M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Dilain, rapporteur. Je ne puis bien entendu qu’être extrêmement favorable à la réduction des inégalités territoriales. Cependant, madame Schurch, je vais me répéter, ce qui témoignera de ma cohérence : je ne vois pas pourquoi on isole la question financière. Il faudrait alors également produire bien d’autres rapports, par exemple un rapport sur l’éducation, en particulier sur l’échec scolaire…
Vous connaissez le goût de notre commission, notamment celui de son président, pour les rapports ; toutefois je pense que celui que vous demandez est inutile, eu égard à la création prochaine d’un observatoire dont l’une des attributions sera de répondre à la question que vous soulevez.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; sinon, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Lamy, ministre délégué. Je partage l’avis du rapporteur. Comme il l’a dit, il est vrai que, sur le fond, nous ne pouvons qu’être d’accord.
Vous soulevez également, madame la sénatrice, la question des outils de péréquation, qui déborde largement le sujet de la politique de la ville et relève même presque entièrement du projet de loi de finances, tous ces outils figurant dans ce dernier.
Une réflexion générale sur la dotation globale de fonctionnement est menée, comme vous le savez. Nous allons nous-mêmes engager une réflexion sur la future dotation de la politique de la ville, qui obligera nécessairement à revenir sur d’autres outils de péréquation, notamment la dotation de solidarité urbaine, aujourd'hui totalement déconnectée de la politique de la ville alors que les thématiques se recoupent.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, sans quoi il émettra un avis défavorable. Sachez cependant que nous entamons une réflexion sur ces questions.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Par cet amendement, on nous propose que le Gouvernement remette un rapport sur l’opportunité d’inscrire dans la loi de finances un objectif chiffré. Or la loi de finances comporte des articles qui mettent en œuvre les dispositifs de péréquation. On ne peut pas dire que ce sujet n’ait pas été examiné au cours des deux ou trois dernières années. Il l’a même peut-être été un peu trop, car on n’a fait qu’empiler les dispositifs et l’on en vient maintenant à se demander s’ils sont tous cohérents entre eux ! Pour ma part, je crois que non.
Dans ces conditions, à quand la réforme de tous ces dispositifs ? Je regrette, monsieur le ministre, que vous n’ayez pas abordé le sujet de la dotation de solidarité urbaine. L’un de vos prédécesseurs avait essayé de la réformer, mais il ne s’y était pas très bien pris, de sorte que l’on avait assisté à une levée de boucliers et que la réforme avait été retirée. Je l’avais déploré à l’époque, car cette dernière allait dans le sens d’un resserrement de la DSU, ce qui aurait été une bonne chose.
J’affirme une nouvelle fois qu’il faudra remettre tout cela sur le tapis. La DSU donne lieu à un saupoudrage –personne ici ne peut dire le contraire – et est maintenant parfois contradictoire avec le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France, le FSRIF, et la baisse de la DGF, qui constitue une sorte de péréquation inversée : je vous renvoie à ce que j’ai dit sur les règles mises en œuvre, qui ne me semblent pas bonnes.
Monsieur le ministre, je vous invite, même si Bercy n’est pas votre ministère de rattachement, à prendre le sujet en main et à nous proposer avec vos collègues une vraie réforme qui rende la péréquation plus simple et plus efficace.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er
I. – La politique de la ville est une politique de cohésion urbaine et de solidarité, nationale et locale, envers les quartiers défavorisés.
Elle est conduite par l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements dans l’objectif commun d’assurer l’égalité entre les territoires, de réduire les écarts de développement entre les quartiers défavorisés et leurs unités urbaines et d’améliorer les conditions de vie de leurs habitants.
Elle est mise en œuvre au moyen des contrats de ville prévus à l’article 5, qui intègrent les actions relevant des fonds européens structurels et d’investissement et s’articulent avec les contrats de plan conclus entre l’État et la région.
Elle mobilise et adapte, en premier lieu, les actions relevant des politiques publiques de droit commun et, lorsque la nature des difficultés le nécessite, met en œuvre les instruments qui lui sont propres.
Elle s’inscrit dans une démarche de coconstruction avec les habitants, les associations et les acteurs économiques, s’appuyant notamment sur la mise en place de coordinations citoyennes de quartier, selon des modalités définies dans les contrats de ville, et sur la co-formation.
Elle vise, en tenant compte de la diversité des territoires et de leurs ressources, à :
1° Lutter contre les inégalités de tous ordres, les concentrations de pauvreté et les fractures économiques, sociales, numériques et territoriales ;
2° Garantir aux habitants des quartiers défavorisés l’égalité réelle d’accès aux droits, à l’éducation, à la culture, aux services et aux équipements publics ;
3° Agir pour le développement économique, la création d’entreprises et l’accès à l’emploi par les politiques de formation et d’insertion professionnelles ;
4° Agir pour l’amélioration de l’habitat ;
5° Développer la prévention, promouvoir l’éducation à la santé et favoriser l’accès aux soins ;
6° Garantir la tranquillité des habitants par les politiques de sécurité et de prévention de la délinquance ;
7° Favoriser la pleine intégration des quartiers dans leur unité urbaine, en accentuant notamment leur accessibilité en transports en commun, leur mixité fonctionnelle et urbaine et la mixité de leur composition sociale ; elle veille à ce titre à la revitalisation et la diversification de l’offre commerciale dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ;
8° Favoriser le développement équilibré des territoires, la promotion de la ville durable et la lutte contre la précarité énergétique ;
9° Reconnaître et à valoriser l’histoire, le patrimoine et la mémoire des quartiers ;
10° Concourir à l’égalité entre les femmes et les hommes, à la politique d’intégration et à la lutte contre les discriminations dont sont victimes les habitants des quartiers défavorisés, notamment celles liées au lieu de résidence et à l’origine réelle ou supposée.
II. – Pour mesurer l’atteinte des objectifs de la politique de la ville énoncés au I par rapport aux moyens mobilisés dans le cadre des politiques en faveur des quartiers prioritaires de la politique de la ville, un observatoire national de la politique de la ville analyse la situation et les trajectoires des résidents de ces quartiers, mesure l’évolution des inégalités et des écarts de développement au sein des unités urbaines et contribue, de manière indépendante, à l’évaluation de la mise en œuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires. Il élabore une méthodologie nationale et apporte son concours aux structures locales d’évaluation.
Cet observatoire a également pour mission l’analyse spécifique des discriminations et des inégalités entre les femmes et les hommes. L’ensemble des données et statistiques qu’il produit sont établies par sexe.
Cet observatoire élabore un rapport annuel sur l’évolution des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Ce rapport est remis au Gouvernement et au Parlement. Il est rendu public.
III. – (Suppression maintenue)
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons maintenant le cœur de ce projet de loi.
Le présent article définit la nature de la politique de la ville en posant un certain nombre de principes, notamment celui de la contractualisation entre les acteurs de la politique de la ville et celui de la mobilisation prioritaire des moyens de droit commun. Nouveauté remarquable et appréciable, il est également indiqué que cette politique fait l’objet d’une coconstruction avec les habitants de ces quartiers.
Nous partageons pleinement ces principes, qui témoignent concrètement d’un changement de langage et de méthode par rapport au gouvernement précédent.
Les objectifs de la politique de la ville, ambitieux et justes, sont ensuite définis ; nous les partageons également. Si nous soutenons bien sûr la définition proposée de ceux-ci, nous restons cependant sceptiques, en dépit de votre engagement personnel, monsieur le ministre, sur la capacité réelle de ce gouvernement à les atteindre.
Exclusion économique, sociale, culturelle, urbaine : les difficultés vécues par ces territoires ont de multiples facettes, dont la pauvreté et le chômage sont évidemment les aspects les plus saillants.
Ces formes d’exclusion n’ont pas régressé au fil des ans ; elles ont au contraire empiré, comme l’a très justement relevé le rapport de la Cour des comptes.
La poursuite des politiques libérales, caractérisées par un désengagement croissant de l’État, a renforcé la précarité dans ces quartiers, qui ont toujours moins de services publics, moins de professeurs, de policiers et de médecins – j’ai bien noté, cependant, que vous avez affirmé qu’il y aurait plus de maîtres que de classes dans ces quartiers, ce qui est une bonne chose.
Ce nouveau projet de loi ne fait malheureusement pas exception, puisqu’il s’insère dans une politique gouvernementale globale de restriction budgétaire.
Si l’essentiel du dispositif repose sur la mobilisation de moyens de droit commun, reconnaissez que ceux-ci sont tout de même malmenés, en dépit de ce que vous avez affirmé. Nous souhaiterions que vous apportiez des précisions sur leur niveau, car nous pensons qu’il sera plus faible.
Comment croire qu’avec moins de ressources, les collectivités pourront garantir dans ces lieux la présence de services publics de proximité ? Les ambitions politiques nécessitent des engagements financiers adéquats, et c’est là que le bât blesse. La politique de la ville, transversale par nature, fera sans doute les frais des coupes budgétaires.
Monsieur le ministre, j’espère très sincèrement que vous saurez vous faire entendre auprès de vos collègues – j’ai cru comprendre que les discussions n’étaient pas terminées – pour obtenir des moyens à la hauteur de vos ambitions, que nous partageons, afin d’insuffler un renouveau dans la politique de la ville. Bien sûr, nous vous soutiendrons.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. Au cours de la campagne présidentielle, le candidat François Hollande avait fait de l’égalité républicaine entre les territoires une priorité de son action future.
Je suis heureux que, grâce à ce texte et à la volonté du Gouvernement, nous puissions entamer une nouvelle étape de la politique de la ville.
Ce texte est effectivement le fruit d’une concertation nationale, qui a mobilisé aussi bien les élus et les services de l’État que les représentants du tissu associatif et économique et, plus largement, l’ensemble des partenaires de la politique de la ville, afin de produire un projet qui réponde aux besoins réels en ce domaine, notamment aux besoins de cohésion urbaine.
Le présent article 1er est l’expression de notre vision de la société, celle que nous voulons pour nous et les générations à venir, celle pour laquelle nous allons nous donner les moyens de nos ambitions.
En fait, ce à quoi nous aspirons, c’est à une société fondée sur des valeurs d’égalité, de solidarité et de justice sociale Et il ne s’agit sûrement pas de vieilles lunes ! Cela dit, j’ai conscience que les problèmes ne disparaîtront pas du jour au lendemain. Mais je suis sûr d’une chose : cet article marque notre volonté de refonder et d’évaluer la politique de la ville le plus judicieusement possible, afin d’en accroître l’efficacité.
Aujourd’hui, monsieur le ministre, vous nous donnez les moyens de changer ce qui, aux yeux de certains, apparaissait comme une cause perdue, celle de nos quartiers défavorisés. Or rien n’est jamais perdu, à condition que l’on se donne les moyens de ses ambitions : définir et réaffirmer les principes fondateurs de la politique de la ville, dire et surtout inscrire dans la loi les objectifs vers lesquels nous tendons et ceux qui guideront notre action.
Il est en effet primordial d’œuvrer en direction des quartiers défavorisés.
Mettre fin aux égoïsmes territoriaux, favoriser la relance du renouvellement urbain, travailler à réduire les écarts de niveaux de vie, améliorer les conditions de vie, réintroduire des services publics : voilà, me semble-t-il, d’authentiques et urgentes priorités.
Réduire les inégalités et améliorer les conditions de vie, cela passera aussi par l’association des habitants à la politique menée, grâce à la mise en place du principe de la coconstruction.
Par ailleurs, si la politique de la ville est nécessairement tournée vers la rénovation urbaine, la qualité de l’habitat, la mise aux normes en matière de salubrité et d’économies d’énergie, ou encore vers la lutte contre la précarité énergétique, il n’en reste pas moins que l’emploi, la formation et le développement économique constituent des éléments déterminants.
C’est pourquoi je me réjouis que le développement économique et l’emploi soient inscrits, par cet article 1er, au cœur de notre action et de nos priorités, en particulier pour ce qui me concerne la formation, la co-formation et l’insertion professionnelle.
Tout est lié ! L’amélioration des conditions de vie passera également par des politiques d’intégration et de lutte contre les inégalités. Le chemin sera peut-être long, mais nous ne pouvons pas renoncer. Il nous faut atteindre ce palier qualitatif dont parlait, il y a quelques instants, notre collègue Jean-Jacques Mirassou.
Albert Camus disait : « On ne cueille pas le fruit du bonheur sur l’arbre de l’injustice. » Il ajoutait qu’il ne suffit pas de dénoncer les inégalités, qu’il faut les combattre. C’est bien là, mes chers collègues, notre objectif commun. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par Mme Schurch, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
et les habitants de ces quartiers
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Par cet amendement, nous souhaitons tout simplement réaffirmer le caractère intrinsèquement humain de la politique de la ville.
En effet, traditionnellement, pour évoquer la politique de la ville, il était fait mention d’une politique de « cohésion sociale et urbaine ». Le présent projet de loi et l’esprit qui vous anime, monsieur le ministre, conduisent à en finir avec cette dichotomie entre le social et l’urbain, opposant deux notions pourtant complémentaires.
Nous comprenons et partageons votre volonté. Néanmoins, nous estimons nécessaire d’affirmer, dès le premier alinéa de l’article 1er, que la politique de la ville a pour finalité d’améliorer les conditions de vie des habitants des quartiers défavorisés, par des actions relevant de l’urbanisme, mais aussi du domaine social.
Ainsi, nous proposons d’indiquer que la politique de la ville vise aussi, spécifiquement, les habitants de ces quartiers.
M. le président. Le sous-amendement n° 84, présenté par M. Dilain, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Amendement n° 13
Alinéa 3
Remplacer les mots :
les habitants de ces quartiers
par les mots :
leurs habitants
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 13.
M. Claude Dilain, rapporteur. Je suis tout à fait d’accord avec vous, madame Schurch : il convient de mentionner les habitants des quartiers défavorisés dès le début de ce texte. Une telle précision revêt une valeur symbolique très forte.
J’estime d’ailleurs que nous devrons un jour mettre fin à la confusion qui peut régner à cet égard – cela apparaît même dans les travaux universitaires – et dont la politique de la ville a trop souffert jusqu’à présent. À mes yeux, il est clair que la politique de la ville doit prendre en compte aussi bien les territoires que les habitants : ce qu’un élève de CM2 regarderait comme une évidence doit tout de même être à notre portée !
Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 13, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 84, qui est purement rédactionnel puisqu’il vise simplement à supprimer la répétition du mot « quartiers ».
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Lamy, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 13, pour les mêmes raisons que la commission, ainsi qu’au sous-amendement n° 84.
M. le président. L'amendement n° 45, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La place et le rôle des habitants dans la définition et la mise en œuvre de cette politique sont déterminants.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Cet amendement ayant le même objet que celui qui vient d’être adopté, j’estime qu’il est satisfait et je le retire.
M. le président. L’amendement n° 45 est retiré.
L'amendement n° 75 rectifié, présenté par MM. Esnol, Baylet, C. Bourquin, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Mézard, Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les crédits de droit commun affectés aux quartiers prioritaires de la politique de la ville sont supérieurs à ceux qui sont mobilisés, en moyenne, sur l’ensemble du territoire.
La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Conçue au départ pour concentrer les moyens sur les quartiers défavorisés et apporter une réponse ponctuelle, la politique de la ville s’est très vite substituée aux politiques de droit commun.
Les quartiers relevant de la politique de la ville ont vocation à évoluer, à connaître une réduction des inégalités constatées et, par conséquent, à sortir du champ de cette politique. Or, loin de disparaître, les quartiers prioritaires se sont multipliés : environ 2 500 contrats urbains de cohésion sociale ont été conclus. Des sommes modiques ont pu être attribuées à certaines villes qui n’en avaient pas véritablement besoin, tandis que, à l’inverse, des quartiers en difficulté n’ont pas pu bénéficier de moyens suffisants, à la hauteur des enjeux économiques et sociaux.
Ce manque d’efficacité a été dénoncé par de nombreux acteurs, notamment par la Cour des comptes dans son rapport sur la politique de la ville publié en juillet 2012. Il convient en effet de concentrer les moyens en priorité sur les zones où les besoins sont le plus criants, afin de réduire les profonds écarts de développement qui persistent entre ces quartiers et le reste du territoire.
Le présent projet de loi semble aller dans le bon sens puisqu’il est précisé en son article 1er que la politique de la ville mobilise en priorité les politiques de droit commun. Toutefois, il me semble qu’il faut aller plus loin, conformément à l’ambition que doit porter un projet de loi de programmation, en consacrant aux quartiers prioritaires des crédits de droit commun supérieurs à ceux qui sont attribués en moyenne sur le territoire national. C’est à nos yeux une condition nécessaire pour que les quartiers concernés puissent sortir du champ de la politique de la ville.
Cet amendement vise donc à faire en sorte que l’ensemble des politiques de droit commun soient mises en œuvre en faveur de l’égalité des territoires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Dilain, rapporteur. Je partage évidemment avec les auteurs de l’amendement l’idée qu’il est nécessaire de mobiliser les politiques de droit commun ; je l’ai dit lors de mon intervention liminaire.
Toutefois, la formulation proposée ici, trop rigide, m’inquiète un peu. En effet, chaque contrat de ville sera différent.
Aussi, bien que je sois totalement d’accord sur le fond de cet amendement, j’en demande le retrait. À défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Lamy, ministre délégué. La position du Gouvernement rejoint celle de la commission.
Je prendrai l’exemple de l’éducation nationale. Son action portera sur les établissements qui reçoivent des élèves des quartiers prioritaires, mais qui ne sont pas forcément implantés dans ces quartiers. Avec Vincent Peillon, nous travaillons actuellement à un exercice de convergence de nos géographies prioritaires. Je vous l’ai dit tout à l’heure, des moyens nouveaux ont déjà été engagés en faveur des jeunes de ces quartiers. Il en est d’ailleurs de même pour d’autres ministères ou agences.
Ainsi, pour ce qui concerne Pôle emploi, un engagement précis est en cours de concrétisation : il s’agit de mettre en place des agents de Pôle emploi dans certains des quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Si, sur le fond, cet amendement participe de l’un des objectifs principaux du texte, sur la forme, il soulève de nombreuses difficultés. J’en demande donc le retrait.
M. le président. L’amendement n° 75 rectifié est-il maintenu, monsieur Fortassin ?
M. François Fortassin. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 75 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 74 rectifié, présenté par MM. Dallier, Bécot et Bizet, Mme Cayeux, MM. Chatillon, Couderc, Ferrand, B. Fournier, Grignon, Houel et Karoutchi, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, Lefèvre, Leleux, P. Leroy et Milon, Mme Procaccia et M. Trillard, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
coordinations citoyennes de quartier
par les mots :
conseils de développement de quartier
II. – En conséquence, dans l’ensemble du projet de loi
Remplacer les mots :
coordinations citoyennes de quartier
par les mots :
conseils de développement de quartier
La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Il s’agit d’un sujet dont nous pourrions certainement débattre fort longtemps : quelle terminologie utiliser pour dénommer le regroupement des habitants qui seront amenés à discuter de la politique de la ville dans les différents quartiers ?
La rédaction qui nous vient de l’Assemblée nationale, et que la commission a maintenue, retient l’appellation « coordinations citoyennes de quartier ». Je ne sais pas si cette expression est, en l’occurrence, très pertinente.
Au mot « coordination », je préfère celui de « conseil ». Il semble d’ailleurs que le Gouvernement soit du même avis puisque l’amendement n° 83 reprend ce terme. Quant au mot « citoyen », il est certainement l’un des plus beaux de notre langue, car il renvoie à la démocratie. Toutefois il possède une signification précise : dans notre droit, est citoyen celui qui a le droit de vote et possède la nationalité française. Il ne faudrait pas laisser croire à certains que, parce qu’ils n’ont pas la nationalité française, ils ne sont pas pris en considération dans le nouveau cadre que nous voulons mettre en place.
C’est pourquoi la dénomination de « conseils citoyens » que le Gouvernement propose de retenir ne me semble pas tout à fait adaptée. Pour ma part, je suggère d’adopter celle de « conseils de développement de quartier », qui me paraît résumer assez bien notre intention.
M. le président. L'amendement n° 83, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
coordinations citoyennes de quartier
par les mots :
conseils citoyens
II. – En conséquence, dans l’ensemble du projet de loi
Remplacer les mots :
coordinations citoyennes de quartier
par les mots :
conseils citoyens
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Lamy, ministre délégué. M. Dallier a raison, nous pourrions débattre longuement du choix de ces termes ; c’est d’ailleurs ce qui s’est passé à l’Assemblée nationale ainsi qu’au sein de votre commission.
Initialement, le rapport Mechmache-Bacqué évoquait des « tables de quartier ». J’avais récusé cette dénomination, qui faisait référence à des expériences menées au Canada et n’ayant pas forcément de lien avec ce qui se passe en France.
Dans la mesure où il existe déjà des comités de quartier, j’avais souhaité qu’on retienne le terme de « conseils ».
Pourquoi ne suis-je pas séduit par l’expression « conseils de développement » ? Tout simplement parce que je considère qu’il faut éviter que cette nouvelle instance puisse être confondue avec les comités de développement qui existent aussi au sein de nos territoires.
Par ailleurs, le terme de « coordination », repris par la commission, ne me semble pas parfaitement adéquat. Il évoque en effet certaines situations particulières où les organisations syndicales représentatives se voient supplantées par une « coordination ». Dès lors, recourir à ce terme risque de donner le sentiment d’une opposition entre ces organes composés de citoyens et les élus.
Reste la question de savoir si l’on doit parler de « conseils citoyens » ou de « conseils de citoyens ».
Vous avez raison, monsieur Dallier, la citoyenneté se définit juridiquement par la nationalité. Or, dans nos quartiers, la présence de citoyens étrangers est parfois massive. Quand je parle de « citoyens étrangers », je pense à ceux qui exercent leur citoyenneté en participant à la vie de la commune et en payant leurs impôts locaux.
Ma première idée était de retenir l’expression « conseils de citoyens ». Toutefois, pour dépasser la question juridique, nous avons finalement opté pour celle de « conseils citoyens », c'est-à-dire des conseils d’habitants exerçant la citoyenneté.
Cette dénomination de « conseils citoyens » me semble correspondre exactement à ce que souhaitent le Gouvernement et tous ceux qui sont soucieux de voir se mettre en place une coconstruction avec les habitants des quartiers de la politique de la ville.
J’indique que, à l’article 5 bis, je défendrai un amendement visant à repréciser la composition de ces conseils.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Dilain, rapporteur. J’avais proposé le mot « coordination » non pas parce que j’y tenais, mais parce que les auditions m’avaient montré que c’était celui qui avait la préférence de certaines personnalités, en particulier Mohammed Mechmache. Il me paraissait malvenu de promouvoir un processus de coconstruction en commençant par refuser la dénomination souhaitée par ceux qui sont susceptibles de l’animer !
Cela étant, je reconnais, avec M. le ministre, que le mot « coordination » peut avoir un double sens. Après de nouvelles discussions, les termes « conseils citoyens » sont désormais acceptés. Je me range très volontiers à cette terminologie, d’autant que tout cela sera explicité, à l’article 5 bis, par l’amendement du Gouvernement.
C’est ce qui m’amène à émettre un avis favorable sur l’amendement n° 83.
Quant à la dénomination « conseils de développement de quartier », proposée par M. Dallier, elle me paraît quelque peu restrictive dans la mesure où, sinon aux termes de la loi, au moins par tradition, le terme de « développement » renvoie presque exclusivement au développement économique. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 74 rectifié.