M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à vous remercier de l’organisation de ce débat préalable au Conseil européen des 23 et 24 octobre prochains, qui se tiendra à un moment où l’Europe doit faire face à une série de crises.
Des crises internationales, d’abord, en Irak, en Syrie, en Afrique, en Ukraine, qui comportent, pour certaines d’entre elles, des risques pour la sécurité de l’Europe.
Des crises économiques, ensuite : la croissance est à l’arrêt dans la zone euro ; le niveau de l’inflation est exceptionnellement faible ; le chômage est élevé, en particulier parmi les jeunes ; la production manufacturière et la demande interne sont très au-dessous de leur niveau antérieur à la crise de 2008, tout comme l’investissement, qui est de 15 % inférieur. Aucun pays n’est épargné par les difficultés économiques, pas même l’Allemagne dont les indicateurs récents sont mal orientés.
Une crise de confiance, aussi, des citoyens à l’égard de l’Union européenne, de son fonctionnement et de ses résultats, qui peut parfois se transformer en un rejet du projet européen lui-même, ce qui est évidemment le plus grave.
Une crise climatique, enfin, face à la croissance incontrôlée des gaz à effet de serre, qui menace notre planète. Ce sera l’un des sujets majeurs de ce Conseil européen.
Ce Conseil est donc important, car l’Europe est à un moment charnière, un moment de définition. Les nouveaux commissaires ont été auditionnés par le Parlement européen. Le collège sera soumis à son investiture dans les prochaines semaines. Les équipes se mettent donc en place, mais surtout de nouvelles priorités ont été fixées et la France a pris toute sa part dans leur définition, ce qui se reflète aussi bien dans le programme stratégique arrêté par le Conseil européen que dans les orientations proposées par Jean-Claude Juncker pour les cinq prochaines années.
Ce Conseil portera sur l’une de ces grandes priorités stratégiques, l’une de celles dont dépend l’avenir de l’Europe et qui doit devenir un grand projet européen : il s’agit de la politique énergétique et climatique de l’Union.
L’Union européenne est confrontée au double défi d’assurer sa sécurité et son indépendance énergétiques et d’engager une nécessaire transition énergétique à l’échelle du continent, pour répondre, en particulier, aux enjeux du changement climatique.
Les décisions doivent être prises dès ce Conseil européen du mois d’octobre 2014, afin que l’Europe soit elle-même en mesure de contribuer au succès de la conférence sur le climat qui se déroulera à la fin de l’année 2015 à Paris et devra permettre de prendre le relais, vous le savez, du protocole de Kyoto. L’ensemble de la communauté internationale doit en effet apporter une réponse au réchauffement climatique, lequel, s’il dépassait les deux degrés, mettrait en danger l’avenir de la planète.
L’objectif de ce Conseil européen est donc d’aboutir à un accord ambitieux sur la politique en matière d’énergie et de climat reposant sur trois principes : l’efficacité, les efforts devant porter sur les secteurs engendrant les principales émissions de gaz à effet de serre ; la responsabilité, puisque chaque pays devra contribuer à l’effort collectif ; et la solidarité, dans la mesure où la répartition de l’effort devra tenir compte des différences de richesse entre les États.
Tout l’enjeu sera d’obtenir un accord entre États membres sur de grands objectifs que nous défendons pour l’horizon 2030, au-delà, donc, de ce qui est déjà fixé pour 2020, à savoir 40 % de réduction des gaz à effet de serre, 27 % d’énergies renouvelables dans notre consommation finale d’énergie et 30 % d’économies d’énergie, c'est-à-dire d’efficacité énergétique supplémentaire. Tout cela est en cohérence avec notre projet de loi relatif à la transition énergétique, que l’Assemblée nationale a voté aujourd’hui.
Pour parvenir à un tel accord, nous devons trouver des compromis sur différentes dimensions de ce paquet énergie-climat.
Tout d’abord, les efforts des acteurs européens doivent s’appuyer sur un marché du carbone réformé. C’est le sens des propositions actuelles qui visent à réduire progressivement et de façon substantielle le nombre de quotas mis aux enchères. Il convient aussi de créer des dispositifs visant à nous assurer que le prix de la tonne de carbone reste incitatif. Ce marché du carbone devra dans le même temps continuer à prendre en compte les risques de délocalisations liés à ce système – on parle de « fuite de carbone » –, grâce en particulier à l’allocation de quotas gratuits pour les secteurs industriels les plus exposés à la concurrence internationale, et ce de façon plus dynamique, pour tenir compte des évolutions technologiques.
Ensuite, nous devons accompagner la transition énergétique des pays qui ont le plus de retard. C’est pourquoi nous soutenons le recours à une partie des revenus du marché du carbone pour aider à la modernisation des secteurs énergétiques les plus polluants, mais également pour soutenir l’innovation en faveur d’une énergie propre et durable.
Les discussions sur ce paquet comportent par ailleurs des enjeux de solidarité envers les pays dont les mix énergétiques et les trajectoires historiques les éloignent d’une transition rapide. À cet égard, il s’agit de permettre à certains États membres de bénéficier d’une partie réservée des revenus du marché du carbone au titre de la solidarité européenne.
Enfin, si l’ensemble des efforts européens représentera, au niveau de l’Europe, une réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre, les cibles de réduction seront définies au niveau national. Nous devons donc nous accorder sur les grands principes d’une méthodologie de répartition de l’effort. Dans ces discussions, les autorités françaises ont proposé et soutenu une répartition qui tienne compte des différences de richesse relative entre les États, grâce à un calcul équitable fondé sur le PIB par habitant. Les spécificités des différents secteurs économiques devront également être prises en compte. Il faudra par exemple que l’accord final reconnaisse les particularités du secteur agricole.
Il ne faut pas le cacher, les négociations restent néanmoins difficiles, notamment avec les pays du groupe de Visegrád, qui réunit la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie. Je me suis moi-même rendu récemment à Bratislava pour échanger et convaincre les membres de ce groupe. Hier encore, j’ai eu des échanges très denses avec mon homologue tchèque, à l’occasion d’une rencontre à Prague, afin d’encourager ces pays à faire mouvement.
Les chefs d’État ou de gouvernement reviendront également sur le sujet crucial de la sécurité énergétique européenne.
Le Conseil européen devrait en effet réaffirmer la nécessité de réaliser des investissements supplémentaires dans le réseau énergétique européen, et singulièrement dans les « projets d’intérêt commun ». L’enjeu sera également de s’assurer des bonnes conditions de négociation avec les pays tiers pour la fourniture d’énergie.
Nous serons particulièrement attentifs à la question des interconnexions énergétiques européennes, et surtout à leurs modalités de réalisation. Il est nécessaire, par exemple, de répondre au problème de la péninsule ibérique ou de l’approvisionnement des pays baltes. La France sera attentive à ce que les objectifs fixés soient réalistes, réalisables et répondent réellement aux besoins.
En effet, le besoin d’investissement au niveau européen est important et incontestable, et la France agit d’ailleurs en ce sens grâce à de nouvelles infrastructures et à des discussions régulières avec ses voisins. Néanmoins, il est nécessaire de prendre en compte les situations nationales et les réalités économiques qui y sont adossées.
En conclusion, il reste encore de nombreux éléments sur lesquels des différences d’appréciation entre États membres persistent. C’est une négociation compliquée, dans laquelle nous devons trouver le point d’équilibre entre notre ambition et le calibrage des paramètres techniques. Il n’en demeure pas moins que l’Europe doit définir très rapidement une position commune. C’est tout l’enjeu des discussions que nous aurons au cours des prochains jours. C’est également tout l’enjeu de nos échanges que de convaincre l’ensemble de nos partenaires que l’intérêt de l’Europe, de ses acteurs économiques, de ses entreprises et, bien évidemment, de ses citoyens est de faire du continent un continent pionnier en matière de transition énergétique.
Le second sujet majeur de ce Conseil européen, c’est la situation de la croissance et de l’emploi. Ce Conseil précédera d’ailleurs un sommet de la zone euro, que la France a souhaité.
Avant même l’entrée en fonction de la nouvelle Commission, un débat est nécessaire sur la situation économique de l’Europe, marquée, je l’évoquais au début de mon intervention, par un ralentissement de la croissance, ainsi qu’un risque de stagnation prolongée, voire de déflation. C’est ce qui a d’ailleurs conduit le président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, à annoncer des mesures particulièrement audacieuses de réduction des taux et d’injection de nouvelles liquidités. Toutefois, comme il l’a dit lui-même, si la politique monétaire peut apporter une contribution à la sortie d’un risque de récession, il faut que d’autres politiques, en particulier les décisions prises par les États membres en matière de coordination de leurs politiques budgétaires, d’investissement et de réformes structurelles, apportent elles aussi leur contribution.
Notre action doit donc être de deux ordres. Il faut bien évidemment continuer à mobiliser toutes les politiques communes de l’Union au service de la croissance. Cela concerne bien sûr le marché intérieur, le commerce et l’innovation. Cependant, nous devons faire plus, notamment en mettant en place de véritables politiques industrielles, pour renforcer l’attractivité et la compétitivité de l’Europe, pour qu’elle redevienne un lieu de production doté d’une base industrielle solide répartie sur l’ensemble du continent.
Notre priorité doit aussi être le soutien à l’investissement, qui a chuté de 15 % dans l’Union depuis 2008. C’est d’autant plus problématique que les besoins en la matière sont colossaux. Ils sont d’ailleurs reconnus dans tous les pays, en particulier dans des secteurs dont dépendra le potentiel de croissance future de l’Europe, comme l’énergie, qui est au cœur de la problématique que j’ai évoquée précédemment, les transports, le numérique et les télécommunications. Comment redresser la situation ? Nous soutenons fermement la proposition de Jean-Claude Juncker d’un plan de 300 milliards d’euros d’investissements publics et privés sur les trois prochaines années. Nous appuierons évidemment les propositions visant à sa mise en œuvre rapide.
Dans cette optique, nous devons, d’une part, mobiliser pleinement les acteurs et les ressources existantes. Je pense aux moyens du cadre financier pluriannuel, notamment ceux du mécanisme d’interconnexion, qui permettront de financer de grands projets comme le canal Seine-Nord, le projet ferroviaire Lyon-Turin ou d’autres projets de même ampleur dans l’ensemble de l’Union européenne. Je pense aussi au rôle particulier de la Banque européenne d’investissement, dont la doctrine en termes de prise de risque pourrait évoluer, afin de mieux soutenir les petites et moyennes entreprises. Cette dernière pourrait aussi encourager la coordination entre banques publiques nationales, comme elle le fait, en France, avec la BPI, la Banque publique d’investissement, ou la Caisse des dépôts et consignations.
De même, nous devons pleinement mobiliser les fonds européens pour pérenniser les project bonds. Actuellement, quatre de ces « obligations de projet » – pour le dire en français – ont été mises en œuvre à l’échelle européenne, dont l’une en France visant à permettre l’équipement en réseau à haut débit de plusieurs de nos régions. Au-delà de cette phase pilote, ces mécanismes de financement qui permettent de mobiliser davantage l’investissement privé grâce à la garantie publique offerte par la Banque européenne d’investissement devraient être développés.
Au-delà de ce qui existe, nous devons réfléchir à de nouveaux outils. Je pense à la mise en place d’une capacité additionnelle de financement, qui pourrait par exemple prendre la forme d’un fonds de garantie au niveau du budget européen, fonds géré par la Banque européenne d’investissement.
En outre, la mobilisation de l’épargne privée, très importante en Europe, par la création de nouveaux véhicules d’investissement de long terme, pourrait être encouragée.
Enfin, le cadre réglementaire entourant le financement de marché pourrait être assoupli pour développer les alternatives au financement bancaire, en particulier en direction des petites et moyennes entreprises.
C’est dans cet esprit que la France abordera toutes les échéances prochaines qui seront appelées à traiter de ces questions majeures, en particulier après l’investiture de la commission Juncker.
Je ne veux pas éluder, avant de conclure, la question de la trajectoire budgétaire française. Même si elle n’est pas à l’ordre du jour de ce Conseil européen, elle est d’actualité et je ne doute pas que certains d’entre vous l’évoqueront.
Le projet de budget pour 2015 de la France repose sur un équilibre entre le maintien de nos engagements, en termes de maîtrise des dépenses et de poursuite des réformes, et l’adaptation à la situation économique exceptionnelle que nous traversons.
Il ne faut pas spéculer à vide. La Commission européenne n’a pas encore forgé son opinion sur un plan budgétaire qui ne lui pas encore été transmis et qui lui sera communiqué demain 15 octobre, comme c’est le cas pour les autres pays de l’Union.
Nous poursuivons donc le dialogue avec elle comme avec nos partenaires pour expliquer le bien-fondé de notre stratégie et les sensibiliser aux contraintes qui la sous-tendent, mais nous ne demandons ni exception ni changement des règles.
La question des trajectoires budgétaires des États membres doit s’intégrer dans un débat plus large, celui du choix des politiques économiques que nous voulons mener en Europe. On ne peut pas en même temps faire le choix des réformes, du soutien à la croissance, à la compétitivité et à l’emploi et s’engager dans un surcroît d’austérité. Chacun en a tiré les leçons, y compris de grandes institutions internationales comme le FMI ou l’OCDE, qui mettent en garde contre le risque, alors que la croissance commence à repartir ailleurs dans le monde – aux États-Unis, dans les pays émergents –, d’une stagnation qui durerait en Europe et qui finalement handicaperait les possibilités de sortie de crise et de réduction du chômage.
C’est ce débat qui est aujourd’hui posé en Europe. Nous ne voulons donc pas remettre en cause nos engagements, ceux que nous avions transmis à la Commission européenne dans le cadre du plan triennal et qui portent en particulier sur une réduction de 50 milliards d’euros des dépenses publiques d’ici à 2017 et de 21 milliards d’euros dès le budget pour 2015, engagements qui portent également – c’est l’objet du pacte de responsabilité et de solidarité – sur une baisse de 40 milliards d’euros des prélèvements fiscaux et sociaux sur nos entreprises pour leur permettre de retrouver de la compétitivité. Ce sera une contribution décisive également à la croissance et à l’emploi, qui est un objectif commun à celui de l’Union européenne. Mais nous ne pensons pas qu’il faille aujourd’hui s’engager dans des politiques de consolidation budgétaire plus forte, dans des politiques d’austérité qui remettraient en cause les conditions de la reprise et de la croissance.
J’observe que le consensus des économistes et les grandes organisations internationales ont plutôt tendance à poser le débat dans les mêmes termes que nous.
Voilà, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je souhaitais vous dire dans ce propos introductif, à la veille d’un Conseil européen particulièrement important. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – MM. André Gattolin et Jean-Claude Requier applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour le groupe écologiste.
M. André Gattolin. Monsieur le secrétaire d'État, vous venez à l’instant de nous détailler les différents éléments qui figurent à l’ordre du jour du prochain Conseil européen : paquet climat-énergie – je vous remercie d’avoir commencé votre propos en évoquant longuement cette question –, situation économique de l’Union européenne et vraisemblablement situation internationale seront les trois chapitres les plus importants qui occuperont les échanges.
Je note par ailleurs que nous avons ce débat au moment où l’Assemblée nationale entame l’examen du projet de loi de finances pour l’année 2015 et alors que les discussions se font vives avec la Commission et nos partenaires européens sur les questions budgétaires.
Je ne doute pas que mes collègues seront ici nombreux à revenir sur ce sujet.
Pour ma part, vous vous en doutez, c’est à la question climatique et énergétique que je consacrerai l’essentiel de mon intervention, en insistant sur ses fortes implications géostratégiques, une dimension que nous avons trop tardivement commencé à prendre en compte, alors même qu’elle surdétermine toute une partie de nos politiques.
En effet, il est clair désormais que la question des choix énergétiques ainsi que celle des effets engendrés par le dérèglement climatique constituent non plus seulement un problème environnemental, mais représentent aujourd’hui des enjeux géostratégiques d’un type nouveau qui influent sur la stabilité politique de la planète, au même titre que les enjeux militaires classiques.
Depuis plusieurs mois, d’ailleurs, les États-Unis ont commencé à revoir leurs doctrines des risques internationaux en intégrant ces nouveaux éléments.
Hier encore, leur département de la défense a rendu public un rapport soulignant les dangers accrus du fait du réchauffement, depuis la montée des océans jusqu’aux probables pénuries en eau et en nourriture en divers endroits de la planète.
La France s’est également engagée, depuis peu, dans cette réflexion, notamment grâce au travail de notre collègue Leïla Aïchi sur ces sujets.
Mais l’Union européenne, comme c’est trop souvent le cas dans les dossiers qui renvoient à la souveraineté de ses membres et aux questions stratégiques les plus sensibles, peine à définir une philosophie qui permette de prendre tout cela à bras-le-corps.
C’est particulièrement perceptible s’agissant de nos rapports avec la Russie.
À l’échelle globale de l’Union européenne, ce pays constitue un fournisseur énergétique de première importance. En 2013, 39 % des importations européennes de gaz en étaient originaires.
La Russie est même le seul fournisseur extérieur de gaz naturel pour six de nos États membres, le gaz représentant par ailleurs une part importante de leur consommation énergétique finale.
En temps de paix, une telle dépendance n’est déjà pas sans risque. Mais lorsqu’une tension internationale se fait jour, comme c’est le cas depuis plusieurs mois autour de l’Ukraine, cette dépendance devient même franchement problématique.
Dans ces conditions, comment gérer à court terme nos relations avec la Russie ? Pour les uns, il faudrait se montrer plutôt conciliant avec Moscou. Pour les autres, au contraire, il convient de demeurer le plus ferme possible.
Au-delà, comment faire pour diminuer à plus long terme notre dépendance énergétique, alors même que l’Union européenne importe aujourd’hui 53 % de l’énergie qu’elle consomme ?
Là encore, les avis divergent : pour les uns, la nécessité de prendre en compte les tensions énergétiques nouvelles rend légitime l’exploitation de toutes les ressources hydrocarbures, y compris non conventionnelles, que l’on pourrait trouver sur le continent ; pour les autres, ces évolutions sont la preuve de ce que la transition énergétique est plus que jamais d’actualité.
Quelle que soit l’opinion que l’on peut avoir sur ces questions, il est au moins une chose sur laquelle, je crois, nous pouvons nous mettre d’accord : la souveraineté de l’Europe, et donc sa capacité à peser sur la scène internationale, passe aussi par la mise en place d’une véritable politique énergétique.
Nos politiques tant climatique qu’énergétique et stratégique doivent donc être repensées conjointement. Tant que nous n’accepterons pas de le faire concrètement, tant que nous continuerons à imaginer ces politiques comme si elles n’entretenaient pas de rapports les unes avec les autres ou pis, comme si elles devaient s’opposer les unes aux autres, chacune d’entre elles échouera à atteindre ses objectifs.
Mettre tous ces éléments en cohérence n’est évidemment pas chose facile ; c’est au contraire éminemment complexe. Mais je crois que, quand le choix réside entre la complexité, d’une part, et la fatalité, d’autre part, c’est bien la première qu’il vaut mieux privilégier.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, vous le savez sans doute, le mois de septembre qui vient de s’écouler a été le plus chaud dans le monde depuis 1880, date à partir de laquelle des relevés constants ont été effectués. Il s’inscrit dans une tendance lourde et qui va en s’accélérant. Quel que soit l’indicateur considéré, tout laisse penser que les politiques déjà mises en place ont échoué à ralentir cette dangereuse évolution.
J’étais il y a quelques semaines en mission au Groenland pour la commission des affaires européennes du Sénat. Je me suis rendu à cette occasion au Jakobshaven, le plus grand glacier de l’hémisphère nord et l’un de ceux qui fondent le plus vite : il a autant reculé ces dix dernières que durant la totalité du siècle précédent !
Nous faisons face là à une transformation accélérée, qui, par rapport au réchauffement climatique lui-même, tient lieu à la fois de conséquence et de facteur aggravant, car plus les grands ensembles glaciaires de la planète fondent, plus les équilibres qui régulent encore notre climat se dérèglent et plus le réchauffement s’accélère.
Il s’agit là d’une spirale infernale qu’il sera de plus en plus difficile de briser, si nous n’y prenons garde ; d’autant que les ambitions des uns et des autres pour tirer le meilleur parti de ces transformations, notamment via l’exploitation accrue, en Arctique, des ressources naturelles, se font de plus en plus vives et risquent bien d’aggraver encore cette tendance.
Alors, si nous voulons enfin remettre en cause ces évolutions terribles, l’Europe doit se montrer plus ambitieuse et plus cohérente que jamais.
Cela nous amène naturellement aux discussions portant sur le futur paquet climat-énergie lui-même. Or les propositions qui se trouvent sur la table s’agissant de ce dernier sont hélas bien inégales.
Celles de la Commission européenne sont clairement insuffisantes. Celles du Parlement européen sont déjà bien plus ambitieuses.
La question est donc de savoir dans quelle mesure nos gouvernements – et singulièrement le gouvernement français – sauront se montrer à la hauteur de ces ambitions.
En l’occurrence, le Parlement européen propose l’instauration d’un objectif de 30 % d’énergies renouvelables dans la production totale européenne pour 2030, de 40 % de réduction de la consommation énergétique et de 40 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Les écologistes proposent quant à eux un objectif plus élevé de 45 % d’énergies renouvelables, de 40 % de réduction de la consommation énergétique et de 60 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Mais, au-delà de ces chiffres, il est absolument primordial que ces objectifs soient contraignants, pays par pays, sans quoi nous pouvons d’ores et déjà affirmer qu’ils ne seront pas tenus.
Au vu des dernières discussions, notamment celles qui ont eu lieu la semaine dernière à Bruxelles, le gouvernement français semble aujourd’hui assez hésitant. Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous nous apporter quelques précisions sur ce dernier point et sur la volonté de la France de soutenir cette résolution ?
Au-delà des seules politiques européennes, ce Conseil européen constitue à notre sens une étape essentielle dans la préparation de la COP21, que notre pays accueillera à la fin de l’année prochaine à Paris.
Pour que ce rendez-vous soit réussi, nous devons faire preuve d’une double exemplarité : l’Europe doit être exemplaire face au monde, sinon son influence restera limitée, et la France doit être exemplaire face à ses partenaires européens, pour ne pas risquer de perdre sa crédibilité dans ce dossier. (M. le président de la commission des affaires européennes ainsi que Mmes Michèle André et Delphine Bataille applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour le groupe CRC.
M. Éric Bocquet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le prochain Conseil européen sera l’occasion, notamment, de revenir sur la question du climat et de l’énergie, conformément aux conclusions des précédents conseils.
Certes, il est important de définir le nouveau cadre d’action en matière de climat et d’énergie, voire de prendre quelques mesures supplémentaires afin de renforcer la sécurité énergétique.
Mais permettez-moi de revenir tout d’abord sur un point qui nous paraît essentiel si nous voulons réellement avancer dans tous les domaines, y compris celui de l’énergie : je veux parler de la situation économique de l’Union européenne.
Depuis des mois, et pour cause, ce sujet est au cœur des préoccupations des dirigeants européens. Le futur commissaire européen chargé de l’emploi, de la croissance, de l’investissement et de la compétitivité a même déclaré dernièrement que l’Allemagne, la France et l’Italie doivent privilégier l’investissement pour stimuler la croissance économique.
Pourtant, il nous paraît compliqué d’investir plus alors que, au niveau budgétaire, la Commission européenne demande, en particulier à la France, de réduire encore davantage les dépenses publiques...
C’était sans compter sur la proposition du commissaire européen qui explique que les partenariats public-privé, les PPP, sont la solution pour permettre aux pays d’investir ; il soulignait même : « Notre but est d’attirer de l’argent privé pour de grands projets d’infrastructures dans les secteurs de l’énergie, du transport et du haut débit. Le secteur privé ne peut pas prendre la totalité des risques. »
En théorie, les PPP permettent d’entretenir, de construire et d’améliorer des équipements à moindres frais. Toutefois, la Cour fédérale des comptes en Allemagne doute que ce système revienne moins cher. Elle a pris pour exemple sept grands projets routiers financés par le privé ; cinq d’entre eux auraient été moins coûteux s’ils avaient été financés de manière classique, et 1,9 milliard d’euros auraient ainsi été économisés.
Pour rester en Allemagne, l’exemple de l’autoroute A1 est tout à fait révélateur. Le ministère des transports pensait que le PPP se traduirait par une économie de 40 %, mais au final cela a coûté un tiers de plus que s’il avait été financé par le contribuable allemand.
Les responsables politiques se déchargent ainsi des missions de service public avec l’argument de la rigueur budgétaire. Mais le malheur des uns fait le bonheur des autres, comme le dit le vieil adage… Nous savons tous que certains consortiums sauront tirer avantage de cette situation.
Depuis des mois, voire quelques années maintenant, on nous serine que la rigueur est le remède miracle à tous nos maux. Souvent d’ailleurs, le modèle allemand est cité en exemple, mais depuis quelques semaines, des voix discordantes commencent à se faire entendre. Le directeur du très réputé Institut allemand de recherche économique – le DIW –, Marcel Fratzscher, vient de publier Die Deutschland-Illusion – Allemagne, l’illusion. Cet ouvrage expose les conclusions auxquelles sont parvenus les chercheurs du DIW. Or, contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire, l’Allemagne n’est pas un si bon modèle... Ce serait même plutôt un modèle qui présente quelques fragilités.
L’investissement public en Allemagne représente 1,6 % du PIB, quand la moyenne de la zone euro se situe à 2,1 %. L’évolution du PIB en volume au deuxième trimestre 2014 par rapport au trimestre précédent est de - 0,2 %, alors que pour la France il est de 0 et pour l’Union européenne à vingt-huit il est de 0,2 %. Outre une croissance faible, la progression des salaires est moins grande que dans le reste de la zone euro, un enfant sur cinq vivant sous le seuil de pauvreté.
Au début des années quatre-vingt-dix, l’État et les entreprises investissaient 25 % du PIB dans les infrastructures routières, les câbles téléphoniques, les écoles et les usines. Aujourd’hui cette proportion est tombée à 19,7 %. L’Allemagne n’investit pas dans son avenir, les investissements d’aujourd’hui sont pourtant la prospérité de demain – petit clin d’œil à Helmut Schmidt. Le DIW estime que le déficit d’investissement a représenté 3 % du PIB entre 1999 et 2012, et même 3,7 % entre 2010 et 2012... L’État et les entreprises devraient dépenser 103 milliards d’euros de plus rien que pour générer une croissance raisonnable et rester au statu quo...
Voilà aujourd’hui où la sacro-sainte rigueur nous conduit : ne plus investir dans l’avenir que ce soit pour les infrastructures, les usines et, encore plus important, l’éducation. Pourtant, si nous voulons être « compétitifs », il faut investir de façon intelligente et cesser de penser que la dette publique est un fardeau, car la dette qui investit a aussi des vertus.
Si l’on prend l’exemple de la France, ce qui cause réellement cette dette n’est pas tant un excès de dépenses, puisque ces dernières n’ont augmenté que de 2 % en trente ans, qu’un déficit persistant de recettes. Les exonérations fiscales et sociales accordées, aux grandes entreprises pour l’essentiel, sur cette période représentent un manque à gagner de 488 milliards d’euros. De plus, depuis quarante ans, les États ne peuvent plus se financer directement auprès des banques centrales et sont donc obligés de passer par les marchés financiers. Ainsi, les intérêts versés représentent 589 milliards d’euros ! Enfin, l’évasion fiscale a coûté à notre pays 424 milliards d’euros depuis 1980...
D’ailleurs, la question de l’énergie, du climat, et plus généralement de la transition énergétique, est certainement un des défis majeurs que nous avons à relever, et il peut nous permettre de relancer l’économie de façon raisonnée en tenant compte de l’ensemble des variables.
Le 23 septembre dernier s’est tenu à New York le sommet sur le climat de l’ONU. Malheureusement, on ne peut pas dire que ce dernier ait été une véritable réussite. Ainsi, le fonds vert de l’ONU n’a récolté pour l’instant que 2,3 milliards de dollars ; c’est très loin de l’objectif du fonds, qui est de réunir 10 milliards de dollars d’ici à la fin de l’année, et 100 milliards par an à partir de 2020.
La seule avancée qui a pu être constatée est un accord sur la déforestation signé par vingt-sept États, plusieurs entreprises majeures et diverses ONG, organisations non gouvernementales. La Conférence des Parties se réunira au Pérou, à Lima, en décembre prochain.
En 2015, Paris accueille la prochaine Conférence sur le climat, d’où la nécessité pour l’Europe d’aboutir à une décision formelle visant à construire un accord ambitieux, équitable et juridiquement contraignant. En effet, en mars dernier, si la Commission a retenu des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, elle n’a pas posé d’objectifs contraignants en termes d’efficacité énergétique ou d’énergies renouvelables. Rappelons simplement que les émissions de CO2 ont atteint 35,1 milliards de tonnes en 2013, soit presque un tiers de plus qu’il y a dix ans...
C’est pourquoi il importe de parvenir à créer une véritable politique de l’énergie européenne à travers une planification écologique. Les États doivent se réengager dans l’avenir de leur filière industrielle énergétique. C’est dans ce sens que nous portons l’exigence de filières relocalisées, notamment en ce qui concerne le photovoltaïque, qui est une filière d’avenir. C’est également dans ce sens que nous nous opposons résolument à la mise en concurrence et à la privatisation des concessions hydroélectriques, qui constituent en France la première source d’énergie renouvelable non intermittente. Celles-ci figurent parmi nos avantages compétitifs.
C’est, je pense, monsieur le secrétaire d’État, tout l’enjeu que la France devra défendre lors de ce prochain Conseil européen. Toutefois, peut-être pourriez-vous nous expliquer plus particulièrement la position qui sera soutenue à ce propos ?
Enfin, pour terminer, je voudrais juste vous faire part de mon « étonnement » sur la façon dont se sont déroulées les nominations des commissaires européens. Chaque commissaire désigné a été invité à une audition publique devant les commissions parlementaires compétentes pour le portefeuille qui lui a été attribué. Cette nouvelle composition de la Commission est soumise à approbation du Parlement européen. Sur le papier, il est vrai que cela a fière allure et que l’on a l’impression d’un véritable choix démocratique. Néanmoins, la réalité est un peu différente : en fait, cela s’est également soldé par des tractations politiciennes de couloir... Quelle image est renvoyée à nos concitoyens ! Si nous voulons que l’Europe soit une avancée démocratique et humaine, que tous les citoyens s’y intéressent, on ne peut continuer d’agir ainsi.
Souvenez-vous, mes chers collègues : voilà quelques mois, nous débattions avec votre prédécesseur, monsieur le secrétaire d’État, des déficits démocratiques de la construction européenne. À l’évidence, le débat reste totalement ouvert.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du RDSE.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le secrétaire d’État, au menu du prochain Conseil européen, vous aurez deux plats de résistance : d’une part, l’énergie et le climat ; d’autre part, l’économie. Néanmoins, vous pourriez ajouter au dessert, entre la poire et le fromage bruxellois, quelques considérations sur diverses questions de politique étrangère.
Aussi, je saisis cette occasion pour revenir sur les difficultés chroniques que connaît l’Europe pour montrer un visage uni dans ce domaine. En effet, malgré les encouragements institutionnels opérés par les différents traités, l’Europe peine à exister sur la scène internationale. Certes, on constate quelques progrès. Je pense en particulier à la crise ukrainienne, pour laquelle, à force de négociations, les États membres de l’Union européenne ont réussi à se mettre d’accord pour établir un régime de sanctions économiques contre la Russie.
S’agissant en revanche de la guerre contre Daech en Irak, même si la coalition internationale s’est progressivement agrandie avec l’inclusion de plusieurs pays européens, la France est venue seule appuyer rapidement les États-Unis par ses frappes aériennes. Pourtant, les pays de l’Union européenne sont tous très concernés par le conflit en Irak ainsi que par celui qui se déroule en Syrie, en raison notamment du recrutement de jeunes européens dans les rangs des djihadistes.
Dans le cas des crises au Mali et en République centrafricaine, l’Union européenne n’avait pas réussi non plus à s’affirmer en tant que puissance politique et militaire. En effet, l’opération Serval a été interprétée par un grand nombre d’observateurs comme un échec de l’Europe de la défense.
À ce jour, une véritable politique étrangère commune n’est donc pas réellement effective, alors que les menaces se précisent à l’est et au sud du continent européen. Il faut bien reconnaître, hélas ! que ce sont avant tout les relations intergouvernementales, et non l’Europe, qui prédominent dans la gestion des conflits.
Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir enrichi les institutions d’outils destinés à mobiliser une diplomatie et une défense européenne. Comme vous le savez, mes chers collègues, le processus d’intégration européenne s’est accompagné d’une volonté d’harmonisation de la politique étrangère et de défense. Européens convaincus, les radicaux de gauche ont d’ailleurs toujours soutenu les initiatives allant dans ce sens.
L’acte fondateur, c’est bien sûr la création d’un second pilier par le traité de Maastricht, qui jette ainsi les bases de la politique étrangère et de sécurité commune, la fameuse PESC. Il s’agissait d’affirmer l’identité de l’Union sur la scène internationale par l’affirmation de grands principes tels que la sauvegarde de valeurs communes, le renforcement de la sécurité de l’Union, le maintien de la paix, ou encore le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Il y a bien sûr aussi le Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Catherine Ashton, qui va bientôt être remplacée par Federica Mogherini. J’espère qu’avec ce changement la rigueur britannique laissera la place au charme latin. (Sourires sur plusieurs travées.) Il convient également de citer le comité de politique et de sécurité. Toutefois, en dépit de tout cela, c’est le Conseil européen qui garde la main en matière de décision. Et avec la règle de l’unanimité, autant dire que c’est bien souvent l’immobilisme qui prévaut.
Je m’inquiète également de l’affaiblissement des capacités militaires des États membres alors que, là aussi, tout reste à faire pour créer une capacité d’action autonome pour l’Europe. L’objectif fixé en 2003 de créer une force de réaction rapide d’environ 60 000 hommes pour une durée d’au moins un an tarde à se réaliser. Pourtant, les traités ont élaboré un cadre de plus en plus volontaire avec la création de l’Agence européenne de défense ou encore l’encouragement aux « coopérations structurées permanentes ».
Néanmoins, tous ces instruments ne suffisent pas à affirmer le potentiel de puissance de l’Europe en matière de politique étrangère. Au moins peut-on se féliciter que le dernier Conseil européen de l’année 2013 ait pris en compte cette problématique, s’agissant en particulier de la défense. Ses conclusions rappellent en effet qu’une « politique de sécurité et de défense commune efficace » contribue « à renforcer la sécurité des citoyens européens » et concourt « à la paix et à la stabilité dans notre voisinage et dans le monde en général ».
Au-delà de ce grand principe déclamatoire, il a été précisé que l’Union européenne devait assumer davantage de responsabilités militaires en améliorant ses capacités de réaction rapide par un accroissement de la flexibilité et des moyens de déployer des groupements tactiques. Un appel à la mutualisation des capacités militaires a été par ailleurs réaffirmé. C’est essentiel dans un contexte de réduction des budgets nationaux de la défense.
Je rappellerai à cet égard que l’effort de défense est consenti à hauteur de 40 % par la France et la Grande-Bretagne, ce qui revient à faire peser sur ces deux pays le poids des interventions militaires, puisque celles-ci ne sont pas supportées par le budget de l’Union, à moins que le Conseil européen n’en décide autrement à l’unanimité.
S’agissant d’ailleurs de cette fameuse règle de l’unanimité, un débat doit être ouvert, car elle est un obstacle majeur à l’émergence d’une politique étrangère commune. Notre pays, monsieur le secrétaire d’État, et l’Allemagne sont favorables à plus de souplesse – nous sommes parfois d’accord avec les Allemands.
Je sais bien que le principe de la majorité qualifiée est un sujet délicat, car en toile de fond il y a la question du lien transatlantique entre la Grande-Bretagne et les États-Unis qui est plus ou moins bien accepté selon les pays.
Mes chers collègues, lors du Conseil européen du 6 décembre 1983 à la veille de la présidence française, le Président François Mitterrand s’exprimait ainsi : « Que l’Europe reste elle-même, c’est vrai dans tous les domaines ; qu’elle soit aussi fidèle à son ambition qui consiste, d’étape en étape, à définir des responsabilités communautaires nouvelles. »
La sécurité dans le monde est encore bien fragile. La France prend toujours ses responsabilités en cas de crise, mais se retrouve souvent à agir de façon isolée, alors que la multiplication des fronts nécessite un engagement collectif puissant. Par son histoire, par son poids démographique et économique, l’Europe est capable d’être un acteur de premier plan sur la scène internationale si elle en affirme la volonté. Il a fallu la crise des dettes souveraines pour avancer davantage en matière d’intégration économique. Faudra-t-il attendre une crise majeure touchant directement à la sécurité des citoyens européens pour mesurer les potentialités stratégiques d’une solidarité forte entre les États membres ?
C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je veux compter sur vous et sur le Gouvernement auquel vous appartenez pour contribuer à l’approfondissement de la politique étrangère et de sécurité commune. (Applaudissements sur les travées du RDSE. – Mme Michèle André et M. Didier Marie applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour le groupe UDI-UC.