M. Jean-Louis Carrère. Bien sûr !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Les problématiques, tant budgétaires que de cohésion territoriale, auxquelles sont confrontés les départements, que chacun ici défend, existent depuis des années ; elles ne sont pas apparues avec le présent texte. Vous-même, madame Escoffier, le savez parfaitement, eu égard aux fonctions ministérielles qui ont été les vôtres pendant deux ans et à votre qualité d’élue de l’Aveyron.
Ces questions doivent donc être pleinement prises en compte par le Parlement. Pour ma part, je suis convaincu que le Sénat, quelle que soit d’ailleurs sa majorité à l’issue du renouvellement de septembre, y répondra et améliorera ce projet de loi, notamment en ce qui concerne l’avenir des conseils généraux.
Remarquez que je parle ici des conseils généraux, et non des départements : ceux-ci sont au cœur de la République ; du reste, la réforme de l’État territorial conduite par le ministre de l’intérieur, qui a présenté une communication sur ce sujet au conseil des ministres d’hier, est précisément inspirée par le souci de renforcer les politiques interministérielles de proximité autour du préfet de département. Nous mettrons bien entendu à profit la réforme des régions pour mener une importante réforme de l’État, car celui-ci doit donner l’exemple.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le débat sur l’avenir des territoires ruraux et de leurs conseils généraux, au sein des grandes régions et au côté des grandes agglomérations, sera central. Le Gouvernement sera extrêmement attentif et ouvert aux propositions du Parlement, dont je ne doute pas un seul instant de la capacité d’imagination ! J’ai déjà eu l’occasion de le dire, c’est pourquoi je m’étonne parfois de certaines réactions.
L’exemple du département du Rhône peut-il inspirer d’autres expérimentations, d’autres avancées ? Sans aucun doute. Faut-il conserver des départements ruraux tandis que l’on irait vers la disparition des conseils généraux dans les territoires plus urbanisés ? Ces questions sont ouvertes : on le voit bien dans les grandes métropoles, notamment à Paris. Le débat permettra de les aborder. Il faut inventer un chemin. Madame Escoffier, je ne reprendrai pas la formule que vous avez empruntée à différents auteurs – je m’étonne d’ailleurs que vous n’ayez pas cité François Mitterrand, qui l’avait choisie pour slogan de l’une de ses campagnes –, mais je suis convaincu qu’il va falloir faire preuve d’imagination.
Parce que le sujet est compliqué, parce qu’il faut du temps pour transférer des compétences et des agents,…
M. Gérard Larcher. Vous l’avez dit : il faut du temps !
M. Manuel Valls, Premier ministre. … parce que, pour des raisons constitutionnelles, nous ne pouvons pas supprimer le conseil général, parce que, venant de toutes les travées du Sénat, des propositions différentes ont été formulées – certains préconisant un nouveau mode de scrutin, d’autres préférant conserver celui qui a été adopté il y a quelques mois, d’autres encore suggérant la création d’une assemblée des intercommunalités –, il est manifestement nécessaire d’inventer quelque chose.
Madame la sénatrice, je le répète, le Gouvernement sera très attentif aux propositions du Parlement, notamment pour ce qui est de l’avenir des territoires ruraux et des conseils généraux. Ils jouent un rôle important en matière de cohésion territoriale et sociale et doivent avoir confiance dans la volonté du Gouvernement de trouver la solution la plus précise et la plus efficace pour nos concitoyens ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Alain Bertrand applaudit également.)
Mme Bariza Khiari. Bravo !
M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour le groupe UMP.
M. François-Noël Buffet. Ma question s'adressait à Mme Marisol Touraine, mais je crois que c’est M. Le Guen qui me répondra.
Je désire attirer l’attention du Gouvernement sur le fait que, le 2 juin dernier, au cours de l’audition de Mme Touraine par la commission des finances, notre collègue Jean-Pierre Caffet, rapporteur spécial de la mission « Santé », a fait observer que les dépenses liées à l’aide médicale d’État avaient connu une très forte augmentation, pour ne pas dire une dérive ou un dérapage, dans la mesure où leur montant est passé de 588 millions à 744 millions d’euros. Les inquiétudes qu’il a exprimées sont partagées par tous les membres de la commission. (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.) Du reste, lors de cette réunion, Mme la ministre a reconnu le bien-fondé des observations présentées.
Que les choses soient bien claires : il n’est pas question pour nous de remettre en cause l’aide médicale d’État.
Mme Annie David. Vous nous rassurez !
M. François-Noël Buffet. En revanche, nous avons tout lieu de nous inquiéter de l’augmentation phénoménale du coût de ce dispositif.
En 2011, nous avions instauré un droit de timbre de 30 euros, que la nouvelle majorité a supprimé dès son arrivée aux responsabilités.
M. Roger Karoutchi. C’est vrai !
M. François-Noël Buffet. Mme Touraine a déclaré avoir connaissance de fraudes, organisées via des filières étrangères, bien sûr, permettant à des personnes de se faire soigner à bon compte dans les hôpitaux français.
Mme Éliane Assassi. Pourquoi « bien sûr » ?
M. François-Noël Buffet. Ma chère collègue, il s’agit d’un fait avéré.
Mme la ministre nous a assuré qu’elle avait parfaitement conscience du problème et qu’elle avait sans doute des solutions à proposer.
Compte tenu de ce constat partagé et du fait que nous sommes tous d’accord pour reconnaître que ce dispositif est nécessaire mais ne doit pas faire l’objet de fraudes ou de détournements, quels moyens le Gouvernement entend-il mettre en œuvre pour remédier à ce problème important ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Je vous remercie, monsieur le sénateur Buffet, de votre question, intéressante sur le fond, et je salue particulièrement la modération de vos propos. Vous avez raison d’aborder la question de l’aide médicale d’État comme vous l’avez fait, en rappelant votre attachement au principe d’un dispositif qui permet la prise en charge médicalisée de personnes malades se trouvant sur notre territoire en situation irrégulière, à condition qu’elles résident dans notre pays depuis plus de trois mois.
L’aide médicale d’État a été conçue d’abord pour des raisons de santé publique : elle vise à protéger la santé de l’ensemble des populations françaises en prévenant la propagation des infections. Elle constitue aussi un dispositif humanitaire, qui existe dans tous les pays développés, y compris dans ceux dépourvus de système de sécurité sociale, comme les États-Unis.
Il est exact, monsieur Buffet, qu’une augmentation significative des crédits consacrés à l’aide médicale d’État est intervenue. Elle est due pour l’essentiel à la hausse du nombre des bénéficiaires, même si les coûts se sont aussi accrus.
Un certain nombre de témoignages suggèrent que le dispositif est parfois mal utilisé, voire détourné de la finalité qui lui est assignée par la législation. Il faut renforcer les contrôles.
Par ailleurs, certains pays n’ayant aucune structure de soins, nous devons aussi travailler avec eux en amont pour prévenir la propagation de maladies tout à fait dangereuses : je pense en particulier aux cas de tuberculose multirésistante.
Je puis vous confirmer que, grâce à des outils statistiques mis en place par les caisses primaires d’assurance maladie, une surveillance très précise du dispositif sera assurée, département par département ; elle permettra le cas échéant de mettre au jour l’activité de filières qui détourneraient une législation à la fois efficace et généreuse. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour le groupe socialiste.
M. Jean-Pierre Caffet. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Elle porte sur le climat social régnant dans le pays et sur l’incertitude pesant sur la tenue de la grande conférence sociale prévue pour la semaine prochaine –incertitude qui semble toutefois relever autant de postures que de préoccupations fondées.
La menace qui plane sur ce rendez-vous démocratique tient avant tout aux pressions exercées par les organisations patronales bien que le Gouvernement ait tenu ses engagements en matière d’amélioration de l’environnement et de la compétitivité des entreprises.
Je ne rappellerai pas dans le détail l’ensemble de la politique menée par le Gouvernement dans ce domaine, mais je soulignerai que jamais, dans le passé, les efforts consentis en faveur des entreprises en matière fiscale et de coût du travail, au travers de la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et du pacte de responsabilité, n’avaient atteint un tel niveau : 40 milliards d’euros à l’horizon 2017.
Certes, nous pouvons comprendre que des difficultés se posent sur un certain nombre de sujets, comme la mise en œuvre du compte individuel de prévention de la pénibilité ou la réforme des temps partiels, qui instaure une durée minimale de travail de vingt-quatre heures hebdomadaires pour les nouveaux contrats. Nous approuvons l’action menée par le Gouvernement pour sécuriser juridiquement ces nouvelles dispositions et trouver les meilleures modalités d’application, dans l’intérêt des entreprises, mais aussi – et peut-être surtout – dans celui des salariés.
Mais, comme vous l’avez dit, monsieur le Premier ministre, il est clair que le patronat ne peut se livrer indéfiniment à une surenchère permanente, s’en tenir à un attentisme peu responsable et se comporter comme un simple lobby dépourvu de responsabilités propres au regard de l’avenir du pays.
Si j’ai mentionné les mesures relatives à la prise en compte de la pénibilité du travail et à la durée minimale des temps partiels, ce n’est pas simplement parce que ces deux sujets sont d’actualité ; c’est aussi parce que ces réformes sont emblématiques de la démarche de dialogue social qui marque ce quinquennat.
Cette démarche, à laquelle nous sommes très attachés, consiste à trouver des solutions équilibrées pour faire avancer le pays, et donc à assortir les efforts demandés à nos concitoyens de contreparties ou de nouvelles avancées sociales, négociées ou décidées par le Gouvernement après concertation, puis ratifiées par le Parlement.
C’est ainsi que la prise en compte de la pénibilité du travail constitue une contrepartie de justice à l’allongement de la durée de cotisation. De même, le socle minimal de vingt-quatre heures hebdomadaires pour les contrats à temps partiel représente un indéniable progrès : pour les femmes, bien sûr, qui subissent au premier chef le temps partiel imposé, mais aussi pour l’ensemble des salariés, dans la mesure où cette durée de travail minimale ouvre des droits supplémentaires en matière de couverture santé et de formation professionnelle.
Monsieur le Premier ministre, nous sommes conscients que, pour renouer avec la croissance et l’emploi, notre pays a besoin de réformes et, sans doute plus que jamais, de dialogue social. Dans le contexte difficile que nous traversons, pouvez-vous nous faire part de votre conception du dialogue social et des initiatives que vous comptez prendre en la matière ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Caffet, le dialogue social est plus qu’une méthode ; c’est une condition de la réussite des réformes. Faire confiance au dialogue social n’est pas un choix de circonstance. Nous sommes convaincus qu’il représente le meilleur chemin pour lever les blocages qui entravent notre pays et prévenir le risque d’enlisement.
Pour que le dialogue social soit fructueux, il faut des partenaires sociaux forts, qui s’engagent et qui soient respectés. Vous le savez mieux que quiconque, mesdames, messieurs les sénateurs, notre pays est traversé de tensions, que reflète l’action des forces syndicales et patronales. Il reste que chacun doit dépasser les postures et avoir le courage de prendre ses responsabilités. On a pu prendre la mesure des difficultés lors de conflits récents, tels que ceux de la SNCF ou des intermittents du spectacle.
En disant cela, je pense d’abord aux organisations patronales. Lors de la présentation du pacte de responsabilité voulu par le Président de la République et dont les premiers éléments ont été massivement votés par l’Assemblée nationale cette semaine, j’ai confirmé la trajectoire que j’avais annoncée dans ma déclaration de politique générale.
En ce qui concerne la mise en place du compte individuel de prévention de la pénibilité, M. Rebsamen a répondu tout à l’heure. Nous organisons une montée en charge progressive du dispositif à partir du 1er janvier 2015 pour donner corps à ce droit nouveau. Vous le savez tous, vous qui rencontrez, comme moi, des chefs d’entreprise et des artisans sur le terrain : il fallait être pragmatique dans la mise en œuvre du compte de prévention de la pénibilité dans les PME, les PMI et les entreprises de taille intermédiaire, où travaillent la majorité de nos concitoyens. C’est sur ces entreprises que nous devons concentrer nos efforts. Nous devons aussi être attentifs à certaines situations particulières, par exemple celle des entreprises du bâtiment. En effet, ce secteur joue un rôle crucial dans la relance de la croissance.
S’agissant enfin du temps partiel, comme l’a indiqué M. Rebsamen, nous sécurisons la relation entre le salarié et son employeur, sans remettre en cause l’avancée inscrite dans la loi relative à la sécurisation de l’emploi.
Dans le traitement des trois dossiers que je viens de mentionner, il fallait de la clarté : c’est la condition de la réussite, pour l’emploi et pour l’effectivité des droits. En effet, il ne s’agit pas uniquement de proclamer des droits, il faut que ceux-ci s’appliquent concrètement dans les entreprises ! Ce qui m’intéresse, c’est de fonder des droits réels, non des droits virtuels.
Comme je l’ai déclaré hier dans un entretien accordé au journal Les Échos, la balle est maintenant dans le camp des organisations patronales : il leur incombe de renoncer aux postures, de s’engager et de respecter leur parole !
J’entends les interrogations et les réactions des différentes organisations syndicales, qui s’exprimeront lors de la grande conférence sociale que le chef de l’État ouvrira lundi prochain. Je sais très bien ce que la France doit à leur engagement en faveur des réformes entreprises ces deux dernières années. De nombreux accords ont été signés, relatifs au marché du travail, aux retraites, à la formation, pour ne citer que ces quelques exemples. J’invite les organisations syndicales à ne pas avoir peur de mettre les sujets sur la table, d’en parler même s’ils sont difficiles, sans se focaliser sur les mots.
Ainsi, parler des seuils, c’est, dans mon esprit, parler de simplification, mais c’est aussi chercher les moyens de donner à tous les salariés une représentation dans laquelle ils se reconnaissent et qui permette un vrai dialogue sur la marche de l’entreprise. Actuellement, dans l’immense majorité des entreprises comptant entre dix et vingt salariés, ils ne sont pas représentés.
Parler de simplification, c’est aussi se donner les moyens de garantir l’effectivité des règles, parce que la complexité de celles-ci est souvent le meilleur prétexte pour ne pas les appliquer, au détriment des salariés.
La grande conférence sociale qui se tiendra dans quelques jours nous permettra de débattre de ces questions, de trouver ensemble les leviers d’action propres à développer l’emploi et à redresser le pays, ainsi que, je l’espère, de nous mettre d’accord sur une feuille de route pour aborder des sujets tels que l’emploi des jeunes, celui des seniors, la formation et l’apprentissage, qui devront être au cœur de nos échanges.
Pour ma part, je fais confiance aux partenaires sociaux et je crois au dialogue social. Bien sûr, je crois aussi à la nécessité de l’intervention de la loi et de l’action gouvernementale lorsque cela est nécessaire, mais je suis convaincu que cette conférence sociale sera un moment important pour notre pays, si chacun assume pleinement ses responsabilités. Le Gouvernement, en tout cas, assumera totalement les siennes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du RDSE.)
coût de la fermeture de fessenheim
M. le président. La parole est à Mme Françoise Boog, pour le groupe UMP.
Mme Françoise Boog. Ma question s’adressait à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, dont je regrette l’absence.
Le 18 juin dernier, Mme la ministre de l’écologie a affiché une grande ambition en matière de redéfinition des équilibres énergétiques de la production française d’électricité.
Notre système de production d’électricité s’articule aujourd’hui autour du socle nucléaire.
M. Jean Desessard. Ah !
Mme Françoise Boog. Mme la ministre a annoncé son intention de plafonner la puissance du parc nucléaire à son niveau actuel, soit 63,2 gigawatts, et affirmé l’objectif de ramener la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 % à 50 % à l’horizon 2025.
M. Jean-Claude Lenoir. C'est impossible !
Mme Françoise Boog. Si le but est clairement exposé, nous n’en savons pas plus sur les moyens de l’atteindre.
En tant qu’élue alsacienne, je suis inquiète ! Mardi dernier, l’INSEE a rendu publique une étude très sérieuse montrant que près de 2 000 emplois seraient directement menacés par une éventuelle fermeture de la centrale de Fessenheim. Pis encore, selon cette même étude, 5 000 personnes verraient leur salaire affecté par l’arrêt de la centrale.
Pouvez-vous nous éclairer sur les moyens que vous comptez mettre en œuvre pour atteindre vos objectifs ? En effet, la centrale de Fessenheim est depuis trop longtemps désignée comme le bouc émissaire…
M. Gérard Longuet. C'est vrai !
Mme Françoise Boog. … de la politique de production nucléaire, d’une filière industrielle d’excellence, particulièrement efficace en France.
Pourquoi fermer arbitrairement Fessenheim, alors que selon l’ASN, l’Autorité de sûreté nucléaire, mondialement reconnue pour ses compétences et son indépendance, l’arrêt de cette centrale n’est pas du tout justifié ?
M. Jean Bizet. C'est exact.
Mme Françoise Boog. L’ASN a donné une autorisation d’exploitation pour dix années supplémentaires, et plus de 260 millions d’euros ont été investis pour mettre le site au meilleur niveau de sûreté nucléaire.
Par ailleurs, un récent rapport de nos collègues de l’Assemblée nationale faisant référence à la fermeture de Fessenheim pointe le « vide de l’action étatique », le « manque d’une impulsion venue d’en haut » et l’« absence de projet mobilisateur concret ».
Quand obtiendrons-nous des réponses sensées, fondées sur des données réelles, quant à l’impact économique et financier de la fermeture de la centrale, à la sécurisation du réseau alsacien, aux problèmes que rencontreront les entreprises électro-intensives installées dans la plaine du Rhin, à l’indemnisation de nos partenaires Suisses et Allemands, coactionnaires de la centrale, et à celle d’EDF ?
M. le président. Madame la sénatrice, votre temps de parole est épuisé.
Mme Françoise Boog. Il y a des promesses de campagne qui mériteraient de ne pas être tenues ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Ségolène Royal. Ne pouvant être présente au Sénat cet après-midi,…
M. Christian Cambon. Elle ne vient jamais au Sénat !
M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État. … elle m'a chargé d’apporter des éléments de réponse à votre question, très complète. Elle se tiendra bien sûr à la disposition de la représentation nationale pour fournir l’ensemble des clarifications nécessaires sur les conséquences économiques et financières d’une fermeture de la centrale de Fessenheim.
Vous le savez, le projet de loi de programmation pour un nouveau modèle énergétique français est actuellement soumis pour consultation au Conseil national de la transition écologique, au Conseil national de l’industrie et au Conseil économique, social et environnemental. L’ensemble des questions que vous avez soulevées, par exemple celle de l’indemnité à verser à EDF, dont le montant ne peut être connu aujourd'hui, seront débattues entre l’État et les acteurs concernés. Je souligne que l’entreprise EDF elle-même ne souhaite pas engager ces discussions avant d’avoir pu prendre connaissance de la teneur de la loi de programmation pour un nouveau modèle énergétique français, ce qui paraît relever du bon sens.
Ce texte sera définitivement adopté en conseil des ministres d’ici à la fin du mois de juillet et il viendra en discussion devant le Parlement à la rentrée. Son objet est clair : il s’agit de donner suite à l’engagement qui a été pris devant la représentation nationale et devant le peuple français, à savoir le plafonnement de la capacité de production d'électricité d’origine nucléaire à son niveau actuel. Dès lors, il appartiendra à l'entreprise EDF, notamment, d’apprécier le préjudice qu’elle estimera avoir à subir du fait de la mise en application de la loi.
L’ensemble de ces questions pourront être abordées lors du débat parlementaire qui s'ouvrira dans quelques semaines. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
taxe de séjour
M. le président. La parole est à M. Michel Houel, pour le groupe UMP. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Michel Houel. Ma question s'adressait à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international, qui se trouve actuellement en déplacement.
Il y a quelques jours, à l’issue des assises du tourisme, plusieurs ministres français, dont M. Fabius, plaidaient unanimement pour le renforcement du secteur du tourisme. M. Montebourg insistait, de son côté, sur une remise à niveau de l’offre touristique et sur les difficultés rencontrées par les hôteliers à la suite de la mise en œuvre des nouvelles réglementations.
Mercredi de la semaine dernière, contre toute attente, deux amendements tendant respectivement à porter le plafond de la taxe de séjour de 1,5 euro à 8 euros et à instaurer une taxe additionnelle de 2 euros pour l’Île-de-France ont été votés par les députés de la majorité,…
M. Roger Karoutchi. Racketteurs !
M. Didier Guillaume. On a connu pire !
M. Michel Houel. … le Gouvernement s’en étant remis à la sagesse de l’Assemblée nationale. En l’occurrence, ce n’était pas très sage…
Dimanche dernier, dans un communiqué, le Quai d’Orsay jugeait cependant – avec retard – impératif de renoncer à l’augmentation de ces taxes « dangereusement et totalement contraires à la promotion du tourisme, qui est une priorité pour l’emploi ». Voilà une déclaration parfaitement en phase avec la réalité économique et heureusement en décalage avec la majorité gouvernementale !
Quelles pourraient être les conséquences de l’instauration de ces nouvelles taxes ? Une hausse des tarifs, bien évidemment ! Dans un secteur où ce sont des prix nets qui sont facturés aux touristes, très en amont la plupart du temps, ce sont les hôteliers qui feraient la plupart du temps les frais des hausses, au début tout au moins, car les taxes ne pourraient pas être répercutées immédiatement sur les clients.
Ce sont la petite hôtellerie et les clientèles modestes qui ressentiraient le plus les effets néfastes des augmentations de prix. Sur un site comme celui d’Euro Disney, implanté dans mon département, une dizaine de milliers de touristes seraient touchés chaque jour !
N’oublions pas que l’hôtellerie a déjà supporté une hausse de la TVA de 5,5 % à 7 %, puis à 10 %, que tous les établissements doivent procéder aux audits d’accessibilité avant la fin de l’année et qu’ils auront en plus à mettre en place le compte de prévention de la pénibilité… Pour soutenir un secteur économique aussi essentiel que le tourisme, il y a mieux, avouons-le !
Quelle attitude le Gouvernement adoptera-t-il lorsque cette disposition sera examinée au Sénat ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.
Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur, comme vous l’avez rappelé, l’Assemblée nationale a été conduite à adopter deux amendements d’origine parlementaire relatifs à la taxe de séjour. Je voudrais apporter certaines précisions.
Le premier de ces amendements, qui vise en effet à donner aux collectivités ayant instauré la taxe de séjour la possibilité d’en relever le plafond à 8 euros par nuitée et par personne, nécessite la prise d’une mesure d’application par voie réglementaire. Un tel relèvement répondrait, semble-t-il, à la demande d’un certain nombre de collectivités.
Le second amendement crée une taxe de séjour de 2 euros par nuitée et par personne en Île-de-France.
Quels sont les enjeux liés à ces deux dispositions ?
M. Éric Doligé. Il n’y en a pas !
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Certes, elles créent des ressources potentielles supplémentaires pour les communes qui le souhaitent, ainsi que pour la région francilienne, destinées au financement d’actions en faveur de l’économie touristique au sens large.
Elles concernent une taxe, la taxe de séjour, dont il était nécessaire de revoir les principes, de l’avis unanime tant des élus locaux que des professionnels. C'est pourquoi avait été demandée, à l’Assemblée nationale, la création d’un groupe de travail sur la fiscalité des hébergements touristiques, conduit par les députés Éric Woerth, Monique Rabin et Éric Straumann. Les conclusions de ce groupe de travail nous seront remises dans les quinze jours à venir. Il devrait notamment proposer que la taxe de séjour soit proportionnée et que son assiette soit élargie à l’ensemble des hébergements touristiques.
Il est clair que ces deux amendements posent problème. D’abord, ils n’ont pas fait l’objet d’une concertation avec le secteur hôtelier et leur dispositif pèse trop fortement sur les petits hôtels (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.), ainsi que sur nos concitoyens, dont il faut rappeler qu’ils sont les premiers touristes en France, tout particulièrement dans la région d’Île-de-France. Quant au dispositif régional, il n’est pas opérationnel en l’état.
Pour ce qui concerne les audits d’accessibilité, je vous rappelle, monsieur le sénateur, que la date limite n’est pas le 31 décembre 2014 : l’échéance est fixée à un an après la publication du dispositif.