Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Par conséquent, je lève le gage.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 24 rectifié.

Veuillez poursuivre, madame la secrétaire d’État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. L’amendement n° 114 rectifié, présenté par M. Barbier, a le même objet et recueille donc également l’avis favorable du Gouvernement, qui lève le gage, étant entendu que cet amendement sera de toute façon satisfait si l’amendement n° 24 rectifié est adopté.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 114 rectifié bis.

Veuillez poursuivre, madame la secrétaire d’État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. L’amendement n° 22 rectifié tend à rehausser le niveau d’encadrement de la présence du stagiaire. Madame Cohen, nous avons débattu il y a quelques instants d’amendements similaires. Je suis d’accord sur ce point avec Mme Férat : il faut préserver une certaine souplesse dans l’organisation du temps de présence du stagiaire, afin que ce dernier puisse effectivement prendre part à l’activité de son organisme d’accueil dans des conditions semblables à celles des autres professionnels.

M. Charles Revet. Vous voyez, madame Férat, il ne faut jamais désespérer ! (Sourires sur les travées de l'UMP et de l’UDI-UC.)

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. La rédaction actuelle des alinéas 35 à 40 assure cette souplesse tout en garantissant aux stagiaires une durée de présence respectant les règles applicables aux salariés de l’organisme d’accueil. Cette durée ne pourra naturellement pas excéder le plafond applicable aux salariés.

L’idée est bel et bien de calquer la vie du stagiaire sur celle de l’ensemble des professionnels de l’entreprise, en particulier de ceux qui assurent son suivi. À nos yeux, ces dispositions sont suffisantes pour éviter les abus et pour assurer un temps et des modalités de présence compatibles avec les objectifs pédagogiques du stage. Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Les amendements nos 120 rectifié et 128 rectifié tendent à supprimer les règles du présent texte relatives à l’alignement de la présence des stagiaires sur celles des salariés de l’entreprise en matière de travail de nuit, de repos quotidien et hebdomadaire, de jours fériés et de durée du travail.

Il nous semble nécessaire d’indiquer quelles règles sont applicables aux stages en matière de temps de présence plutôt que de tout renvoyer à la seule convention de stage. La souplesse ne signifie pas une ouverture trop large ! Je ne peux donc qu’être défavorable à ces amendements.

Je signale que, d’après l’INSEE, les stagiaires effectuent en moyenne davantage de travaux de nuit que les salariés. (Mme Françoise Férat et M. Yves Pozzo di Borgo le contestent.) C’est la réalité des faits ! Le taux de travail de nuit est, pour les stagiaires, de quatre points supérieur à celui des salariés. Cette situation n’est pas normale et nous devons y mettre un terme.

L’amendement n° 118 rectifié vise à revenir à la rédaction initiale des dispositions encadrant le temps de présence des stagiaires, en supprimant la limitation aux 35 heures. Si le temps de travail pour l’ensemble des salariés est de 32 ou de 39 heures, il en sera de même pour les stagiaires. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement, pour les raisons que j’ai déjà exposées.

Avec une telle disposition, l’amendement n° 25 rectifié sera satisfait : étant donné que le temps de travail est inférieur à 35 heures pour la plupart des salariés, elle profitera à la majorité des stagiaires. Il s’agit là d’une légère divergence d’appréciation avec M. le rapporteur.

(M. Charles Guené remplace M. Jean-Pierre Raffarin au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Charles Guené

vice-président

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote sur l'amendement n° 123 rectifié.

Mme Catherine Procaccia. Contrairement au congé parental, qui est court, le congé de maternité dure grosso modo quatre mois. Un stage de six mois, c’est-à-dire la durée maximale, peut-il être validé malgré quatre mois de congé de maternité ? Ou bien n’est-il considéré que comme un stage de deux mois ? C’est une simple interrogation.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Il n’y a pas de stages pour les éléphants et, chez les humains, la grossesse dure généralement neuf mois. (Sourires.)

Mme Catherine Procaccia. Nous sommes d’accord ! (Nouveaux sourires.)

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Il n’est, bien sûr, pas envisageable de faire travailler, fût-ce en stage, des jeunes femmes enceintes de huit mois, de huit mois et demi ou de neuf mois.

Nous y reviendrons dans la suite de nos débats, la présente proposition de loi permet la validation de stages à titre partiel.

De surcroît, la convention de stage sera à l’avenir tripartite : elle sera conclue entre l’entreprise, le stagiaire – en l’occurrence, la stagiaire – et l’établissement de formation. Dans ce cadre, il sera possible de convenir d’un report de la partie du stage qui n’a pu être effectuée du fait d’un congé de maternité.

Les deux possibilités sont donc offertes, à charge pour les parties à la convention de stage de préciser quelle option est retenue.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 24 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 114 rectifié bis est satisfait.

Je mets aux voix l'amendement n° 22 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 120 rectifié et 128 rectifié.

Mme Françoise Férat. En l’espèce, nous revenons à l’organisation du temps de travail du stagiaire selon les spécificités de l’entreprise. Mme Procaccia a fort bien expliqué la situation en présentant son amendement, je n’y insiste pas.

Il s’agit, madame la secrétaire d’État, d’un amendement de bon sens. Or j’ai le sentiment que nous ne vivons pas dans le même monde ! Les propos que vous avez tenus tout à l'heure sur le travail de nuit, comme lors d’autres interventions, me laissent à penser que les maîtres de stage sont des négriers !

Je vous invite, avec sincérité, à venir dans mon département. Je vous ferai visiter des entreprises, dont l’organisation est différente. Vous constaterez alors que cette diversité n’est pas le fruit de la malice des chefs d’entreprise. Mme Procaccia l’a déjà indiqué : rien ne serait plus inutile que la présence de stagiaires au moment où leur formateur est absent !

Je vous ferai rencontrer des maîtres de stage qui n’abusent pas de leurs stagiaires, pour reprendre vos propos, mais qui prennent le temps, au contraire, d'être de véritables formateurs, avant tout dans l’intérêt des jeunes.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Je tiens tout d’abord à vous rassurer, madame Férat : ayant travaillé dix ans dans le privé – six ans dans une start-up, un peu moins longtemps dans une grande entreprise et un laps de temps encore plus court dans une structure associative –, je connais à peu près toutes les configurations possibles en matière de cadre de travail.

Je nourris une grande estime à l’endroit des chefs d’entreprise – je n’oublie pas évidemment les salariés –, qui participent au développement de notre pays et créent des emplois. Je refuse donc le procès qui est bien trop souvent fait à la gauche et qui s’appuie sur des idéologies à mon sens bien dépassées.

M. Yves Pozzo di Borgo. On voit pourtant le résultat : c’est le chômage !

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Si vous comptiez le nombre d’entreprises que j’ai visitées, ou au sein desquelles j’ai travaillé, et qui ne soulèvent aucune difficulté, vous n’en sortiriez sans doute pas gagnants !

Madame Férat, je vous réitère mon invitation : venez visiter les nombreuses entreprises de mon département, l’Isère. Elles sont de toutes tailles, ne fonctionnent ma foi pas si mal, et certaines abritent même des membres éminents des organisations patronales.

Quel est l’esprit de la proposition de loi ? Un stagiaire doit vivre les mêmes horaires de travail que ceux du tuteur qui l’encadre. Ainsi, si le temps de travail est de 32 heures dans l’entreprise, il travaillera 32 heures. Il en va de même si la durée du travail est de 39 heures ou de 35 heures, ce qui est le plus souvent le cas.

Il n’y a aucune raison de laisser toute liberté à l’entreprise ! En témoignent les chiffres dont nous disposons : ils montrent que les stagiaires sont plus nombreux que les salariés à travailler de nuit. Et nous pouvons nous accorder à considérer que cette situation est absolument anormale.

La disposition en cause signifie non pas que l’on ne fasse pas confiance aux entreprises, mais que l’on cherche à réguler et à éviter les abus, néfastes pour l’image des entreprises, laquelle doit être attractive si nous voulons que notre pays se développe et que les jeunes, titulaires d’un BTS, d’un DUT, d’une licence ou d’un doctorat, se dirigent vers le secteur privé, pour lequel, je le répète, j’ai la plus grande estime.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je sollicite un éclaircissement, à la fois pour moi et pour nos nombreux concitoyens, qui suivent nos débats sur leur écran de télévision ou d’ordinateur, en particulier quand je suis en séance, selon mes amis, en tout cas ! (Sourires.)

Madame la secrétaire d’État, la statistique de l’INSEE que vous avez citée selon laquelle les stagiaires font plus d’heures de travail de nuit que les salariés m’a surpris.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Nous aussi !

M. Jean Desessard. Quelle méthode statistique l’INSEE a-t-il retenu ? Il s’agit bien d’une recherche pointue : on étudie le nombre de stagiaires qui travaillent de nuit par rapport à celui de salariés de l’entreprise.

M. Jean-Pierre Caffet. L’INSEE fait des études pointues !

M. Jean Desessard. Ma question l’est tout autant : quels sont les secteurs ou les entreprises concernés ?

Si je comprends bien, on entre dans l’entreprise le soir et on constate que ce sont les stagiaires qui travaillent, ou qui sont plus nombreux que les salariés qui, eux, travaillaient dans la journée ! Comme je n’ai jamais disposé de cette information, je n’ai pas eu le temps d’y prêter attention. Or cette donnée me surprend considérablement.

Madame la secrétaire d’État, je vous prie de nouveau de m’éclairer, tout comme le Sénat tout entier et nos concitoyens qui suivent nos travaux ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Caffet. Et tous les Français !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, le chiffre que j’ai cité résulte de l’une des enquêtes Emploi que l’INSEE mène régulièrement, en diffusant des questionnaires. Je vous ferai volontiers parvenir la fiche en question, qui montre que les stagiaires sont plus nombreux que les salariés à travailler la nuit. Nous avons nous-mêmes été extrêmement surpris.

M. Charles Revet. Cela paraît en effet pour le moins surprenant !

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. C’est pourtant bien le résultat de l’enquête Emploi de l’INSEE !

Mme Catherine Génisson. Cela signifie que les stagiaires travaillent sans être encadrés !

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. C’est effectivement la conclusion que nous en avons tirée !

Mme Catherine Génisson. En somme, ils font le travail à la place des salariés !

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Il ne s’agit pas pour autant de stigmatiser les entreprises, pas plus que les organismes ou associations qui peuvent également être concernés. Tous les secteurs, le secteur public, celui de l’économie sociale et solidaire, ou encore le secteur privé connaissent des abus.

Notre objectif est, au contraire, de réguler et de mettre fin aux abus, afin de réhabiliter les lieux de travail en général auprès des jeunes. Et nous en avons besoin !

Monsieur le sénateur, je vous enverrai ce document, que vous pourrez alors partager avec vos collègues.

M. Jean Desessard. Vous êtes formidable, madame la secrétaire d’État ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Madame la secrétaire d’État, je souhaite obtenir une précision.

Vous nous avez dit que, dans une entreprise où la durée hebdomadaire de travail est de 32 heures, les stagiaires se verraient appliquer la même règle. Dans ce cas-là, quel sera le montant de leur gratification ? J’ai déposé, vous vous en souvenez, un amendement qui visait à ce que ce dernier, aujourd’hui de 436 euros mais que nous avons augmenté, soit maintenu, quel que soit le nombre de jours travaillés. Vous vous y étiez alors opposée, souhaitant que continue à s’appliquer un forfait basé sur les horaires.

Dans ces conditions, si un stagiaire travaille 32 heures, lui appliquera-t-on une décote ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, ce montant, que les membres de votre assemblée ont modifié lors de la dernière séance consacrée à l’examen du présent texte, constitue un plancher. Rien n’empêche de prévoir une somme supérieure dans une convention de stage. Calculée sur un taux horaire, en l’absence de dispositions spécifiques dans la convention, la gratification versée pour un travail de 32 heures sera effectivement moins élevée que celle qui est octroyée pour un travail de 35 heures et il en sera de même de celle-ci par rapport à une gratification correspondant à un travail de 39 heures.

L’esprit du texte est bien de calquer la situation du stagiaire sur celle qui est en vigueur dans l’organisme d’accueil ; il serait donc bon que de se caler sur les conventions existantes.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 120 rectifié et 128 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'amendement n° 118 rectifié.

Mme Laurence Cohen. Lorsqu’elle a donné l’avis du Gouvernement, Mme la secrétaire d’État s’est déclarée favorable à cet amendement et a affirmé que, s’il était adopté, l’amendement n° 25 rectifié serait satisfait. Je ne comprends pas ! Aussi, je souhaite obtenir une explication.

En effet, à mon sens, l’amendement n° 25 rectifié est beaucoup plus protecteur, puisqu’il vise une convention collective plus favorable aux stagiaires. L'amendement n° 118 rectifié, quant à lui, me semble nettement moins favorable, car il tend à ce que le stagiaire s’adapte à la situation de l’entreprise, quelle que soit la convention collective en vigueur.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. J’interviens non pas au nom de la commission, mais en mon nom propre. Je regrette que M. Barbier souhaite revenir sur la disposition adoptée en commission.

Tout d’abord, quel serait l’intérêt pédagogique de faire travailler un stagiaire 39 heures et non 35 heures, conformément à la durée légale du travail ? Ayant une certaine expérience en la matière, je persiste, je m’interroge. J’attends donc une explication.

Certaines de mes interrogations rejoignent celles de Mme Procaccia. Le texte initial qui avait été soumis à la commission disposait : « Le temps de présence du stagiaire fixé par la convention de stage ne peut excéder la durée de travail des salariés de l'organisme d'accueil. » Cette mesure pouvait paraître satisfaisante.

Toutefois, l’organisme d’accueil peut pratiquer une durée de travail bien supérieure : des dispositions du code du travail permettent de déroger aux 35 heures.

M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. On peut ainsi travailler 10 heures par jour, 44 ou 48 heures sur douze semaines, voire 60 heures ! Doit-on alors appliquer au stagiaire ces dérogations ? Est-ce utile et pédagogique ?

Si la convention de stage ne prévoit pas de prendre en compte ce dépassement horaire, que se passera-t-il concernant la rémunération ? Outre la gratification prévue, le stagiaire ne recevra pas de somme supplémentaire pour le temps en plus passé dans l’entreprise.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Si !

M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. J’aimerais avoir des précisions sur ce point, parce que cela ne figure nulle part.

Mme Laurence Cohen. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. En tout état de cause, si un éducateur n’accepte de signer une convention de stage qu’à partir du moment où le stagiaire qui travaillera 44 heures par semaine pendant douze semaines sera un peu mieux gratifié, je ne suis pas véritablement convaincu de l’opportunité de cette mesure sur le plan pédagogique.

Le stagiaire est un stagiaire ; on doit lui ménager un temps de repos. En dehors de son stage, il a aussi d’autres choses à faire : il peut vouloir travailler ses cours en vue de l’obtention de son diplôme, et certains exercent des petits boulots à côté, qu’ils risquent de perdre si on leur demande de travailler durant de telles amplitudes horaires.

Pour ma part, je suis donc très réservé sur ce point. Je considère que la durée légale du temps de travail, à savoir 35 heures, est tout à fait appropriée à un stagiaire. C'est la raison pour laquelle nous avions voté cette disposition en commission.

Mmes Laurence Cohen et Isabelle Pasquet. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Il y a là effectivement une divergence de vues entre nous.

Le texte initial prévoyait bien – et tel est l’esprit qui le sous-tend ! – que la convention collective de l’organisme d’accueil s’appliquait au stagiaire. Il s’agit bien entendu d’un taux horaire. D’ailleurs, vous le savez bien, monsieur le rapporteur, puisque la commission a modifié ce taux horaire, afin d’augmenter la gratification en conséquence. La gratification est donc fixée en fonction du taux horaire. Dans le cas où l’activité du stagiaire serait supérieure à 35 heures, les heures supplémentaires seront bien entendu prises en compte dans la gratification. (M. le rapporteur fait une moue dubitative.) C’est tout à fait évident !

Il existe, il est vrai, une divergence entre la proposition de loi initiale et le texte tel que l’a modifié la commission.

Madame Cohen, je vous disais simplement précédemment que si vous envisagiez d’adopter l’amendement n° 118 rectifié – mais il me semble que vous n’en êtes pas encore complètement convaincue ! (Sourires.) –, l’amendement n° 25 rectifié deviendrait de fait sans objet. Qui peut le plus peut le moins : si l’on s’adapte à la durée de travail pratiquée dans l’organisme d’accueil, généralement de 35 heures, on s’adapte aussi à des durées inférieures.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. J’aimerais aussi avoir une précision.

Vous nous avez dit tout à l'heure, madame la secrétaire d’État, qu’un stagiaire ne peut pas être assimilé à un salarié. Dans ce cas, on ne peut pas lui imposer les horaires de l’entreprise, car cela reviendrait précisément à procéder à une telle assimilation.

C’est pour cette raison que la commission a modifié le texte initial qui lui a été soumis. Nous pensons que la durée légale du temps de travail de 35 heures doit s’appliquer au stagiaire. On ne saurait assimiler ce dernier à un salarié dans certains cas, et dire le contraire dans d’autres.

C’est pourquoi je soutiens la position du rapporteur et je le rejoins dans son avis défavorable sur l’amendement n° 118 rectifié. Considérant ce que vous nous avez dit, le stagiaire ne saurait être considéré, je le répète, comme un salarié.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je vais défendre le Gouvernement ! (Sourires.)

M. Jean Desessard. Madame Cohen, vous avez argué du fait que l’amendement n° 25 rectifié est plus protecteur que l’amendement n° 118 rectifié. Mais on ne peut pas dire que, concernant la durée de son temps de travail, un stagiaire doit être protégé, ou alors ce n’est plus un stagiaire !

Vous ne voulez pas qu’il travaille 39 heures, vous voulez le protéger, comme s’il était exploité. Cela pose un problème : on entre là dans le cadre du statut de salarié apprenti ; il ne s’agit plus de celui de stagiaire.

Je vais vous dire, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles je défends la position de Mme la ministre.

Imaginez que le stagiaire en déplacement toute la journée avec son tuteur veuille revenir le soir avant l’équipe au motif qu’il a déjà fait ses 35 heures !

Mme Catherine Procaccia. Tout à fait !

M. Jean Desessard. On se rend bien compte du problème que cela pose.

M. Charles Revet. C’est une question de bon sens !

M. Jean Desessard. Et il ne s’agit pas simplement d’un problème pratique. Quand on est stagiaire – c’est ainsi que je l’ai vécu et que je le conçois ! –, on fait partie d’une équipe.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. C’est un stage ! Ce n’est pas un travail !

M. Jean Desessard. On ne peut pas partir avant les autres ! Durant cette période de stage d’un mois ou de deux, on doit supporter les mêmes conditions de travail que les salariés. Si le stagiaire est exploité, comme les salariés de l’organisme d’accueil, vous auriez raison, cher rapporteur et chers collègues. Mais, normalement, il a un statut de stagiaire. Certes, on ne lui demande pas le même rendement qu’à un salarié, mais il vit au même rythme justement pour se faire une idée de l’entreprise.

En ce sens, je comprends très bien la position de Mme la secrétaire d’État : le stagiaire doit s’adapter au rythme de l’entreprise. Si on lui demande de travailler 60 heures par semaine, je suis d’accord avec vous, monsieur le rapporteur, il s’agit effectivement d’un abus. Mais si on lui demande de faire partie d’une équipe, sans être soumis, je le répète, au même rendement qu’un salarié, je ne suis pas choqué par cette proposition.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

M. Gilbert Barbier. Je n’ai pas grand-chose à ajouter aux propos de M. Desessard, qui a parfaitement décrit ce qui peut se passer.

Dans une entreprise, on voit mal un stagiaire dire, après une journée de travail de 10 heures, qu’il a fait son quota d’heures. De plus, les salariés qui font des heures supplémentaires, qui travaillent 40 ou 60 heures par semaine, bénéficient, à un moment ou à un autre, de jours de récupération. Le stagiaire, lui, sera toujours stagiaire. Que fera-t-il pendant ces jours ?

Selon moi, le stagiaire est dans l’entreprise pour regarder comment on travaille. Dans le cadre de son stage, il doit s’adapter à l’entreprise qu’il a choisie. C’est à lui de voir si les horaires lui conviennent.

Comme l’a relevé notre collègue Jean Desessard, j’imagine mal un stagiaire dire, dans le cadre d’un déplacement ou même au sein d’un atelier, alors qu’il est en train de regarder ce qui se fait : « j’ai fait mes 35 heures, je m’en vais, peu importe ce qui se passera ensuite. » Ce n’est pas de cette façon que les jeunes pourront tirer profit de leur stage. Ils sont là, je le répète, pour observer le travail réalisé dans l’entreprise.

M. le président. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.

M. Charles Revet. Je soutiens, moi aussi, le présent amendement.

Il faut être logique, pratique : les jeunes rencontrent des difficultés pour trouver des stages parce que les artisans ou les entreprises du bâtiment, par exemple, expliquent qu’ils n’ont pas de temps à leur consacrer. Ils avancent de surcroît parfois le fait que les jeunes ne pourront pas rester deux heures de plus par jour pour refuser le stage.

Je partage les propos de nos collègues Jean Desessard et Gilbert Barbier. Dès lors qu’il apprend un métier, le stagiaire doit en découvrir tous les aspects. Il ne s’agit pour autant, bien sûr, de lui imposer des horaires extravagants. Je pense que c’est important. C’est pourquoi je voterai l’amendement n° 118 rectifié.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.

Mme Isabelle Pasquet. Je veux simplement préciser que le rythme de travail du stagiaire ne se décompte pas de la même façon que celui d’un salarié. Pour ce dernier, il s’apprécie sur l’année ; sont pris en considération les jours de récupération, les repos compensateurs, les congés payés. Tout cela est refusé au stagiaire.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Non !

Mme Isabelle Pasquet. On ne peut donc pas calquer les journées de travail des stagiaires sur celles des salariés qui sont, je le répète, décomptées sur l’année, contrairement aux stagiaires, qui sont dans l’entreprise pour une période beaucoup plus réduite.

C'est la raison pour laquelle nous ne sommes pas d’accord avec l’amendement de M. Barbier et que nous préférons notre amendement n° 25 rectifié.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. La priorité est à l’emploi et au développement économique, nous en sommes, je pense, tous convaincus, et le combat est immense. Comme l’a dit avec conviction notre collègue Jean Desessard, les stagiaires doivent apprendre à connaître réellement le monde des entreprises, y compris les métiers difficiles, tels ceux du secteur du bâtiment et des travaux publics.

Par conséquent, à un moment donné, il faut dépasser certaines idées et apporter une certaine souplesse en matière d’amplitude horaire, afin de prendre en considération toutes les contraintes de l’entreprise, tout en restant, bien entendu, dans le cadre du code du travail, dont on mesure toute la complexité.

Il faut vraiment, je le répète, que les stagiaires connaissent le monde des entreprises. Il y va de l’avenir de celles-ci.

C’est pourquoi je soutiendrai également cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Mme Catherine Génisson. Au risque de contrarier M. le rapporteur et mes collègues du groupe CRC, je voterai cet amendement, et l’argument avancé par Mme Pasquet me conforte dans cette idée.

Le stagiaire travaille en collaboration avec un tuteur. Quand ce dernier bénéficiera de jours de récupération ou de dispositifs prévus dans le code du travail, le stagiaire en bénéficiera aussi de fait.

Nombre d’entre nous ont accueilli des stagiaires : ceux-ci sont contents de travailler à côté de leur tuteur,…

M. Charles Revet. Bien sûr !

M. Jean Desessard. Et voilà !

Mme Catherine Génisson. … y compris un peu plus de 35 heures. Même si on les contraint à se soumettre à cette durée légale, certains d’entre eux iront au-delà, ce qui posera des problèmes en termes d’assurance : ils ne seront plus légalement couverts.

Aussi, si l’on veut faire en sorte que le stage soit véritablement bénéfique aux stagiaires, il convient d’adopter l’amendement n° 118 rectifié, qui me semble tout à fait satisfaisant.