M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Une réduction d’impôt de 10 000 euros, c’est loin d’être négligeable. Encore faut-il payer un tel montant d’impôt, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Hier soir, vous déploriez que trop de Français ne payent pas l’impôt sur le revenu. Aujourd’hui, vous voulez qu’un plus grand nombre encore d’entre eux en soit exonéré… À un moment donné, il faut tout de même poser des limites.
De surcroît, comme l’a souligné opportunément M. le rapporteur général, ceux qui ne peuvent pas loger dans leur niche, déjà assez confortable, l’ensemble de leur investissement Madelin ont le droit de le reporter sur les années suivantes. Comme vous l’avez précisé, monsieur Delattre, il est possible d’investir un peu plus de 55 000 euros pour atteindre la réduction maximale.
Le Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement. Même si l’on peut considérer que certains investissements sont vertueux, nous atteignons là des montants qui troublent l’imagination.
M. Daniel Raoul. Et la raison !
M. le président. Monsieur Delattre, l'amendement n° I-102 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Francis Delattre. Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement aussi fait preuve de constance, en persistant à mener la même politique depuis trois ans, avec les résultats que l’on sait, eux aussi très constants ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. Richard Yung. Ils sont bons !
M. Francis Delattre. Nous le savons tous, les PME-PMI sont le principal réservoir d’emplois marchands dans notre pays.
On gage, de façon un peu ridicule, nos amendements sur le tabac, mais on pourrait plus efficacement les gager sur les emplois aidés au sens large, qui coûtent des milliards d’euros. On le sait très bien, ces emplois ne servent qu’à passer un cap, alors que notre pays résoudrait tous ses problèmes s’il était capable de créer, au minimum, deux millions d’emplois marchands.
Naturellement, cela suppose de faire quelques efforts financiers et fiscaux pour engager le mouvement… Le dispositif visé dans cet amendement a déjà produit des résultats. En revanche, lorsqu’on le rabote, on crée des chômeurs supplémentaires. Pour ma part, j’assume ce choix ! Nous sommes d’ailleurs plusieurs collègues, sur différentes travées, à proposer des amendements allant dans ce sens, et nous pensons qu’il serait utile de réfléchir sérieusement à ces questions.
M. le rapporteur général nous propose d’attendre le débat sur le projet de loi de finances rectificative. Nous sommes prêts à patienter, car nous ne sommes pas dogmatiques.
M. Vincent Capo-Canellas. Très bien !
M. Francis Delattre. En attendant, le problème demeure. Ce pays est-il capable de créer entre un et deux millions d’emplois marchands pour résoudre ses problèmes ? Car il n’y a pas d’autre solution !
Ce sont les PME et les PMI qui créent des emplois, nous nous accordons tous sur ce point, et vous devriez donc, monsieur le secrétaire d’État, examiner plus sérieusement nos amendements, au lieu de nous opposer un discours strictement politique.
Cela étant, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-102 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d'une discussion commune.
Les amendements nos I-274 rectifié et I-405 rectifié, présentés par M. Pointereau, ne sont pas soutenus.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je reprends l’amendement n° I-405 rectifié au nom de la commission, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° I-427, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 726 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1° bis du I est abrogé ;
2° Le 1° du I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – pour les cessions, autres que celles soumises au taux mentionné au 2° , de parts sociales dans les sociétés dont le capital n’est pas divisé en actions. Dans ce cas, il est appliqué sur la valeur de chaque part sociale un abattement égal au rapport entre la somme de 23 000 € et le nombre total de parts sociales de la société. »
4° Au quatrième alinéa du II, la référence : « et 1° bis » est supprimée.
IV. – La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous voudrions surtout comprendre la raison de certaines différences de traitement.
Pourquoi le taux des droits d’enregistrement applicables aux cessions de SA, c'est-à-dire de sociétés anonymes, ou de SAS, autrement dit de sociétés par actions, est-il de 0,1 %, alors que les cessions de parts sociales de SARL ou d’EURL sont, pour leur part, taxées à 3 % ? Comme le soulignait l’auteur de l’amendement n° I-405 rectifié, les dirigeants de société sont logiquement tentés de modifier les statuts avant d’envisager une cession.
Comment expliquer, monsieur le secrétaire d’État, ce traitement défavorable aux PME ? Quel serait le coût d’un alignement des taux ? Ces deux questions méritent d’être posées, et nous avons besoin, sur ce point, d’un éclairage du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Au travers de cet amendement, vous proposez de diminuer, voire de supprimer purement et simplement les droits d’enregistrement applicables aux cessions de parts sociales dans les sociétés dont le capital n’est pas divisé en actions. Celles-ci sont actuellement soumises aux droits proportionnels d’enregistrement de 3 % et bénéficient d’un abattement appliqué sur la valeur de chaque part sociale et dont le montant équivaut au rapport entre la somme de 23 000 euros et le nombre total de parts sociales de la société.
Votre proposition aurait un coût budgétaire. Elle romprait en outre l’équilibre entre la taxation des cessions de fonds de commerce et des fonds de clientèle, qui sont taxés de manière similaire à la cession des parts sociales au taux global de 3 % si l’on cumule le droit budgétaire perçu par l’État et les taxes additionnelles perçues par les collectivités territoriales, jusqu’à 200 000 euros.
Je n’ai pas particulièrement examiné ce point avant notre séance, et je m’en excuse. L’on me dit en effet qu’il conviendrait peut-être de réexaminer certaines situations historiques, en vue d’une d’harmonisation. Nous pourrons donc de nouveau aborder ce sujet à l’avenir.
Dans ces conditions, je sollicite, pour l’heure, le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° I-427 est-il maintenu ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ces différences de taux s’expliquent sans doute pour des raisons historiques, mais il est difficile, aujourd’hui, de les comprendre. Peut-être faudrait-il travailler à la définition un taux de convergence.
Dans l’immédiat, nous retirons cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-427 est retiré.
L'amendement n° I-104 rectifié bis, présenté par MM. Delattre, Doligé, Commeinhes, Pierre et Portelli, Mme Deroche, M. Pellevat, Mmes Gruny et Canayer et MM. P. Dominati, Charon, Grand et Mayet, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 777 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Tableau I
a) À la cinquième ligne de la première colonne, le montant : « 552 324 » est remplacé par le montant : « 1 104 648 » ;
b) À la sixième ligne de la première colonne, les mots et montants : « Comprise entre 552 324 € et 902 338 € » sont remplacés par les mots et le montant : « Au-delà de 1 104 648 € » ;
c) Les septième et huitième lignes sont supprimées ;
2° Tableau II
a) À la cinquième ligne de la première colonne, le montant : « 552 324 » est remplacé par le montant : « 1 104 648 » ;
b) À la sixième ligne de la première colonne, les mots et montants : « Comprise entre 552 324 € et 902 338 € » sont remplacés par les mots et le montant : « Au-delà de 1 104 648 € » ;
c) Les septième et huitième lignes sont supprimées ;
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
M. Francis Delattre. Il s’agit, là encore, d’un problème bien connu, celui des successions dans les PME-PMI. Comme vous le savez, mes chers collègues, environ 30 % des entreprises disparaissent du fait de transmissions non accomplies ou mal accomplies. Naturellement, la fiscalité de transmission du patrimoine constitue l’une des difficultés auxquelles les entreprises sont confrontées.
Notre collègue députée Fanny Dombre-Coste a rédigé, en juillet dernier, un rapport sur les transmissions d’entreprise, dont j’ai lu quelques extraits. Nous pouvons tous faire le même constat : il y a un vrai problème !
Cet amendement vise donc à la fois à simplifier et à diminuer le barème des droits de mutation, afin qu’ils encouragent la succession plutôt que la rétention, évitant ainsi que des entreprises ne disparaissent.
Nous proposons simplement de doubler la tranche à 20 %, pour fixer sa limite supérieure à 1 104 648 euros, et d’appliquer un taux de taxation maximal à 30 % au-delà de cette limite supérieure.
Il me semble que ce dispositif simple serait bien accueilli dans le milieu des PME-PMI, monsieur le secrétaire d’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Francis Delattre pose un vrai sujet, celui de la transmission des entreprises. Certains dispositifs favorisant cette transmission existent déjà, en particulier le pacte dit « Dutreil » ; la commission a d’ailleurs déposé plusieurs amendements afin de l’améliorer.
Si nous pouvons souscrire à l’intention de l’auteur de cet amendement, nous nous heurtons à une difficulté, car le dispositif qu’il propose vise non pas simplement les transmissions d’entreprise, mais toutes les transmissions en ligne directe à titre gratuit, notamment la cession d’un appartement ou d’un portefeuille d’actions. Le coût de cette mesure serait donc très élevé, de l’ordre de plusieurs milliards d’euros.
Par conséquent, j’invite Francis Delattre à bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Cet amendement va encore dans le même sens… Diminuer les impôts, mais uniquement pour ceux qui en payent beaucoup, ou du moins un peu !
Mesdames, messieurs les sénateurs, rendez-vous compte de ce que vous proposez : aujourd’hui, plus de 90 % des successions – je crois même que nous sommes plus proches de 95 %, mais je reste prudent – sont exonérées de droits de succession.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Grâce à Nicolas Sarkozy !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Il faut le dire et le répéter, car c’est ce qu’indiquent les notaires : plus de 90 % des successions aujourd’hui sont exonérées de droits. Or nos concitoyens ne le savent pas, car ils payent des frais de notaire. Ceux-ci sont légitimes – ils correspondent à un travail réalisé –, mais les Français les assimilent à des droits perçus par l’État, ce qui crée une confusion et rend parfois populaire la présentation que vous pouvez faire de certains de vos amendements.
Ici, vous proposez d’aller plus loin. On peut vous entendre, mais on ne peut pas vous écouter. Vous dites que vous souhaitez agir au bénéfice des entreprises, mais votre amendement, en réalité, vise tout le monde ! Tous les particuliers sont concernés, qu’ils détiennent des capitaux, de l’immobilier, des biens mobiliers, etc.
M. Richard Yung. Y compris des lingots d’or ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je voudrais vous rappeler que, pour les entreprises, il existe de nombreux dispositifs favorables. Il faut le dire aussi, car, à vous entendre, les larmes pourraient nous monter aux yeux !
Le pacte Dutreil, par exemple, permet de transmettre des parts de société en bénéficiant d’une exonération de 75 % de leur valeur. Oui, 75 % ! Et ce chiffre ne tient même pas compte des abattements applicables, soit 100 000 euros par ascendant en ligne directe, et 50 % de plus quand on cède avant soixante-dix ans.
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Eh oui !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Nous devrions donc réussir à contenir nos larmes ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)
On pourrait effectivement aller encore plus loin... Je n’ai pas chiffré le coût de votre amendement, mais je comprends mieux pourquoi nous avons trouvé plus de 5 % de PIB de déficit public en arrivant aux responsabilités ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
Vous l’aurez compris, mon avis sur cet amendement est défavorable.
M. le président. Monsieur Delattre, l’amendement n° I-104 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Francis Delattre. Monsieur le secrétaire d'État, si vous lisez le rapport qui a été préparé par Fanny Dombre-Coste, députée socialiste de l’Hérault, vous verrez qu’elle partage largement le constat que je viens de dresser.
Si notre amendement ne vise pas seulement les entreprises, c’est peut-être parce que nous ne disposons pas de l’appui des directions d’un grand ministère. Il s’agit peut-être d’un impair : j’entendais bien, pour ma part, cibler la transmission des entreprises.
En effet, dans nos circonscriptions, nous connaissons la situation et la réalité des successions mal réglées, qui entraînent finalement la disparition de certaines entreprises.
M. Daniel Raoul. Ce n’est pas lié à l’imposition !
M. Francis Delattre. Monsieur le rapporteur général, il faut travailler sur ce sujet, car nous connaissons les failles du système Dutreil. En tout cas, nous essayons de perfectionner ce dispositif.
Le problème existe, cette préoccupation est partagée par nombre de parlementaires. Toutefois, comme nous sommes de petits artisans de la législation, j’accepte de retirer mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-104 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de dix-sept amendements faisant l'objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-166, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 787 B, 885 I bis, 885 I ter et 885 I quater du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Le présent amendement tend à supprimer certaines dispositions correctrices de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, qui, selon nous, nuisent à sa bonne répartition entre les contribuables.
Nous souhaitons tout d’abord viser la disposition permettant aux membres des pactes d’actionnaires, qui constituent le noyau dur de l’actionnariat d’une entreprise, de diminuer leur contribution à l’ISF à proportion de leur participation.
Cette exonération des intérêts minoritaires, instaurée par la loi pour l’initiative économique, dite « loi Dutreil », qui vient d’être évoquée, n’a pas rencontré, il faut le dire, un grand succès, malgré les assurances contraires qui figuraient à l’époque dans le rapport sur le fondement duquel elle avait été élaborée. À en croire l’évaluation des voies et moyens qui est annexée au projet de loi de finances, quelque 12 700 ménages recouraient à ce dispositif en 2012, pour une dépense fiscale globale de 63 millions d’euros.
L’ensemble des dispositions que nous visons représente une dépense fiscale de 260 millions d’euros au total, ce qui doit représenter une exemption d’assiette comprise entre 40 et 55 milliards d’euros. Quand on sait que le patrimoine imposable des redevables de la tranche moyenne de l’ISF s’élève à près de 440 milliards d’euros, on mesure aisément la faible pertinence de l’ensemble du dispositif.
Le pacte d’actionnaires concerne, au premier chef, des actionnaires minoritaires et non impliqués dans la gestion courante de l’entreprise. Il s’agit souvent d’une technique d’optimisation fiscale pour celles et ceux dont le rapport avec l’entreprise se limite à la perception de dividendes.
Nous pouvons alors poser la question : la fiscalité dans notre pays aurait-elle vocation uniquement à permettre la transmission des positions acquises, voire des rentes de situation, ou doit-elle aussi participer de la dynamique économique dans son ensemble ? La question se pose.
C’est pour ces motifs qu’il nous faut supprimer le dispositif Dutreil. Une niche en moins va sans doute en faire aboyer quelques-uns, mais cette loi n’a pas vocation à préserver l’actionnariat d’entreprises dynastiques ou à simplement empêcher certains de payer « trop d’impôt ».
Mes chers collègues, nous ne pouvons donc que vous inviter à adopter cet amendement.
M. le président. L’amendement n° I-29, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le dernier alinéa du b de l’article 787 B du code général des impôts est supprimé.
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement, comme les deux suivants, vise non pas à supprimer le dispositif Dutreil, comme le précédent amendement, mais au contraire à l’améliorer.
Ce dispositif a fait la preuve de son efficacité, notamment pour la transmission d’entreprises familiales. Toutefois, à l’usage, on a pu constater que certains points, sans constituer de réels coûts, n’en sont pas moins des freins ou n’emportent aucune justification particulière.
L’amendement n° I-29 devrait recueillir un large assentiment. En effet, il s’agit d’une disposition qui a déjà été votée dans le cadre de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « loi Macron ». En outre, elle constitue une proposition relativement consensuelle, qui figure dans le rapport des députés Olivier Carré et Christophe Caresche sur l’investissement productif de long terme.
Il s’agit d’assouplir le dispositif Dutreil, en supprimant l’obligation de conserver les participations inchangées à chaque niveau d’interposition pendant la phase d’engagement collectif. Cette condition, qui ne se justifie guère, est restrictive et inutile. Elle peut retarder la prise de décisions dans la vie des entreprises, qui est faite, notamment, de cessions.
M. le président. L’amendement n° I-30, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le b de l’article 787 B du code général des impôts est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Dans l’hypothèse où les titres sont détenus par une société possédant directement une participation dans la société dont les parts ou actions peuvent être soumis à un engagement collectif de conservation visé au a, ou lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui détient les titres de la société dont les parts ou actions peuvent être soumis à un engagement de conservation, l’engagement collectif de conservation est réputé acquis lorsque les conditions cumulatives ci-après sont réunies :
« - Le redevable détient depuis deux ans au moins, seul ou avec son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, les titres de la société qui possède une participation dans la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement collectif, ou les titres de la société qui possède les titres de la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement de conservation ;
« - Les parts ou actions de la société qui peuvent être soumises à un engagement collectif, sont détenues par la société interposée, depuis deux ans au moins, et atteignent les seuils prévus au premier alinéa du présent b ;
« - Le redevable ou son conjoint ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité exerce depuis plus de deux ans au moins, dans la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement collectif, son activité professionnelle principale ou l'une des fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis lorsque la société est soumise à l'impôt sur les sociétés. »
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes résultant pour l'État des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise lui aussi à reprendre une mesure déjà adoptée par le Sénat lors de l’examen de la loi Macron. Et là encore, il s'agit d’améliorer le dispositif Dutreil, en permettant l’application de l’engagement collectif réputé acquis à des situations où les titres transmis sont détenus par des sociétés interposées.
En clair, il existe aujourd'hui une différence de traitement, qui ne paraît pas justifiée, entre la détention directe et indirecte. De fait, cela empêche l’application du dispositif Dutreil pour certaines transmissions d’entreprises. Il y a lieu de mettre fin à cette différence.
M. le président. L’amendement n° I-31, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au premier alinéa du f de l'article 787 B du code général des impôts, les mots : « de la condition prévue au » sont remplacés par les mots : « des conditions prévues aux a ou ».
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes résultant pour l'État des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Toujours en vue d’améliorer le dispositif Dutreil, cet amendement, qui a également été adopté au Sénat lors de l’examen de la loi Macron, a pour objet de faciliter la transmission d’entreprises, en permettant des opérations d’apport de titres dans la période d’engagement collectif.
Ce serait une amélioration bienvenue, qui lèverait un obstacle aux transmissions d’entreprises familiales, sans pour autant affaiblir la phase d’engagement initial.
Au total, les trois amendements que je viens de présenter ont un coût très limité ; leur adoption permettrait toutefois de lever des obstacles techniques, qui ne sont pas justifiés et qui constituent souvent des freins à l’objectif de faciliter les transmissions d’entreprises.
M. le président. L’amendement n° I-193, présenté par MM. P. Dominati, Morisset, Vogel et Revet, Mme Deromedi, MM. Vasselle, Dassault et Mandelli, Mme Gruny, M. Bouchet, Mme Deseyne et M. Magras, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les articles 885 A à 885 Z du code général des impôts sont abrogés.
II - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 402 bis, 438, 520 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Comme tous les ans depuis une dizaine d’années, je propose une solution beaucoup plus simple, monsieur le rapporteur général : supprimer purement et simplement l’ISF ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)
Je ne vais pas revenir sur les inconvénients techniques de cet impôt, qui ne fait pas de distinction entre les assujettis, qui frappe particulièrement les couples et qui affecte plutôt la classe moyenne que les ultra-riches. (Mêmes mouvements.)
M. Richard Yung. Classe moyenne supérieure, tout de même…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Un peu de mesure !
M. Philippe Dominati. Les coûts de recouvrement de cet impôt sont particulièrement élevés, et le nombre de ses assujettis progresse chaque année.
Voilà pour la forme, mais, sur le fond, il y a beaucoup plus grave ! Il semblerait en effet, d’après de nombreux économistes, que le rendement de cet impôt soit préjudiciable aux recettes fiscales de l’État. Les uns parlent de deux fois le coût de la TVA ; d’autres, d’une évasion en capitaux qui pourrait être comprise entre 150 et 200 milliards d’euros. M. Christian Chavagneux, qui est éditorialiste au journal Alternatives économiques, évoque quant à lui quelque 10 % des recettes fiscales de l’État.
Ils sont donc nombreux à s’exprimer en ce sens, et la Cour des comptes a eu l’occasion de le souligner en 2009 : c’est un impôt au rendement négatif !
Ensuite, l’ISF procède d’une grande hypocrisie de la part des plus hautes autorités de l’État, quelles qu’elles soient, puisque j’évoque cette situation depuis une dizaine d’années... Nos artistes, écrivains, sportifs ou élites sont accueillis dans les palais de la République, nous assistons à leurs concerts ou à leurs manifestations culturelles ou sportives, mais il faut bien admettre que, pour la plupart d’entre eux, ils ne peuvent plus résider dans notre pays. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)
Cet impôt cause donc une perte nette assez importante. J’ai entendu, il est vrai, des hommes d’État de l’opposition, qui sont peut-être appelés demain à redevenir majoritaires, faire un mea culpa à ce sujet. J’ai donc bon espoir !
Mes collègues Bocquet ou Yung ont évoqué un souci d’harmonisation.
Mme Marie-France Beaufils. Pas dans le même sens que vous !