M. le président. La parole est à M. le ministre
M. Éric Besson, ministre. Monsieur le sénateur, nous avons souhaité rénover le dispositif de soutien au solaire photovoltaïque afin de le rendre économiquement soutenable et de permettre l’émergence d’une véritable industrie nationale du solaire.
Vous proposez d’allier critères de performance et sélection de nos industriels. C’est ce que nous faisons, en respectant bien évidemment les règles européennes et internationales.
Ainsi, dans l’appel d’offres en cours concernant des installations de production d’électricité à partir de l’énergie solaire de puissance supérieure à 250 kilowatts, le critère « impacts environnementaux et évaluation des risques industriels » représente, en fonction du lot considéré, de 13 % à 20 % de la notation des projets.
Vous le savez, nous avons également soutenu et mis en place en juillet dernier un label dit « alliance qualité photovoltaïque », dont l’objectif est précisément de promouvoir et de faire reconnaître les solutions technologiques françaises.
Quant aux filières d’avenir du photovoltaïque, elles constituent effectivement le segment où peuvent émerger les industriels français performants. Nous soutenons d’ores et déjà ces filières d’avenir en leur offrant la possibilité de développer industriellement des projets concrets.
L’appel d’offres pour les installations de plus de 250 kilowatts comprend d’ores et déjà quatre lots dédiés à des technologies innovantes, pour un total de 237,5 mégawatts.
Nous développons la recherche sur ces technologies grâce au grand emprunt. Vous savez que deux appels à manifestations d’intérêt ont été lancés ; nous en annoncerons les résultats dans les semaines à venir. Le premier appel à projets de création des instituts d’excellence en matière d’énergies décarbonées est en phase finale d’instruction, mais d’autres candidats sont pressentis pour répondre au second appel d’offres ouvert en ce moment.
Enfin, vous le savez, nous accompagnons nos entreprises à l’export. Ainsi, un appel à projets pour soutenir le développement à l'export des entreprises françaises de la filière solaire vient d’être lancé, portant sur l’attribution d’une enveloppe de 100 millions d’euros, et j’ai personnellement conduit à l’étranger des délégations de chefs d’entreprise du photovoltaïque pour faciliter leurs démarches.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial, pour la réplique.
M. Jean-Pierre Vial. Monsieur le ministre, je connais votre engagement. Je me permets malgré tout de souligner la nécessité que le Gouvernement fasse tout pour que la qualité environnementale des produits soit vraiment considérée comme une exigence. Il s’agit non pas de créer un privilège pour les entreprises françaises, mais d’apporter le soutien qu’elles méritent à celles ayant un avantage compétitif.
La France a sa place à l’international, notamment dans le plan solaire méditerranéen. À cet égard, sachez que je vous remercie de votre accompagnement.
M. le président. La parole est à M. Christian Namy.
M. Christian Namy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’industrie française a perdu 2 millions d’emplois depuis trente ans ; son poids dans le PIB est, sur la même période, passé de 25 % à un 15 %.
Le déclin de l’emploi industriel, dû en grande partie aux gains de productivité et à la concurrence internationale, n’est d’ailleurs pas propre à la France ; il touche la plupart des économies occidentales.
Malgré les mutations industrielles en direction des industries de hautes technologies, la France a encore du mal à implanter ou à réimplanter des industries nouvelles dans des territoires aujourd’hui dévitalisés.
Aux côtés de la hausse du chômage, nos friches industrielles constituent ainsi les stigmates de la désindustrialisation en France.
Aussi, ces milliers de friches commencent enfin à être valorisées, sous forme de logements ou d’établissements publics ou encore via la réimplantation d’activités industrielles – trop rares, hélas !
Je n’insisterai pas sur les questions d’urbanisme et de dépollution des sols, qui, bien que cruciales dans l’implantation d’activités et la reprise de sites désaffectés, n’intéressent pas directement votre ministère.
La rénovation des friches constitue un enjeu essentiel pour réimplanter des activités et les ancrer sur nos territoires, à condition que l’État soutienne ces initiatives.
Monsieur le ministre, votre ministère a, dans cette optique, déployé un plan de 200 millions d’euros, sur la période 2010-2013, pour accompagner des projets de réindustrialisation concourant à structurer l’environnement économique local.
Les délais de mise en place ont été longs, et les premiers résultats partiels me permettent de penser que ce plan ne répond pas de manière satisfaisante aux espérances des collectivités. Il me semble donc utile que vous nous présentiez le bilan à mi-parcours de ce dispositif, en termes d’emplois et d’investissements ainsi que les correctifs que vous comptez le cas échéant lui apporter.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Besson, ministre. Monsieur le sénateur, l’aide à la réindustrialisation, l’ARI, est l’une des mesures phares des états généraux de l’industrie. Dotée de 200 millions d’euros sur trois ans, cette aide s’adresse en priorité aux petites et moyennes entreprises ainsi qu’aux entreprises de taille intermédiaire, puisque seules sont éligibles les entreprises du secteur industriel de moins de 5 000 salariés.
L’ARI vise à favoriser leurs investissements productifs en France, puisqu’il faut réaliser au minimum 5 millions d’euros d’investissements et créer au moins 25 emplois en trois ans.
Ce dispositif est effectif depuis juillet 2010 et il connaît depuis une montée en puissance progressive : à ce stade, douze aides ont été attribuées, pour un total de 54 millions d’euros générant 235 millions d’euros d’investissement et plus de 1 000 emplois créés sur le territoire.
Sur la liste dont je dispose, et que je me propose de vous faire parvenir, figurent ainsi des activités très diverses : fonderies à Dreux, sous-traitance automobile en Haute-Savoie, industrie du papier en Ardèche, groupes agroalimentaires à Roanne, maroquinerie de luxe dans le Doubs, connectique pour les secteurs spatial et médical dans la Marne, produits photovoltaïques, éco-matériaux, et j’en passe.
Seront bientôt finalisés huit autres dossiers, à hauteur de 24 millions d’euros d’aide, ce qui permettra de dégager 120 millions d’euros d’investissement supplémentaire et de créer plus de 500 emplois.
L’objectif initial était d’accompagner une quarantaine de projets, en vue de permettre 400 millions d’euros d’investissement et de créer 2 000 emplois sur trois ans.
Vous m’avez demandé, monsieur le sénateur, de faire en quelque sorte un « arrêt sur image ». Je suis en mesure de vous dire que, à mi-parcours, nous avons déjà soutenu 20 projets, favorisé plus de 350 millions d’euros d’investissement et créé 1 500 emplois dans des bassins industriels qui en avaient grand besoin. Comme vous l’avez suggéré, on peut toujours améliorer le dispositif, mais nous pouvons d’ores et déjà nous réjouir des résultats obtenus lors de cette première étape.
Nos objectifs seront probablement tous dépassés, ce qui témoigne du succès de ce dispositif.
Un sénateur du groupe socialiste-EELV. Tout va bien !
M. le président. La parole est à Mme Josette Durrieu.
Mme Josette Durrieu. Je tiens avant tout à exprimer notre solidarité avec les salariés de Peugeot SA. Je le fais d’autant plus volontiers que je suis l’élue d’un département, les Hautes-Pyrénées, qui a perdu 10 000 emplois en moins de dix ans. Je m’inspirerai d’ailleurs, pour illustrer mon propos, d’exemples concrets que je connais bien.
Après la fermeture d’un site tel que celui de GIAT, à Tarbes, qui comptait plus de 3 200 salariés, il ne reste qu’un seul défi à relever : la réindustrialisation du département. Pour gagner ce pari, nous avons choisi, d’une part, d’encourager la recherche et, d’autre part – c’est au ministre chargé de l’économie numérique que je m’adresse ! –, d’équiper ce territoire d’un réseau haut et très haut débit.
Pour encourager la recherche, les collectivités locales, en l’occurrence les départements et les régions, financent, par l’intermédiaire de fonds spéciaux, les travaux et thèses scientifiques, les laboratoires, et même les projets d’investissements. Dans les Hautes-Pyrénées, nous menons également cette démarche dans le cadre des pôles de compétitivité, qui constituent, selon nous, des espaces privilégiés.
Au demeurant, nous rencontrons des problèmes, dans la mesure où les sociétés gestionnaires, qui sont des entreprises de rentes – j’y insiste, même si c’est un lieu commun ! –, font des bénéfices, mais n’investissent pas. Les menaces d’OPA sont réelles. L’entreprise ESK, installée dans les Hautes-Pyrénées, a ainsi perdu l’an dernier 97 emplois, qui sont partis en Allemagne, en même temps que les brevets et le savoir-faire.
Monsieur le ministre, que faites-vous pour protéger ces entreprises ?
Par ailleurs, en l’absence d’équipement en haut et très haut débit, l’industrie n’a aucun avenir. Le conseil général achève donc le déploiement intégral de ce réseau sur le territoire. C’est également le cas dans d’autres départements, mais ils sont peu nombreux. Le coût de cet équipement, 29 millions d’euros, est lourd pour cette collectivité. Or celle-ci n’a pas reçu un seul euro de l’État pour la réalisation de ce projet ; c’est invraisemblable !
M. Roland Courteau. Surprenant !
Mme Josette Durrieu. Ce projet, qui a obtenu le prix de l’aménagement du territoire, n’a bénéficié d’aucun crédit au titre du grand emprunt, du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, du Fonds européen agricole pour le développement rural ou encore, tout au moins pour le moment, du Fonds européen de développement régional !
Où sont passés, monsieur le ministre, les quelque 750 millions d’euros destinés à l’équipement des zones peu denses ? Des territoires seraient-ils abandonnés ? Je rappelle que 40 % à 60 % des industries de ce pays sont localisées en secteur rural ! Tous les efforts des collectivités seraient-ils vains ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Besson, ministre. Je ne pourrai vous répondre sur tous les sujets que vous avez évoqués, madame la sénatrice. Permettez-moi de citer un seul chiffre : plus de 6 milliards d’euros de financement public et privé ont été mobilisés depuis 2005 en faveur des pôles de compétitivité. C’est considérable !
L’équipement en haut et très haut débit, auquel vous avez consacré l’essentiel de votre propos, est effectivement un objectif majeur. Notre pays est dans le peloton de tête pour le très haut débit en Europe. Sachez d’ailleurs que deux de nos opérateurs majeurs, France Télécom-Orange et SFR, viennent de signer un accord très important, dont nous nous félicitons, par lequel ils s’engagent à couvrir 60 % de la population dans les dix ans.
Par ailleurs, dans les zones de carence de l’initiative privée, les collectivités locales contribuent au déploiement de ce réseau, et le Gouvernement a ouvert en juillet 2011 un premier guichet de 900 millions d’euros.
J’espère, madame la sénatrice, que trois projets interdépartementaux ou régionaux d’importance seront récompensés d’ici à la fin de l’année ; ils devraient être suivis d’une douzaine d’autres en 2012.
Il est vrai qu’il nous a fallu du temps pour mettre en œuvre ce dispositif, car nous étions contraints de respecter scrupuleusement la réglementation européenne.
Pour les zones très rurales ou très reculées, la solution ne passe par la fibre optique, mais par le satellite. Nous consacrons 40 millions d’euros à la recherche et développement, au titre des investissements d’avenir, afin d’améliorer cette offre satellitaire.
Enfin, la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique prévoit que les collectivités locales peuvent demander aux opérateurs des informations sur les réseaux déployés. Le décret d’application a été adopté une première fois par le Gouvernement en janvier 2009, mais cette version, qui convenait aux collectivités locales, a été annulée par le Conseil d’État.
Nous avons, depuis lors, modifié la base juridique par la loi du 22 mars 2011, qui a habilité le Gouvernement à transposer le « paquet télécom ». La nouvelle version du décret, plus solide sur un plan juridique, devrait désormais être rapidement publiée. Je vais donc saisir cette semaine l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et la commission consultative des communications électroniques.
Comme vous le voyez, nous avons la volonté de doter les collectivités territoriales des zones rurales de tous les outils nécessaires au déploiement de leur réseau. C’est d’ailleurs leur souhait, comme en témoigne votre intervention.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour la réplique.
M. Jean-Jacques Mirassou. Votre réponse ne nous satisfait pas, monsieur le ministre, même si nous savons que le temps vous est compté. L’exercice auquel nous nous livrons trouve d’ailleurs là ses limites.
Nous venons d’évoquer la situation des collectivités locales, qui, souvent hors compétence, investissent financièrement dans le tissu industriel de leur territoire.
Comment se fait-il donc, alors même que vous évoquez sans cesse les comités stratégiques de filières et les états généraux de l’industrie, que ces collectivités ne soient jamais informées de la situation de l’industrie dans leurs territoires, et plus largement dans notre pays, autrement que par les réponses aux questions lapidaires que nous avons le droit de poser dans cet hémicycle tous les trois mois ? Pourquoi les élus de Haute-Garonne et de la région Midi-Pyrénées, par exemple, ne sont-ils pas informés de la situation de l’aéronautique ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Un sénateur du groupe socialiste-EELV. Bien envoyé !
M. le président. La parole est à M. Alain Chatillon.
M. Alain Chatillon. Le 26 avril dernier, dans cet hémicycle, la mission commune d’information sur la désindustrialisation des territoires, dont j’étais le rapporteur, formulait dix-sept propositions destinées à redynamiser le tissu industriel et à accompagner les PME et les ETI de notre pays.
Monsieur le ministre, six mois après ce débat, combien de ces propositions vos services ont-ils examinées, et combien ont-elles été appliquées ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Besson, ministre. Avant de répondre à M. Chatillon, je souhaite faire une remarque sur le déroulement de cette séance de questions cribles thématiques. Je respecte tout à fait le rôle du Parlement et les règles qui régissent les travaux du Sénat ; mais répondre en deux minutes à une question extrêmement large, et entendre ensuite une réplique portant sur trois autres sujets, sans que je puisse y répondre, c’est tout de même, vous en conviendrez, un exercice compliqué.
Monsieur Chatillon, j’avais souligné la cohérence de vos dix-sept propositions avec les actions d’ores et déjà menées par le Gouvernement depuis 2007 ; je pense à la politique conduite en matière d’innovation, de recherche et développement, au triplement du crédit d’impôt recherche depuis 2008 et à la mise en place des pôles de compétitivité. Par ailleurs, sur 35 milliards d’euros d’investissements d’avenir, près de 17 millions d’euros sont consacrés à l’innovation et à la recherche, notamment en matière industrielle.
Certaines de vos propositions ont été mises en œuvre depuis la publication de votre rapport. C’est le cas de celle relative à la sécurité et à la confidentialité des données stratégiques. Comme vous le savez, un texte législatif portant sur le « confidentiel entreprise » est actuellement en cours d’élaboration. C’est aussi le cas de la mesure portant création d’indications géographiques protégées, qui vise à mieux protéger nos savoir-faire locaux, par exemple, les couteaux de Laguiole ou la dentelle de Calais.
Nombre de vos propositions sont donc actuellement en cours d’application. Pour que toutes soient mises en œuvre, je vous invite officiellement, monsieur le sénateur, à venir les présenter lors d’une des prochaines séances plénières de la conférence nationale de l’industrie, qui regroupe tous les acteurs du monde de l’industrie, y compris les syndicalistes. Une telle rencontre permettra d’achever la concrétisation des préconisations contenues dans ce rapport de grande qualité.
M. le président. La parole est à M. Alain Chatillon, pour la réplique.
M. Alain Chatillon. Monsieur le ministre, permettez à l’industriel que je suis depuis trente-huit ans de vous faire deux suggestions concrètes.
La première concerne la capacité d’exportation de nos entreprises. L’an dernier, notre balance commerciale était déficitaire de 50 milliards d’euros, tandis que celle de l’Allemagne était excédentaire de plus 200 milliards d’euros.
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Alain Chatillon. Nos entreprises ont donc véritablement besoin d’un accompagnement.
Il est en outre nécessaire, et ce sera ma seconde suggestion, d’organiser un Grenelle des banques, afin d’inciter celles-ci à se rapprocher des entreprises, en particulier des PME.
Supprimer les numéros de téléphone des banques qui commencent « 800 », ce serait déjà une performance. En zone rurale, on ne trouve plus de banquiers !
M. Jean-Claude Carle. Eh oui !
M. Alain Chatillon. En tant que maire et président d’un pôle de compétitivité, je suis dans l’incapacité d’accompagner les entreprises de mon territoire, car il faut de trois à six mois pour qu’un banquier daigne répondre à une demande de crédit de trésorerie.
M. Roland Courteau. Hélas !
M. Alain Chatillon. Autant dire que lorsque l’industriel obtient la réponse, le problème est réglé : le marché est déjà passé...
Je vous demande donc, monsieur le ministre, de faire un geste fort et crédible en direction des banques et en faveur de l’aide à l’exportation. (Applaudissement sur de nombreuses travées.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy.
M. Philippe Leroy. Je tiens à dire, en préambule, que la question de Jean-Pierre Chevènement ne doit pas être jetée aux oubliettes. Comme je l’avais indiqué lors du débat sur la réindustrialisation, l’euro fort représente une réelle difficulté pour les entreprises européennes, et nous devons y prêter attention.
S’agissant de la Lorraine, région fortement touchée par les restructurations, je ne partage pas l’avis de notre camarade Évelyne Didier sur l’action menée par le Gouvernement au cours des dernières années.
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour votre engagement profond en faveur de la sidérurgie en Lorraine, qui s’est traduit par les mesures que vous avez énumérées précédemment. Je tiens à témoigner de l’efficacité de l’action gouvernementale, engagée lors des trois ou quatre dernières années afin de protéger l’industrie lorraine, et j’en parle en connaissance de cause !
Nous sommes encore vivants, notamment en Moselle, grâce à l’action forte du Gouvernement. Le matraquage systématique n’est pas une bonne politique !
Monsieur le ministre, je vous demande de vous engager auprès du groupe Total aussi fortement que vous l’avez fait auprès d’ArcelorMittal.
Nous devons trouver, avec les grands groupes chimiques européens, une solution aux problèmes des industries chimiques continentales, qui fabriquent nombre de produits nouveaux à partir de dérivés du pétrole.
On peut en effet craindre, à terme, une délocalisation massive de la chimie européenne si son approvisionnement, notamment en éthylène, n’est pas assuré. Ce problème se pose en Moselle, à l’usine Total de Carling. Si cette entreprise devait fermer, tout un pan de l’industrie lourde mosellane disparaîtrait.
Qu’en est-il, monsieur le ministre, des projets d’alimentation par gazoducs des entreprises chimiques continentales éloignées des côtes ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Besson, ministre. Monsieur le sénateur, vous confirmez que je n’ai pas cherché à écarter d’un revers de main les questions de fond posées par Jean-Pierre Chevènement. J’ai précisé que tous nos problèmes de compétitivité ne pouvaient être attribués à l’euro. Par ailleurs, j’ai rappelé que, dans un certain nombre de secteurs et dans certaines circonstances, l’euro nous avait protégés : n’oublions pas les attaques contre le franc et les dévaluations successives qu’il nous a fallu opérer par le passé !
Je ne conteste pas qu’il faille procéder à un certain nombre d’ajustements. J’ai simplement souligné que le Président de la République s’y attelait en essayant de modifier les règles du jeu du système monétaire international.
Je vous remercie, monsieur le sénateur, de vos propos concernant la politique industrielle du Gouvernement. Je ne reviendrai pas sur les précisions que j’ai apportées à votre collègue et que vous avez bien voulu rappeler, au sujet de l’action que nous essayons de mener sur le site de Florange : nous nous mobilisons.
Vous me posez une question précise sur le projet de pipeline chimique entre la France et l’Allemagne. Vous savez mieux que quiconque qu’il vise à relier les réseaux français et allemands d’oléfine, afin de sécuriser l’approvisionnement de plusieurs sites chimiques en Lorraine et dans le Jura.
En juillet 2008, le Premier ministre a confié à François Loos, député du Bas-Rhin, la mission d’examiner les conditions d’un raccordement. Son rapport, remis le 10 décembre 2008, a conclu à l’intérêt d’une telle infrastructure. Une étude de faisabilité a ensuite été financée par les industriels. Elle a confirmé que le projet était réalisable, le coût d’investissement des deux canalisations d’éthylène et de propylène étant estimé à 156 millions d’euros.
Préalablement à la recherche d’un financement public, j’ai récemment écrit aux principaux chimistes concernés, afin qu’ils puissent me confirmer leur souhait de prendre part au projet. En effet, il est essentiel que les intéressés se prononcent sur la pertinence industrielle d’un tel raccordement et s’engagent à le soutenir. Il est également capital de s’assurer que le pipeline, qui est susceptible de concurrencer le dernier vapocraqueur de Carling, est bien compatible avec son maintien en activité.
Monsieur le sénateur, voilà l’exact état de la situation. Je suis très désireux d’avancer et je vous tiendrai bien évidemment informé des développements de ce projet.
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy, pour la réplique.
M. Philippe Leroy. Monsieur le ministre, je ne mets pas en doute votre engagement sur ce dossier. Toutefois, si cela est possible, j’invite le Gouvernement à exercer de fortes pressions sur le groupe Total, qui, à l’heure actuelle, ne semble pas très pressé de participer à ce projet européen de pipeline.
Par ailleurs, je vous demande – si vous le pouvez mais, à mes yeux, vous le devez ! – de prendre l’initiative de réunir à la fois les industriels européens et les gouvernements concernés, afin de renverser la vapeur ! Il en va de l’intérêt de nos industries plastiques dans l’Europe tout entière.
M. le président. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques consacrées aujourd’hui à la désindustrialisation.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Charles Guené.)