M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, sur l'article.

M. Francis Delattre. Le présent article va forcément mettre en cause un certain nombre d’amendements qui ont contribué à atténuer l’équilibre du projet de loi de finances à hauteur de 11 milliards d'euros. Il me semble important de rappeler la portée de ces amendements. Certains pensent qu’il n’était pas raisonnable de les déposer, d’autres que cela ne servait à rien, mais je voudrais démontrer qu’il s’agissait d’un exercice utile.

Nous avons rétabli la défiscalisation des heures supplémentaires, y compris pour les salariés des PME, qui avaient jusqu’alors été écartés, alors même qu’ils étaient mentionnés dans les engagements du Président de la République. Cela coûte environ 4,5 milliards d'euros. Parmi nous, il y avait ceux qui défendaient le pouvoir d'achat et ceux qui défendaient la compétitivité des entreprises – en gros, ceux qui croyaient au ciel et ceux qui n’y croyaient pas. Cependant, sur cet article, nous avions tous le même Graal : nous voulions tous améliorer la condition sociale de 10 millions de nos concitoyens.

Nous avons rétabli le quotient familial dans ses dimensions de l’année dernière. Cela coûte 800 millions d'euros. Nous avons également écarté d’autres mesures relatives aux familles. Au total, on atteint environ 1 milliard d'euros. Nous considérons que la démographie est un atout pour notre pays. Nous croyons davantage en une société jeune, dynamique, qu’en une société vieillissante, repliée sur elle-même. Nous pensons aussi que notre système de retraites par répartition a besoin d’un renouvellement des générations. Attaquer le quotient familial, c’est en réalité attaquer l’ensemble des familles ; la seule différence est que certaines ont seulement plus de charges que les autres.

Nous avons écarté la fiscalisation de l’avantage lié à la possession d’une complémentaire santé lequel concerne 17 millions de Français. Il s’agissait, il faut bien le dire, d’un tour de passe-passe de l’ingénierie financière, qui envahit peu à peu nos discussions. Était-ce utile de faire contribuer nos concitoyens visés sur ce mince avantage ? Il est vrai que cette mesure coûte 1,2 milliard d'euros, mais on ne peut pas considérer qu’une fiscalité qui touche 17 millions de salariés est une fiscalité pour les riches. La disposition concerne tout simplement nos concitoyens qui travaillent.

M. le ministre délégué chargé du budget nous a indiqué que les charges des entreprises allaient baisser d’environ 10 milliards d'euros l’année prochaine. Pour que cet engagement soit tenu, nous avons écarté la surfiscalisation de l’impôt sur les sociétés des entreprises qui réalisent plus de 2 500 millions d'euros de chiffre d'affaires. Cela coûte 2,5 milliards d'euros. Je rappelle que, si le projet du Gouvernement est adopté, le taux de l’impôt sur les sociétés pourra atteindre 38 % en France, contre 15 % en Allemagne et 24 % au Royaume-Uni. Le rapport Gallois souligne que ce sont les PME-PMI disposant déjà d’une certaine consistance qui ont les moyens d’entreprendre la conquête de marchés internationaux. Si vous voulez renforcer la compétitivité de ces entreprises, il ne faut évidemment pas les surtaxer à hauteur de 2,5 milliards d'euros.

Nous avons écarté une autre innovation financière funeste, qui remonte à 2013 et devait être accentuée en 2014 : la non-déductibilité fiscale des intérêts des prêts contractés par les entreprises pour financer leurs investissements. Cela coûte 3 milliards d'euros. Dans un pays où 80 % des investissements des entreprises sont financés par les banques, la mesure proposée ne conduirait qu’à augmenter le taux des prêts dont les entreprises ont besoin. Tout le monde déplore que nos entreprises soient confrontées à un véritable problème d’investissement, notamment à cause de la faiblesse de leurs fonds propres. Il faudrait donc les aider au lieu de les surtaxer ; cela serait plus utile pour notre économie.

Nous atteignons ainsi les 11 milliards d'euros que j’ai évoqués au début de mon intervention. Chacun peut juger de la pertinence de nos amendements. Plusieurs d’entre eux ont été soutenus par certains groupes de la majorité ; nous les en remercions.

D’aucuns ont fait le procès de nos propres propositions. Si nous faisions seulement le contraire de ce que vous nous avez proposé, cela serait déjà pas mal, cela serait un commencement de programme. Cela ne suffirait pas, certes, mais cela serait le début d’un chemin.

J’en viens aux collectivités territoriales. En deux ans, 4,5 milliards d'euros seront prélevés. Des économies de 1,5 milliard d'euros seront réalisées. Monsieur le ministre, selon votre magnifique document sur la croissance et l’emploi, hors charge de la dette et pensions, le budget de l’État s’élèvera à 294,5 milliards d'euros en 2014, contre 295,2 milliards d'euros en 2013. Autrement dit, il diminuera de 700 millions d'euros. Or la dotation aux collectivités territoriales baissera quant à elle de 1 milliard d'euros exactement. C’est donc sur le dos des collectivités territoriales que vous réalisez votre mince économie sur la croissance des dépenses du pays.

Nos amendements ont le mérite d’éclairer crûment vos vrais choix économiques et fiscaux. Vous jouez à une sorte de bonneteau fiscal avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, mais, en réalité, votre projet de budget prévoit 10 milliards d'euros de charges supplémentaires pour les entreprises et presque autant pour les salariés. Vous privilégiez toujours la consommation au détriment de la production et, par conséquent, de l’emploi.

Le problème de ce budget est qu’il manque d’incitations et de courage politique.

Avec des dépenses publiques équivalant à 57,1 % du PIB, ce qui classe la France tout en haut des pays de la zone euro, vous asphyxiez les forces productives. Au regard de la situation de l’Allemagne, dont ces mêmes dépenses sont passées, en dix ans, de 48,5 % à 44,7 % du PIB, un vrai schisme est en train de se préparer !

M. Jean-Pierre Caffet. C’est le résultat des dix ans pendant lesquels vous avez gouverné !

M. Francis Delattre. Vous devriez prendre ces chiffes avec sérieux, parce que cet écart est annonciateur de nos difficultés dans les années qui viennent. Les économies et les orientations des deux pays sont trop divergentes pour que nous puissions maintenir une monnaie commune durablement.

En fait, il s’agit d’un budget conservateur, sans cap ni courage, qui nous conduit au déclassement. C’est le vieux monde de la dépense publique incontrôlée qui va s’écrouler avec le socialisme à la française, incapable de se réformer. (Protestations véhémentes sur les travées du groupe socialiste.)

M. Michel Berson. C’est ridicule !

M. Francis Delattre. Résultat : aujourd’hui, mes chers collègues, c’est l’Espagne qui nous prend des parts de marché, notamment industrielles. (Brouhaha sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Francis Delattre. Vous avez devant vous un budget à risques pour nos prêteurs internationaux et pour la paix sociale du pays.

Vous seriez bien inspiré…

M. Michel Berson. Vous, vous ne l’êtes pas !

M. Francis Delattre. … de garder un certain nombre de nos amendements, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. André Reichardt.

M. André Reichardt. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dirai juste quelques mots pour abonder dans le sens de mon collègue Francis Delattre, ce qui ne vous surprendra pas.

Le projet de loi de finances pour 2014 aura en effet de très grandes conséquences pour les entreprises, des TPE jusqu’aux grands groupes internationaux dont le siège est en France.

Or ce sont bien les entreprises qui créent de l’emploi, lequel constitue la première des priorités pour notre pays.

Puisque Francis Delattre en a parlé, je ne reviendrai pas sur les discussions que nous avons eues sur l’article 9, qui signe le retour de la taxe à 75 %, sur l’article 10, nouvel épisode du feuilleton de la taxe sur l’excédent brut d’exploitation, sur l’article 20, aux termes duquel est créée une éco-contribution carbone. Je m’étendrai davantage sur les mesures qui affectent tout particulièrement les PME, voire les TPE.

La hausse de la TVA mise en œuvre par la loi de finances rectificative de décembre 2012 va entrer en vigueur le 1er janvier prochain, puisque le Gouvernement ne souhaite pas revenir dessus. Pour un produit attendu de 6 milliards d’euros, cette augmentation va certes affecter tous les secteurs d’activité, mais tout particulièrement les artisans et les commerçants. Récemment, la grogne des centres équestres montre clairement que tout le monde va être touché.

Mes chers collègues, cette mesure va avoir des répercussions que nous n’imaginons pas pour ces secteurs : des entreprises sont tout simplement menacées de disparition parce que leurs clients ne seront plus solvables.

Le bâtiment, en particulier, va beaucoup souffrir, le taux de TVA applicable étant déjà passé de 5,5 % en 2011 à 7 % en 2012, pour atteindre 10 % au mois de janvier prochain. Il aura donc été multiplié par deux en moins de deux ans dans un secteur qui emploie beaucoup de main-d’œuvre qualifiée.

À n’en pas douter, le travail au noir va de nouveau prospérer. Dans ce secteur, il y aurait certainement eu intérêt à faire bénéficier les artisans indépendants, même si ce n’est pas la panacée, du CICE, comme j’avais eu l’occasion de le réclamer. Malheureusement, le Gouvernement est resté sourd à mes demandes.

L’article 23 bis, quant à lui, tend à réduire de moitié le crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage, mesure qui va pénaliser les entreprises embauchant des apprentis. Il est vrai que le Gouvernement préfère financer des emplois d’avenir sur le dos du contribuable.

L’article 24, pour sa part, a pour objet de baisser de 1,5 milliard d’euros la DGF des collectivités. On a le sentiment qu’une telle disposition ne va pas toucher les entreprises, mais vous savez bien que ce n’est pas le cas, puisque cette baisse sera compensée par des impôts locaux, contribution foncière des entreprises ou cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, à la charge des entreprises, petites ou grandes.

Enfin, pour ne pas être trop long, je termine par l’article 31, que nous avons examiné hier soir, et qui aura pour effet d’abaisser le plafond des ressources affectées aux compagnies consulaires de façon drastique,…

M. André Reichardt. … ce qui empêchera celles-ci d’assurer leur mission d’accompagnement des entreprises. Or nous savons qu’elles jouent un rôle fondamental, qu’on le veuille ou non.

In fine, le Gouvernement ponctionne 5,3 milliards d’euros sur les entreprises, sans prendre en compte l’incidence de la hausse de la TVA, qui s’ajoutent à la ponction de 10 milliards d’euros opérée l’année dernière. Ce sont donc 15 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires supportés par les entreprises.

Mes chers collègues, si nous votons cette hausse, nous aurons 15 milliards d’euros en moins pour l’emploi et la croissance. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. le président. L'amendement n° I-545, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. Dans l’état A, modifier les évaluations de recettes comme suit :

I. – BUDGET GÉNÉRAL

1. Recettes fiscales

11. Impôt sur le revenu

Ligne 1101            Impôt sur le revenu

minorer de 5 447 000 000 €

13. Impôt sur les sociétés

Ligne 1301            Impôt sur les sociétés

minorer de 587 000 000 €

14. Autres impôts directs et taxes assimilées

Ligne 1402                   Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes

majorer de 250 000 000 €

Ligne 1499            Recettes diverses

minorer de 310 000 000 €

 

15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

Ligne 1501            Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

minorer de 64 548 000 €

16. Taxe sur la valeur ajoutée

Ligne 1601            Taxe sur la valeur ajoutée

minorer de 3 319 000 000 €

17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

Ligne 1701            Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d'offices

majorer de 150 000 000 €

Ligne 1753            Autres taxes intérieures

minorer de 236 000 000 €

3. Prélèvements sur les recettes de l'État

31. Prélèvements sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales

Ligne 3107        Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

minorer de 4 977 000 €

Ligne 3122        Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle

minorer de 55 600 000 €

Ligne 3123        Dotation pour transferts de compensations d'exonérations de fiscalité directe locale

minorer de 27 777 000 €

Ligne 3126        Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la dotation unique des compensations spécifiques à la taxe professionnelle

minorer de 7 246 000 €

III. – COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE

Aides à l'acquisition de véhicules propres

Ligne 01           Produit de la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d'immatriculation des véhicules

minorer de 100 000 000 €

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Ligne 03           Amendes perçues par la voie du système de contrôle-sanction automatisé

majorer de 10 000 000 €

II. Le I de l’article est ainsi rédigé :

« I. - Pour 2014, les ressources affectées au budget, évaluées dans l’état A annexé à la présente loi, les plafonds des charges et l’équilibre général qui en résulte, sont fixés aux montants suivants :

 

 

 

(En millions d'euros)  

 

RESSOURCES

CHARGES

SOLDES

 

 

 

 

 

Budget général

 

 

 

 

 

 

 Recettes fiscales brutes / dépenses brutes

 377 283

 408 151

 

 

    A déduire : Remboursements et dégrèvements

 102 537

 102 537

 

 

 Recettes fiscales nettes / dépenses nettes

 274 746

 305 614

 

 

 Recettes non fiscales

 13 800

 

 

 

 Recettes totales nettes / dépenses nettes

 288 546

 305 614

 

 

    A déduire : Prélèvements sur recettes au profit des

 

 

 

 

      collectivités territoriales et de l'Union européennes

 74 388

 

 

 

 Montants nets pour le budget général

 214 158

 305 614

- 91 456

 

 

 

 

 

 

 Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

 3 906

 3 906

 

 

 Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

 218 064

 309 520

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Budgets annexes

 

 

 

 

 

 

 Contrôle et exploitation aériens

 2 156

 2 156

  0

 

 Publications officielles et information administrative

  215

  203

  12

 

 Totaux pour les budgets annexes

 2 371

 2 359

  12

 

 

 

 

 

 

 Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

 

 

 

 

 Contrôle et exploitation aériens

  19

  19

 

 

 Publications officielles et information administrative

»

»

 

 

 Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

 2 390

 2 378

  12

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Comptes spéciaux

 

 

 

 

 

 

 Comptes d'affectation spéciale

 71 316

 70 933

  383

 

 Comptes de concours financiers

 122 559

 124 297

- 1 738

 

 Comptes de commerce (solde)

xx

 

  117

 

 Comptes d'opérations monétaires (solde)

xx

 

  52

 

 Solde pour les comptes spéciaux

xx

 

- 1 186

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Solde général

xx

- 92 630

 

 

 

 

 

 

III. Le 1° du II de l’article est ainsi rédigé :

« 1° les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :

 

(En milliards d'euros)

 

 

 

Besoin de financement

 

 

 

 

Amortissement de la dette à moyen et long terme

104,8

 

     Dont amortissement de la dette à long terme

42,2

 

     Dont amortissement de la dette à moyen terme

62,6

 

     Dont suppléments d'indexation versés à l'échéance (titres indexés)

-

 

Amortissement des autres dettes

0,2

 

Déficit à financer

80,6

 

     Dont déficit budgétaire

92,6

 

     Dont dotation budgétaire du 2e programme d’investissements d’avenir

-12,0

 

Autres besoins de trésorerie

1,8

 

 

 

Total

187,4

 

 

 

 

 

 

Ressources de financement

 

 

 

 

Émission de dette à moyen et long termes, nette des rachats

184,0

 

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

1,5

 

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

-

 

Variation des dépôts des correspondants

-

 

Variation du compte de Trésor

1,4

 

Autres ressources de trésorerie

0,5

 

 

 

Total

187,4

 

IV. A l’alinéa 12 de l’article, remplacer le montant : « 69,2 milliards d’euros » par le montant : « 79,2 milliards d’euros ».

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Je vais bien entendu présenter cet amendement, mais je ne peux pas ne pas répondre aux interventions extrêmement nuancées et d’une grande honnêteté intellectuelle que je viens d’entendre. (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Francis Delattre. Nous avons affaire à un expert !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Je tiens d’ailleurs à en féliciter chaleureusement leurs auteurs.

Reprenons donc les arguments qui ont été évoqués.

D’abord, vous vous inquiétez, mesdames, messieurs les sénateurs, de l’augmentation de la dépense publique et des charges sur les entreprises résultant de ce projet de budget.

À cet égard, je voudrais simplement vous rappeler les chiffres figurant dans les rapports du Haut Conseil des finances publiques : entre 2007 et 2012… (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Francis Delattre. Ça y est !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Je comprends que ces chiffres vous gênent, mais il faut toujours savoir d’où l’on part et quelle direction l’on souhaite prendre pour savoir où l’on s’apprête à arriver.

Je reprends : entre 2007 et 2012, la dépense publique a augmenté de 170 milliards d’euros. (Mêmes mouvements.)

La part de la dépense publique dans le PIB a augmenté de 3 points de 2007 à 2012. Le taux d’augmentation de la dépense publique s’est établi à 2,3 % entre 2002 et 2007, et à 1,7 % entre 2007 et 2012.

M. Bruno Sido. C’était la crise !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Le budget qui vous est proposé affiche, lui, une division par cinq de l’augmentation de la dépense publique.

Vous parlez d’économies, mais en avez-vous fait lorsque vous étiez aux responsabilités ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. La révision générale des politiques publiques, qui était votre doctrine, a représenté 10 milliards d’euros d’économies par rapport au rythme tendanciel d’augmentation de la dépense entre 2010 et 2013. Vous occupiez alors toutes les ondes de la télévision et de la radio pour vous en réjouir. Nous, c’est 15 milliards d’économies en un an seulement ! Voilà la vérité concernant la dépense publique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Avec un tel bilan, vous êtes bien entendu tout à fait légitimes pour tenir des propos aussi nuancés…

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Les vôtres le sont toujours autant !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Ensuite, vous dites que ce budget entraînera une augmentation de 5,5 milliards des charges pesant sur les entreprises cette année.

Veuillez excuser ma franchise et mon sens de la nuance, mais c’est un colossal bobard !

En réalité, nous avons mis en place un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (Protestations sur les travées de l'UMP.) qui correspond à un allégement net de charges de 20 milliards d’euros pour les entreprises.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Ces 20 milliards d’allégements de charges sur les entreprises représentent 7 milliards d’euros de plus que la TVA sociale que vous aviez votée. De surcroît, cette dernière correspondait à une diminution des cotisations sociales qui avait pour principale caractéristique de bonifier l’assiette de l’impôt sur les sociétés, si bien que vous récupériez par l’intermédiaire de celui-ci une partie de ce que vous aviez consenti en allégements de charges. Ainsi, il fallait dégager 33 milliards de TVA sociale pour que les entreprises bénéficient de 20 milliards d’allégements nets de charges. Avec le CICE, la même somme est obtenue sans qu’elle soit payée intégralement par le contribuable personne physique.

Ce dispositif est totalement financé : 10 milliards d’euros d’économies en dépenses, dont 4 milliards d’euros dans le budget pour 2014 ; 6,5 milliards d’euros de TVA ; 3,5 milliards d’euros de fiscalité écologique, parce qu’il est bon qu’une fiscalité vertueuse contribue à l’abaissement du coût du travail.

Voilà très exactement ce que nous faisons. J’ajoute que le niveau des prélèvements cette année est inférieur de 2 milliards d’euros à celui de l’année précédente, ce qui signifie que, en 2014, l’allégement net de charges fiscales et sociales sur les entreprises est de 12 milliards d’euros.

M. Thierry Foucaud. C’est bien ce que l’on vous reproche !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Que vous avanciez un chiffre de 5,5 milliards d’euros d’augmentation porte un nom : c’est un mensonge ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Gournac. On verra au mois de mars prochain !

Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Chiche !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Ensuite, vous prétendez, prenant toute une série d’exemples, que nous aurions décidé nous-mêmes d’augmentations de fiscalité.

Monsieur Reichardt, vous avez notamment parlé des centres équestres, mais vous êtes tellement peu convaincu de ce que vous dites que, lorsque le Sénat a voté les amendements que vous présentiez sur le sujet, certains d’entre vous ont demandé des suspensions de séance, car ils avaient bien conscience que la réduction du taux de TVA sur les centres équestres avait été décidée en 2004 alors que tout le monde savait pertinemment qu’elle n’était pas conforme au droit européen.

La Commission et les institutions de l’Union ont enclenché une procédure à l’encontre de cette décision que vous avez prise alors que vous étiez aux responsabilités, procédure au terme de laquelle la France a été condamnée au mois de mars 2012.

Vous n’en avez tenu aucun compte !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. À notre arrivée au pouvoir, nous avons cherché à convaincre la Commission de la nécessité de corriger un certain nombre de dispositions de la directive TVA que vous n’étiez pas parvenus à faire modifier.

Alors a été engagée à l’encontre de la France, en raison des décisions que vous aviez prises et que nous avons essayé de corriger, une procédure de manquement sur manquement au terme de laquelle, si nous n’avions pas procédé à une mise en conformité du taux de TVA avec la réglementation européenne, nous nous serions exposés à un risque financier considérable pour finir, de toute façon, par être obligés de nous mettre en conformité.

Il est vrai que vous aimez bien les contentieux européens !

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. En effet, dans le budget de l’an dernier, nous avions prévu plus de 3 milliards d’euros au titre du contentieux OPCVM.

Faire payer le contribuable français pour les errements juridiques dont vous avez été les auteurs vous est donc très familier. Vous aimez cela, nous non ! C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous mettre en conformité au droit et d’engager, avec la Commission européenne, dans le cadre de la révision de la directive TVA, toutes les négociations adéquates pour faire en sorte que les centres équestres, ainsi que d’autres activités, puissent bénéficier du taux réduit de TVA, ce que vous n’avez pas réussi à faire.

Voilà la vérité que je voulais rétablir (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.), c’est-à-dire telle qu’on la doit à la représentation nationale. La politique se fait avec des chiffres et des réalités, et non pas avec de la mauvaise foi et des propos tendancieux. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Francis Delattre. Vous êtes professionnel en la matière !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Une discussion budgétaire mérite mieux que cela.

Monsieur le président, vous m’avez invité à présenter l’amendement du Gouvernement, ce que je vais maintenant faire bien volontiers.

Cet amendement traditionnel, de nature technique, vise à tirer les conséquences sur l’équilibre budgétaire de l’ensemble des votes intervenus au Sénat depuis le début de la discussion de la première partie du projet de loi de finances.

Les votes de la Haute Assemblée conduisent en effet à revoir à la hausse le déficit budgétaire de 10 milliards d’euros. Tel est le résultat des amendements votés par un certain nombre de groupes qui considèrent que la réduction des déficits est l’objectif prioritaire…

Ce déficit supplémentaire de 10 milliards d’euros résulte, tout d’abord, du rétablissement des exonérations fiscales et sociales sur les heures supplémentaires qui représente pas moins de 4,4 milliards d’euros.