M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel, auteur de la question n° 1518, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
M. Jean-Marie Bockel. Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur un problème lancinant de mise en œuvre de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance.
Le premier projet de décret d’application de cette loi concerne la fixation par le juge de l’exercice du droit de visite dans un espace de rencontre dédié au maintien des liens entre parents et enfants, inscrit aux articles 373-2-1 et 373-2-9 du code civil. Ces lieux permettent notamment aux parents incarcérés de rencontrer leurs enfants.
La non-publication de ce décret est particulièrement préjudiciable au financement de ces espaces, dont les gestionnaires connaissent souvent des difficultés.
En effet, aucune modalité de financement n’ayant été prévue depuis l’adoption de la loi, certains espaces de rencontre ont déjà fermé, quand d’autres ont réduit leur activité ou instauré une liste d’attente, ce qui est vraiment regrettable pour les enfants et les familles concernés. Un dossier famille représente une mesure ordonnée par un juge aux affaires familiales pour six mois, renouvelable une fois ; le cadre juridique est donc très précis.
Les frais de fonctionnement de chaque espace de rencontre devraient être pris en charge conjointement par différents organismes financeurs tels que le ministère de la justice, le ministère des solidarités et de la cohésion sociale, les organismes sociaux et les collectivités territoriales, qui, fort heureusement, sont souvent très impliquées. L’ensemble de ces partenaires sont compétents sous forme d’un « coût mesure » arrêté chaque année.
Sur la base de l’adhésion à son code de déontologie, la Fédération française des espaces de rencontre regroupe 109 des 130 espaces de rencontre existant actuellement en France, répartis sur 62 départements. Elle dispose donc d’une bonne représentativité. En 2008, selon les informations collectées par cette fédération auprès de ses adhérents, 76 des lieux étudiés avaient permis que se réalisent plus de 63 000 rencontres impliquant 12 000 enfants. Ce dispositif, loin d’être marginal, constitue donc un élément essentiel du suivi familial et de la réinsertion future des personnes incarcérées.
Selon une estimation de cette même fédération, le coût total d’une mesure pour un espace de rencontre parents-enfants avoisine les 1 200 euros.
Un second décret d’application de la même loi, relatif aux espaces de rencontre destinés au maintien des liens entre un enfant et ses parents ou un tiers, est également en attente de publication au sein du ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Il permettra d’encadrer juridiquement cette activité.
Aussi, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage d’adopter afin de publier et de mettre en œuvre ces décrets d’application, eu égard à la nécessité d’assurer la pérennité de ces espaces de rencontre parents-enfants, dont je peux témoigner qu’ils jouent, à Mulhouse, un rôle essentiel.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser mon collègue Michel Mercier, qui ne peut être présent aujourd’hui au Sénat.
Comme vous l’indiquez, monsieur Bockel, la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance reconnaît aux espaces de rencontre une existence juridique. L’article 373-2-9 du code civil a ainsi été complété par un alinéa qui prévoit que le droit de visite, lorsque l’intérêt de l’enfant le commande, peut être exercé dans un espace de rencontre désigné par le juge.
Les espaces de rencontre sont préconisés dans toute situation où une relation enfants-parents – et/ou l’exercice d’un droit de visite – est interrompue, difficile ou trop conflictuelle.
Ces espaces répondent ainsi à certaines situations de divorce ou de séparation conjugale ou familiale. Les juges aux affaires familiales peuvent être prescripteurs de cette mesure au travers d’une ordonnance ou d’un jugement ; les parents peuvent aussi en être à l’origine.
Ces dispositifs répondent également à des situations de prises en charge dans le cadre d’un placement, suivies par le service social ou le juge des enfants.
Si la plupart de ces services ont un statut associatif, d’autres sont gérés par les caisses d’allocations familiales.
Toutefois, comme vous l’avez précisé, monsieur Bockel, la loi doit être complétée par des textes réglementaires permettant de mieux encadrer le dispositif. Un décret relevant du ministère des solidarités et de la cohésion sociale mettra en place l’encadrement administratif de ces structures. Ce premier texte conditionne la prise d’un second décret relevant, cette fois, du ministère de la justice et des libertés, qui fixera les règles procédurales applicables lorsque le juge aux affaires familiales recourt à ces espaces de rencontre. Le bon fonctionnement du dispositif des espaces de rencontre nécessite que les textes soient publiés en même temps, les deux décrets étant complémentaires.
Les services du ministère des solidarités et de la cohésion sociale ont été sensibilisés quant à l’importance d’avancer rapidement. Nous espérons que ces deux décrets pourront être publiés très prochainement.
En ce qui concerne les difficultés de financement des associations qui gèrent les espaces de rencontre, vous savez qu’elles ne résultent pas d’un désengagement du ministère de la justice et des libertés, monsieur le sénateur. Au contraire, ces dernières années, celui-ci a doublé son effort budgétaire en direction des espaces de rencontre, les crédits étant passés de moins de 1 million d’euros en 2003 à plus de 2,4 millions d’euros aujourd’hui.
Tels sont les éléments de réponse que M. le garde des sceaux m’a chargée de vous apporter, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel.
M. Jean-Marie Bockel. Nous n’avons évidemment aucune divergence sur le fond, madame la secrétaire d’État. Au demeurant, nul ne conteste l’intérêt de ces centres.
Le décalage entre l’augmentation du budget du ministère de la justice et le fait que, sur le terrain, les capacités de financement se réduisent s’explique probablement pour partie par l’augmentation du nombre de lieux de rencontre. Ces espaces connaissent en effet un franc succès.
L’on constate également un désengagement de la part de certains organismes sociaux comme la Caisse d’allocations familiales, la CAF, qui est en train de recentrer ses financements – le même problème se pose d’ailleurs dans le domaine de la petite enfance ou dans d’autres secteurs, dans lesquels les collectivités territoriales sont obligées de prendre le relais.
Les départements, qui sont également confrontés à de sérieuses difficultés financières, notamment avec le versement de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, ont aussi parfois tendance à se désengager ou à stabiliser leurs subventions.
En raison de l’augmentation de la charge, et malgré la stabilité des budgets, certaines associations gestionnaires se trouvent en grande difficulté, dans mon département comme ailleurs. Certaines sont même obligées de supprimer des emplois pour éviter le dépôt de bilan. Quant aux collectivités territoriales, dont les budgets sont très contraints, il leur est souvent impossible d’augmenter massivement leur participation.
Les décrets doivent donc paraître. Vous avez affirmé qu’ils seraient bientôt publiés, madame la secrétaire d’État ; je veux bien en accepter l’augure.
Toutefois, les pouvoirs publics doivent également engager un dialogue avec la Fédération, qui dispose d’une bonne vision d’ensemble, sur la manière dont les différents partenaires, et pas seulement l’État, peuvent concrètement assurer le financement de ces espaces de rencontre.
Quoi qu’il en soit, je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, et j’espère qu’elle nous permettra d’avancer sur un sujet qui devient de plus en plus sensible. On ne peut indéfiniment régler ce genre de problèmes avec la réserve parlementaire ou d’autres moyens d’urgence.
M. le président. Mes chers collègues, avant d’aborder la question suivante, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures dix, est reprise à dix heures quinze.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial, auteur de la question n° 1501, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
M. Jean-Pierre Vial. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la liaison Lyon-Turin aura franchi une étape décisive en 2011, conformément à l’engagement pris par le Président de la République lors de sa venue à Chambéry à l’occasion du cent cinquantième anniversaire du rattachement de la Savoie à la France et réitéré par courrier au mois de juillet 2011.
Monsieur le ministre, la première étape a été constituée par l’accord intervenu entre vous-même et votre collègue italien, le 27 septembre dernier, sur la répartition du financement du tunnel de base.
Dans le prolongement de cet engagement, la Commission européenne a confirmé la liaison Lyon-Turin dans le réseau central de l’Union européenne en s’engageant à rendre éligible le tunnel de base à des financements européens jusqu’à 40 %, soit une majoration par rapport aux engagements antérieurs.
Par ailleurs, conformément également aux engagements du Président de la République, le Gouvernement vient d’engager la procédure tendant à lancer l’enquête publique du tracé Lyon-Sillon alpin–Saint-Jean-de-Maurienne.
Les ouvrages d’accès au tunnel de base, à savoir les tunnels de Chartreuse, de Belledonne et du Glandon, constituent un ensemble indispensable à la liaison Lyon-Turin, permettant le franchissement des Alpes, et l’engagement concret d’une politique de report modal significative.
Ces ouvrages, qui doivent être considérés comme partie intégrante du tunnel de base sur le plan opérationnel, sont éligibles à des financements européens, qui pourraient être sollicités à la même hauteur que le financement du tunnel de base.
Or l’éligibilité de ces ouvrages d’accès aux financements européens nécessite leur intégration à la section internationale au titre de l’avenant au traité de 2001 ou du nouveau traité, qui aurait dû intervenir avant la fin de l’année 2011. Je souhaite donc que vous me confirmiez l’inscription effective de ces trois ouvrages dans la section internationale.
Il s’agit, monsieur le ministre, d’une question essentielle à deux titres.
Elle est tout d’abord essentielle au titre des financements européens. Vous conviendrez que nous avons eu raison, avec quelques-uns, de penser que la Commission européenne était disposée à contribuer fortement à ce projet majeur, et la participation financière, portée à 40 % pour le tunnel de base, le prouve. Il nous faut maintenant faire en sorte que cette participation soit étendue au financement des ouvrages d’accès.
Cette question est également essentielle dans la mesure où le tunnel sous Chartreuse constitue une priorité pour sortir le fret des bords du lac du Bourget et de l’agglomération de Chambéry-Aix-les-Bains et pour offrir à la liaison Lyon-Turin les capacités nécessaires au fret ferroviaire et à l’autoroute ferroviaire.
Or les éléments du dossier de l’enquête publique conduisent à une vraie interrogation, voire à une inquiétude s’agissant du fret ; les informations sont en effet difficilement compréhensibles et pour le moins partielles – elles ne donnent ni les capacités de fret des lignes concernées ni les trafics de fret attendus sur l’étoile chambérienne à l’ouverture du tunnel de base et avant la réalisation de Chartreuse-Belledonne –, quand elles ne sont pas contradictoires avec les positions antérieures de Réseau ferré de France, RFF, notamment celles de 2006.
Monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous pourrez nous apporter sur ce dossier important.
M. le président. Monsieur Vial, je vous remercie de cette question à laquelle je suis moi-même très attentif.
La parole est à M. le ministre.
M. Thierry Mariani, ministre auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé des transports. Monsieur le sénateur, tout comme vous, je me réjouis des avancées décisives intervenues cet automne sur le projet de liaison ferroviaire Lyon-Turin avec, d’une part, l’accord intervenu le 27 septembre 2011 entre la France et l’Italie sur la répartition du financement du tunnel de base et, d’autre part, la confirmation de l’engagement de l’Union européenne en faveur de cette opération.
S’agissant des accès français, la décision qui a été prise le 10 novembre dernier par Nathalie Kosciusko-Morizet et moi-même confirme le phasage et la consistance des aménagements entre Lyon et le futur tunnel de base franco-italien. Nous avons demandé au préfet de Savoie, préfet coordonnateur de l’enquête publique, le lancement de celle-ci dans les meilleurs délais. Ce lancement est intervenu le 16 janvier dernier, ce dont je me réjouis.
Dans le cadre de la révision de sa politique des transports, la Commission européenne a par ailleurs souhaité donner un signal fort en faveur de la réalisation des projets transfrontaliers, nécessaires à la construction effective du réseau européen performant et structurant qu’elle appelle de ses vœux, en majorant son soutien aux projets transfrontaliers. La Commission européenne a ainsi proposé le projet de liaison ferroviaire entre Lyon et Turin comme projet devant figurer dans le futur réseau central des réseaux transeuropéens de transport, en cours de refonte, et confirmé son soutien à cette opération.
Je vous assure qu’une grande partie des accès français au tunnel de base, en particulier les tunnels de Chartreuse, de Belledonne et du Glandon, figurent bien parmi les ouvrages de la section internationale de la liaison Lyon-Turin définie dans le nouvel accord international, que je signerai d’ailleurs avec mon homologue italien lundi prochain, à Rome.
À ce titre, les États français et italiens chercheront à obtenir, le moment venu, les financements communautaires les plus élevés possible, compte tenu de la dimension internationale de cette opération majeure qui porte pour nous tous de grandes ambitions pour l’avenir du transport de marchandises dans les Alpes.
Enfin, nous sommes, vous l’avez compris, totalement sensibilisés à cette problématique du fret ferroviaire. La liaison Lyon-Turin est un projet emblématique du report modal que nous voulons opérer vers le fer. À cet égard, il convient de rappeler que le trafic routier qui emprunte aujourd’hui les grands tunnels entre la France et l’Italie effectue en majorité des trajets de plus de 500 kilomètres. Il entre donc pleinement dans le domaine de pertinence du mode ferré et de la liaison Lyon-Turin, dès lors que nous aurons réussi à offrir à ce mode un itinéraire performant, ce que nous nous employons avec conviction à faire avec nos partenaires italiens.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Monsieur le ministre, je note avec une grande satisfaction les avancées et les décisions prises ces derniers mois, particulièrement s’agissant de la section commune du tunnel de base.
Vous venez de rappeler que la liaison Lyon-Turin porte de grandes ambitions pour le fret ferroviaire. Il s’agit du cœur du projet. Maintenant que l’accord a abouti sur le tunnel de base, la principale question concerne les accès français : quelle solution de phasage retenir pour alimenter correctement et efficacement l’ouvrage international dès sa mise en service, en prenant en compte les enjeux des territoires ?
L’enquête publique qui vient d’être engagée sera décisive, en considérant les possibilités financières de l’Europe pour un accompagnement substantiel de ce projet, qui devra répondre aux critères du futur réseau central européen.
Monsieur le ministre, je vous remercie de vos propos s’agissant de ce volet de l’engagement et de l’ambition à laquelle devra répondre ce futur réseau en matière de fret : ils me satisfont pleinement.
Je vous remercie par avance de veiller à ce que les décisions d’échelonnement des différents ouvrages répondent aux priorités que sont les ambitions économiques et écologiques de la liaison Lyon-Turin. En revanche, tant les élus que les populations des territoires concernés s’interrogent aujourd'hui – je vous le dis du fond du cœur et en toute transparence –, l’enquête publique et l’ambition que vous affichez leur paraissant en légère contradiction avec les informations données actuellement par RFF.
Quoi qu’il en soit, je remercie le Gouvernement de sa détermination, et je compte beaucoup sur l’attention qu’il portera aux conclusions de l’enquête publique qui vient d’être engagée.
M. le président. Monsieur le ministre, nous comptons sur votre vigilance.
avenir du chu charles-nicolle de rouen
M. le président. La question n° 1530, adressée par M. Thierry Foucaud à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, est retirée de l’ordre du jour.
situation de l'hôpital max-querrien de paimpol
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, auteur de la question n° 1571, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
M. Ronan Kerdraon. Monsieur le ministre, je souhaitais interroger M. le ministre de la santé sur les vives inquiétudes qui entourent l’avenir de l’hôpital Max-Querrien de Paimpol et sur la situation catastrophique de l’établissement, tant sur le plan social que sur le plan de l’offre de soins.
Après la fermeture de la maternité voilà quelques années, l’hôpital s’est vu contraint, le 1er janvier 2011, de stopper son activité de chirurgie par l’Agence régionale de santé, celle-ci estimant que les 1 200 actes assurés annuellement par l’établissement n’étaient pas suffisants pour maintenir son bloc opératoire. Trente-six lits d’hospitalisation ont ainsi été fermés, entraînant du même coup la disparition d’une partie substantielle des ressources de l’hôpital et un profond déséquilibre du budget de fonctionnement de ce dernier.
Depuis cette décision, les signaux et les bruits de couloir préoccupants se sont multipliés avec, notamment, la rumeur lancinante que le pôle radiologie du centre hospitalier pourrait être amené à fermer, faute d’équipement suffisant.
Cette rumeur a été démentie, mais nous venons d’apprendre la suppression de vingt-cinq emplois, dont douze postes d’aide-soignante accompagnés de départs à la retraite non remplacés, annonce qui a suscité localement une véritable levée de boucliers. C’est ainsi que, mercredi dernier, près de 400 personnes ont manifesté devant les portes de l’établissement.
Cette mobilisation n’est pas un épiphénomène. Elle s’inscrit dans la durée : tout au long de l’année 2011, les personnels, les syndicats et les élus locaux, en particulier ma collègue députée Corinne Erhel, se sont très largement investis en demandant des garanties sérieuses quant à la pérennité de l’établissement.
Une pétition, rassemblant 2 000 signatures et 18 conseils municipaux, a également été établie, prouvant, s’il en était besoin, le grand attachement de la population au maintien d’un établissement public de santé fort et actif dans ce secteur des Côtes d’Armor.
Plus globalement, c’est l’organisation du système hospitalier, découlant de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, la loi HPST, qui suscite ces nombreuses interrogations.
Les acteurs locaux craignent en effet que la coopération sanitaire développée entre les hôpitaux de Lannion, de Paimpol et de Saint-Brieuc, couplée aux objectifs de rentabilité et à la concurrence exacerbée avec les établissements privés, ne finisse par avoir raison de l’un des trois établissements. C’est une perspective qui s’avérerait particulièrement funeste et pénalisante pour les patients, compte tenu de l’éloignement géographique entre ces trois sites...
Engagé depuis plusieurs années dans sa restructuration, le centre hospitalier Max-Querrien a développé tous les efforts possibles pour assurer à la fois sa pérennité et son avenir. C’est ainsi qu’un redéploiement du projet hospitalier a été élaboré par les élus, la direction, la communauté médicale et les partenaires sociaux, au début de l’année 2011.
Aujourd’hui, il est primordial de conforter l’établissement en y investissant les moyens nécessaires pour assurer durablement son bon fonctionnement. C’est la question de l’égal accès aux soins de qualité qui est ici en jeu.
Monsieur le ministre, je souhaite donc connaître la position du Gouvernement quant à l’avenir de l’hôpital Max-Querrien de Paimpol.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Thierry Mariani, ministre auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé des transports. Monsieur le sénateur, le centre hospitalier de Paimpol a fait évoluer son offre de soins en complémentarité avec les autres hôpitaux du territoire de santé, en particulier avec le centre hospitalier de Saint-Brieuc, afin de maintenir une offre de proximité reconnue et adaptée aux besoins de la population.
La cessation de l’activité chirurgicale a donné lieu à une réorganisation importante des activités de soins de l’établissement, notamment par la transformation des capacités de chirurgie en deux secteurs de prise en charge de soins de suite et de réadaptation, ou SSR, spécialisés – dix lits de SSR post-chirurgicaux et dix lits de SSR plaies chroniques –, permettant ainsi de mettre en place une prise en charge attendue et jusque-là insuffisante sur ce bassin.
Dans cette même logique et dans le cadre des orientations du projet médical du territoire n° 7 – territoire dans lequel est implanté le centre hospitalier de Paimpol –, vingt lits de SSR cardiovasculaires seront installés courant 2012, Paimpol étant le site de référence du territoire sur l’activité de SSR cardiovasculaire.
Contrairement à ce que vous indiquez, l’État, par le biais de l’Agence régionale de santé, l’ARS, accompagne fortement ces importantes recompositions depuis plus d’un an, au niveau tant du soutien financier et de l’appui à la gestion du dialogue social que de l’accompagnement au pilotage.
Ainsi, afin de répondre aux difficultés financières importantes du centre hospitalier de Paimpol, dues aux résultats antérieurs ainsi qu’à la période de transition entre, d’une part, la fermeture du bloc opératoire et la cessation de l’activité chirurgicale et, d’autre part, la montée en charge du nouveau projet médical, l’État a alloué un total de près de 3 millions d’euros au centre hospitalier, dont une partie de crédits pérennes – dotations affectées à l’activité des SSR – afin d’accompagner son développement d’activité. Un encadrement au moyen d’un contrat de retour à l’équilibre est également en cours.
Par ailleurs, il est important de rappeler que le centre hospitalier a bénéficié en 2011 d’un soutien des crédits du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, volet ressources humaines. Ainsi, l’ARS a attribué environ 100 000 euros afin de permettre à l’établissement de gérer au mieux les enjeux de reconversions liées aux évolutions du projet médical.
De même, l’ARS a enfin rencontré à plusieurs reprises les partenaires sociaux de l’établissement en 2011, afin de pouvoir échanger sur l’avancée de la mise en œuvre du projet médical et sur les incidences sur le climat social de l’établissement. Vous constaterez donc que, avec ces crédits supplémentaires, nous sommes bien loin du désengagement que vous tentez de dénoncer !
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.
M. Ronan Kerdraon. Monsieur le ministre, je ne suis que le porte-parole et le relais à la fois de la population, des élus et des professionnels qui constatent ce désengagement. Et ce n’est pas la réponse que vous venez de nous faire qui les rassurera !
En moins d’un an, je le rappelle, c’est la énième décision de restructuration qui a été prise sans garantie que ce soit la dernière.
Dès lors, quel crédit peut-on accorder à cette décision, qui pénalise également lourdement le personnel non médical ?
Quel crédit accorder également à l’ampleur du plan social, ampleur tenant tant à l’importance de la réduction des effectifs qu’à l’impact de ce plan, qui pénalise aujourd'hui toutes les catégories professionnelles ?
J’entends ce que vous dites, monsieur le ministre : l’État a, semble-t-il, investi ; mais allez-vous enfin entendre et respecter la décision du conseil de surveillance, qui avait clairement refusé toute direction commune entre les centres hospitaliers de Saint-Brieuc et de Paimpol ?
sécurité juridique des réserves de substitution d'eau
M. le président. La parole est à M. Michel Doublet, auteur de la question n° 1502, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.
M. Michel Doublet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite vous faire part de la situation ubuesque que connaît l’Association syndicale autorisée d’irrigation, l’ASAI, regroupant douze agriculteurs, qui se retrouve privée de l’utilisation de réserves de substitution d’eau à la suite de l’annulation de l’autorisation de création des réserves par la juridiction administrative.
Le projet de création de cinq réserves d’eau situées dans le nord-est du département de la Charente-Maritime, esquissé dès 1997, a nécessité, pour son aboutissement, d’importantes études hydrogéologiques, techniques et environnementales.
L’étude d’impact réalisée en novembre 2006 avait fait ressortir des effets positifs sur l’environnement : prélèvements en période de hautes eaux visant à diminuer la pression exercée en été sur la nappe phréatique et les rivières, amélioration de l’écoulement des eaux de surface avec des effets induits pour le milieu en aval, c'est-à-dire sur le marais poitevin, ainsi qu’une meilleure gestion des apports d’eau pour l’irrigation.
La réalisation de ces cinq réserves, dont le coût a été estimé à 5,3 millions d’euros hors taxes, a bénéficié d’un cofinancement : à hauteur de 37 % pour les exploitants agricoles, de 25 % pour les agences de l’eau, de 17 % pour le conseil général et de 18 % pour l’État.
Ce projet a reçu les autorisations administratives nécessaires : arrêté préfectoral du 19 mars 2008, permis d’aménager en 2008 et permis modificatif en 2009.
À la suite d’une saisine contentieuse d’associations environnementales, l’arrêté d’autorisation de création de réserves d’eau a été annulé par le tribunal administratif en janvier 2010, au motif qu’il manquait un document dans l’étude d’impact, en l’occurrence l’inventaire de la faune.
Or, lorsque la juridiction administrative a rendu sa décision, les travaux étaient en cours d’achèvement. Malgré cette décision, la préfecture de la Charente-Maritime a enjoint l’ASAI d’achever les travaux et de mettre en eau le fond pour tenir la bâche, tout en n’autorisant pas le remplissage total des réserves, alors que les professionnels ayant réalisé lesdits travaux avaient conseillé aux propriétaires de remplir la réserve pour protéger la membrane et éviter tout dégât à la bâche, au risque de rendre le dispositif non opérationnel. L’ASAI a donc rempli les réserves pendant l’hiver, en informant les services de l’État.
Considérant la situation de déficit hydrique au printemps 2011, l’ASAI a demandé au préfet de la Charente-Maritime l’autorisation d’utiliser l’eau des réserves, demande qui a été refusée. Toutefois, pour sauver leurs exploitations, les agriculteurs ont décidé de passer outre à ce refus et ont utilisé l’eau. Les services du département de la Charente-Maritime n’ont donc pas eu d’autre choix que de verbaliser, même si d’aucuns reconnaissent la situation ubuesque. Les réserves contenant de l’eau, pourquoi ne pas autoriser l’irrigation à titre temporaire ?
Aujourd’hui, l’ASAI ne peut pas déposer de déclaration de fin de travaux, un document qui conditionne le versement des dernières subventions de l’agence de l’eau et du conseil général de la Charente-Maritime.
La part des douze agriculteurs concernés représente un emprunt de 1,9 million d’euros, dont le remboursement doit intervenir en décembre 2012. Sans autorisation provisoire d’utilisation pour 2012, la situation financière des agriculteurs sera catastrophique.
Je tiens à préciser que les agriculteurs se sont engagés depuis plusieurs années dans une agriculture plus respectueuse de l’environnement et moins consommatrice en eau. Ils sont conscients que la sobriété dans l’utilisation de cette précieuse ressource sera de mise dans les années à venir.
Les futurs projets de réserves d’eau dans notre département seront plus modestes. Toutefois, le projet dont je parle aujourd’hui existe et il faut donc trouver une solution viable pour les agriculteurs qui ont lourdement investi.
Le plan d’adaptation de la gestion et des soutiens à la création de volumes va dans le bon sens, mais il faudrait qu’il soit rapidement mis en œuvre.
Je me félicite de la disposition introduite par l’Assemblée nationale dans le cadre de la proposition de loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives, visant à permettre aux chambres d’agriculture de se porter maître d’ouvrage pour les projets de retenues d’eau ayant pour finalité l’irrigation agricole.
Aussi, monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour sécuriser juridiquement la réalisation des retenues d’eau, dont les montages sont particulièrement complexes, pour encadrer les délais d’instruction, pour limiter les délais de recours, pour permettre aux exploitants l’utilisation de l’eau en réserve au moins à titre provisoire et pour simplifier la complexité réglementaire, dont la rigidité empêche toute approche pragmatique des situations locales.