Mme Catherine Procaccia. C’est compliqué !
M. Jean-François Husson. Vos propos sont très compliqués, madame la ministre !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. … un horizon ; une adaptation pour les zones de montagne et, plus généralement, pour les zones où la densité de population est faible ; enfin, une dérogation pour les intercommunalités de 16 000 ou 17 000 habitants qui viennent de se constituer, et une autre pour les îles.
M. le président. Le sous-amendement n° 1180, présenté par M. F. Marc, est ainsi libellé :
Amendement n° 1105, alinéa 7
Compléter cet alinéa par les mots :
ou d'une presqu'île
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. J’ai entendu avec intérêt les arguments développés à l’instant par Mme la ministre sur la nécessité de proposer des adaptations.
Je partage l’idée selon laquelle il convient aujourd’hui de développer une logique globale de l’intercommunalité dans le cadre de cette législation nouvelle.
J’approuve aussi ce qu’elle a dit sur la nécessité d’avoir une ambition. Si l’on veut une intercommunalité qui réussit, qui apporte des services à nos concitoyens, qui sert l’intérêt général, il faut qu’elle dispose de ressources, et donc de bases fiscales suffisamment larges et significatives.
Dès lors, il me semble légitime de viser une taille minimum pour disposer de cette capacité d’agir et pour apporter ainsi du sens aux prestations assurées pour satisfaire l’intérêt général.
Des adaptations s’avèrent toutefois nécessaires.
Je souscris parfaitement aux évolutions suggérées s’agissant de la densité de population dans les territoires ruraux et de montagne. Il s’agit, me semble-t-il, d’une adaptation significative par rapport à la taille d’intercommunalité recherchée, qui permettra aussi, comme l’a souligné Mme la ministre, de répondre aux préoccupations de nombre d’élus de ces secteurs.
Je propose simplement que, parmi ces adaptations qui portent, pour l’une d’entre elles, sur les territoires insulaires, l’on tienne également compte des presqu’îles.
Lorsque vous êtes sur une île, que vous regardiez au Nord, au Sud, à l’Est ou à l’Ouest, vous voyez…. de l’eau ! (Sourires.) En revanche, sur une presqu’île, vous voyez de l’eau devant vous, à gauche, à droite, et un peu de territoire derrière vous. Pourtant, il est parfois difficile de créer des liens avec ce territoire qui peut être relativement éloigné géographiquement, et cette particularité peut être à l’origine de difficultés importantes en matière d’organisation territoriale pour faciliter l’accès des services aux habitants.
Je propose donc, à travers ce sous-amendement, que la dérogation prévue pour les îles soit étendue aux presqu’îles.
M. le président. L'amendement n° 600, présenté par M. A. Marc, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) Au 1° , les mots : « le représentant de l’État dans le département » sont remplacés par les mots : « la commission départementale de coopération intercommunale » ;
La parole est à M. Alain Marc.
M. Alain Marc. Je me réjouis de vos propos, madame la ministre. Il me semble qu’à travers cet amendement, avec cette possibilité d’adaptation, vous venez tout simplement de découvrir ce qu’est la France ! (Sourires.)
Mon amendement, qui vient en complément du vôtre, vise à faire en sorte que les préfets ne soient pas tout-puissants. J’ai bien entendu que vous alliez leur envoyer une circulaire. Toutefois, aujourd’hui, leur comportement est très éloigné de vos propositions. En effet, alors que nous sommes en train de discuter de ce projet de loi, les préfets, notamment celui de l’Aveyron, accompagnés des sous-préfets, sont en train de réunir les présidents d’intercommunalités, dont je fais partie, pour envisager les adaptations et les évolutions possibles de ces dernières.
Madame la ministre, si vous pouviez faire cesser ce hiatus administratif, lequel va à l’encontre de votre volonté d’adaptation qui me semble très positive, je retirerais mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par M. Courteau, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
a) Le 1° est ainsi rédigé :
« La constitution d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant au moins 20 000 habitants ; toutefois ce seuil de population n'est pas applicable aux établissements publics dont le territoire comprend des zones de montagne délimitées conformément à l'article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ;
« Par ailleurs, ce seuil peut être abaissé soit par le représentant de l'État dans le département soit à la demande de la commission départementale de coopération intercommunale à la majorité des deux tiers des membres présents pour tenir compte des caractéristiques géographiques particulières de certains espaces, des bassins de vie, des schémas de cohérence territoriale et du territoire vécu au regard des compétences exercées par les établissements publics de coopération intercommunale du département.
« Afin de préserver des espaces de cohérence, de proximité, d’accessibilité aux services, les établissements publics de coopération intercommunale doivent comporter au maximum cinquante communes. Le représentant de l'État dans le département peut déroger à cette règle notamment pour les périmètres issus de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. »
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Par cet amendement, nous vous proposons que le seuil fixé dans le projet de loi initial puisse être abaissé soit par le représentant de l’État dans le département, soit à la demande de la commission départementale de coopération intercommunale, à la majorité des deux tiers des membres présents.
Il s’agit de tenir compte des caractéristiques géographiques particulières de certains espaces, des bassins de vie, des schémas de cohérence territoriale et du territoire vécu au regard des compétences exercées par les établissements publics de coopération intercommunale du département.
Par ailleurs, cet amendement tend à permettre au représentant de l’État de limiter le nombre maximum de communes d’un EPCI afin de préserver la proximité, les espaces de cohérence et d’accessibilité aux services.
M. le président. L'amendement n° 410, présenté par M. Montaugé et Mme Claireaux, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
a) Au 1°, les mots : « au moins 5 000 » sont remplacés par les mots : « un multiple de 5 000 habitants, en fonction de la densité d’habitat du territoire concerné, les seuils sont définis par décret » ;
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 137 rectifié, présenté par MM. Bertrand et Barbier, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
a) Au 1° , le nombre : « 5 000 » est remplacé par le nombre : « 20 000 ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 937, présenté par M. Delebarre, Mmes Bonnefoy, Herviaux, Guillemot et S. Robert, MM. Germain, Haut, Botrel, Courteau et Montaugé, Mme Jourda et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
a) Au 1°, le nombre : « 5 000 » est remplacé par le nombre : « 15 000 » ;
… ) au 1°, après le mot : « département », sont insérés les mots : « sur demande motivée de la commission départementale de coopération intercommunale à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés de ses membres, »
La parole est à M. Philippe Kaltenbach.
M. Philippe Kaltenbach. Cet amendement a été déposé par l’ensemble du groupe socialiste.
Alors que le Gouvernement est entré dans le débat avec la volonté de fixer un seuil à 20 000 habitants, la commission des lois a supprimé ce seuil, pour en revenir à celui qui est actuellement en vigueur de 5 000 habitants.
Les membres du groupe socialiste estiment quant à eux qu’il serait utile de fixer un objectif de façon à inciter les intercommunalités à se regrouper, tout en jugeant le seuil de 20 000 habitants trop élevé. Nous proposons donc de le fixer à 15 000 habitants, ce qui apporterait plus de souplesse à ce dispositif.
Pourquoi regrouper les EPCI ? Cela ne répond pas à une simple volonté de disposer d’établissements toujours plus gros. Toutefois, nous le savons, il existe encore sur nos territoires trop de petits EPCI qui n’auront pas les capacités de faire face aux dépenses ni de rendre les services attendus par la population.
Nous prévoyons en outre des adaptations pour les territoires insulaires et les zones de montagne, délimitées conformément à l’article 3 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.
Nous avons par ailleurs souhaité donner aux commissions départementales de coopération intercommunale, à une majorité qualifiée, la possibilité de saisir le préfet pour obtenir une dérogation à ce seuil.
La solution de facilité serait de ne toucher à rien, de laisser les choses en l’état. Nous estimons au contraire qu’il convient de permettre aux EPCI de se regrouper et d’atteindre une taille et une force suffisantes. Cet enjeu est important.
Il en est de même de ce projet de loi, qui est essentiel pour nos collectivités, nous ne cessons de le répéter depuis le début de cette discussion. Nous allons non seulement renforcer la compétence des régions en matière économique et conforter les départements, mais encore construire des intercommunalités d’une taille suffisante (Ce n’est pas une question de taille ! sur les travées de l’UMP.) et dotées de pouvoirs et de moyens d’action plus étendus.
C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste, au lieu de rester dans le statu quo, fait un pas en proposant d’abaisser le seuil de 20 000 à 15 000 habitants.
M. Alain Marc. Pourquoi pas 16 000 ? Ils ne savent pas compter.
M. Philippe Kaltenbach. Nous proposons de tenir compte des adaptations et aménagements présentés par la ministre, parmi lesquels la densité est une bonne idée en ce qu’elle permet non seulement de bien cibler les dérogations, mais aussi de donner la possibilité à la commission départementale de coopération intercommunale – c’est-à-dire aux élus locaux – de formuler une proposition au préfet si elle estime que, dans un coin du département et en dépit de ces adaptations, ce seuil de 15 000 habitants n’est pas adapté.
Cette solution équilibrée pourrait peut-être satisfaire tout le monde. Beaucoup ont déclaré au cours des débats qu’il fallait, pour arriver à un consensus, trouver un point d’équilibre. Le statu quo n’en est pas un et ferait courir au Sénat le risque d’être prochainement désavoué par l’Assemblée nationale et de voir le seuil remonter à 20 000 habitants. Le dispositif proposé, qui est raisonnable et peut faire l’objet de dérogations, va au contraire dans le sens de l’intérêt général. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste a déposé cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je me permets de rappeler que l’Association des maires de France, dont le congrès s’est tenu il n’y a pas si longtemps, dans sa très grande majorité, s’est opposée à ce seuil. Elle n’en veut pas ! Certes, rien ne nous oblige à tenir compte de cet avis… (Marques d’approbation sur les travées de l’UDI-UC.)
Quelles que soient les études retenues, madame la ministre, je reconnais l’effort de compréhension du Gouvernement sur les problèmes que rencontrent les collectivités en matière d’intercommunalité.
Mme Jacqueline Gourault. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cela dit, vous nous promettez monts et merveilles en la matière, mais hormis la création d’une mission obligatoire pour les offices de tourisme ou la prise en charge des gens du voyage, permettez-moi de douter des nouvelles compétences des intercommunalités ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) C’est pourtant bien ce qui les attend, je peux vous le dire ! Ce ne sont pas des arguments recevables.
Le Gouvernement propose de maintenir le seuil de 20 000 habitants tout en suggérant des adaptations. Je tiens tout d’abord à vous rappeler, s’agissant des communes de montagne, que la loi de 2010 n’avait prévu aucun seuil pour ces dernières. Telle est la loi actuellement en vigueur.
M. Roland Courteau. C’est vrai !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En effet, les conditions géographiques sont telles que même un seuil de 5 000 habitants ne pouvait pas coller !
M. Rémy Pointereau. Il a raison !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Toujours est-il que revenir au seuil de 20 000 habitants serait une régression pour les communes de montagne.
Les possibilités d’adaptation seront de la responsabilité du préfet, dont j’ai toujours reconnu la force de proposition, sans préjudice des pouvoirs de la CDCI. D’ailleurs, en 2010 déjà, je défendais déjà les représentants de l’État, et ceux qui leur étaient opposés sont ceux-là mêmes qui les défendent aujourd’hui ! J’espère que, de l’autre côté de l’hémicycle, on ne va pas se mettre à les attaquer ! (Sourires.)
J’ai beau avoir bien lu l’étude d’impact, madame la ministre, je ne sais toujours pas à quoi correspond ce seuil de 20 000 habitants. On aurait tout aussi bien pu inscrire 25 000 que 15 000…
Selon moi, tout dépend des territoires. Le critère de densité moyenne auquel vous faites référence ne fonctionne pas pour un département très rural, où les dérogations et adaptations ne seront de toute façon pas possibles. (Oui ! sur les travées de l’UMP.) C’est de l’arithmétique simple.
M. Rémy Pointereau. C’est de la physique !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je ne sais pas quel technocrate a encore inventé cela, mais c’est bête conne chou ; ou alors je n’y comprends plus rien ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Rémy Pointereau. Il a raison !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Laissons vivre les quelques intercommunalités mises en place sur des territoires insulaires. S’agissant des presqu’îles, la question est plus compliquée. Tout dépend de leur taille : si tout le Cotentin doit faire l’objet de dérogations – je sais que M. le président de la commission des lois est d’accord (Sourires.) –, cela risque tout de même de poser problème.
M. Rémy Pointereau. C’est le comble de l’absurde !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur Alain Marc, si c’est bien à la CDCI de délibérer, je crois que, dans notre beau pays, c’est le représentant de l’État qui propose.
Monsieur Courteau, vous êtes également favorable au seuil de 20 000 habitants,…
M. Roland Courteau. Avec des adaptations !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … ce qui est contraire à la position de la commission.
Les dérogations que vous proposez ne sont pas suffisantes. Je pense notamment à la limitation du nombre de communes membres d’un EPCI à cinquante et à la possibilité de dérogation pour tenir compte des périmètres issus de la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités locales.
Monsieur Kaltenbach, vous avez défendu l’amendement du groupe socialiste visant à abaisser ce seuil à 15 000 habitants. Nous pouvons jouer aux enchères descendantes, si vous le souhaitez. (Rires sur les travées de l'UMP.)
Mme Catherine Procaccia. Il a de l’humour !
M. Rémy Pointereau. Beaucoup !
M. Philippe Kaltenbach. Monsieur le rapporteur, vous ne faites pas d’ouverture !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. J’ai moi-même fait une enchère descendante, puisque la commission souhaite en rester au seuil de 5 000 habitants, monsieur Kaltenbach.
Certains semblent ne pas comprendre que la mise en œuvre de la loi de 2010 a été difficile. Il a fallu convaincre toutes les collectivités…
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Pas partout !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Dans certains départements, si ! Globalement, je dois reconnaître que les choses se sont plutôt bien passées dans mon département, mais le problème, monsieur le secrétaire d’État, c’est que la loi MAPTAM est en train de tout bouleverser. De grandes intercommunalités de 500 000 habitants ! Certains – les préfets, pour ne pas les citer – sont tombés sur la tête ! Pourvu que ce ne soit pas monté encore plus haut ! (Sourires.)
Par ailleurs, certaines intercommunalités viennent tout juste de voir le jour. Plutôt que de leur proposer des adaptations, il faudrait les dispenser de seuil. Comment comptez-vous distinguer celles qui pourront y déroger des autres ?
Mme Jacqueline Gourault. C’est du temps qu’il faut leur donner !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pour toutes ces raisons, la commission, qui reste soucieuse de la recherche d’un consensus…
Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas une vente aux enchères !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … et qui a conservé le principe d’une révision de la carte et de la mise en place d’un nouveau schéma,…
M. René-Paul Savary. Tout à fait !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … est défavorable à tous ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. La proposition de François Marc pour les presqu’îles s’inscrit dans le cadre du projet de circulaire adressé aux préfets concernant les zones frontalières, la mer ou la montagne. Là aussi, nous sommes face à une impossibilité physique.
Le Gouvernement est également défavorable aux autres amendements que le sien. Je voudrais toutefois apporter quelques précisions.
On a beaucoup parlé des départements de Savoie et de Haute-Savoie, par exemple, qui présenteraient des difficultés. Or le texte ne conduirait aujourd’hui aucune des intercommunalités de ces deux départements à bouger. Aucune !
En Lozère, qui compte 24 intercommunalités…
M. Rémy Pointereau. Pour combien d’habitants ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. … en dessous du seuil fixé, compte tenu de l’ensemble des adaptations, nous accepterions aussi qu’elles ne bougent point. Vous voyez là un exemple typique d’adaptation.
Vous dites que le dispositif est compliqué, mais la France est compliquée ! (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Je continue mon énumération.
Prenez le territoire de Belfort, l’Essonne, les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis, le Val-de-Marne, le Val-d’Oise, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Réunion, le Var, le Tarn, les Yvelines, la Seine-et-Marne, la Haute-Savoie, la Savoie, le Rhône, les Pyrénées orientales, le Nord, la Moselle, et la Lozère : dans ces départements, une seule intercommunalité, dans le pire des cas, serait susceptible de bouger ! En réalité, peu de départements sont concernés, puisque 29 % des EPCI s’interrogent.
Je tiens à souligner par là que les adaptations, et non pas les dérogations qui ont été demandées, sont nombreuses. Elles sont codifiées, seront inscrites de façon explicite dans la circulaire envoyée aux préfets, et la commission départementale de la coopération intercommunale aura naturellement pour mission de contrôler les projets.
On l’observe depuis quelque temps dans de nombreuses zones que l’on connaît bien, ceux d’entre vous, comme François Marc, qui ont assisté à des anniversaires d’intercommunalités rurales, ont rapporté que le président, contre toute attente, acceptait et encourageait les avancées, au risque de ne bénéficier d’aucun seuil critique d’action.
C’est la raison pour laquelle je ne suis pas favorable à ces amendements et que je continue à défendre le nôtre. Toutefois, le Gouvernement n’est pas plus républicain que la République, et si notre proposition n’était pas acceptée, nous pourrions nous orienter vers une position de repli.
M. Rémy Pointereau. C’est mieux !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Dans ce cas, je vous demanderais sans doute une suspension de séance afin d’éviter que ne se reproduise ce qui s’est passé dernièrement avec les routes et pour que le Gouvernement ait le temps de proposer un sous-amendement à l’un des amendements. (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Jean-Claude Lenoir. C’est une ouverture intéressante !
M. Jean-Claude Lenoir. Ce n’est pas de l’ironie…
M. Rémy Pointereau. On peut rire de tout !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. … puisque nous sommes le seul pays d’Europe à compter 36 000 communes et à avoir pris la décision de garder nos communes. (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Jean-François Husson. Un peu de cohérence !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Seulement, nous constatons tous ensemble que le sentiment d’abandon monte dans ces territoires ruraux, alors que nous avons des communes, des intercommunalités à taille modulable, des départements, et des régions.
L’intérêt général conduit l’exécutif à s’interroger sur le fait que, dans des zones très urbaines, l’hyper-richesse côtoie l’hyper-pauvreté, ce qui provoque parfois l’indignation chez les habitants et conduit à des événements dramatiques tels ceux que l’on a connus en Bretagne et qui pourraient se reproduire.
Ensemble, sans ironie et sans querelle, on peut se demander pourquoi, dans certaines communautés rurales, les habitants sont à ce point dépourvus de ressources. Face à ces très grandes difficultés, nous devons nous poser cette question fondamentale et tout faire pour y apporter des solutions !
En France, il existe une profonde inégalité entre les territoires, et voilà sans doute vingt ans que ces inégalités augmentent progressivement ! Pouvons-nous nous contenter d’être spectateurs ou devons-nous essayer d’agir ? C’est le fond de la question.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. S’agissant de l’étude d’impact, Mme la ministre a brandi un tableau. Or la commission n’a jamais reçu ces informations ! (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Jean-François Husson. C’est la démocratie !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Comment voulez-vous que l’on discute sérieusement si nous n’avons pas tous les éléments ? Dans la mesure où l’étude d’impact initiale était complètement nulle, même si le Conseil constitutionnel a jugé que cela répondait aux critères…
M. Claude Bérit-Débat. Il y en a eu d’autres depuis !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je vous signale que l’étude d’impact portait non sur ce texte, mais sur le précédent.
Comment voulez-vous que l’on soit en mesure d’apprécier la situation sans avoir tous les éléments ? Ce n’est pas du tout convenable ! De même, lorsque des amendements sont déposés au dernier moment sans que nous puissions les discuter, nous ne pouvons pas travailler correctement. Je vous le dis, ce n’est pas ce soir, en séance, que nous trouverons un compromis, même si, personnellement, je le regrette.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1180.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote sur l'amendement n° 1105.
M. Rémy Pointereau. Je partage entièrement les arguments de M. le rapporteur à propos du seuil de 20 000 habitants. Pourquoi pas 15 000, 25 000 ou 30 000 ? Pourquoi introduire une nouvelle norme à gérer, alors que nous tentons justement de les diminuer.
La commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire avait été saisie pour avis sur l’article 14, et nous avions déposé un amendement de suppression de ce seuil de 20 000 habitants.
Nous avions alors proposé, comme M. Marc, que ce soit la commission départementale de la coopération intercommunale qui décide du seuil requis selon les départements. Cependant, dans la mesure où la commission des lois a abaissé le seuil à 5 000 habitants, notre amendement n’avait plus d’objet, ce qui n’empêche pas qu’il ait été voté en commission à la quasi-unanimité.
Le fait de vouloir imposer ce seuil de 20 000 habitants est une absurdité qui soulève une profonde inquiétude chez les élus ruraux, puisque dans certains territoires il faudrait entre 80 et 100 communes pour atteindre ce seuil. À cela s’ajoute un problème de distance avec le siège de l’intercommunalité qui engagera évidemment des frais supplémentaires.
L’Association des maires de France, qui représente principalement les intérêts des maires ruraux, est opposée, me semble-t-il, au seuil des 20 000 habitants. L’intercommunalité doit être au service des communes, et non l’inverse.
L’intercommunalité doit pouvoir gérer dans un territoire ce que la commune ne peut assumer. Elle ne pourra néanmoins pas tout régler. En associant vingt, trente ou quarante communes pauvres, on ne créera jamais une intercommunalité riche, et même en multipliant le nombre d’habitants.
Dans les communautés de communes rurales où les décisions ne sont pas prises librement, les choses ne peuvent pas fonctionner. Même si l’intercommunalité dispose des moyens nécessaires, il faut aussi un projet commun, fédérateur.
On parle de 20 000 habitants en milieu rural, mais en milieu urbain, c’est peu. Il serait peut-être préférable d’augmenter ce seuil à 50 000 habitants en ville. On voit bien qu’il est difficile d’imposer un seuil global.
Notre territoire, comme le disait Mme la ministre, est divers et varié : nous avons des montagnes, des zones de plaine peu peuplées. Nous devons sortir d’une logique purement quantitative pour privilégier une logique qualitative qui serait plus adaptée aux réalités territoriales.
Nous devons faire confiance aux élus locaux et les laisser gérer leurs territoires ; ils sont suffisamment expérimentés pour savoir qu’un territoire de 8 500 habitants fonctionne correctement en intercommunalité. Laissons-les en paix !
Il faut aussi veiller à maintenir de la stabilité dans nos périmètres de communautés de communes. Certaines d’entre elles ont changé de périmètre trois fois : comment peuvent-elles mener à bien des projets et favoriser la croissance ? C’est impossible !
Pour toutes ces raisons, je suis tout à fait opposé à l’amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. Je voudrais féliciter M. le rapporteur, qui est un bon orateur, de nous avoir expliqué ce qu’était la mosaïque de la France. Bien qu’il soit parisien, M. Hyest a les pieds sur terre ! En effet, il est maire d’un village de 300 habitants, en Île-de-France. J’espère qu’à la fin de la soirée nous pourrons dire : Hyest, we can ! (Rires admiratifs sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Mme Catherine Procaccia. Personne n’y avait songé !
M. Alain Houpert. J’ai le sentiment, chers collègues, que l’on oppose l’ambition à la raison.
L’ambition du Gouvernement est de fixer le seuil à 20 000 habitants, seulement il s’agit là simplement d’un chiffre, d’une limite. C’est envisageable en milieu urbain, mais c’est autre chose du point de vue de la raison. Nous avons parlé des presqu’îles et des îles : une île, pour moi, est un endroit difficile d’accès, et les territoires ruraux sont parfois assimilables à des îles ou à des presqu’îles, en raison de leur éloignement.
Je viens du département de la Côte-d’Or, où il a fallu, pour créer une intercommunalité avec 20 000 habitants, réunir six cantons, tous pauvres. Seulement, on ne marie pas la misère à la misère !
Lors de l’examen de la dernière loi où cette fameuse limite à 5 000 habitants a été retenue, nous nous étions battus tous ensemble, et nous avions réussi à en créer deux dans le département de la Côte-d’Or. Toutefois, comme nous avions marié une intercommunalité riche avec une intercommunalité pauvre, le résultat est que, depuis deux ans, elles se battent pour des bases fiscales.
La conclusion de tout cela est que maintenant les ruraux disent que l’intercommunalité coûte trop cher !