M. François Patriat. C’est très bien !
M. Christian Favier. Suivant cette orientation, nous devons reconnaître, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, que vous avez gardé le cap. En témoignent les amendements que vous avez présentés au nom du Gouvernement pour concentrer les pouvoirs locaux entre les mains d’intercommunalités une nouvelle fois renforcées, poursuivre l’évaporation des communes et des départements, renforcer les compétences régionales en réduisant la libre administration des autres collectivités territoriales, tenter de les hiérarchiser derrière des pilotes et des chefs, après avoir réduit leurs ressources et mis sous contrôle leurs dépenses.
Aussi, c’est en raison de l’ensemble de ces éléments, qui sont toujours contenus dans ce projet de loi, malgré les nombreuses modifications apportées par le Sénat, que nous continuons de contester ce texte. Nous aussi, nous gardons le cap !
Nous continuons d’affirmer que le millefeuille est une affabulation, que l’avenir appartient aux communes, aux départements et aux régions, développant leur coopération et travaillant avec un État stratège garant de l’égalité des citoyens.
Nous réaffirmons l’utilité de chacune des collectivités. Toutes doivent disposer de compétences identifiées, mais non exclusives, d’outils de coopérations, de moyens pour agir en faveur de projets partagés. Elles doivent aussi avoir la possibilité d’intervenir quand les intérêts de leur territoire sont en cause.
C’est pourquoi, au cours de ce débat, nous avons longuement défendu le maintien de la compétence générale aux régions et aux départements et que nous continuerons de le faire. Celle-ci reste, à nos yeux, consubstantielle des lois de décentralisation, des droits et libertés locales auxquels nous restons attachés et qui permettent la mise en œuvre du principe constitutionnel de subsidiarité.
L’heure n’est pas pour nous à la caporalisation de l’action locale !
Nos institutions doivent au contraire travailler ensemble, se coordonner, coopérer en réseau, en partenariat, en respectant la place et le rôle de chacun, dans le cadre de projets d’actions publiques partagées, pour décupler leurs capacités d’action et ainsi mieux répondre aux besoins et aux attentes de la population.
C’est forts de cette vision de nos institutions locales et de leur nécessaire évolution que nous avons défendu un grand nombre d’amendements et en avons soutenu certains venant d’autres travées de notre assemblée.
Aucun jeu politicien, aucun souci de marchandage ne nous ont animés au cours de ces débats. C’est une certaine idée de notre organisation territoriale que nous avons tenté de défendre et de préserver. Et nous savons qu’elle est partagée par bon nombre de nos concitoyens et par une majorité d’élus locaux, quand on les écoute vraiment.
À cet égard, nous n’avons aucune illusion sur certaines majorités qui se sont parfois retrouvées dans cet hémicycle pour défendre les prérogatives de telle ou telle collectivité. Certaines sont de circonstances, prenant en compte les mécontentements qui s’expriment.
Quant à nous, nous n’oublions pas qui est à l’origine de l’intercommunalité contrainte, qui a soutenu une réduction bien plus grande encore du nombre de régions, qui voulait la disparition des départements par leur fusion au sein des régions, qui voulait le conseiller territorial, qui a souhaité réduire le nombre d’élus locaux, y compris les conseillers municipaux.
Nous avons toujours combattu de telles orientations et poursuivrons sans relâche notre action parlementaire, aux côtés des élus locaux, en faveur d’une décentralisation au service de nos concitoyens et du renforcement de notre démocratie locale.
Le résultat de nos travaux est là : les propositions du Gouvernement sur un certain nombre d’articles ont été rejetées, et nous nous en félicitons. Ainsi les départements ont-ils recouvré leurs compétences alors que le texte initial prévoyait de les dévitaliser afin de mieux les faire disparaître.
Pour autant, les départements sont-ils à l’abri ? Malheureusement, nous ne le pensons pas.
Certes, des paroles rassurantes ont été prononcées, donnant à penser que la disparition des départements n’était plus à l’ordre du jour.
Cependant, madame la ministre, le dépôt par le Gouvernement d’amendements visant à rétablir le texte initial, que la commission avait modifié à une très large majorité, a pu laisser penser le contraire.
En outre, les derniers propos du Président de la République ont laissé craindre le retour à l’ordre du jour de cette question une fois les élections départementales passées. La mobilisation ne doit donc pas faiblir.
Du fait de la création des super-régions, jamais l’utilité du département comme échelon intermédiaire efficace et réactif n’a été aussi évidente.
Le texte tel qu’il résulte des travaux du Sénat marque quelques avancées sur d’autres sujets, sans toutefois, reconnaissons-le, parvenir à remettre en cause la machine infernale de la concentration et à enrayer la volonté affirmée de réduction permanente des dépenses, laquelle est devenue l’alpha et l’oméga de toutes les réformes de nos collectivités territoriales. Pourtant, l’austérité sans limite imposée à la Grèce devrait faire réfléchir chacune et chacun.
C’est particulièrement vrai pour la métropole du Grand Paris. Certes, dans sa nouvelle rédaction, le texte prend en compte un certain nombre de demandes des maires de ce territoire, mais il ne leur donne toujours pas de réelles capacités d’action en commun, au plus près des besoins. En outre, le texte garde l’objectif d’une métropole fortement intégrée, au risque de créer un monstre bureaucratique et technocratique très éloigné des populations, coupé des dynamiques territoriales, surtout.
Aussi, tout en appréciant la richesse de nos débats, nous mesurons les limites de l’exercice.
L’essentiel des objectifs du projet de loi subsistent dans le texte du sénat. Au nom de la clarification, c’est d’abord une réduction inquiétante de l’action publique locale qui s’annonce. Nos inquiétudes concernant l’avenir des personnels restent donc aussi fortes.
Chacun l’aura compris, nous ne nous reconnaissons pas dans le texte qui nous est aujourd’hui soumis.
Cependant, madame la ministre, compte tenu de l’opiniâtreté avec laquelle vous avez tenté de rétablir le projet de loi dans sa version initiale et avec laquelle vous avez défendu, pied à pied, la disparition future des départements, nous ne souhaitons pas voter contre un texte rétablissant à leur profit un grand nombre des compétences que vous souhaitiez leur ôter, en particulier les collèges et les routes.
Pour notre part, nous prenons en compte la réécriture du texte et les évolutions, insuffisantes mais significatives, concernant la création de la métropole du Grand Paris. Certes, nous regrettons que la proposition qui correspondait à une demande très majoritaire des élus consistant à donner aux territoires de la métropole un statut d’EPCI à fiscalité propre n’ait pas été retenue, mais nous apprécions certaines avancées votées par notre assemblée, comme la suppression du PLU métropolitain ou l’attribution de la contribution foncière des entreprises aux territoires.
Nous comptons sur la navette parlementaire pour améliorer encore ce texte.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Christian Favier. Aussi le groupe CRC s’abstiendra-t-il sur ce projet de loi. Il s’agira d’une abstention combative et vigilante. Nous souhaitons ainsi, en nous appuyant sur le texte du Sénat, que les préoccupations qui se sont exprimées au cours de nos débats soient entendues par nos collègues de l’Assemblée nationale et que d’autres avancées soient possibles.
Cette abstention combative est aussi une forme de soutien aux mécontentements qui s’expriment sur ce texte. Les premières mobilisations ont déjà permis de ne pas tuer les départements et les communes. Il faut donc amplifier le mouvement. Rien n’est inéluctable. Telle est notre conviction ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour le groupe du RDSE.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, je vous remercie de réunir aujourd'hui tant de nos collègues : leur présence dans cet hémicycle montre que le Sénat est bien le représentant des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.)
Je remercie ensuite MM. les rapporteurs du travail considérable qu’ils ont effectué, conjointement et solidairement : Jean-Jacques Hyest, tout d’abord, qui a tenu le choc de la séance, mais aussi René Vandierendonck, dont la sagesse et l’expérience ont manqué à tous.
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il ne pourra être reproché au Sénat d’avoir rendu copie blanche. Notre assemblée a construit sans préjugés et a modernisé sans réticences. Elle a rempli son rôle constitutionnel au cours de la discussion de ce projet de loi, laquelle a été longue et ardue. La commission des lois, sous l’égide de nos deux rapporteurs, issus de la majorité et de l’opposition, a œuvré pour façonner un texte plus équilibré.
Comment ne pas rappeler certaines incohérences entre les textes successifs qui nous ont été soumis ? Ainsi, notre excellent collègue Gérard Collomb a-t-il relevé avec justesse et efficacité certaines contradictions au cours de ce débat entre la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles et le présent texte, les compétences exclusives des régions dans le domaine économique se carambolant avec celles des métropoles.
Comment ne pas rappeler la loi sur les binômes, que notre groupe a longuement combattue ici et dont je me rends compte aujourd'hui qu’elle compte peu d’adeptes sur le terrain ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.)
Nous avons ensuite vécu la fusion des grandes régions, puis l’examen du projet de loi NOTRe, sans que jamais, mes chers collègues, un texte sur les finances locales ne nous soit soumis.
M. Charles Revet. Et voilà !
M. Jacques Mézard. En janvier 2014, le Président de la République, lors de la présentation de ses vœux à Tulle, a loué les conseils généraux. Quatre mois plus tard, il nous annonçait la suppression des départements. (M. Bruno Sido s’esclaffe.)
Mardi dernier, ceux qui étaient présents à l’Élysée ont entendu que les départements seraient préservés, mais « pour un temps » - la précision a son importance. Pour sa part, le groupe du RDSE n’a pas cessé de réclamer la clarté et la vérité.
M. Bruno Sido. Nous aussi !
M. Jacques Mézard. Que veut le Gouvernement ?
La vérité, on peut la subodorer, sans d’ailleurs forcément la craindre.
Ce que veut le Gouvernement in fine, c’est la suppression des départements, tout au moins dans certains territoires, et cela peut se comprendre, compte tenu de la création des métropoles.
Ce que veut le Gouvernement, ce sont de grandes régions et de grandes intercommunalités, résultant de la fusion de nombre de communes – cela peut s’entendre – et le développement des communes nouvelles.
Tout cela mérite d’être dit clairement. Après tout, on peut être d’accord ou pas. Mais on ne peut pas faire un pas en avant, deux pas en arrière, puis de nouveau trois pas en avant et deux pas en arrière. Comme nous le disons depuis le début, ce n’est pas la bonne solution.
Permettez-moi quelques remarques sur la méthode qui a présidé à l’élaboration de cette réforme. L’exposé des motifs du projet de loi, rappelons-le, évoquait la suppression de l’échelon départemental à l’horizon 2020. Depuis, les déclarations pour le moins ambiguës sur ce sujet se sont multipliées.
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement a déposé des amendements visant à revenir au texte initial, ce qui peut se concevoir, mais il a ainsi fait peu de cas du grand travail réalisé par notre commission.
M’éloignant du texte de mon intervention écrite, je vous dirai ce que j’ai sur le cœur, c’est plus simple et sans doute plus efficace.
Aujourd'hui, où en sommes-nous ?
Je pense que, in fine, le Gouvernement consentira à abandonner les collèges aux départements…
M. Bruno Sido. C’est insuffisant !
M. Jacques Mézard. … pour montrer qu’il a fait un effort. Chacun appréciera, surtout après les élections départementales…
En revanche, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je pense que vous évoluerez peu en ce qui concerne la voirie départementale. Je me suis d’ailleurs longtemps demandé pourquoi. À partir du moment où l’on considère que les conseils départementaux doivent être préservés, on doit leur laisser la voirie départementale : s’il y a bien un domaine qui doit être géré près du terrain, c’est bien celui-là !
Certes, on peut penser que certains grands itinéraires seraient mieux gérés à l’échelle régionale.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. On peut en discuter !
M. Jacques Mézard. On peut en discuter, ce serait logique et, là encore, cela peut s’entendre, mais, madame la ministre, je ne vois qu’une explication au dépôt de vos amendements visant à transférer la voirie départementale.
M. Bruno Sido. L’argent !
M. Jacques Mézard. Dans votre esprit, ces grandes régions que vous avez voulues, que vous aimez et qui auront beaucoup de pouvoirs – elles en auront tant d’ailleurs que, faute d’avoir réformé le système électoral, vous favoriserez l’avènement de super-hiérarques – ces grandes régions, donc, auront besoin de financements. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Dès lors, il faut vraisemblablement leur transférer, à ces grandes régions, les recettes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ! (Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, le conteste.)
M. Jean-Claude Lenoir. Bien sûr !
M. René-Paul Savary. Eh oui !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Notre collègue dit la vérité !
M. Jacques Mézard. De grâce, dites-le, et discutons-en de façon loyale et transparente, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Pour les transports scolaires, nous nous sommes expliqués : les communes et les intercommunalités ont déjà du mal à les gérer, quelle drôle d’idée de les transférer à des centaines de kilomètres !
J’évoquerai maintenant les intercommunalités. Oui, nous sommes ici, en grande majorité, favorables au développement de l’intercommunalité, qui est d’ailleurs le vrai moyen de préserver le bloc communal ; mais pourquoi contraindre les communes à la fusion en retenant un seuil de 20 000 habitants ? Ce seuil n’a strictement aucune justification de terrain. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.) Il est totalement arbitraire !
C’est une chose d’être conseiller municipal à Paris ou dans la région d’Ile-de-France - je rappelle d’ailleurs que les conseillers municipaux de Paris sont également conseillers généraux, ce que personne ne dit. C’en est une autre dans des dizaines de départements que nous connaissons : comment créer des intercommunalités de 20 000 habitants, sans lien aucun avec les bassins de vie et la réalité de terrain ? Cela n’a de sens, madame la ministre, que si vous entendez véritablement supprimer les départements, auquel cas le seuil de 20 000 habitants…
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Il est insuffisant !
M. Jacques Mézard. … est effectivement insuffisant. Il faut prévoir un seuil plus élevé. Telle est la réalité !
Nous ne pouvons pas vous suivre sur ce seuil, madame la ministre, car il est totalement arbitraire et aboutira à des situations catastrophiques.
Avant de conclure, je dirai un mot sur tous ces schémas, sur toutes ces usines à gaz prévus dans le texte. Nos territoires, nos collectivités, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, ont besoin de liberté et non de schémas prescriptifs.
M. Yves Détraigne. Oui !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Très bien !
M. Jacques Mézard. Malheureusement, nous n’y sommes pas encore ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.)
En conclusion, permettez-moi de rappeler cette citation empruntée au discours de Belleville de Gambetta – je me réfère souvent à l’histoire de la IIIe République : « Par cette institution du Sénat bien comprise, bien appliquée, la démocratie est souveraine maîtresse de la France. »
C’est dans cet esprit que la très grande majorité du groupe du RDSE votera le texte du Sénat. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
M. Philippe Adnot. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, compte tenu des trois minutes qui me sont imparties, j’irai à l’essentiel.
Merci d’abord à vous, monsieur le président de la commission des lois, et, à travers vous, à l’ensemble de la commission.
Merci à vous, monsieur le rapporteur, cher Jean-Jacques Hyest, qui, avec votre conviction habituelle,…
M. Bruno Sido. Et notre collègue va au bout de ses convictions !
M. Philippe Adnot. … nous avez permis de nous retrouver, avec l’ensemble de nos collègues, pour élaborer un texte qui, s’il n’est pas parfait à mes yeux, du moins sauvegarde l’essentiel.
Merci pour les communes, qui ont poussé un ouf de soulagement quand elles ont su qu’elles n’auraient pas à tout reconstruire de force au niveau intercommunal.
Merci pour les entrepreneurs, qui, devant la situation bloquée qui s’annonçait, voyaient s’éloigner la perspective de carnets de commandes.
Merci pour les départements, qui, avec le texte que nous allons adopter, conservent l’essentiel de leurs compétences. Le principe de réalité, s’agissant de la clause de compétence générale, finira par nous donner raison !
Les régions veulent être leaders en matière économique ? Soit ! Nous verrons le résultat et le jugerons à l’aune de l’efficacité.
Mais ce texte va voyager vers une autre assemblée : je veux croire que les députés ouvriront les yeux devant les risques que ferait courir, par exemple, l’attribution des routes aux régions.
Depuis la décentralisation, et particulièrement la dernière vague, s’agissant des routes, nous avons patiemment intégré les personnels des parcs, mis fin au compte de commerce, rationalisé l’organisation, mutualisé avec les services de moyens des finances, de l’informatique, des ressources humaines, des marchés, de manière à être efficaces. Sur le terrain, les équipes nous l’ont rendu en élargissant leurs compétences et en améliorant leurs performances.
Au moment du transfert des services de l’État, mon département a reçu 250 personnels au titre des routes. Aujourd’hui, nous en comptons 35 de moins, malgré l’augmentation de la charge de travail.
C’est tout cela qui peut être remis en cause, avec le risque de générer des dépenses supplémentaires incroyables tout en diminuant l’efficacité de l’action au service de nos concitoyens.
N’oublions pas que, au moment où l’on nous a décentralisés, l’État avait une autorité, localement : il avait le préfet, il avait la DDE. Si l’on transfère les routes aux régions, où sera l’autorité locale ? À quel responsable s’adressera-t-on ?
Tout le monde perçoit bien l’énorme dépense qu’il faudrait engager pour essayer de reconstituer cette puissance que nous avons aujourd’hui mais que les régions n’auront jamais, parce qu’elles n’ont pas d’autorité dans les départements.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Philippe Adnot. Je veux croire, madame la ministre, que vous n’allez pas jouer la politique du pire et que vous aiderez l’Assemblée nationale à partager la sagesse du Sénat.
Les prochaines élections départementales seront pour nous l’occasion d’aller devant nos concitoyens : ils ne manqueront pas de nous demander des explications. Il serait bon, dans cette perspective, que les versions issues des travaux de nos deux assemblées soient assez proches, sinon, l’exaspération de nos concitoyens pourrait bien atteindre des sommets, et la situation risque d’être difficile à gérer !
Pour ma part, je soutiendrai le texte issu des travaux de la commission et du Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Ouverture du scrutin public
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République dans le texte de la commission, modifié.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Je vous rappelle qu’une seule délégation de vote est admise par sénateur.
Le scrutin est ouvert.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à dix-sept heures.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 84 sur l’ensemble du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 203 |
Pour l’adoption | 192 |
Contre | 11 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Je remercie Mmes et MM. les secrétaires d’avoir participé à l’organisation de cette première. Les opérations de vote se sont bien déroulées, dans un délai un peu plus bref que prévu.
M. Jean-Louis Carrère. C’était très long !
M. le président. La conférence des présidents en tirera les enseignements.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Au terme de ces débats très riches, permettez-moi d’avoir à mon tour une pensée pour René Vandierendonck, qui a suivi nos débats sur internet. Il reviendra nous apporter toute son expérience et sa sagesse lors de la deuxième lecture de ce texte.
Je voudrais remercier la commission des lois, son président Philippe Bas et, bien sûr, son rapporteur, Jean-Jacques Hyest, qui a siégé sans discontinuer. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.) Il a accompli un énorme travail, avant le débat en séance publique et pendant celui-ci.
Nos discussions ont été très utiles et constructives. Contrairement à ce que j’ai pu lire ici ou là, le Sénat n’a absolument pas détricoté le texte du Gouvernement. Il a apporté sa vision des choses, qui diffère de celle du Gouvernement sur certains sujets – je pense notamment au seuil de population pour les intercommunalités ou au transfert des routes aux régions –, mais la rejoint sur nombre de points, comme la clause de compétence générale ou le transfert de la compétence en matière de transports. Sur les collèges, le Gouvernement a fait un pas dans la direction souhaitée par le Sénat.
Le texte va maintenant être soumis à l’Assemblée nationale,…
M. Charles Revet. C’est là qu’il risque d’être détricoté !
M. André Vallini, secrétaire d'État. … puis il y aura les élections départementales. À cet égard, ne serait-il pas possible d’inverser la perspective ? Beaucoup d’entre vous disent que ces élections vont être difficiles parce que les compétences ne seront pas encore réparties entre régions, départements et intercommunalités.
Un sénateur du groupe UMP. Et voilà !
M. André Vallini, secrétaire d'État. Et si l’on essayait de penser autrement, en considérant que ces élections seront l’occasion d’un débat dans chaque département, dans chaque canton, auquel les sénateurs prendront part ? Une fois qu’elles se seront tenues, nous reviendrons tous ici pour la deuxième lecture, enrichis des débats qui auront eu lieu sur le terrain. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
Je vous donne donc rendez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour un débat qui sera, je n’en doute pas, aussi utile et constructif qu’il l’a été en première lecture. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC et du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Je voudrais saluer à mon tour la présence continue au banc de la commission de M. Jean-Jacques Hyest, dont les réponses extrêmement précises et documentées sur chaque amendement nous ont tous impressionnés.
Je m’associe aux propos d’André Vallini. Nous avons fait des pas les uns vers les autres : le Gouvernement a accepté des amendements et le Sénat a adopté certains de ceux qu’il a présentés. Nous soumettrons à l’Assemblée nationale un texte qui n’a pas beaucoup changé, qui a ses équilibres, même s’ils ne sont pas forcément approuvés par tous.
Nous avons rencontré, pendant deux jours, des représentants de départements très ruraux. Ces derniers n’attendent pas simplement de nous le transfert de compétences, mais aussi une réflexion sur la manière d’aider les territoires le plus en difficulté. Nous avons avant tout entendu une demande de solidarité et de péréquation, envers tant les territoires suburbains que les grandes zones rurales.
Je vous donne moi aussi rendez-vous pour la deuxième lecture, mesdames, messieurs les sénateurs, en vous remerciant pour la qualité des débats de la première lecture. Ils ont été exempts d’invectives, en dépit de la difficulté de certains sujets, tels que Paris et Marseille. Nous avons tous cherché à avancer, même si les choses sont compliquées.
Nous nous retrouverons en deuxième lecture avec, je le crois, la volonté partagée de faire prévaloir la solidarité entre les territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC et du RDSE. – M. Michel Mercier applaudit également.)
M. le président. Même si c’est difficile, il faut avancer !