Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les notaires que j’ai rencontrés dernièrement à Château-Renault, sont très inquiets, mais également extrêmement déterminés. Rapport de l’Inspection générale des finances, fuites dans la presse, déclarations ministérielles contradictoires : tout cela n’est pas fait pour les rassurer.
Les notaires ont conscience d’être la cible de tous ceux qui souhaitent la déréglementation de leur profession, voire sa disparition. Surtout, ils ne comprennent pas que ce soit le gouvernement actuel qui soit à l’origine de cette campagne.
Les notaires, en effet, ne méritent pas les caricatures entendues ces derniers temps visant à les stigmatiser. Je rappelle qu’ils ont collecté, en 2013, 22 milliards d’euros de recettes fiscales à titre gratuit pour l’État. Ce sont des officiers publics assurant une mission de service public, appliquant des tarifs réglementés, les mêmes sur tout le territoire.
La sécurité des actes notariés représente une garantie forte pour l’ensemble de nos concitoyens, notamment pour les plus faibles d’entre eux.
Un ministre a annoncé en août que 6 milliards d’euros de pouvoir d’achat pourraient être restitués aux Français en déréglementant la profession. Or son successeur a déclaré en septembre qu’il était illusoire de penser qu’une telle réforme rendrait 6 milliards de pouvoir d’achat aux Français. Qui croire ?
Regardons de près ce qui s’est passé aux Pays-Bas. En libéralisant les tarifs voilà douze ans, les Néerlandais ont provoqué une hausse de 70 % du coût des actes notariés, ce qui a accru l’inégalité d’accès au service public notarial. Où est donc l’intérêt économique d’un tel bouleversement ?
Le président du Conseil national du notariat soulignait en mai dernier : « Ce n’est pas parce qu’il y aura plus de concurrence entre notaires qu’il y aura plus d’achats immobiliers ou plus de successions à régler ! Cela n’aura aucun impact sur le PIB. »
Si ce projet n’a aucune conséquence, ni sur le pouvoir d’achat ni sur le PIB, en quoi pourrait-il être utile ? La seule solution raisonnable me semble donc son retrait immédiat. En effet, sa mise en œuvre porterait atteinte à notre modèle social républicain déjà fortement attaqué.
Une libre installation « sauvage » entraînerait une dégradation de la sécurité juridique et une remise en cause de la garantie collective. Par ailleurs, l’entrée de capitaux étrangers dans leurs études par l’intermédiaire des banques, des compagnies d’assurance ou d’autres investisseurs, conduira inéluctablement à une perte d’indépendance, ainsi qu’à la disparition des petites structures.
Une telle réforme signera le recul non seulement de la présence de la puissance publique dans des territoires aujourd’hui très affectés par la disparition de services publics comme La Poste ou encore les trésoreries, mais aussi de l’accès au droit pour nombre de nos concitoyens, à l’image de ce qui s’est passé avec la fermeture de tribunaux. Et cela, nous ne pouvons l’accepter !
La défense de l’accès au droit, la préservation de la mission de service public des notaires et la sécurité juridique sont autant de principes chers à Mme Taubira, ministre de la justice. Je me félicite qu’elle les ait défendus à maintes reprises, montrant ainsi son attachement à la réglementation notariale. Devant le congrès des notaires qui se tenait à Lyon en juin 2013, elle disait à propos de la directive sur la reconnaissance des qualifications professionnelles : « Il a fallu se battre contre ceux qui sont persuadés qu’il faut déréglementer ces professions. […] Nous sommes armés d’une culture du service public. Nous avons la culture de la présence territoriale. Nous avons la culture de la citoyenneté. Armés de cela, nous avons décidé d’être invincibles et nous avons été invaincus ! »
Alors, monsieur le secrétaire d’État, il ne faut pas laisser s’installer une telle entreprise de destruction de nos principes républicains au profit de l’installation d’un hypermarché du droit. Comment comptez-vous donc préserver dans notre pays les valeurs fondamentales qui régissent cette profession ? Les notaires et les personnels des études sont prêts à appuyer toute initiative allant en ce sens. (M. Michel Houel applaudit.)
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Matthias Fekl, secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger. Madame la sénatrice, vous avez appelé l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, dont je vous prie d’excuser l’absence, sur le projet de réforme des professions réglementées, et plus particulièrement sur la situation des notaires.
Mme la garde des sceaux reconnaît avec vous la place importante qu’occupent les notaires dans le service public de la justice. Comme vous le rappelez, le Gouvernement a d’ailleurs soutenu devant les institutions européennes la spécificité de cette profession lors des discussions relatives à la révision de la directive dite « qualifications professionnelles » du 7 septembre 2005. C’est en invoquant cette spécificité que le gouvernement français a obtenu l’exclusion du notariat du champ d’application de cette directive, alors que cette bataille n’était pas gagnée d’avance !
Dans le même sens, la Cour de justice de l’Union européenne a affirmé, dans un arrêt du 24 mai 2011, que les notaires « poursuivent des objectifs d’intérêt général, qui visent notamment à garantir la légalité et la sécurité juridique des actes conclus entre particuliers » – je cite le point 87 de cet arrêt. À ce titre, toujours selon la Cour, les restrictions relatives à l’organisation du notariat en France peuvent être compatibles avec la liberté d’établissement garantie par le droit de l’Union.
En ce qui concerne la réforme des professions juridiques réglementées, la ministre de la justice a conduit depuis le 17 septembre une série de consultations avec les représentants de ces professions et le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Cette concertation a déjà permis de dissiper un certain nombre des inquiétudes qui, il faut le reconnaître, avaient pu naître. Je note avec satisfaction que les mouvements de protestation qui entouraient l’ouverture des concertations ont été suspendus.
La nécessité de réformer les professions juridiques réglementées est largement admise, y compris par les professionnels eux-mêmes. Depuis 2012, Mme la garde des sceaux a lancé ce processus de modernisation, en lien avec leurs représentants. Ainsi, elle a déjà agi pour la réduction du tarif des greffiers des tribunaux de commerce avec le décret du 19 mai 2014. L’ordonnance du 12 mars 2014 réforme les procédures collectives et modifie également les conditions de désignation des administrateurs et mandataires judiciaires. Le nombre de notaires salariés pouvant être nommés a été augmenté par l’ordonnance du 27 février 2014. Des participations financières croisées sont désormais possibles entre professionnels du droit et du chiffre depuis un décret du 19 mars 2014. Tout récemment, enfin, il a été procédé, par un décret du 28 août dernier, à l’extension de la compétence territoriale des huissiers de justice du ressort du tribunal de grande instance au département.
C’est dans un esprit de dialogue que doivent se poursuivre les discussions. Personne, au sein du Gouvernement, ne peut se voir reprocher d’adopter une logique simpliste ou de tenir un discours caricatural. Au contraire, tous ses membres ont le souci constant d’assurer la qualité du service public, de garantir la sécurité juridique des actes concernés et de préserver un maillage territorial serré, comme nos concitoyens sont en droit de l’attendre
Ainsi, c’est à l’aune de ces exigences qu’il faut analyser les risques que présenteraient la liberté d’installation, l’orientation des tarifs vers les coûts ou encore l’ouverture à la concurrence de certains actes. (Mme Frédérique Espagnac et M. Luc Carvounas applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez bien résumé l’ensemble des déclarations de Mme la garde des sceaux. Malheureusement, certains faits continuent de les contredire. Je vais donc finir par me dire qu’un autre ministère ne défend peut-être pas tout à fait la même conception de la concertation, s’agissant de la profession de notaire. En effet, Les Échos ont récemment publié des « pistes de réflexion » du ministère de l’économie, alors que les sujets évoqués n’avaient fait l’objet d’aucun débat avec la profession. Ainsi, pendant la consultation, la presse publie des éléments qui n’ont absolument pas été abordés par les négociateurs. Il va donc falloir à un moment adopter une méthode de travail plus claire, afin qu’un accord s’établisse entre les déclarations publiques et le contenu des discussions.
J’ajoute que les informations diffusées dans la presse ne permettent pas au public de comprendre les réalités en cause. Par exemple, les tarifs réglementés permettent aux personnes les plus modestes de bénéficier de tarifs très raisonnables, pour des biens d’une valeur allant jusqu’à 200 000 euros. Or peu de gens savent que, à la rémunération du notaire, s’ajoutent des frais correspondant tout simplement à des impôts. Le mélange de ces chiffres crée une confusion quant au coût véritable de l’intervention du notaire.
Ainsi, pour un bien de 200 000 euros, s’il faut verser 12 500 euros au Trésor public, l’office notarial ne perçoit, quant à lui, que 2 500 euros. Cette réalité est très mal connue, et il ne faut donc pas s’étonner que la perception du coût de l’acte juridique, en dépit de la sécurité qu’il apporte, soit totalement faussée. Je souhaite par conséquent que l’État apporte les éclaircissements nécessaires dans ce débat. (MM. Jean-Claude Lenoir et Michel Houel applaudissent.)
M. Jean-Claude Lenoir. Nous approuvons cette intervention !
répartition des sièges au sein des assemblées intercommunales
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, auteur de la question n° 856, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le président, permettez-moi tout d’abord de saluer votre présence, pour la première fois, au fauteuil de la présidence, de même que celle de M. Matthias Fekl, qui intervient également pour la première fois au nom du Gouvernement dans cet hémicycle.
Ma question porte sur les conditions dans lesquelles s’organise l’intercommunalité. Comme vous le savez, mes chers collègues, la loi du 16 décembre 2010 prévoit que les sièges des assemblées communautaires peuvent être répartis sur la base d’un accord local. En l’absence d’accord, les dispositions législatives s’appliquent.
De fait, en 2013, lors du renouvellement des assemblées communautaires qui a fait suite à la recomposition des communautés de communes, 90 % de ces assemblées ont été reconstituées sur la base d’un accord local. Or la disposition législative permettant ces accords a été déclarée inconstitutionnelle par le Conseil constitutionnel – je ne porte évidemment aucun jugement sur cette décision –, ce qui crée malheureusement une situation très difficile au sein des communautés de communes.
En effet, l’accord local n’étant plus possible, il faudra appliquer la loi de manière très stricte dès le prochain renouvellement des conseils communautaires. Certaines communes seront ainsi privées du droit de conserver un ou deux représentants au sein du conseil communautaire, et nous y voyons une atteinte au principe selon lequel tout le territoire d’une communauté de communes doit être représenté de façon satisfaisante au sein du conseil.
J’ai entendu dire que cette décision ne s’appliquerait qu’en 2020. Or je n’en suis pas sûr. En effet, un projet de loi qui devrait prochainement être discuté par le Parlement prévoit une nouvelle composition des communautés de communes. Lorsque cette disposition aura été adoptée, il faudra bien procéder à un renouvellement des instances communautaires : ce sera avant 2020, sans doute dès l’année prochaine ! Il est donc urgent de régler ce problème.
J’ai été particulièrement heureux de lire dans la presse que M. le Premier ministre avait déclaré, devant la convention nationale de l’Assemblée des communautés de France, réunie la semaine dernière, qu’il allait consulter le Conseil d’État sur la proposition de nos collègues de la commission des lois MM. Jean-Pierre Sueur et Alain Richard. Il s’agit d’une base de réflexion sur laquelle nous pouvons nous pencher, mais il y a vraiment urgence à légiférer, monsieur le secrétaire d’État !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Matthias Fekl, secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger. Monsieur le sénateur Jean-Claude Lenoir, vous avez interrogé le ministre de l’intérieur, qui vous prie d’excuser son absence ce matin, sur la décision dite Commune de Salbris rendue le 20 juin 2014 par le Conseil constitutionnel, qui a déclaré contraires à la Constitution les dispositions relatives aux accords locaux de composition des conseils communautaires des communautés de communes et des communautés d’agglomération. Vous venez d’ailleurs de nous présenter une analyse de cette décision.
Si le Conseil constitutionnel a jugé que l’accord local était insuffisamment encadré pour garantir le respect du principe d’égalité devant le suffrage, la modulation dans le temps de cette annulation a permis d’éviter la remise en cause des résultats des élections municipales et communautaires de cette année.
Le Gouvernement a par ailleurs adressé des instructions aux préfets leur précisant la procédure à suivre pour la modification de la composition des conseils communautaires, dans le but d’accompagner les élus locaux, sur le terrain, compte tenu des nombreuses interrogations suscitées par cette décision du Conseil constitutionnel.
Au-delà de cet accompagnement nécessaire, le Gouvernement est attaché à conserver la possibilité d’accords locaux sur la composition des instances des communautés de communes ou d’agglomération. Tout en respectant la décision du Conseil constitutionnel, il convient d’accorder plus de souplesse aux élus, car la possibilité de nouer des accords locaux de représentation est en effet une condition de l’efficacité de l’intercommunalité. Le Premier ministre l’a d’ailleurs lui-même rappelé lors de la convention nationale de l’Assemblée des communautés de France, l’AdCF, le 9 octobre dernier.
Un nouveau dispositif compatible avec les exigences de la décision du Conseil constitutionnel relatives au respect du principe d’égalité de suffrage doit donc être élaboré. La proposition de loi déposée en ce sens par vos collègues Alain Richard et Jean-Pierre Sueur sera examinée demain par la commission des lois et la semaine prochaine en séance publique.
Afin qu’une solution présentant toutes les garanties juridiques puisse être adoptée à brève échéance, le Gouvernement envisage de saisir le Conseil d’État d’une demande d’avis relative à l’interprétation de la décision du Conseil constitutionnel. Je ne doute pas que ces éléments nous permettront d’éclairer les débats qui auront lieu au sein de votre assemblée et d’aboutir à un dispositif sûr et pérenne.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le secrétaire d’État, je ne voudrais pas surestimer le poids de mes initiatives, mais je constate avec plaisir que le dépôt de cette question est à l’origine d’un certain nombre de mesures destinées à corriger le problème que j’ai soulevé !
Plus sérieusement, je suis heureux que vous ayez confirmé devant nous les déclarations de M. le Premier ministre devant la conférence nationale de l’Assemblée des communautés de France, car l’avis du Conseil d’État sera extrêmement important.
Je dirai, pour être tout à fait clair, que nous avons collectivement commis une erreur, lors de la discussion de la loi du 16 novembre 2010, en décidant que la représentation au sein des conseils communautaires devait « tenir compte » de la population, alors qu’il aurait fallu préciser qu’elle était établie « en fonction » de la population. D’un point de vue strictement juridique, cette différence dans la formulation est très importante, avec les conséquences que l’on sait.
J’ajoute que la disposition de la loi du 16 décembre 2010 en cause n’avait pas été censurée par le Conseil constitutionnel. C’est sur l’initiative de Salbris, dans le Loir-et-Cher, commune qui a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité, que le Conseil constitutionnel a été amené rétroactivement à la juger inconstitutionnelle. L’affaire étant jugée, je ne ferai pas de commentaire, même si nous sommes nombreux à regretter les conséquences de cette décision. J’apprécie donc que des initiatives fortes soient prises pour nous permettre de corriger bientôt ce problème !
taux de taxe sur la valeur ajoutée des dotations publiques versées aux télévisions locales
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy, auteur de la question n° 866, adressée à M. le ministre des finances et des comptes publics.
M. Philippe Leroy. Monsieur le secrétaire d’État, je joins mes salutations à celles que vous a présentées M. Jean-Claude Lenoir.
Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur l’assujettissement à la TVA des dotations publiques versées aux télévisions locales. L’ensemble des dispositions législatives et réglementaires en vigueur permet la mise en place de services de télévision destinés à diffuser, par voie hertzienne ou par toute autre voie autorisée, des informations sur la vie locale. On compte ainsi en France quarante-huit télévisions locales au titre de la TNT et presque cent télévisions dites « télévisions locales câblées » qui sont soit en délégation de service public, soit, quelquefois, en régie directe.
Les collectivités locales concluent avec ces télévisions, pour des durées comprises entre trois et cinq ans, des contrats d’objectifs et de moyens qui permettent de leur verser des aides pour équilibrer leur budget. C’est ainsi que toutes les chaînes de télévision locales bénéficient de soutiens qui sont, comme je l’ai déjà dit, indispensables à cet équilibre.
Or, l’économie de ce secteur est fragilisée par l’application sur ces versements des collectivités locales d’un taux de TVA, très dernièrement porté de 5 à 10 %. Outre que ce taux est assez défavorable, il est d’autant plus anormal que le taux prélevé sur les versements de l’État à France Télévisions, également bénéficiaire d’un contrat d’objectifs et de moyens, n’est que de 2,1 %. Il y a là inégalité de traitement entre des services publics !
Monsieur le secrétaire d’État, pour quelles raisons tolère-t-on encore cette différence de traitement entre des télévisions qui relèvent toutes du service public, même si, pour France Télévisions, c’est au titre national et, pour les télévisions locales, c’est au titre des collectivités publiques locales ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention de M. le ministre des finances et des comptes publics, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence, sur le taux de TVA applicable aux dotations publiques versées aux télévisions locales.
Comme vous le savez, les taux de TVA sont modifiés depuis le 1er janvier 2014 : le taux normal est fixé à 20 % et le taux réduit de 7 % est porté à 10 %.
Dans ce cadre, conformément aux dispositions du j de l’article 279 du code général des impôts, les rémunérations versées par les collectivités territoriales et leurs groupements pour la mise en œuvre d’un contrat d’objectifs et de moyens correspondant à l’édition d’un service de télévision locale sont soumises au taux de 10 %. Ce taux est identique à celui qui est appliqué aux abonnements souscrits par les usagers afin de recevoir un service de télévision.
En outre, une mesure de baisse du taux de TVA – ce taux ne pourrait en tout état de cause être inférieur au taux de 5,5 %, puisque aucun taux réduit inférieur à 5 % ne peut plus être introduit depuis 1991 – provoquerait une distorsion de concurrence entre, d’une part, les télévisions locales signataires d’un contrat d’objectifs et de moyens et, d’autre part, les télévisions locales qui n’auraient pas le soutien d’une collectivité territoriale.
Dans ces conditions et pour ces raisons, le Gouvernement n’envisage pas d’abaisser le taux de TVA applicable aux prestations en cause.
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy.
M. Philippe Leroy. Monsieur le secrétaire d’État, cette décision est à mon avis tout à fait regrettable ! En effet, on ne peut pas méconnaître la réalité et la justesse des taux d’imposition applicables aux versements faits par les collectivités aux télévisions locales. Il n’en reste pas moins qu’il y a vraiment discordance de traitement entre France Télévisions et les télévisions locales. Elles sont toutes les deux de nature publique lorsqu’il y a un contrat d’objectifs et de moyens, et la différence de taux de TVA est donc incompréhensible ! On peut noter également que, d’une façon générale, les télévisions locales ne bénéficient d’aucune autre aide de l’État, et notamment pas du fonds d’aide à la presse.
Je réitérerai donc ma question sur une situation qui crée une insécurité financière pour des télévisions locales, lesquelles valent bien les télévisions nationales pour l’information du public. Je rappelle que plus d’un million de Français regardent chaque jour les télévisions locales pour une durée moyenne de quarante minutes. C’est dire que les Français portent une attention très vive à leurs télévisions locales et à leurs informations locales !
augmentation des prélèvements annuels sur le réseau action logement
M. le président. La parole est à M. Georges Labazée, auteur de la question n° 855, adressée à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
M. Georges Labazée. Je salue la présence ce matin dans cet hémicycle du grand quart sud-ouest, des ministres siégeant au banc du Gouvernement jusqu’à vous, monsieur le président, en passant par moi qui suis un peu plus âgé ! (Sourires.)
Madame la ministre, ma question porte sur la décision du Gouvernement d’accroître ses prélèvements annuels sur le réseau Action Logement. Nous sommes d’ailleurs nombreux dans cette assemblée à vous avoir sollicitée sur ce problème.
Vous le savez – et l’action depuis plus de deux ans du Gouvernement l’a bien démontré –, le logement social est une priorité pour les Français. Pour nous, élus, il est bien souvent la première sollicitation que nous adressent nos administrés. Preuve qu’il s’agit aussi d’une priorité du Gouvernement, le projet de loi de finances pour 2015 fait du budget de votre ministère un véritable budget de combat, en hausse de 80 millions d’euros à périmètre constant.
Madame la ministre, le financement du logement social est largement assuré par la contribution d’Action Logement. En 2013, près de 560 000 ménages ont bénéficié des aides d’Action Logement et 70 000 ménages ont été logés dans le logement social sur réservations des comités interprofessionnels du logement, les CIL.
Plus concrètement, dans le département des Pyrénées-Atlantiques que je connais bien, Action Logement a mobilisé 4,5 millions d’euros de prêts et subventions pour financer des logements locatifs sociaux, contribuant ainsi en partie à l’agrément de 1 547 logements locatifs sociaux.
La lettre d’engagement mutuel signée en novembre 2012 entre l’État et Action Logement permettait au réseau d’emprunter 3 milliards d’euros sur les années 2013-2015 en contrepartie d’une réduction progressive par l’État de ses prélèvements. L’objectif était d’accompagner la volonté gouvernementale de produire 150 000 logements sociaux par an.
Pourtant, madame la ministre, le 15 juillet dernier, vous avez confirmé la décision du Gouvernement d’accroître ses prélèvements annuels sur le réseau Action Logement d’1,5 milliard d’euros sur quatre ans « pour tenir compte du pacte de responsabilité et de solidarité qui va bénéficier directement et rapidement aux entreprises et à leurs salariés ».
Vous comprendrez que cette augmentation considérable aura des conséquences sur les missions d’Action Logement.
Je voudrais donc vous interroger sur les décisions que le Gouvernement entend prendre : renoncer à ce projet de prélèvement, ou amender ce denier ? J’attends avec beaucoup d’intérêt votre réponse, madame la ministre !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous avez raison de rappeler que le logement constitue une priorité pour ce gouvernement, comme l’ont démontré les différents plans et mesures que nous avons présentés en juin et en août avec M. le Premier ministre en vue de relancer la construction de logements sans négliger la nécessité de rénover le parc existant.
Aujourd’hui, vous appelez davantage mon attention sur les conséquences de l’augmentation de la contribution d’Action Logement aux politiques nationales.
Comme vous l’avez rappelé, j’ai reçu le 15 juillet dernier les partenaires sociaux d’Action Logement pour avancer sur les négociations portant sur la première convention quinquennale 2015-2019.
Cette négociation s’inscrit dans le cadre de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, ou loi ALUR, qui marque le retour du dialogue social sur l’utilisation des fonds issus de la participation des employeurs à l’effort de construction. Je me félicite de la qualité de nos échanges et de nos débats.
Les objectifs poursuivis à travers cette négociation sont, d’abord, l’augmentation de la construction de logements sociaux et intermédiaires dans les zones sous tension, ensuite, le renforcement de l’accession à la propriété des Français, enfin, l’accompagnement à la mobilité professionnelle.
Lors de notre rencontre avec Action Logement, j’ai rappelé l’urgence de la situation du logement et la nécessaire mobilisation de tous les acteurs pour relancer la construction en France.
Une avancée importante dans les discussions a été obtenue le 15 juillet dernier au sujet du financement. Nous nous sommes accordés sur le montant de la contribution d’Action Logement aux politiques nationales, contribution qui sera relevée à hauteur d’un milliard d’euros en 2016, de 900 millions en 2017, de 700 millions en 2018, et de 500 millions en 2019. Il s’agit en effet, comme vous l’avez rappelé, de tenir compte du pacte de responsabilité et de solidarité, qui va bénéficier directement aux entreprises et à leurs salariés.
Le dialogue avec les partenaires sociaux se poursuit sur le montant et le ciblage de l’effort d’Action Logement en faveur de la production de logements, l’articulation de ses dispositifs avec ceux de l’État, notamment en matière d’accession à la propriété, l’effort en faveur des personnes les plus modestes et le renforcement de l’efficacité de la collecte par le réseau des comités interprofessionnels du logement.
Je précise que les grandes lignes de l’accord sont consensuelles. Quelques détails nécessitent encore des discussions plus approfondies, plus techniques, en vue d’une signature de la convention avant la fin de l’année.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, la politique du Gouvernement en matière de logement bénéficie d’objectifs volontaristes et de moyens à la hauteur de ses ambitions, ainsi que vous l’avez rappelé. Bien sûr, nous avons besoin de l’engagement non seulement de l’ensemble des partenaires, mais également des élus locaux qui, sur le terrain, ont à nous accompagner pour relancer la construction et permettre l’accès de nos concitoyens au logement.
M. le président. La parole est à M. Georges Labazée.
M. Georges Labazée. Madame la ministre, je vous remercie de votre propos. Cette semaine, j’ai été reçu par votre cabinet ministériel. J’espère que, dans le prolongement de cet entretien fructueux, une solution quant au relèvement des plafonds nous concernant directement sera trouvée, nous permettant ainsi de produire encore plus de logements.
éventuel projet du gouvernement de créer un impôt sur les personnes propriétaires de leur logement
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, auteur de la question n° 850, adressée à M. le ministre des finances et des comptes publics.
M. Jean Louis Masson. Madame le secrétaire d’État, je voudrais attirer votre attention sur un problème qui me préoccupe et qui inquiète un certain nombre de Français. Selon les rumeurs insistantes reprises par la presse, et notamment par des journaux a priori sérieux – Le Point, La Tribune, l’Express –, le Gouvernement aurait pu étudier ou avoir étudié, en concertation avec des parlementaires socialistes, la possibilité de taxer les résidences principales des personnes propriétaires de leur logement.
L’idée serait qu’une personne propriétaire de sa résidence principale bénéficie d’un revenu fictif correspondant à l’absence de loyer pour l’occupation de ladite résidence. De ce fait, il serait donc envisagé de considérer que l’équivalent du loyer, parce qu’il est un revenu fictif, doit être imposé au titre de l’impôt sur le revenu.
Il est à peine croyable que l’on puisse simplement envisager une telle mesure aussi injuste à l’encontre de familles qui ont parfois travaillé toute une vie pour devenir propriétaires de leur logement !
Madame le secrétaire d’État, vos services ont-ils, oui ou non, étudié d’une façon quelconque une telle possibilité de taxation ?
D’une façon plus générale, vous le savez, les Français qui travaillent – et souvent durement, d’ailleurs – croulent sous le poids des impôts et des taxes. Au lieu d’aggraver encore la situation, il conviendrait à mon avis de réaliser des économies, notamment au niveau du laxisme de l’assistanat dont profitent certains marginaux qui vivent systématiquement aux crochets de la société sans jamais travailler, ou des ressortissants étrangers attirés en France uniquement par le niveau des aides sociales attribuées à guichet ouvert.
Je vous rappelle, madame le secrétaire d’État, que le père de la petite Leonarda – celui-là même que connaît bien le Président de la République, lequel voulait faire revenir cette jeune fille en France –, interviewé sur une chaîne de télévision italienne, avait répondu, alors qu’on lui demandait pourquoi il avait quitté l’Italie où il était installé pour se rendre dans notre pays, que les aides sociales et les soutiens divers aux pseudo-réfugiés y étaient bien supérieurs aux dispositifs existants en Italie. Même si l’intéressé n’a pas fait exprès de dire cela, je pense que sa remarque apporte de l’eau au moulin de tous ceux qui, en France, se posent un certain nombre de questions en la matière.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.