Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement suit la position de la commission, même s’il préférerait, pour des raisons juridiques, un retrait de l’amendement.

Comme je l’ai dit hier soir, nous avons prévu un certain nombre de rencontres avec les organisations syndicales pour parler de la sécurisation juridique de l’utilisation des services communs, en vue d’accroître l’efficacité de l’action publique locale, source d’économies de moyens. Certains craignent qu’il ne s’agisse également d’une source d’économie de personnel.

Ces craintes ont été relayées par les organisations syndicales, avec lesquelles nous avons eu une première rencontre ; cette dernière n’a cependant pas été suffisante pour nous permettre de trouver un accord sur des dispositions sécurisantes pour les personnels dans l’agenda social.

Je comprends votre position, mais je pense qu’il faut quand même avancer vers la mutualisation parce que, dans de très petites communes, que nous voulons absolument conserver, il y a parfois – mais vous connaissez cette réalité aussi bien que moi – seulement un demi-poste de secrétaire de mairie. J’éprouve d’ailleurs une grande admiration pour ces fonctionnaires qui, à temps partiel, doivent répondre aux questions financières, juridiques ou liées à l’urbanisme, par exemple.

Les dispositions prévues dans l’article permettront de mettre en place dans ces petites communes un système de permanences susceptible de leur apporter une aide efficace pour qu’elles retrouvent une vie qu’elles avaient en fait perdue. L’arrivée de personnels pour régler les problèmes d’eau, d’assainissement, de déchets ou autres, qu’autorise cette mutualisation, au travers de l’intercommunalité, permet en effet souvent de redonner du sens à nos communes.

À mon sens, vos craintes sont excessives au regard de ce que nous voulons faire, mais il est vrai que l’agenda social doit aussi être l’occasion de conforter les personnels.

M. le président. Monsieur Favier, maintenez-vous votre amendement ?

M. Christian Favier. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 542.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 544, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 6, première phrase

Remplacer cette phrase par quatre phrases ainsi rédigées :

« Les effets de ces mises en commun sont réglés par convention après établissement d’une fiche d’impact décrivant notamment les effets sur l’organisation et les conditions de travail, la rémunération et les droits acquis pour les agents. La fiche d’impact est annexée à la convention. La convention fait l’objet d’une négociation préalable avec les organisations syndicales de fonctionnaires conformément à l’article 8 bis de la loi 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Les accords conclus sont annexés à la convention. La convention et ses annexes sont soumises à l’avis du ou des comités techniques compétents. »

La parole est à M. Christian Favier.

M. Christian Favier. Dans la droite ligne du débat que nous venons d’engager, cet amendement tend à réécrire l’alinéa 6 de cet article 39, qui prévoit que « les effets de ces mises en commun sont réglés par convention après établissement d’une fiche d’impact décrivant les effets sur les agents et avis du ou des comités techniques compétents ».

Cette formulation ne nous semble pas suffisamment précise, raison pour laquelle nous en proposons une réécriture afin que la convention, qui régit les conditions de la mise en commun de ces services, soit obligatoirement accompagnée d’une fiche d’impact décrivant notamment les effets sur l’organisation et sur les conditions de travail des agents opérant dans le cadre de ces services communs.

Par voie de conséquence, et comme à chaque fois que les conditions de travail des agents publics sont modifiées, nous proposons que, conformément à l’esprit de la loi qui a conduit à la création des comités techniques, ces derniers soient saisis pour avis des projets de convention, afin de s’assurer que cette dernière, et d’une manière plus générale la mise en commun des services, n’ait pas pour effet de dégrader les conditions de vie et de travail des agents publics.

Par ailleurs, toujours compte tenu des modifications intervenant dans l’organisation et les conditions de travail des agents concernés par la mise en commun de services, nous proposons d’ouvrir des négociations préalables à la création des services communs, dans le respect de l’article 8 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, qui stipule notamment que les organisations syndicales de fonctionnaires ont également qualité pour participer avec les autorités compétentes à des négociations relatives aux conditions et à l’organisation du travail.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. La commission des lois est favorable à cet amendement, sous réserve d’une rectification qui consisterait à supprimer la troisième des cinq phrases de l’amendement.

M. le président. Monsieur Favier, que pensez-vous de cette suggestion ?

M. Christian Favier. Nous y sommes favorables et rectifions notre amendement en ce sens, afin d’apporter davantage de garanties aux agents dans le cadre de ces services communs.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 544 rectifié, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi libellé :

Alinéa 6, première phrase

Remplacer cette phrase par quatre phrases ainsi rédigées :

« Les effets de ces mises en commun sont réglés par convention après établissement d’une fiche d’impact décrivant notamment les effets sur l’organisation et les conditions de travail, la rémunération et les droits acquis pour les agents. La fiche d’impact est annexée à la convention. Les accords conclus sont annexés à la convention. La convention et ses annexes sont soumises à l’avis du ou des comités techniques compétents. »

Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement rectifié ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 544 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 402 rectifié, présenté par Mme Létard, M. Jarlier, Mme Morin-Desailly, MM. Détraigne, Capo-Canellas, Tandonnet, J.L. Dupont et J. Boyer, Mme Férat et MM. Lasserre, Merceron, Arthuis et Roche, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Dans ce cas, le calcul du coefficient d’intégration fiscale fixé par l’article L. 5211-30 du présent code prend en compte cette imputation.

La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Le coefficient d’intégration fiscale, ou CIF, qui est le pivot de la répartition de la dotation globale de fonctionnement des intercommunalités à fiscalité propre, mesure le degré de mise en commun de la fiscalité par les communes au profit de l’intercommunalité. C’est ainsi le rapport entre la fiscalité perçue par l’EPCI, d’une part, et le montant total de la fiscalité perçue sur son territoire, d’autre part.

Le calcul de la fiscalité perçue par l’EPCI prend en compte les attributions de compensation, les dépenses obligatoires variant selon les transferts de recettes et de charges à l’EPCI ou de leur rétrocession par celui-ci aux communes.

Le montant des attributions de compensation a donc un impact sur le calcul du CIF, et, par conséquent, sur le montant de la DGF.

Cet amendement vise à assurer que le financement de services communs par la communauté impactant les montants des attributions de compensation est pris en compte dans le calcul du CIF, et donc de la DGF.

Cette règle doit être inscrite noir sur blanc dans la loi. En effet, dans certains cas, la direction générale des collectivités locales considère que le financement de services communs n’a aucun impact sur le calcul du CIF.

Cette situation doit être clarifiée, car la comptabilisation des dépenses consacrées aux services communs et mutualisés au sein du CIF est l’une des meilleures incitations financières possible à la mutualisation de services, qui est l’un des objectifs de ce projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. Ma collègue illustre parfaitement l’importance que le thème de la mutualisation a prise sur toutes les travées de cet hémicycle.

La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement invite au retrait de cet amendement, car c’est un débat que nous devrons avoir de façon globale, au moment de la discussion du projet de loi de finances pour 2014. Je ne peux accepter un amendement de façon isolée.

M. le président. Madame Létard, l’amendement n°402 rectifié est-il maintenu ?

Mme Valérie Létard. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 757 rectifié bis, présenté par MM. Vincent et Chiron, est ainsi libellé :

Alinéa 7

I. - Supprimer les mots :

ou par une commune

II. – Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Dans le cadre d’une bonne organisation des services et dès lors que cela correspond à la solution la plus appropriée pour maîtriser les dépenses publiques, un service commun peut être géré par la commune la plus peuplée d’une métropole ou d’une communauté urbaine.

La parole est à M. Jacques Chiron.

M. Jacques Chiron. Les services communs devaient jusqu’à présent, notamment depuis la loi du 16 décembre 2010, être organisés exclusivement à l’échelle intercommunale.

Autoriser la constitution de services communs portés par une commune peut remettre en cause l’objectif d’intégration intercommunale et les efforts de rationalisation de la réforme en entraînant un contournement des transferts d’agents.

Une telle possibilité ne doit donc être qu’une dérogation, ouverte à des catégories déjà très intégrées d’intercommunalités et justifiée par une meilleure efficacité en termes de maîtrise de la dépense publique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui, pour sa part, a cherché à élargir l’accès aux services communs. Je prie donc ses auteurs de bien vouloir le retirer. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je demande également le retrait de cet amendement.

M. le président. Monsieur Chiron, l'amendement n° 757 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jacques Chiron. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 757 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 545, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ils conservent également, s’ils y ont intérêt, les avantages dont ils bénéficiaient dans leur collectivité d’origine dans le domaine de l’action sociale et de la protection sociale complémentaire santé et prévoyance.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec des amendements que nous avons déjà déposés.

Il vise à garantir aux agents des collectivités locales et territoriales qui seraient transférés, avec tout ou partie de leur service, à une métropole, ou qui seraient concernés par la mutualisation des services, qu’ils pourront conserver, s’ils estiment que cela leur est bénéfique, les avantages dont ils bénéficiaient dans leur collectivité d’origine dans les domaines de l’action et de la protection sociales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour les mêmes raisons qu’hier soir, car, juridiquement, l’action sociale ne peut être transférée comme cela est demandé.

En revanche, de nombreux transferts ont déjà été effectués avec des compensations correspondant à un régime différent d’action sociale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 545.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 546, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La convention prévue au sixième alinéa détermine le nombre de fonctionnaires et d’agents non titulaires territoriaux transférés par les communes. Elle détermine la nature précise des activités exercées et les conditions d’emploi des agents titulaires et non titulaires transférés. Elle fixe les modalités de contrôle et d’évaluation de ces activités. La fiche d’impact prévue au même alinéa est annexée à cette convention.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Il s’agit également d’un amendement de cohérence.

L’alinéa 6 de l’article 39 prévoit qu’une convention encadre la mutualisation des services en précisant les modalités techniques de mise en œuvre du transfert de personnels communaux en direction de l’établissement public de coopération intercommunale chargé de gérer les services communs.

Toutefois, tel qu’il est actuellement rédigé, cet alinéa ne prévoit pas que les conditions de travail, d’emploi, la subordination juridique ou l’évaluation et l’avancement des agents seront abordés dans cette convention. Cela crée une forme d’instabilité préjudiciable aux agents, laquelle pourrait, à terme, déboucher sur d’importants contentieux administratifs.

Afin d’éviter cette situation, et pour garantir aux agents un cadre juridique clair, précis et protecteur de leurs droits, nous souhaitons que cette convention précise notamment la nature des activités exercées et les conditions d’emploi et de travail des agents et des non-titulaires transférés de la commune à l’intercommunalité.

M. le président. L'amendement n° 870, présenté par M. Vandierendonck, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer le mot :

troisième

par le mot :

quatrième

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 870 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 546.

M. René Vandierendonck, rapporteur. L’amendement n° 870 vise à corriger une erreur matérielle.

La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 546.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il n’est pas nécessaire que la convention détermine la nature précise des activités et des conditions d’emploi des agents, ces informations figurant dans la fiche d’impact, laquelle est soumise à l’avis des comités techniques compétents. Nous devons donc faire confiance à la fois aux élus et aux organisations syndicales présentes aux comités techniques. L’information des agents est par conséquent garantie dans des conditions satisfaisantes.

Dès lors, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 546. Il ne peut pas vous suivre, madame la sénatrice, car cela signifierait que nous serions de fait, et ensuite, si votre amendement était adopté, de droit, opposés à ce que la fiche d’impact soit annexée à la convention.

Si les motivations qui sont à l’origine de cet amendement, ainsi que du précédent, lequel a été adopté, sont très louables, la réponse juridique que vous proposez n’est pas adaptée aux avantages déjà acquis par les organisations syndicales.

Le Gouvernement est en revanche favorable à l’amendement n° 870.

M. le président. Madame Pasquet, l'amendement n° 546 est-il maintenu ?

Mme Isabelle Pasquet. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je le mets aux voix.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 870.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 871, présenté par M. Vandierendonck, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Vandierendonck, rapporteur. L’imputation prévue par cet alinéa implique que soit adopté l'article 34 du projet de loi de développement des solidarités territoriales et de la démocratie locale, qui supprime le troisième alinéa de l'article L. 5214-1.

Il n'est pas d'usage d'anticiper les choix futurs du législateur. Dans l’immédiat, je propose donc de supprimer cet alinéa. Il sera possible de procéder à ce renvoi ultérieurement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable. La disposition figurera dans le troisième projet de loi.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 871.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 39, modifié.

(L'article 39 est adopté.)

Article 39
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles
Article 40 (interruption de la discussion)

Article 40

L’article L. 5215-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° A la première phrase du premier alinéa, le chiffre : « 450 000 » est remplacé par le chiffre : « 400 000 ».

2° (nouveau) Sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation au seuil défini au premier alinéa, une communauté urbaine peut être créée dans toute aire urbaine, au sens de l’Institut national de la statistique et des études économiques, réunissant au moins deux des fonctions de commandement suivantes :

« - siège du chef-lieu de région ;

« - siège d’un centre hospitalier universitaire ;

« - siège d’un pôle universitaire ;

« - présence d’au moins deux pôles de compétitivité ;

« - présence d’au moins deux pôles d’excellence. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 342 rectifié est présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Chevènement, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall, Vendasi, Hue et Mazars.

L'amendement n° 547 est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Cet amendement vise à supprimer l’article 40.

L’accroissement considérable des possibilités de créer des communautés urbaines ou des communautés d’agglomération au fil des différentes dispositions législatives qui se succèdent nous laisse dubitatifs. Pour tout dire, il nous inquiète. Les critères sont constamment modifiés.

La réalité – et c’est logique, humain – est que, régulièrement, tel ou tel territoire demande à devenir une communauté d’agglomération ou une communauté urbaine et que l’on modifie alors les critères pour donner satisfaction à tel ou tel territoire.

Permettez-moi donc de faire un rappel historique sur la création des communautés urbaines.

En 1966 – cela a été rappelé au cours de ces débats –, l’objectif était de remédier, dans les aires urbaines les plus peuplées et les plus denses, au décalage entre les structures administratives existantes et la réalité géographique de ces agglomérations.

Je rappelle que la loi Chevènement de 1999 a relevé de 20 000 à 500 000 habitants le seuil de création d’une communauté urbaine. On se souvient de l’aventure d’Alençon : c’est une belle aventure, mais qui est restée limitée. Les évolutions se sont plutôt faites, depuis, dans le sens inverse.

Il nous est aujourd'hui proposé d’abaisser le seuil de création de 450 000 à 400 000 habitants. Cela fera plaisir aux territoires comptant 420 000 ou 432 500 habitants !

L’article 40 prévoit également un certain nombre de dérogations au seuil ainsi défini. Une communauté urbaine peut être créée dans toute aire urbaine réunissant au moins deux des fonctions de commandement suivantes : siège du chef-lieu de région, d’un centre hospitalier universitaire, d’un pôle universitaire, présence d’au moins deux pôles de compétitivité ou d’au moins deux pôles d’excellence. Ces critères sont alternatifs.

À ce sujet, je me souviens que, lors de l’examen de la loi de 2010, notre excellent collègue, le maire de Clermont-Ferrand, avait déposé un amendement visant à définir des critères correspondant exactement à la situation de sa ville. Je lui avais alors dit que l’existence de la statue de Vercingétorix ne justifiait pas forcément la création d’une communauté urbaine à Clermont-Ferrand ! (Sourires.) Ni même, aurais-je pu ajouter, le nombre de pneus fabriqués... (Nouveaux sourires.)

Je pense qu’il serait sage de ne pas modifier les critères de création dès que l’on examine une disposition législative concernant les collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l'amendement n° 547.

M. Christian Favier. À la suite du propos tenu par M. Mézard, et en cohérence avec la position que nous avons adoptée sur les métropoles, nous considérons qu’il n’est pas nécessaire d’abaisser le seuil du nombre d’habitants permettant la création d’une communauté urbaine. On voit bien qu’il s’agit là d’une sorte de lot de consolation pour ceux qui ne pourront accéder au statut de métropole.

Toutefois, notre argumentation sera un peu plus large.

Dans la hiérarchie de l’intégration des communes, les communautés urbaines se situent au deuxième rang, après les métropoles. Réduisant le nombre possible de métropoles, la commission a voulu, dans le même temps, renforcer tout de même l’intégration de nouvelles communes en permettant l’augmentation du nombre de communautés urbaines. Elle s’inscrit en cela dans la logique de la loi de 2010 visant à élargir toujours davantage le périmètre des intercommunalités, afin d’inciter les communes à abandonner de plus en plus de compétences.

Connaissant notre position sur ces questions, personne ne sera étonné que nous n’acceptions pas ce mouvement de concentration et donc l’augmentation du nombre de communautés urbaines.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. Le pilier du travail de la commission des lois a été la pensée du Sénat exprimée dans ses rapports, notamment le très fameux rapport de M. Mézard intitulé Faire confiance à l’intelligence territoriale (M. Jacques Mézard s’exclame.).

Ce rapport préconisait un nombre très limité de métropoles.

Comme cela était indiqué dans ce rapport, et comme cela a été dit et écrit à bon droit – cela a été dit en particulier par M. Edmond Hervé ici, au cours du débat –, il est important qu’une métropole soit également un pôle de centralité à vocation régionale. Sur quels critères se fonder ? Nous avons choisi la méthode la moins empirique possible : le recours à la technique du faisceau d’indices, laquelle correspond au cumul de deux des cinq conditions énumérées dans l’article 40.

Enfin, pour préserver les finances, nous n’entendons pas, pas plus dans ce domaine que dans d’autres, rendre la chose automatique. Nous souhaitons permettre à des communautés d’agglomération n’atteignant pas le seuil démographique fixé dans le texte, mais exerçant incontestablement des fonctions de centralité dans leur région, de suivre leur pente en montant, c'est-à-dire de progresser, si elles le souhaitent, sur la voie d’une intercommunalité renforcée.

La proposition de la commission me paraît équilibrée. Dès lors, monsieur Mézard, je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je comprends parfaitement ce que M. le rapporteur appelle la « pensée du Sénat », exprimée dans le magnifique rapport Faire confiance à l’intelligence territoriale.

Dans quelques instants, je retirerai l’amendement n° 825 du Gouvernement, compte tenu des autres amendements en discussion commune.

Par rapport à ce que nous avons dit hier sur les métropoles, je relève une petite contradiction. Hier soir, vous me disiez que l’on ne pouvait pas avancer et qu’il fallait limiter la DGF des métropoles pour que les autres collectivités ne soient pas pénalisées. Si nous ouvrons largement le champ des communautés urbaines, la même question va se poser ! Je vois donc dans cet aspect financier une limite à cet élargissement.

En revanche, je suis bien consciente que certaines grandes agglomérations exercent des fonctions spécifiques et ne peuvent cependant pas accéder à un statut qui les conforterait – je suis très attachée à cette notion de fonction, qu’il s’agisse des fonctions métropolitaines, hier, ou des fonctions urbaines, aujourd’hui.

Enfin, je suis favorable à l’intégration et à la mutualisation des services. Je serais donc en contradiction avec moi-même si je m’opposais à ces amendements.

Je m’en remets par conséquent à la sagesse du Sénat, nourrie par « l’intelligence territoriale » de M. Mézard et de tous les sénateurs qui ont travaillé avec lui. (M. Jacques Mézard s’exclame.) J’observe simplement que, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2014, nous devrons examiner de très près les conséquences de ce que nous faisons. Telle est donc la position du Gouvernement.

Comme je ne reprendrai pas la parole sur cet article, j’ajoute que j’avais l’intention de demander le retrait des amendements nos 763 rectifié, 69 rectifié, 343 rectifié et 877, compte tenu de l’ensemble des raisons que je viens de rappeler. Je renonce donc à ma demande de retrait et je m’en remets à la sagesse du Sénat. En revanche, mes services étudieront de plus près les conséquences des dispositions adoptées pour éclairer davantage le Sénat en deuxième lecture.

M. le président. Monsieur Mézard, l’amendement n° 342 rectifié est-il maintenu ?

M. Jacques Mézard. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Edmond Hervé, pour explication de vote.

M. Edmond Hervé. Je souhaite exprimer mon soutien à la position défendue par M. le rapporteur René Vandierendonck.

Madame la ministre, pour la clarté du texte final, je souhaiterais que nous ne mêlions pas ce projet de loi portant réforme institutionnelle au futur contenu de la loi de finances. Il y va de la bonne compréhension de nos débats !

M. Jean Germain, rapporteur pour avis de la commission des finances. Très bien !

M. Edmond Hervé. Ensuite, pour qu’une démarche soit parfaitement démocratique, il faut toujours se fixer des critères, qu’ils soient quantitatifs ou qualitatifs. Tout comme vous, je connais les difficultés d’interprétation que peuvent poser certains critères, pour ne pas parler de leur caractère parfois arbitraire ou injuste.

En ce qui concerne le critère purement quantitatif du seuil démographique, il me semble utile de procéder à un bref rappel historique.

Examinons le rayonnement des villes depuis le Moyen Âge. Par exemple, les villes hanséatiques, qui étaient liées dans un réseau et jouissaient d’un rayonnement exceptionnel, ne se caractérisaient pas par leur importance démographique…

M. Jean-Jacques Hyest. Il n’y avait pas de DGF à l’époque !

M. Edmond Hervé. Autre exemple : Gênes était une petite ville qui rayonnait mondialement. Ce qui explique ce rayonnement, c’est l’intelligence et la capacité d’entreprendre.

Dans les années 1970-1980, quelle ville, en France, rayonne et inspire les autres ? C’est Grenoble ! À l’époque, le rayonnement de cette ville n’est pas lié à la démographie, il est dû à son université, à sa recherche, à sa gouvernance. (M. Michel Mercier s’exclame.) Je mentionne volontairement Grenoble, parce que j’appartiens à une génération qui a contracté une dette à l’égard d’Hubert Dubedout.

M. Michel Mercier. C’est vrai !

M. Edmond Hervé. L’État a considérablement aidé Grenoble, madame la ministre, notamment pour la technopole.

De nombreuses louanges ont été adressées, à juste titre, à M. Gallois pour son rapport. Mais M. Gallois n’a pas inventé le contenu de son rapport : nous le trouvons déjà dans la philosophie qui a inspiré la création des technopoles. Évoquant les technopoles, je rends hommage à la fidélité de M. Gallois, qui a été le directeur de cabinet de Jean-Pierre Chevènement.

M. René Vandierendonck. Il a un bon fond !