M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. Puisque nous en sommes aux déclarations liminaires, je tiens à vous dire, monsieur le ministre, que nous vous reprochons surtout de présenter un projet de loi de programmation alors que vous allez bientôt quitter vos fonctions, le mandat présidentiel touchant à son terme. (Protestations sur les travées de l'UMP.) L’actuel Président de la République sera peut-être reconduit, mais pour l’instant son mandat est quasiment terminé.
M. Jean-Jacques Hyest. Il fallait déposer une motion tendant à opposer la question préalable, alors !
M. Jean-Pierre Michel. Monsieur le ministre, ce n’est pas vous qui êtes en cause personnellement, tout le monde le sait, mais une loi de programmation se présente en début et non en fin de mandature, après avoir procédé à un premier état des lieux. C’est notre critique la plus importante, même si le contenu du texte est également discutable ; d’ailleurs, mon collègue Jean-Jacques Hyest a émis un jugement assez négatif à son encontre, même si, au final, il le votera.
Je souhaite revenir, car j’ai été un peu rapide hier, sur ce qui est écrit dans l’annexe : « À l’exception des établissements parisiens, la capacité des établissements ne dépassera toutefois en aucun cas 850 places. » Cela signifie que l’on construira partout des établissements de 850 places, sauf en région parisienne où les centres atteindront 1 000, 2 000 ou 3 000 places et où l’on relèvera de 30 % le droit à bâtir et à enfermer, comme l’a annoncé dimanche soir le Président de la République !
La direction de l’administration pénitentiaire lit-elle les rapports du Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou de l’Observatoire des prisons ? Écoute-t-elle les syndicats pénitentiaires ? Les gros établissements sont très difficiles à gérer, le nombre de suicides et d’agressions y est élevé.
Je l’ai souligné hier, vous n’appliquez pas la loi pénitentiaire, qui prévoyait que soient connus les taux de récidive, établissement par établissement. Il serait intéressant de connaître ces chiffres, même si je suis déjà quasiment certain que les établissements plus restreints fonctionnent beaucoup mieux que les gros.
Pourquoi revenir au gigantisme qui a tellement été critiqué ? Je pense, notamment, à Fleury-Mérogis. En agissant de la sorte, vous ne freinerez ni le nombre de suicides en prison ni le nombre d’agressions, et vous n’aiderez pas le personnel dans sa mission de garde, qui est aussi une mission d’insertion.
Bien entendu, le groupe socialiste suivra les préconisations de Mme la rapporteur.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Au début de la discussion des articles et avant d’entrer dans les détails du texte, il est normal de se livrer à des déclarations de principe.
Jean-Pierre Michel sait parfaitement que je n’ai supprimé aucun petit établissement. Je les ai tous maintenus, même ceux dont la suppression était prévue, car j’ai jugé, pour les avoir visités, qu’il y régnait une certaine « convivialité » même si leur conception immobilière n’était pas forcément parfaite. Il n’y a pas que Mayotte, monsieur le sénateur, quand bien même je m’efforce, bien sûr, de trouver une solution pour les détenus, mais aussi pour les gardiens de Majicavo, que vous avez oublié d’évoquer hier !
Les détenus que j’ai rencontrés ont tous manifesté le désir de rester dans ces petites structures en raison du travail d’humanisation qui y est fait.
Quant aux grosses structures, ce qui compte c’est avant tout le type d’architecture choisi. Pour les futurs établissements, il nous faudra tirer les leçons des échecs passés. C’est moins le nombre de places qui est en cause que le type d’architecture. Si l’établissement est composé de cinq pavillons de 100 personnes, avec des arbres, ce n’est pas la même chose qu’un unique bâtiment de 500 personnes.
Voilà pourquoi nous avons prévu de renforcer le système conception-réalisation. L’idée est que l’administration pénitentiaire puisse mieux imposer les architectures les plus adaptées.
J’ai bien compris, monsieur Michel, en écoutant M. Sueur et en constatant que vous avez vous-même, de façon imagée, évoqué le taux de 30 %, que, depuis dimanche, les propositions du Président de la République font l’actualité ! (M. Jean-Pierre Michel s’esclaffe.) Certes, vous n’êtes pas forcément d’accord avec lui, mais vous venez de nous démontrer aujourd’hui, et j’en suis heureux, qu’il avait repris la main ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Pierre Michel. Bien joué ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Virginie Klès, pour explication de vote.
Mme Virginie Klès. Je ferai un petit aparté statistique sur l’utilisation qui est faite des chiffres.
Depuis le début du débat, beaucoup de chiffres sont mis en lien les uns avec les autres. Pour autant, y a-t-il relation de causalité entre eux ? Selon vous, il y aurait plus de détenus, donc il faudrait plus de places. Pardonnez-moi, mais les choses ne sont pas aussi simples. Si l’on souhaite mettre des chiffres en rapport et établir des relations de cause à effet, il faut considérer l’ensemble des facteurs.
Le nombre de détenus n’est pas uniquement lié au nombre de places, il est aussi fonction des politiques pénales qui sont mises en œuvre, de l’évolution de la délinquance, et donc des mesures et des politiques de prévention de la délinquance. Il est également lié aux données sociodémographiques, qui peuvent être ponctuelles ou conjoncturelles.
Par ailleurs, le fait de créer plus de places n’entraînera-t-il pas une augmentation mathématique du nombre de détenus ?
Enfin, l’aménagement des peines me semble être la seule façon de personnaliser la peine. En matière pénale, on ne peut pas prévoir à l’avance toutes les peines possibles et imaginables, pas plus que l’on ne peut savoir à quel délinquant on aura affaire ni déterminer les infractions qui seront commises. Bien évidemment, il faut des normes afin de fixer et de quantifier la peine – prison, sursis, etc. –, et d’homogénéiser les condamnations sur l’ensemble du territoire.
M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.
M. Jean-René Lecerf. N’étant d’accord ni avec la rédaction proposée par le Gouvernement pour le rapport annexé au texte ni avec la réécriture de la commission, je m’abstiendrai sur les deux amendements du Gouvernement.
Je tiens quand même à dire deux choses.
Premièrement, je suis extrêmement sceptique quant aux pronostics qui portent sur l’évolution du nombre de personnes écrouées. Je constate d’ailleurs que depuis les débuts, ou presque, de la Ve République, tous les ministres de la justice qui se sont livrés à ces pronostics, y compris de très bons ministres, se sont trompés, et même très largement ! Je pense, par exemple, à Albin Chalandon, qui fut également député de mon département, le Nord, et pour qui j’ai beaucoup d’estime. Pour autant, le moins que l’on puisse dire est que ses pronostics sur l’évolution du nombre de personnes écrouées ne se sont pas, et de très loin, réalisés.
J’espère, monsieur le ministre, que l’on se trompe aussi aujourd’hui, notamment l’administration pénitentiaire, lorsqu’on prévoit 80 000 personnes sous écrou à l’échéance de 2017.
Deuxièmement, nous assistons à une curieuse inversion des rôles au sujet de l’encellulement individuel. Si le principe de l’encellulement individuel, inscrit dans notre droit depuis 1875, est toujours proclamé aujourd’hui, si ne s’y est pas substitué le principe de l’encellulement collectif, c’est grâce au Sénat. C’est le Sénat qui, sur ce point, l’a emporté face au gouvernement de l’époque et qui, ensuite, est parvenu à convaincre nos collègues de l’Assemblée nationale en commission mixte paritaire. Néanmoins, le Sénat n’a jamais été un ayatollah de l’encellulement individuel.
Je suis souvent très étonné d’entendre dire que, pour respecter la loi pénitentiaire, il faut 95 %, 96 %, 97 %, voire 100 % de places d’encellulement individuel. L’un de vos prédécesseurs, Mme Rachida Dati,…
Mme Nathalie Goulet. Aïe !
M. Jean-René Lecerf. … nous rappelait que le programme Perben, réalisé à une époque où la loi, comme aujourd’hui, impose le principe de l’encellulement individuel, comprenait 32 % de cellules pour une occupation double. Il est tant d’exceptions au principe de l’encellulement individuel : les personnes suicidaires, les personnes qui, pour des raisons de santé souhaitent ne pas être seules, etc.
Le Sénat a été le premier à reconnaître qu’il n’était pas utile d’exiger un taux de 95 % ou de 99 % de cellules individuelles. Le Parlement est prêt à tolérer un volant de cellules pour occupations multiples, de l’ordre de 20 % ou de 25 %, voire de 30 %, si cela peut éviter de construire des places de prison coûteuses et inutiles. Il y va de l’intérêt de chacun.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.
M. Philippe Bas. Je soutiendrai les amendements du Gouvernement.
En effet, le rapport annexé au texte du Gouvernement exprime bien l’équilibre de la politique d’exécution des peines. Elle se résume en quelques mots : diversification des modes de détention pour les adapter aux différents condamnés, ainsi qu’à la durée de leur peine, et améliorer la qualité de la détention ; augmentation du nombre de places en prison pour remédier à la surpopulation carcérale, qui est une caractéristique française ; soutien, grâce à la mise en œuvre de moyens très importants, de toutes les mesures d’aménagement et d’exécution des peines décidées à l’occasion du vote de la loi du 24 novembre 2009.
Pour répondre à certaines interventions, j’ajoute que nous avons tout lieu de nous réjouir : pendant que d’autres battent la campagne, le Sénat continue de légiférer sérieusement ! Nous ne sommes d’ailleurs pas les premiers à nous comporter de la sorte avant une élection présidentielle. Je citerai, par exemple, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, qui modifie la loi portant réforme du droit des incapables majeurs, et la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.
Il est bien dans la tradition républicaine de légiférer jusqu’à ce que les campagnes officielles démarrent. Je suis heureux que le Sénat, de ce point de vue, continue de donner l’exemple par son sérieux ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Il serait bon que la majorité gouvernementale évite de dénaturer la loi pénitentiaire en l’interprétant ou en l’appliquant mal.
Cette loi, je le rappelle, a été votée par tous les groupes du Sénat, excepté par le mien pour une raison très simple : nous l’avons estimée insuffisamment contraignante et nous avons jugé son contenu peu précis. Or il s’avère que des textes d’application n’ont pas été publiés, si bien que la loi n’est pas complètement mise en œuvre. Voilà pourquoi la commission des lois du Sénat a décidé, conjointement avec la commission de contrôle pour l’application des lois, de créer une mission de contrôle sur l’application de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009.
Néanmoins, je défends les principes qui ont prévalu lors de la rédaction de ce texte ; certains d’entre eux figurent d’ailleurs dans le projet de loi que nous examinons aujourd’hui. La loi pénitentiaire de 2009, ne l’oublions pas, nous était non pas dictée, car le Parlement est souverain, mais fortement demandée par les instances européennes.
Il n’est pas acceptable d’entendre aujourd’hui que le projet de loi de programmation est la pure application de la loi pénitentiaire de 2009.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Ce que nous contestons, et nous avons nous-mêmes pris certaines précautions, qui figurent d’ailleurs dans les propositions que j’ai formulées devant la commission, qui les a approuvées à la majorité, c’est la façon dont le programme du Gouvernement tord le bâton, si je puis dire. La distorsion qu’il opère est si importante qu’elle empêche de fait toute mise en application réelle des principes de la loi pénitentiaire.
Par ailleurs, la prévision que fait le Gouvernement – je ne fais là que répéter ce qu’un autre a dit – du nombre de personnes susceptibles d’être emprisonnées en 2017, sans même parler du quantum des peines, me paraît extrêmement contestable, pour des raisons que j’ai déjà expliquées et sur lesquelles je ne reviendrai donc pas.
L’histoire nous a déjà montré – je pense notamment au ministre Albin Chalandon – que l’on pouvait se tromper en faisant ce genre de pari sur l’avenir. Comment pouvez-vous affirmer qu’en 2017 les personnes susceptibles non pas d’être condamnées à une peine – on verra cela après –, mais d’être enfermées seront beaucoup plus nombreuses ? Cela revient à dire que les gouvernements futurs, quels qu’ils soient, n’auront pas d’autres solutions à proposer que l’emprisonnement. Cela veut dire que, en termes de politique pénale, on continuera d’augmenter les peines, qu’on n’aura pas développé les peines alternatives, qu’on n’aura trouvé aucune façon de gérer autrement les peines prononcées par les magistrats. Ce n’est pas acceptable !
Quand on voit la fluctuation, ne serait-ce qu’entre 2003 et 2011, du nombre de peines susceptibles de déboucher sur un enfermement, on se rend bien compte que l’évolution n’est pas linéaire. Par conséquent, dire que, d’ici à 2017, ce nombre ne fera qu’augmenter de façon continue ne m’apparaît pas comme une bonne manière d’envisager l’avenir.
Sur un autre aspect, le Gouvernement semble également se contredire. Exécution des peines ne veut pas dire enfermement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Certes, mais le projet de loi de programmation donne précisément l’impression du contraire.
Ainsi, quid des alternatives, notamment pour ce qui concerne les courtes peines ? Vous nous dites vous-même, monsieur Hyest, que mettre les gens en prison pour de très courtes peines n’est pas très efficace. Cela veut donc dire que l’on doit s’obliger à développer l’alternative, ce que les juges d’application des peines ont toute possibilité de faire ; je crois qu’ils en sont assez d’accord, car incarcérer pour quelques semaines, cela n’a rien de reconstructif. Aucun programme ne peut être mis en place dans les établissements pour des périodes aussi brèves. En outre, cela obère gravement la situation sociale, familiale, notamment, des personnes qui vont se retrouver en prison puisque celles qui travaillent seront empêchées de le faire, et que les familles de ces personnes se désagrégeront encore plus.
Donc, nous devrions être d’accord sur le fait que les personnes condamnées à des peines de prison inférieures ou égales à trois mois ne doivent pas se retrouver enfermées. La semi-liberté, cela existe, c’est un aménagement de peine.
M. André Reichardt. Mais cela ne peut pas être systématique !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Certes, mais dans le calcul du nombre de places, on considère que les courtes peines, qui représentent la moitié de ce que vous appelez le « stock », sont des peines aménageables. Alors qu’à partir de ces éléments nous devrions être d’accord, nous ne le sommes pas. C’est quand même curieux !
Concernant les établissements, nous souhaitons tous, me semble-t-il, que ces derniers concourent aux différents moyens de favoriser la réhabilitation. Or, à cet égard, je souligne au passage qu’on est loin du compte, car la question de l’activité des détenus soulève beaucoup de problèmes : quel travail peuvent-ils faire ? Quelle doit être leur rémunération ? Le droit du travail leur est-il applicable, notamment en matière de chômage ?
Si l’on peut bien sûr être d’accord sur certains points, en l’espèce, s’agissant du texte que vous nous soumettez, il est question de l’extension du nombre de places, et non de l’aménagement du nombre de places existantes de manière à permettre le développement des activités à l’intérieur des établissements.
Enfin, j’évoquerai un aspect qui est lié aux établissements de conception nouvelle. Le coût extrêmement élevé de ces établissements, qui font l’objet de partenariats public-privé, la nécessité de construire de grandes unités, même si celles-ci se décomposent en plus petites unités, aboutissent inéluctablement à construire ces établissements en plein désert. Or nous ne sommes pas favorables à ce mouvement, car, outre que c’est une façon de cacher les prisons, c’est préjudiciable à la préservation des liens familiaux et sociaux des personnes détenues.
Je citerai l’exemple de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Porcheville, que j’ai visité récemment. Pour les jeunes qui sont enfermés dans cette prison, le maintien de liens est particulièrement important. Or l’EPM de Porcheville est quasi inaccessible par les transports en commun.
Bien sûr, les maires de villes-centres sont souvent opposés à l’implantation d’un établissement pénitentiaire sur leur territoire.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Moi, je suis favorable à l’implantation de ces établissements dans les villes-centres, comme beaucoup d’entre nous ici. Ce n’est peut-être pas facile, mais envoyer les détenus dans les déserts, comme cela se pratique aux États-Unis, où j’ai d'ailleurs visité plusieurs établissements de ce type, est franchement dommageable pour le maintien des liens familiaux.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Madame le rapporteur, même s’il n’est pas facile de connaître toute la France, je vous précise néanmoins qu’en dehors des villes ce n’est pas le désert ! (Sourires.)
M. André Reichardt. C’est l’ancien ministre de l’espace rural qui s’exprime là !
Mme Éliane Assassi. Développez les transports en commun !
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je salue mes collègues membres de la commission des lois, qui, sur ce texte très compliqué, ont travaillé avec beaucoup de passion.
Ayant écouté attentivement les interventions de Mme le rapporteur, de M. le président de la commission des lois et de M. le garde des sceaux, je me permettrai, en toute objectivité, de formuler plusieurs remarques.
M. le garde des sceaux a clairement indiqué qu’aucun établissement, même petit, n’avait été supprimé. Je retiens donc que le Gouvernement est lui aussi attaché au maintien du nombre de centres pénitentiaires.
Permettez-moi d’apporter mon modeste témoignage en tant que représentant du département des Ardennes. Voilà quelques mois, a eu lieu l’inauguration de l’extension de la maison d’arrêt de Charleville-Mézières. Je souhaite d'ailleurs, avec un certain nombre de collègues ici présents, et comme l’a fait le président de la commission des lois, rendre hommage à l’ensemble des personnels qui travaillent dans ces établissements. L’extension de l’établissement de Charleville-Mézières visait les personnes condamnées à des peines relativement courtes, de six mois, d’un an, voire de deux ans. En visitant les locaux, nous avons pris la mesure de l’investissement qui avait été consenti et qui, en totalité, était financé par l’État, c'est-à-dire par le ministère de la justice.
Donc, il ne faut pas voir que le négatif. Cet investissement, relativement important, a été réalisé dans le cadre du plan de relance.
Lors de la visite de cet établissement, pourtant de petite taille, nous avons également pu mesurer le travail qui est mené en direction des détenus. En effet, comme le président de la commission des lois l’a rappelé, nous sommes attachés à la réinsertion, notamment au travers du travail d’atelier, sujet sur lequel plusieurs de mes collègues sont intervenus.
J’en viens à l’amendement n° 30.
Il n’est pas si fréquent qu’un amendement soit aussi dense, mais, après en avoir lu les quatorze pages, on ne peut douter de son caractère pédagogique. Même si aucune proposition n’est parfaite, on ne peut que reconnaître la validité de l’état des lieux auquel il procède. Au-delà du constat, les propositions significatives, notamment en termes d’augmentation de capacité, qu’il contient sont de nature à répondre aux attentes et aux difficultés. Le Gouvernement s’efforce d’améliorer la situation de l’ensemble des professionnels en respectant la séparation des pouvoirs.
Voilà pourquoi je voterai cet amendement.
M. le président. Monsieur Mézard, l'amendement n° 40 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jacques Mézard. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 40 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 13.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 55 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l’ensemble de l'article 1er et le rapport annexé, modifié.
(L'article 1er et le rapport annexé sont adoptés.)
Article additionnel après l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 41 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la troisième phrase de l’article 2 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, après le mot : « organisé », sont insérés les mots : « , dans les établissements pénitentiaires et les services d’insertion et de probation, ».
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Précédemment, Jean-Jacques Hyest rappelait l’importance des services pénitentiaires d’insertion et de probation. Pour notre part, nous considérons que le sort réservé aux SPIP n’est pas conforme à ce qu’il devrait être.
Le projet de loi prévoit en effet que ces services seront renforcés par une réorganisation de leur mode de fonctionnement plutôt que par un accroissement de leurs moyens humains et financiers. Même si un certain effort a déjà été réalisé, ce renforcement des moyens humains et financiers est indispensable, dans la mesure où les objectifs fixés par la loi pénitentiaire en termes de création de postes n’ont pas été pleinement satisfaits. Et nous savons, monsieur le ministre, combien est indispensable le travail de ces services !
On a rappelé de tous côtés la difficulté des détenus à assumer une sortie sèche. Il est donc indispensable de rappeler que, au 1er janvier 2011, les 2 716 conseillers de probation avaient à suivre près de 240 000 dossiers, soit une moyenne de 88 dossiers par conseiller. Comment s’étonner, dans ces conditions, que tout ne soit pas toujours parfait ?
Il est tout à fait anormal de mettre en cause ces services, qui ne peuvent malheureusement pas assumer la totalité de leurs missions dans les meilleures conditions, faute de moyens suffisants. Ce n’est pas l’application du programme de management Lean, qui est fondé, je le rappelle, sur des méthodes assimilables au taylorisme, qui apportera une solution positive et pérenne.
Nous estimons donc qu’il est primordial de donner aux SPIP les moyens de travailler convenablement. Commençons donc par souligner dans le texte même de la loi qu’ils participent au service public pénitentiaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Cet amendement tend à apporter une précision certes évidente, mais utile au vu, d’une part, des critiques portant sur le travail des SPIP, même s’il est vrai que des problèmes existent, et, d’autre part, de la tendance à la réorientation de leurs missions.
La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je comprends l’objectif qui sous-tend cet amendement, mais la précision qu’il apporte semble redondante, puisqu’elle figure déjà dans la loi.
Madame le rapporteur, si vous le souhaitez, vous pouvez faire adopter un amendement tendant à insérer un article additionnel unique aux termes duquel toutes les dispositions de la loi pénitentiaire seront reprises dans le projet de loi. Car c’est exactement de cela qu’il s’agit ici : on ne fait que répéter une disposition existant déjà dans notre droit positif.
Je demande à M. Mézard de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Mézard., l'amendement n° 41 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jacques Mézard. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le garde des sceaux, j’ai déjà appelé votre attention sur les besoins de financement des services d’insertion de l’Orne et sur la nécessité de les reloger dans des locaux plus conformes à l’exercice de leur mission de réinsertion et de suivi. Aujourd'hui, le personnel n’a pas les moyens de travailler dans des conditions convenables. De nombreux départements connaissent d’ailleurs une situation comparable.
Réaffirmer que les services d’insertion et de probation relèvent des missions du service public pénitentiaire n’est pas complètement inutile. Mieux vaut se répéter que se contredire ! Quoi qu’il en soit, nous avons l’impression que ces services sont sous-estimés et leurs personnels insuffisamment valorisés.
Voilà ce que je tenais à dire à l’occasion de l’examen de l’excellent l'amendement n° 41 rectifié bis.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.