiera tout à la fois de la présidence du conseil exécutif, de huit postes de conseillers exécutifs, de la présidence de l’assemblée et des neuf sièges supplémentaires résultant de la prime majoritaire ; étant entendu que, par ailleurs, les neufs sièges libérés par les conseillers élus au conseil exécutif seront remplacés par des membres de la formation majoritaire.
Je comprends bien le souci de dégager une majorité stable. Mais il faut trouver un équilibre susceptible de respecter au mieux le choix des électeurs.
Rappelons qu’en Martinique, malgré la multiplicité des partis, on n’a jamais connu de problèmes d’instabilité politique tels que ceux évoqués pour justifier la nécessité d’une prime majoritaire importante. On n’en a pas connu lorsque l’exécutif ne disposait que d’une voix de majorité, comme ce fut le cas de 1983 à 1986, à la région, sous la présidence d’Aimé Césaire, ou de 1988 à 1993, au conseil général, où je me suis trouvé premier vice-président en cohabitation avec un président RPR élu au bénéfice de l’âge.
On n’en a pas connu non plus lorsque l’exécutif dépendait d’une majorité de gestion transcendant les oppositions partisanes, comme ce fut le cas de 1992 à 1998 à la région, avec un président élu au bénéfice de l’âge, et de 1998 à 2004, toujours à la région.
Lorsqu’une large majorité des élus réunis en congrès a proposé un conseil exécutif élu par l’Assemblée au scrutin majoritaire de liste, avec pour président le premier candidat de la liste, cette proposition allait de pair avec le choix d’une élection à la proportionnelle de l’assemblée, sans prime majoritaire.
Si le niveau de la prime majoritaire devait rester aussi important que ce qui est prévu dans la rédaction actuelle du texte, seule une représentation du conseil exécutif à la proportionnelle éviterait de laisser tout le pouvoir concentré dans une même main et empêcherait que soient marginalisées des formations politiques même très représentatives de la population martiniquaise.
Comme nous examinerons tout à l’heure la question de la prime majoritaire, je demande la réserve du vote sur l’amendement n° 68 jusqu’au vote sur l’article 6 relatif au mode d’élection des conseillers à l’Assemblée de Martinique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur la demande de réserve et sur l’amendement ?
M. Christian Cointat, rapporteur. La commission n’est pas favorable à la demande de réserve. Cet amendement ne présente pas spécialement de lien avec l’article 6 ; en revanche, il vise à remettre en cause l’architecture globale du statut de l’Assemblée de Martinique.
À l’exception du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie – une exception qui se justifie par les accords politiques passés avec les Calédoniens et par la révision constitutionnelle qui en a découlé –, aucun conseil exécutif n’est désigné en France selon un système proportionnel.
Je précise en outre que ce mode de désignation du Gouvernement calédonien ne va pas sans poser quelques problèmes, sur lesquels nous allons prochainement devoir nous pencher dans cette enceinte.
Partout ailleurs, on a fait le choix d’un système proportionnel assorti d’une prime majoritaire pour dégager une majorité. L’exécutif doit donc être majoritaire, mais il reste contrôlé par une assemblée au sein de laquelle toutes les forces sont représentées.
En vous écoutant, cher collègue, j’avais finalement l’impression que vous défendiez, par vos exemples, le système guyanais, qui se caractérise davantage par une représentation plus équilibrée de toutes les forces de l’assemblée au sein de la commission permanente.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Le rôle d’un organe coopératif n’est pas le même que celui d’un organe exécutif !
M. Christian Cointat, rapporteur. Absolument ! Les membres d’un exécutif doivent être capables de travailler en bonne intelligence, sans tiraillements internes.
Je comprends toutefois votre approche, monsieur Lise ; elle me semble digne d’intérêt.
Il est vrai aussi que, parmi les élus que nous avons rencontrés, certains n’avaient visiblement pas bien perçu qu’il s’agirait d’un exécutif monocolore. Une fois qu’ils l’ont compris, ils se sont demandé s’ils n’auraient pas mieux fait d’opter pour le régime guyanais.
M. Jean-Paul Virapoullé. Il est bien meilleur, en effet !
M. Christian Cointat, rapporteur. Mais un choix a été fait, et nous devons aller au bout de la logique, sauf à remettre en cause l’ensemble du statut de la Martinique.
Votre amendement est bien pensé, bien rédigé, mais il ne s’insère pas dans le schéma qui a été retenu par le Gouvernement et une majorité d’élus martiniquais. Dans ces conditions, et à mon grand regret, je vous demanderai de bien vouloir le retirer, ce qui m’évitera d’avoir à émettre un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Lise, l'amendement n° 68 est-il maintenu ?
M. Claude Lise. Je suis obligé de le maintenir, monsieur le président.
Le dispositif que je propose est très cohérent. En réalité, le problème qui se pose n’est pas la remise en cause de tout le dispositif, comme le prétend M. le rapporteur. Lorsque les élus, réunis en congrès, ont proposé un exécutif homogène, ils se sont aussi prononcés contre toute prime majoritaire. Ils ont par la suite accepté une certaine forme de prime majoritaire, mais pas aussi importante que celle qui nous est proposée dans le texte.
Au regard de l’importance de la prime majoritaire et de l’homogénéité de l’exécutif, j’ai le sentiment que l’on s’apprête à créer une sorte d’exécutif omnipotent, sans compter que l’on a failli permettre tout à l’heure au président de l’exécutif d’être aussi président d’une communauté d’agglomération !
Si tel est le projet du Gouvernement, chacun doit prendre ses responsabilités. Mon rôle d’élu, après avoir consulté nombre de mes collègues, est de mettre en garde contre de telles perspectives.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur la demande de réserve et sur l’amendement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Monsieur Lise, on peut comprendre votre souci de garantir le pluralisme politique. Je vous rappelle néanmoins que l’élection de l’assemblée au scrutin proportionnel permettra de tenir compte de la diversité de la représentation politique.
Je voudrais aussi, en abondant dans le sens de M. le rapporteur, vous donner trois raisons supplémentaires de retirer votre amendement.
D’abord, si ce conseil exécutif est issu de l’assemblée élue à la proportionnelle, ses membres ne siégeront plus au sein de cette assemblée.
Ensuite, le projet de loi mentionne expressément que chaque membre de ce conseil exécutif sera obligatoirement détenteur d’une délégation.
Enfin, le recours à la motion de défiance ne serait plus opérant si le caractère majoritaire de la composition du conseil exécutif n’était pas maintenu. On voit mal en effet l’opposition voter contre l’un de ses membres qui siège au conseil exécutif.
Vous le voyez, l’architecture du texte a été minutieusement pensée. Nous ne pouvons donc pas vous suivre, car votre proposition, qui aurait pour conséquence de remettre en cause le fondement de l’exécutif collégial, ne me semble pas conforme au modèle proposé à l’issue des négociations menées avec les élus.
M. le président. Je mets aux voix la demande de réserve du vote sur l’amendement n° 68 jusqu’au vote sur l’article 6.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas la demande de réserve.)
M. le président. L'amendement n° 96 rectifié, présenté par MM. S. Larcher, Antoinette, Gillot, Lise, Patient et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 148
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Nul ne peut être élu président du conseil exécutif s’il n’a préalablement à chaque tour de scrutin remis aux conseillers à l’Assemblée de Martinique, par l’intermédiaire du président de l’assemblée, une déclaration écrite présentant les grandes orientations de son action pour la durée de ses fonctions.
La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. Cet amendement a pour objet d’appeler votre attention, mes chers collègues, sur un oubli dans le texte qui nous est proposé : le projet de loi ne prévoit pas de déclaration de candidature à la présidence du conseil exécutif.
Or, de toute évidence, cet exécutif aura véritablement pour fonction de conduire les destinées du territoire pendant plusieurs années. Il semble donc important que les têtes de liste pour l’élection au conseil exécutif transmettent aux membres de l’assemblée un document permettant d’apprécier leur programme pour le territoire. Ce document, sous forme de déclaration écrite, aurait vocation à présenter les grandes orientations du candidat pour la durée de ses fonctions. Lesdites orientations seraient évidemment en rapport avec les compétences dévolues à la collectivité.
Une telle mesure me semble particulièrement importante, notamment pour permettre une information claire et complète des membres de l’assemblée.
En outre, le projet de loi prévoyant la possibilité de proposer des motions de défiance, il semble logique que le président du conseil exécutif s’engage, dès sa désignation, sur un programme qui lui est politiquement opposable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Cointat, rapporteur. Cet amendement vise à aligner la Martinique sur le droit commun applicable aux régions et qui est déjà en vigueur en Guyane.
La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 129, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 156
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« IV. – Si le président du conseil exécutif exerce une fonction le plaçant dans une situation d’incompatibilité prévue au III, il cesse de ce fait même d’exercer ses fonctions de président du conseil exécutif et d’appartenir au conseil exécutif. En cas de contestation, l’incompatibilité prend effet à compter de la date à laquelle la décision juridictionnelle confirmant l’élection du conseil exécutif devient définitive.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de cohérence, qui vise le président du conseil exécutif se trouvant dans une situation d’incompatibilité, par analogie avec les dispositions applicables au président d’un conseil régional ou au président de l’Assemblée de Guyane.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 97, présenté par MM. S. Larcher, Antoinette, Gillot, Lise, Patient et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 174
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 7224-13-1. – Le président du conseil exécutif peut, par arrêté délibéré au sein du conseil exécutif, prendre toute mesure :
« 1° Tendant à préciser les modalités d’application des délibérations de l’Assemblée de Martinique ;
« 2° Fixant les règles d’organisation et de fonctionnement des services de la collectivité territoriale de Martinique.
II. – Après l’alinéa 196
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 7225-4. – Les délibérations de l’Assemblée de Martinique peuvent prévoir des mesures d’application arrêtées par le président du conseil exécutif dans les conditions prévues par l’article L. 7224-13-1.
La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. Je souhaite appeler l’attention du Sénat sur l’importance de cet amendement : le président du conseil exécutif doit disposer des moyens effectifs de mettre en œuvre les décisions de l’assemblée.
Le choix de la mise en place d’un conseil exécutif distinct de l’assemblée se justifie par l’application du principe de la séparation des pouvoirs. Celle-ci apparaît logique dès l’instant où l’assemblée délibérante peut être habilitée à adopter des règles applicables sur le territoire de la collectivité « dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi », comme le prévoit le troisième alinéa de l’article 73 de la Constitution.
Dès lors, des mesures d’exécution des délibérations de l’assemblée se révèlent nécessaires. Il convient donc de doter le président du conseil exécutif de la possibilité de prendre en conseil exécutif lesdites mesures.
Le statut de la collectivité territoriale de Corse, qui a inspiré en grande partie l’organisation administrative de la collectivité de Martinique, fait référence à l’article L. 4422-26 du code général des collectivités territoriales, qui dispose : « Le président du conseil exécutif de Corse peut, par arrêté délibéré au sein du conseil exécutif, prendre toute mesure :
« 1° Tendant à préciser les modalités d’application des délibérations de l’Assemblée ;
« 2° Fixant les règles d’organisation et de fonctionnement des services de la collectivité territoriale de Corse ; […] »
L’attribution du président du conseil exécutif de la collectivité territoriale de Corse relative à la possibilité de prendre des mesures « tendant à préciser les modalités d’application des délibérations de l’Assemblée » s’explique par le fait que l’Assemblée de Corse se voit reconnaître, par l’article L. 4422-33 du même code, la possibilité de « prévoir des mesures d’application arrêtées par le président du conseil exécutif dans les conditions fixées à l’article L. 4422-26 ».
Il me paraît logique, voire indispensable, de doter l’Assemblée de Martinique et le président du conseil exécutif de la collectivité de Martinique des mêmes attributions que celles qui sont applicables en Corse. Cela est d’autant plus nécessaire si l’on prend en compte le fait que la loi organique réformant le régime des habilitations étend la durée de celles-ci.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Cointat, rapporteur. Comme vient de l’indiquer M. Larcher, il s’agit d’accorder la possibilité au président du conseil exécutif de prendre des mesures d’exécution des délibérations de l’assemblée, à l’instar des dispositions applicables en Corse.
Cette précision est utile. La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 130, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 184
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 7224-22. - Sur sa demande, le président du conseil exécutif reçoit du représentant de l'État dans la collectivité territoriale les informations nécessaires à l'exercice de ses attributions.
« Sur sa demande, le représentant de l'État dans la collectivité territoriale reçoit du président du conseil exécutif les informations nécessaires à l'exercice de ses attributions.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 23, présenté par M. Virapoullé, est ainsi libellé :
Alinéas 188 à 193
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé. J’ai longuement expliqué ce matin, lors de la discussion générale, les nombreuses raisons pour lesquelles je ne souhaitais pas introduire dans le fruit sain martiniquais le ver polynésien et, encore moins, le ver corse.
L’intervention de notre collègue Claude Lise n’a fait que me conforter dans ma conviction.
Voilà un texte qui, dès son élaboration, a commencé à susciter l’émotion en Martinique.
Comment un conseil exécutif composé de huit membres, dont aucun issu de l’opposition et qui sera responsable devant l’assemblée, va-t-il gérer ses affaires lorsque l’on sait – les mêmes causes produisant les mêmes effets – qu’une telle disposition a entraîné une pagaille monstre en Polynésie ? Ce n’est pas la seule cause, mais c’est la principale. Combines par-ci, ententes par-là, mésalliances suivant les circonstances, c’est à cela que vous allez livrer la Martinique, ce territoire si fragile, aux marchés si étroits, aux productions en butte à la concurrence des pays voisins. Alors que nous avons besoin de stabilité, de consensus politique, pour édifier un modèle économique que nous avons du mal à construire, vous allez donner les pleins pouvoirs à un conseil exécutif et suspendre au-dessus de sa tête une épée de Damoclès, à savoir la possibilité de se voir renverser par une autre majorité.
L’objet de l’amendement que je propose est de supprimer la notion de responsabilité de l’exécutif devant l’Assemblée de Martinique, qui ne sied pas à cette assemblée.
Imposer ce mode de fonctionnement, c’est changer l’organisation. Je l’ai dit ce matin, et je souhaite qu’un jour le Conseil constitutionnel vérifie mes dires.
Le mode d’organisation ne faisait pas partie de la question que le chef de l’État a posée aux Martiniquais et qui était la suivante : « Voulez-vous regrouper les compétences des deux assemblées dans une nouvelle collectivité unique ? ». À cette question, les Martiniquais ont répondu « oui » !
Si l’on avait voulu changer le mode d’organisation, on aurait dû formuler la question de la façon suivante : « Voulez-vous, en même temps que le rassemblement des compétences, changer le mode d’organisation ? ». Telle n’a pas été la question !
Je pense donc que nous commettons une faute de droit au regard de la loi fondamentale et surtout une faute politique vis-à-vis de ce territoire. C’est de stabilité politique dont il a besoin pour inspirer confiance aux investisseurs.
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Virapoullé, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 188
1° Deuxième phrase
Remplacer les mots :
au moins un tiers des conseillers de l'Assemblée de Martinique
par les mots :
la majorité absolue des membres de l'assemblée
2° Dernière phrase
Supprimer cette phrase.
II. - Alinéa 189
Remplacer le mot :
titre
par le mot
chapitre
III. - Alinéa 191
1° Remplacer les mots :
absolue des conseillers à l'Assemblée de Martinique
par les mots :
des trois cinquièmes des membres de l'assemblée
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Chaque membre de l'assemblée ne peut signer, par année civile, plus de deux motions de défiance.
La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé. Il s’agit d’un amendement de repli.
Monsieur le rapporteur, je ne comprends pas pourquoi la commission a assoupli les règles de dépôt et d’adoption de la motion de défiance.
Le Gouvernement avait proposé la règle de la majorité absolue pour le dépôt de la motion et celle des trois cinquièmes pour son adoption. Ce dispositif était plus raisonnable que celui qui est proposé par la commission.
Si mon amendement n° 22 n’était pas adopté, ce que je regretterais à l’instar de tous mes collègues attachés comme moi à ce territoire, ce serait malheureux pour la Martinique.
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par Mmes Terrade, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 188
1° Deuxième phrase
Compléter cette phrase par les mots :
ou par un groupe d’élus
2° En conséquence, troisième phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement s’inscrit dans le même esprit qu’un autre amendement qui a été adopté tout à l’heure.
M. le président. L'amendement n° 101, présenté par M. S. Larcher, est ainsi libellé :
Alinéa 188, dernière phrase
Remplacer les mots :
de deux motions
par les mots :
d’une motion
La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. Je reviens sur l’importance du rôle du président du conseil exécutif et, ce faisant, sur les conditions dans lesquelles une motion de défiance peut lui être opposée.
J’ai déposé cet amendement afin que ces conditions soient strictement encadrées. En effet, le texte qui nous est proposé prévoit la possibilité pour l’assemblée de voter une motion de défiance à l’encontre du conseil exécutif.
Sur le principe, cette possibilité semble tout à fait justifiée au regard de l’importance des pouvoirs confiés au conseil exécutif. Cependant, il convient que nous soyons extrêmement attentifs à ce que cette option ne soit pas détournée de son objectif initial.
Ainsi, il me semble parfaitement inapproprié qu’un même conseiller puisse signer deux motions de défiance au cours de la même année. Quel est l’intérêt d’une telle fréquence ? Je n’en vois aucun ! En revanche, j’aperçois le risque de créer une situation de déstabilisation permanente de l’exécutif de la collectivité.
La conséquence en serait, bien sûr, la paralysie de la collectivité et son incapacité à développer ses projets au bénéfice de la population.
Je vous demande donc, mes chers collègues, de bien vouloir corriger cette disposition en ramenant le nombre de motions à une seule par an et par conseiller.
M. le président. L'amendement n° 131, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 189
Remplacer le mot :
mandats
par le mot :
fonctions
II. – Alinéa 193, seconde phrase
Remplacer les mots :
au mandat de président du conseil exécutif et à ceux
par les mots :
aux fonctions de président du conseil exécutif et
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 69, présenté par MM. Lise, Antoinette, Gillot, S. Larcher et Patient, est ainsi libellé :
Alinéa 193
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les membres du conseil exécutif qui perdent leur fonction retrouvent leur mandat de conseillers à l’Assemblée de Martinique.
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Je le retire.
M. le président. L’amendement n° 69 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 23, 22, 9 et 101 ?
M. Christian Cointat, rapporteur. Je m’étendrai un peu plus longuement sur l’amendement n° 23, qui nécessite quelques précisions, ne serait-ce que pour éclairer le débat sur la constitutionnalité ou non de notre proposition relative à la Martinique.
La suppression de la possibilité de renverser le conseil exécutif par l’adoption d’une motion de défiance constructive ne serait pas cohérente avec le schéma institutionnel retenu pour la Martinique et approuvé par la commission. Le même mécanisme existe en Corse, et le Conseil constitutionnel l’a validé en 1991.
En ce qui concerne le schéma institutionnel de la Martinique, notre collègue Virapoullé a invoqué un argument constitutionnel à l’appui de son amendement : les électeurs de Martinique auraient dû être consultés sur le mode d’organisation institutionnelle de cette collectivité.
Je tiens à rappeler avec précision les cas dans lesquels les électeurs d’un département ou d’une collectivité d’outre-mer doivent être consultés ou non.
Le premier alinéa de l’article 72-4 de la Constitution impose que soit recueilli le consentement des électeurs de la collectivité concernée pour le passage de l’article 73 à l’article 74 de la Constitution, dans les formes prévues au second alinéa de l’article 72-4. C’est ce qui a été fait le 10 janvier 2010 en Guyane et en Martinique : les électeurs ont refusé.
Le dernier alinéa de l’article 73 de la Constitution impose, lui aussi, que soit recueilli le consentement des électeurs de la collectivité concernée pour permettre la création d’une collectivité unique en lieu et place d’un département et d’une région d’outre-mer ou bien d’une assemblée délibérante unique pour le département et la région, dans les formes prévues au second alinéa de l’article 72-4 également. C’est ce qui a été fait le 24 janvier 2010 en Guyane et en Martinique : les électeurs ont accepté la collectivité unique. Il y a eu deux consultations.
En revanche, aux termes du second alinéa de l’article 72-4 de la Constitution, « Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel, peut ... » – je dis bien « peut » – …
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. « Peut » !