Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Nous comprenons vos objections, monsieur le ministre, et nous connaissons tous les difficultés relationnelles existant entre les producteurs et la grande distribution. Nous ne prétendons pas détenir la vérité, mais que proposez-vous, pour votre part, pour tenter d’améliorer la situation ?
Nous voulons la paix entre producteurs, consommateurs et distributeurs ; nous voulons que tous les acteurs s’y retrouvent. Que faire pour cela ? Qu’apporte ce projet de loi aux producteurs ? En quoi permet-il d’établir un équilibre entre l’ensemble des parties prenantes ? Là est la question ! Force est de constater que les propositions sont rares, c’est pourquoi nous nous sommes permis d’en avancer une, qui vaut ce qu’il vaut, mais dont la discussion permettra peut-être d’ouvrir sur d’autres solutions…
Mme la présidente. L'amendement n° 350 rectifié bis est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 410 rectifié est présenté par MM. Bizet, Houel, Lefèvre et Revet.
L'amendement n° 608 rectifié est présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au deuxième alinéa de l’article L. 442-2 du code de commerce, les mots : « minoré du montant de l’ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit et » sont supprimés.
La parole est à M. Jean Bizet, pour présenter l’amendement n° 410 rectifié.
M. Jean Bizet. Cet amendement est très proche de celui que viennent de nous soumettre nos collègues Reichardt et César, mais il est formulé différemment.
J’ai bien écouté, en particulier, les arguments de M. le ministre, que je crois sincère. Cependant, lors de la discussion générale, j’ai indiqué que la grande distribution était en train de porter un mauvais coup aux outils de transformation français, qui n’ont pas bénéficié, au fil du temps, de marges suffisantes pour permettre leur restructuration, leur modernisation, leur extension : c’est une des causes du différentiel qui se creuse actuellement entre l’Allemagne et notre pays ; c’est également une des causes, non la seule, du malaise que connaît le secteur de la transformation en Bretagne. D’ailleurs, il n’est pas anodin que M. Le Cam formule des propositions voisines des nôtres.
Cet amendement vise donc à relever le seuil de revente à perte pour limiter l’ampleur de la guerre des prix. Je l’avais déjà présenté dans le cadre de l’examen de la loi relative à la consommation, mais il n’avait pas eu l’heur de plaire à M. Hamon. Quant à la loi de modernisation de l’économie, évoquée tout à l’heure par M. le président de la commission des affaires économiques, j’avoue qu’elle ne m’a pas non plus laissé un souvenir particulièrement impérissable…
Il n’est pas question, avec cet amendement, dont je crains qu’il ne subisse le même sort que le précédent, de revenir sur les marges arrière. Cependant, son examen doit être l’occasion de regarder la situation en face : la grande distribution, ne soyons pas naïfs, dégage des marges ailleurs !
Les démarches de médiation, les négociations ne fonctionnent pas aussi bien en France qu’en Allemagne. Je suis avec beaucoup d’attention la filière laitière, la Manche étant redevenue le premier département laitier : nous avons laissé derrière nous nos voisins de l’Orne… (Sourires.)
Mme Nathalie Goulet. Je vous remercie !
M. Jean Bizet. Je salue leurs efforts ! (Nouveaux sourires.)
Dieu sait que l’Allemagne n’est pas la référence absolue, mais je note que, dans ce pays, la grande distribution a relevé à trois reprises, dans les six mois qui viennent de s’écouler, le prix du lait. Qu’en est-il chez nous ? En Basse-Normandie, certains outils de transformation ne peuvent plus se restructurer, se moderniser ou s’agrandir, faute de disposer des marges financières nécessaires.
Je donnerai simplement un chiffre, que j’ai trouvé dans un grand journal économique national dont je me permets de me faire ici l’écho… (Sourires.)
Mme Nathalie Goulet. Que c’est délicat !
M. Jean Bizet. N’est-ce pas !
Comme vous devez le savoir, monsieur le ministre, les prix alimentaires ont augmenté de 3,8 % en Allemagne, de 3,7 % en Grande-Bretagne, et seulement de 1,2 % en France. Telle est la réalité !
Anticipant les réactions que pourra susciter notre proposition de relever le seuil de revente à perte, je suggère de préciser davantage encore le dispositif de l’amendement n° 605 de M. Le Cam, tel que sous-amendé par la commission des affaires économiques, en visant les produits alimentaires frais contenant un pourcentage important de produits de base, tels que le lait, la viande et les légumes, dont la liste exacte serait arrêtée par décret. Dans ce cas, je serais tout à fait prêt à retirer le présent amendement, ainsi que l’amendement n° 411 rectifié.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 608 rectifié.
M. Gérard Le Cam. Par définition, le prix d’achat effectif est le prix unitaire net figurant sur la facture d’achat, minoré du montant de l’ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur.
C’est justement cette possibilité de soustraire le montant de l’ensemble des avantages financiers consentis par le vendeur qui permet de fixer un seuil de revente à perte très bas, à ce point que, en pratique, l’interdiction se trouve contournée. Or, cette interdiction est déjà assortie de plusieurs exceptions : les périodes de fin de saison ou d’entre-deux saisons de vente, la vente de produits démodés ou frappés d’obsolescence technique, le réapprovisionnement à la baisse, etc.
Enfin, le manque à gagner lié à la pratique des prix d’appel sur certains produits de l’industrie agroalimentaire est répercuté sur les prix payés aux producteurs.
C’est pourquoi nous proposons de revenir à un calcul plus juste du prix effectif à l’achat et à un relèvement du seuil de revente à perte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. La commission souhaiterait entendre l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques.
M. Jean Bizet. Nous l’entendrons avec beaucoup d’intérêt !
M. Didier Guillaume, rapporteur. Concernant la grande distribution, je voudrais dire ici qu’elle n’est ni Satan ni le grand méchant loup ! Elle n’est pas seule à mettre à mal l’agriculture. Dans des départements comme le mien, où les productions arboricoles et maraîchères tiennent une grande place, elle permet aux agriculteurs de vendre leurs produits et de déstocker des frigos souvent pleins. C’est une réalité objective ! Nous ne pouvons pas sans cesse opposer les uns et les autres, et considérer la grande distribution comme la source de tous les maux !
Pour autant, il existe bien un problème des prix, et il faudra que nous parvenions un jour à traiter le sujet essentiel du seuil de revente à perte.
M. André Reichardt. Absolument !
M. Didier Guillaume, rapporteur. Quelle autre profession accepterait de vendre des produits en dessous de leur prix de revient, alors que c’est interdit par la loi ? Il faut arrêter de demander combien cela coûte, et déterminer combien cela vaut. Il faut arrêter de trouver normal, au nom des lois de l’économie libérale, que le prix d’achat de produits agricoles tels que les fraises, les tomates ou les abricots soit fixé par une seule personne, à un niveau tel que le prix de revient s’avère supérieur au prix de vente au consommateur. Ce n’est plus acceptable !
Dans cette perspective, il faut repenser le schéma économique global. C’est pourquoi j’ai toujours soutenu la volonté du président Raoul de revenir sur la loi LME et les 3 R, qui dévastent les relations commerciales. Nous en avions parlé au gouvernement de M. Fillon, à celui de M. Ayrault ; j’espère que ce gouvernement se saisira du sujet. La question des 3 R est sans doute complexe, mais si nous ne la traitons pas, nous n’aboutirons pas !
Je m’attache toujours à rechercher des positions équilibrées : ne lançons pas l’anathème contre la grande distribution ; elle joue aussi un rôle important auprès des petits agriculteurs. Cela étant, on voit bien que nous ne pouvons plus cautionner des pratiques qui nuisent clairement aux relations commerciales.
Je souhaite que nous puissions traiter rapidement la question du seuil de revente à perte, en l’inscrivant dans un cadre plus large, celui du système économique. Mais cela dépasse les compétences du modeste rapporteur que je suis !
M. Charles Revet. Allons, allons !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Monsieur le rapporteur, vous êtes trop modeste ! (Sourires.)
Il est frappant de constater que nous sommes passés de l’agriculture à l’industrie agroalimentaire…
M. Jean-Jacques Mirassou. Exactement !
M. Stéphane Le Foll, ministre. L’agroalimentaire relève certes de mon champ de compétence, mais je rappelle que nous débattons en l’espèce d’un projet de loi d’avenir agricole !
M. André Reichardt. C’est un sujet important !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Bien sûr, je ne dis pas le contraire !
L’amendement défendu par M. Bizet a pour objet la prise en compte d’un pourcentage, celui qu’a présenté M. Reichardt vise à intégrer, dans le calcul du seuil de revente à perte, la moyenne des coûts fixes. Connaissez-vous les coûts fixes de la grande distribution, messieurs les sénateurs ?
Mme Sophie Primas. Voilà !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Êtes-vous capables de déterminer leur évolution magasin par magasin, produit par produit ? Tout fluctue en permanence ! Même avec ces critères, il est très difficile de fixer un cadre.
Cela étant, M. Bizet a soulevé un point intéressant : pourquoi le prix du lait a-t-il augmenté plus tôt en Allemagne que chez nous, et sans qu’il soit besoin de réunir tout le monde autour d’une table, comme nous avons dû le faire ? Nos voisins Allemands établissent des règles, qu’ils appliquent concrètement, y compris aux enseignes hard discount. Lorsqu’ils considèrent qu’une augmentation de prix est nécessaire, ils la mettent en œuvre.
A contrario, en France, c’est la concurrence entre grands distributeurs qui prime, y compris sur la logique économique. C’est précisément ce que nous tentons de changer, en promouvant la discussion entre les acteurs. Au reste, parmi les grands distributeurs, certains, tel Serge Papin, commencent à s’inquiéter pour la pérennité de notre système de production !
M. Jean Bizet. Bien sûr !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Quant à Michel-Édouard Leclerc, il a dit lui-même que le volume de vente des produits les moins chers n’augmente plus : ainsi, ce n’est plus la baisse des prix qui lui permet d’accroître ses parts de marchés. D’ailleurs, les hard discounters commencent eux aussi à vendre des produits de marques. Longtemps, toute leur stratégie s’est fondée sur la pratique des prix les plus bas, en négligeant le service, mais ils ont perdu la bataille contre la grande distribution ! On le voit, la situation commence à évoluer un peu.
À mon sens, ce n’est pas avec des mesures législatives que nous parviendrons à résoudre ces problèmes, qui relèvent de la négociation commerciale. En revanche, il est essentiel d’instaurer des garde-fous là où cela est nécessaire. C’est ce que nous avons fait en proposant d’améliorer la contractualisation : je songe à la place donnée aux organisations de producteurs, aux sanctions prévues en cas de non-respect des conclusions des négociations collectives entre organisations de producteurs et transformateurs, au recours systématique à la médiation avant tout conflit. L’objectif est de donner la primauté à la négociation entre les acteurs.
Ces dispositions s’ajoutent aux mesures inscrites dans la loi relative à la consommation visant à corriger le dispositif de la loi LME, pour obliger les parties prenantes à renégocier lorsque les coûts de production augmentent en cours de contrat.
M. Gérard César. Oui !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Tel n’était pas le cas auparavant. Voyez l’exemple du lait : le prix des céréales augmente, celui des protéines fourragères aussi, mais le prix d’achat du lait n’est pas renégocié et le résultat net des producteurs laitiers diminue. C’est ainsi que l’on a abouti à la crise du début de 2013, qu’il a fallu résoudre par la médiation.
Nous nous efforçons donc de faire en sorte que l’évolution des coûts de production agricole se répercute au niveau du transformateur, puis à celui du grand distributeur. Telle est la démarche que nous devons adopter ! Nous ne pouvons pas laisser le jeu de la concurrence entre grands distributeurs empêcher la prise en compte de la réalité des coûts de production, c’est-à-dire des prix du marché. Lorsque le prix des protéines végétales augmente de 20 % à 30 % sans que le prix du lait bouge, ni pour les transformateurs ni pour la grande distribution, il y a un problème !
M. Didier Guillaume, rapporteur. Et voilà !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Nous avons changé les choses à cet égard. La clause « miroir », instaurée par la loi relative à la consommation pour permettre la prise en compte des augmentations des coûts de production dans les prix payés par les grands distributeurs aux transformateurs, concernera désormais également les relations commerciales entre producteurs et transformateurs.
L’ensemble de ces éléments renforcent de manière certaine les moyens de contrer des logiques extrêmement destructrices pour l’appareil de production français.
Si l’on veut aller au-delà par la loi, on se heurtera toujours au problème du contournement de celle-ci : on l’a vu à propos des marges arrière.
M. Roland Courteau. Exactement !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Et je ne parle même pas de la question fiscale, sur laquelle il y aurait beaucoup à dire !
Pour pouvoir changer réellement les choses, nous devons maintenir une approche cohérente, adopter une stratégie claire. De simples articles techniques ne sauraient suffire : une cohérence d’ensemble du dispositif législatif est nécessaire.
Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à ces amendements. De telles mesures resteraient, en définitive, sans effet ! Je préfère, je le redis, conserver une cohérence globale au dispositif.
Depuis mon arrivée au ministère de l’agriculture, ma démarche est restée la même : lorsque des problèmes sont survenus, j’ai réuni tout le monde autour de la table, sans pointer quiconque du doigt. À la fin de l’année 2012, lorsque j’ai rassemblé tous les acteurs de la filière laitière, les missiles ont volé à travers la salle pendant plus d’une heure… La grande distribution renvoyait les éleveurs vers les céréaliers, et refusait d’augmenter le prix du lait. L’industrie laitière estimait qu’elle payait déjà le lait assez cher et rejetait la responsabilité de la crise sur la grande distribution. Quant aux producteurs, confrontés à de grandes difficultés, ils avaient le sentiment que l’on se moquait d’eux…
Votre question était : que proposez-vous ? Ma réponse est que, grâce à tous ces outils, nous avons établi une nouvelle stratégie, que nous devons maintenant conforter.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec beaucoup d’attention. Je vous rejoins lorsque vous affirmez qu’il faut mettre en place un dispositif global, avec la contractualisation, les organisations de producteurs, le médiateur, et que ce ne sont pas des interventions au coup par coup qui permettront de résoudre les problèmes.
M. Gérard César. Tout à fait !
M. Daniel Dubois. Je rappelle au passage que j’avais proposé la création du médiateur par le biais d’un amendement au projet de loi de modernisation de l’économie. J’étais déjà persuadé qu’il était nécessaire de disposer d’une telle instance pour prévenir les conflits.
Malgré tout, il me semble que, dans votre vision globale, il manque deux éléments, l’un en amont, l’autre en aval.
En amont, pour mieux anticiper les difficultés, l’Observatoire des prix et des marges devrait, à mon sens, être compétent en matière de distorsions de concurrence. Un observatoire de la distorsion de concurrence a d’ailleurs existé par le passé, mais il a été supprimé.
M. Gérard César. En effet !
M. Daniel Dubois. En aval, il faut prévoir des pénalités suffisantes pour sanctionner les dérives. Ne conviendrait-il d’ailleurs pas de faire intervenir le consommateur pour sanctionner ceux qui ne jouent pas le jeu, comme savent très bien le faire les Anglo-Saxons ? Pour l’heure, les pénalités sont tellement faibles qu’elles ne sont pas dissuasives. Imposons la transparence en publiant, sur le site de l’Observatoire des prix et des marges, la liste des contrevenants. De telles informations doivent être accessibles. Les consommateurs pourraient alors en tirer les conséquences et infliger eux-mêmes la sanction, en cessant de fréquenter les enseignes concernées.
Monsieur le ministre, la démarche globale que vous venez d’exposer gagnerait ainsi en efficacité. Je le répète, je l’approuve pleinement, mais il faut encore l’affiner quelque peu !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Nous nous trouvons ici à la frontière de la loi d’avenir pour l’agriculture et de la loi relative à la consommation. Je suis d’ailleurs étonné que le consommateur n’ait pas été davantage évoqué dans ce débat, à côté des producteurs, des transformateurs et des distributeurs ! (Marques d’approbation sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.) À cet égard, Gérard Le Cam a raison de souligner que les clients des grandes surfaces sont en quelque sorte des consommateurs captifs, pour des raisons économiques. (Mme Mireille Schurch acquiesce.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je souhaite simplement vous dire, monsieur le ministre, que je suis d’accord avec vous ; en particulier, je considère moi aussi qu’il faut agir en amont et que c'est par le renforcement des filières agricoles que nous pourrons répondre à la grande distribution.
En revanche, je ne crois pas du tout – je prie mes collègues auteurs des amendements concernés de bien vouloir m’en excuser – à l’efficacité des mesures tendant à réglementer les rabais, les ristournes et les remises en aval de la production. Pour avoir travaillé dans la grande distribution, je sais bien comment les choses se passent : les distributeurs trouvent toujours des moyens de contourner la loi ! Il en a été ainsi pour la loi Galland, que vous avez mentionnée, monsieur le ministre. Cela étant, cette situation a un aspect positif, puisqu’elle a permis aux distributeurs français de devenir extrêmement puissants et de se hisser au tout premier plan mondial.
Selon moi, c'est donc en amont, en confortant les filières de production, que nous trouverons des solutions.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard César, pour explication de vote.
M. Gérard César. Je suis moi aussi tout à fait en phase avec le ministre. Lorsque nous avons mis en place l’Observatoire des prix et des marges, nous pensions que cela suffirait à assurer une bonne information sur la réalité des relations commerciales. Ne pourrait-on pas créer un groupe de travail pour examiner ce que fait l’Observatoire des prix et des marges ?
Par ailleurs, on ne parle pas assez des organisations de producteurs. Ceux-ci doivent aussi s'organiser pour peser d’un poids suffisant face à la grande distribution.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Mme Primas a évoqué la créativité de la grande distribution. J’envisage de déposer un amendement au prochain projet de loi de finances, visant à rendre celle-ci éligible au crédit d’impôt-recherche… (Sourires.)
Plus sérieusement, pour répondre à une suggestion de M. le rapporteur, j’indique que je suis prêt à demander l’organisation d’une audition pour faire le point sur le fonctionnement de l’Observatoire des prix et des marges. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.
M. Gérard Bailly. Je crois que nous ne pourrons pas trancher cette question fort importante de la rémunération des chacun des acteurs, en particulier les producteurs, à l’occasion de l’examen du présent projet de loi.
J’ai déjà lancé un appel à la commission des affaires économiques pour créer le groupe de travail que vient d’évoquer à son tour M. César.
M. Gérard César. Oui, absolument !
M. Gérard Bailly. J’aimerais que nous puissions engager une véritable réflexion sur ce sujet.
Je voudrais en outre réagir aux propos de Mme Primas.
Dans ma région, la filière du comté, qui produit 58 000 tonnes de fromage par an, est très bien organisée. Cependant, malgré cela, le déréférencement reste une arme au service de la grande distribution. Leclerc l’a employée contre un affineur très important, dont je ne citerai pas le nom, qui refusait de baisser ses prix. Ce professionnel m'a dit que si un autre distributeur avait brandi la même menace, il aurait été bien obligé d’en passer par une baisse de prix.
Je le répète, je souhaiterais vraiment qu’une réflexion sur ces sujets puisse s’engager. Je pense que le président Raoul nous a entendus !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.
M. Jean Bizet. Ayant bien entendu les propos des uns et des autres, je vais retirer l’amendement n° 410 rectifié, ainsi que, par anticipation, l’amendement n° 411 rectifié, qui lui est lié.
Je le redis, l’idéal serait de préciser encore la rédaction de l’amendement n° 605 de M. Le Cam, sous-amendé par la commission, afin de viser les produits alimentaires frais fabriqués à partir d’éléments de base tels que le lait, la viande ou les légumes. Je fais confiance à M. le ministre pour élaborer un décret établissant la liste de ces produits.
M. le ministre a souligné à juste titre les vertus de la négociation. Je rappelle que M. Le Maire était parvenu, en mai 2011, à obtenir que, pour un ensemble de filières, une table ronde réunisse automatiquement les acteurs en cas d’augmentation durable de plus de 10 % du prix des matières premières. Or la première de ces réunions s’est soldée par un échec, une des trois centrales d’achat n’ayant pas été au rendez-vous, malgré l’engagement pris. Par conséquent, comme l’a dit M. Dubois, il faut à la fois la carotte et le bâton.
Mme la présidente. L'amendement n° 410 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 608 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 7 (suite)
Mme la présidente. Nous en revenons, à l’article 7, à l’amendement n° 605, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et dont le vote a été précédemment réservé. J’en rappelle les termes :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le début du premier alinéa de l’article L. 441-2-1 du code de commerce est ainsi rédigé : « Pour les produits alimentaires, un distributeur, une centrale d’achat, une centrale de référencement ou un groupement d’achat un distributeur, prestataire de services... (le reste sans changement) »
Le sous-amendement n° 855, présenté par M. Guillaume, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
produits alimentaires
par les mots :
produits alimentaires figurant sur une liste établie par décret
La parole est à M. Didier Guillaume, rapporteur.
M. Didier Guillaume, rapporteur. Il s’agit de permettre l’extension de l’interdiction des 3 R, qui concerne aujourd'hui les seuls produits périssables. Le sous-amendement prévoit qu’un décret fixera la liste des produits alimentaires entrant dans le champ de cette interdiction. Il convient en effet de ne pas interdire les 3 R pour certains produits, tels que les sodas. Peut-être M. le ministre pourra-t-il prendre en compte la suggestion de M. Bizet lors de la rédaction de ce décret.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Charles Revet. Le Gouvernement est prudent !
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je ne voterai pas ce sous-amendement. En effet, j’estime que nous ne pouvons pas, en quelques instants, prendre une décision dont nous ne mesurons absolument pas les conséquences. L’interdiction portera sur un ensemble de produits beaucoup trop large, qui ne sera défini qu’ultérieurement, par décret.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 605, modifié.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 7 (suite)
Mme la présidente. L'amendement n° 411 rectifié, présenté par MM. Bizet, Houel, Lefèvre et Revet, est ainsi libellé :
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du 1° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce est ainsi rédigée :
« De pratiquer à l’égard d’un partenaire économique ou d’obtenir de lui des prix, des délais de paiement, des conditions de vente ou des modalités de vente ou d’achats discriminatoires et non justifiés par des contreparties réelles en créant de ce fait, pour ce partenaire, un désavantage ou un avantage dans la concurrence. »
Cet amendement a été retiré.
L'amendement n° 607, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le cadre de la contractualisation des relations commerciales, les conditions du déférencement sont encadrées par décret.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement vise à prévoir que les conditions du déréférencement soient encadrées par décret.
Plus largement, je me réjouis des avancées permises par ce débat, au bénéfice des agriculteurs, et je salue l’idée de créer un groupe de travail, qui pourrait notamment réfléchir à la mise en place d’une fiscalité incitative ou coercitive, pour faire en sorte que la grande distribution achète aux meilleurs prix aux producteurs locaux. En travaillant ensemble, nous pourrons obtenir encore de réelles avancées pour la profession agricole.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. La commission ne peut qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement d’appel : cela ne peut pas marcher, monsieur Le Cam, et vous le savez bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Le Cam, l'amendement n° 607 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 607 est retiré.
Article 7 bis
La transformation d’un syndicat agricole régi par le titre III du livre Ier de la deuxième partie du code du travail, désigné en application de l’article L. 653-10 du code rural et de la pêche maritime, en une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou par la loi locale maintenue en vigueur dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin n’emporte pas la création d’une personne morale nouvelle. Les agréments, habilitations, aides ou avantages financiers directs ou indirects et les conventions en cours bénéficient à l’association issue de la transformation.
Les bénéfices en sursis d’imposition, les plus-values latentes incluses dans l’actif du syndicat et les profits non encore imposés sur les stocks ne font pas l’objet d’une imposition immédiate, à la double condition qu’aucune modification ne soit apportée aux écritures comptables et que l’imposition desdits bénéfices, plus-values et profits demeure possible sous le nouveau régime fiscal applicable à l’association.
Le présent article s’applique aux transformations réalisées entre la date de promulgation de la présente loi et le 31 décembre 2019.