Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je comprends l’objectif qui est poursuivi par cet amendement, mais il nous pose un problème de frontière avec le code de l’environnement.
Vous proposez d’inclure les espaces ruraux et les paysages dans les sites patrimoniaux remarquables, mais l’objectif de ces sites est de protéger villes, villages, quartiers, ainsi que les espaces ruraux et les paysages lorsqu’ils participent de la cohérence patrimoniale de ces villes, villages et quartiers.
En revanche, pour ce qui est des espaces ruraux non bâtis, des paysages non liés à la cohérence patrimoniale d’une ville, un autre type de classement s’applique. Ces espaces auront plutôt vocation à être protégés comme des monuments naturels et sites au titre du code de l’environnement, sujet que nous évoquions un peu plus tôt dans la discussion.
Il nous semble que cet amendement apporterait un risque de confusion entre les deux législations. C’est pourquoi nous préférons vous demander le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Madame Laborde, l’amendement n° 157 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 157 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 105, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 89, première phrase
Après le mot :
architecture
insérer les mots :
et de l’architecte des bâtiments de France
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Cet amendement concerne les architectes des Bâtiments de France, les ABF.
Nous avons déjà eu des discussions sur ces questions et les choses ne sont pas toujours évidentes. Nous avons tous vécu des prises de position un peu péremptoires, des délais parfois longs ou des va-et-vient compliqués à gérer…
Pour autant, devons-nous accepter que les prérogatives de ces professionnels soient rognées, au profit notamment des élus locaux – même si nous les représentons – et des commissions nationale et régionales de l’archéologie et du patrimoine ?
Cela ne nous paraît pas absolument évident !
Au contraire, cela nous semble même dangereux et contre-productif, dans la mesure où les élus que nous sommes n’ont pas forcément les compétences patrimoniales nécessaires – c’est un fait…
Pire, nous sommes souvent, dans ces affaires, juges et parties, tant la préservation du patrimoine constitue une opportunité importante, mais aussi une charge difficile à assumer.
Par ailleurs, malgré toutes les critiques que l’on entend concernant les ABF – je profite de cet amendement pour rappeler certains principes auxquels nous sommes attachés –, on ne peut s’empêcher de remarquer qu’à peine 100 recours ont été déposés sur un total d’environ 400 000 avis.
Je ne peux pas non plus oublier que le principal problème dans cette affaire réside, au final, dans le nombre des ABF en exercice : à peine 120 dans l’ensemble du pays pour 44 000 monuments et autres sites.
Un autre sujet de grief régulièrement entendu à leur égard est la question de l’abord automatique de cinq cents mètres qui serait le fait du prince, en l’occurrence de l’ABF, lequel refuserait systématiquement de moduler ce périmètre.
J’aimerais rappeler qu’en près d’un siècle les abords n’ont fait l’objet que d’un seul arrêt de cour administrative.
Les problèmes ne sont donc pas si importants que cela.
De fait, il nous paraît légitime, malgré tout ce qu’on a pu dire et penser, que les architectes des Bâtiments de France donnent leur avis sur le classement d’un lieu comme site remarquable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. La mission des architectes des Bâtiments de France les conduit, aujourd’hui, à intervenir a posteriori sur la gestion d’un espace protégé, en particulier pour délivrer les autorisations de travaux ou pour veiller à la cohérence des documents de protection.
Leur expertise est évidemment importante et indispensable. Cependant, il ne paraît pas nécessaire qu’ils interviennent dès le stade de la décision de classement, même à titre consultatif.
Le droit en vigueur ne prévoit d’ailleurs pas leur intervention au moment du classement d’un secteur sauvegardé ou d’une AVAP. Ce serait donc curieux de le prévoir ici.
Par ailleurs, j’ajoute que le texte prévoit la consultation de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture sur toute proposition de classement au titre des sites patrimoniaux remarquables, ce qui devrait vous rassurer, monsieur Abate, sur la prise en compte de la valeur patrimoniale de l’espace à protéger.
C’est pourquoi la commission demande aux auteurs de retirer leur amendement ; à défaut, elle sera contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement a pour objet de prévoir l’avis de l’architecte des Bâtiments de France sur le projet de classement d’un site patrimonial remarquable.
Je partage l’appréciation qui est la vôtre sur le rôle que jouent les ABF. Il est majeur dans la préservation du patrimoine de notre pays.
Aujourd’hui, il est prévu que la décision intervienne à l’issue d’une procédure conduite par les services de l’État chargés du patrimoine, notamment l’architecte des Bâtiments de France. Celui-ci peut donc être consulté en amont.
La commission nationale rendra son avis et l’ABF sera consulté à ce titre, comme il l’est aujourd’hui pour les créations de secteurs sauvegardés ou d’AVAP.
Il me semble donc que votre amendement est déjà, dans une large mesure, satisfait. On peut prévoir de rendre explicite cette participation à ce niveau si vous le souhaitez. Je m’en remets donc à la sagesse de votre assemblée sur ce point.
Mme la présidente. Monsieur Abate, l’amendement n° 105 est-il maintenu ?
M. Patrick Abate. J’ai bien compris les arguments de Mme la rapporteur, mais je le maintiens pour insister sur le principe du rôle des ABF.
Mme la présidente. L'amendement n° 167 rectifié, présenté par MM. Barbier et Bertrand, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 89, dernière phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et aux associations reconnues d’utilité publique ayant pour objet la protection, la promotion ou la mise en valeur du patrimoine
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement vise à donner aux associations reconnues d’utilité publique ayant pour objet la protection, la promotion ou la mise en valeur du patrimoine la possibilité de proposer le classement d’un site au titre des sites patrimoniaux remarquables.
Ces associations ont un rôle à jouer pour proposer les sites qui n’auraient pas été retenus par les administrations ou les collectivités concernées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cet amendement vise à ouvrir aux associations de défense du patrimoine l’initiative du classement au titre des sites patrimoniaux remarquables.
Si je comprends, madame Laborde, le souci exprimé par cet amendement, il ne me paraît pas utile d’ouvrir une telle faculté.
Je rappelle que le Sénat a déjà ouvert, en première lecture, l’initiative du classement au titre des sites patrimoniaux remarquables à la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture et aux commissions régionales.
Or ces instances comptent justement, parmi leurs membres, des représentants d’associations ou de fondations ayant pour objet de favoriser la connaissance, la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine. Elles pourront donc tout à fait reprendre à leur compte les demandes des associations mentionnées par cet amendement, lorsqu’elles sont justifiées.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. L’initiative que vous demandez au profit des associations me semble aller au-delà de ce que nous avons prévu et qui constitue déjà une grande avancée : les associations seront désormais représentées au sein de la commission nationale et des commissions régionales. Elles pourront, en réalité, exercer le pouvoir d’initiative dont vous parlez, mais à travers ces commissions, plutôt que de manière isolée.
Il me semble que cette avancée est importante.
La collégialité des commissions est également un élément utile qu’il faut souligner.
Je suis donc plutôt encline à vous demander le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Madame Laborde, l’amendement n° 167 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Il s’agissait d’un amendement d’appel important envers les associations, qui ne dépendent pas des collectivités. Ayant entendu les arguments, nous le retirons, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 167 rectifié est retiré.
L’amendement n° 106, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 94
Remplacer les mots :
peut être établi sur tout ou partie
par les mots :
est établi sur l’ensemble
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Comme précédemment, cet amendement étant lié à l’amendement n° 101, qui n’a pas été retenu, nous le retirons.
Mme la présidente. L’amendement n° 106 est retiré.
L’amendement n° 128, présenté par M. Bouvard, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 108, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 96
Supprimer les mots :
ou le plan de valorisation de l’architecture et du patrimoine couvrant le périmètre
II. – Alinéa 101
Supprimer les mots :
plan de valorisation de l’architecture et du patrimoine et, le cas échéant, sur le projet de
III. – Alinéa 126, dernière phrase
Supprimer les mots :
ou du plan de valorisation de l’architecture et du patrimoine
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Même punition ! Cet amendement est retiré, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 108 est retiré.
Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L'amendement n° 18 rectifié ter est présenté par Mme Cayeux, M. Houel, Mme Morhet-Richaud, M. Bouchet, Mme Di Folco, M. Delattre, Mme Deromedi, MM. Karoutchi, Doligé, Commeinhes, Cardoux, Vasselle et Pellevat, Mme Hummel, MM. Morisset, Milon et Chaize, Mmes Canayer et Duchêne, MM. Revet, Lefèvre, Savin, Mandelli, Husson, Chasseing, Pinton et J.P. Fournier, Mme Mélot, M. Masclet, Mmes Lopez et Lamure et MM. Charon, Gremillet, Pierre, Dallier et Gilles.
L'amendement n° 71 rectifié est présenté par M. Delcros, Mme Billon, MM. Capo-Canellas, Cigolotti et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Lasserre, Marseille, Médevielle, Roche et Tandonnet.
L'amendement n° 119 est présenté par M. Bouvard.
L'amendement n° 182 est présenté par M. Eblé.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 123
Remplacer les mots :
ou des immeubles non bâtis
par les mots :
des immeubles non bâtis ou, dès qu'il existe un acte décidant la mise à l'étude du plan de sauvegarde et de mise en valeur mentionné au II de l'article L. 313–1 du code de l'urbanisme, des parties intérieures du bâti
II. – Alinéa 124
Remplacer les mots :
protégés par le plan de sauvegarde et de mise en valeur
par les mots :
inscrits dans le périmètre de mise à l'étude du plan de sauvegarde et de mise en valeur mentionné au premier alinéa du présent article
La parole est à Mme Caroline Cayeux, pour présenter l’amendement n° 18 rectifié ter.
Mme Caroline Cayeux. Avec cet amendement, il s'agit, en reprenant la disposition adoptée en première lecture au Sénat, de bien différencier la place et le rôle des deux dispositifs pouvant être mis en œuvre dans les sites patrimoniaux remarquables.
Cet amendement permet de rétablir la procédure, supprimée à l’Assemblée nationale en deuxième lecture, de demande d’autorisation de travaux entre la mise à l’étude du plan de sauvegarde et l’entrée en application du règlement.
En première lecture, le Sénat avait voté le fait que, dès qu’il existe un acte décidant la mise à l’étude du plan de sauvegarde, les travaux susceptibles de modifier l’état des parties intérieures des immeubles sont soumis à autorisation et donnent accès à la fiscalité Malraux.
La suppression de cette disposition entraîne à la fois un double risque et une contradiction de vote. Je m’explique.
Premièrement, les travaux intérieurs n’étant plus soumis à autorisation, la fiscalité ne s’appliquerait qu’avec l’approbation du plan de sauvegarde, alors qu’actuellement elle s’applique dès la création du secteur sauvegardé.
Supprimer les effets sur les travaux liés à la prescription du plan de sauvegarde devrait, en toute logique, en supprimer les effets fiscaux.
Deuxièmement, la spécificité du plan de sauvegarde est de protéger les intérieurs.
Par conséquent, ne pas soumettre les travaux à une autorisation dès la prescription du plan de sauvegarde revient à ne pas se donner les moyens de protéger les intérieurs dès le début de la démarche, voire à aller à l’encontre de ce régime de protection fort, en laissant la porte ouverte à des collectionneurs pour emporter tout ce qui peut l’être et qui pourrait pourtant justifier le plan de sauvegarde.
Enfin, troisième point, la commission de la culture du Sénat a souhaité étendre aux biens visés par les articles 524 et 525 du code civil les protections créées par le plan de sauvegarde.
Cette extension, justifiée, sera encore moins opérante si l’autorisation des travaux n’est pas exigible dès la décision de mettre en place un plan de sauvegarde, car les biens visés à ces articles sont justement les plus faciles à enlever.
Mme la présidente. Les amendements nos 71 rectifié et 119 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Vincent Eblé, pour présenter l’amendement n° 182.
M. Vincent Eblé. Cet amendement est identique à celui que vient de proposer Mme Cayeux. Il est donc défendu et je partage tout à fait l’argumentation avancée. Je souhaite qu’il soit adopté.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 176 rectifié est présenté par M. Husson, Mme Mélot, MM. César, Karoutchi, Morisset, Gremillet, Commeinhes, P. Leroy, Delattre, de Raincourt, B. Fournier et Charon, Mme Lamure et MM. Chasseing, Pierre et Gilles.
L’amendement n° 185 est présenté par M. Eblé.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 124
Remplacer les mots :
, situés à l’extérieur ou à l’intérieur d’un immeuble, sont protégés
par les mots :
sont situés à l’extérieur ou à l’intérieur d’un immeuble protégé
L’amendement n° 176 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Vincent Eblé, pour présenter l’amendement n° 185.
M. Vincent Eblé. Cet amendement, encore plus court et de nature rédactionnelle, peut tout de même avoir une petite importance…
Nous proposons de remplacer l’expression « situés à l’extérieur ou à l’intérieur d’un immeuble, sont protégés », qui est prévue dans l’état actuel du projet de loi, par « sont situés à l’extérieur ou à l’intérieur d’un immeuble protégé ».
Cela signifie que l’ABF pourra continuer à contrôler des travaux situés à l’intérieur d’immeubles protégés en totalité par un plan de sauvegarde et de mise en valeur, sans que les éléments de décor aient été précisément décrits et fassent eux-mêmes l’objet d’une mesure de protection.
À partir du moment où l’édifice est protégé, l’ABF pourra ainsi diagnostiquer des éléments intérieurs et les intégrer dans le système de protection.
Il s’agit donc d’un renforcement du dispositif de protection.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements restant en discussion ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je suis vraiment troublée, pour ne pas dire tourmentée, traumatisée, par les amendements identiques nos 18 rectifié ter et 182. (Sourires.)
M. Claude Raynal. Il ne faut pas !
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je suis d’autant plus sensible à la préoccupation qui a été exprimée qu’elle consiste à rétablir partiellement le texte que la commission de la culture avait adopté en première lecture, sur mon initiative – c’est là que je suis très ennuyée.
Je me suis ensuite interrogée sur l’opportunité de le rétablir et j’y avais renoncé. Laissez-moi vous en expliquer les raisons.
Il est vrai qu’aujourd’hui les intérieurs sont, de fait, protégés dès la décision de classement au titre des secteurs sauvegardés. En découle une situation absurde, dans laquelle les intérieurs sont finalement mieux protégés avant l’adoption du plan de sauvegarde et de mise en valeur, puisqu’une fois celui-ci adopté, ce sont seulement les éléments identifiés en son sein qui font l’objet d’une protection.
Dans ces conditions, des centaines – si ce n’est plus – de particuliers réalisent chaque année des travaux à leur domicile en toute illégalité, car ils ignorent l’existence d’un classement au titre des secteurs sauvegardés et le régime d’autorisation de travaux qui en découle, quand bien même ils ne concerneraient que la réfection d’une salle de bains dans laquelle aucun élément de décor ne justifie une protection.
Par ailleurs, je crains que ni l’État ni les ABF ne disposent des moyens matériels de faire respecter une telle disposition.
L’objectif du texte étant de simplifier et de rationaliser les règles actuelles, il ne me paraît pas souhaitable d’encourager la poursuite d’une situation aussi ubuesque, qui représente, de surcroît, une protection exorbitante par rapport au régime des monuments historiques, pourtant supposé être le plus protecteur.
Finalement et en raison de ce que je vous indiquais en préambule, je m’en remets à la sagesse de notre assemblée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. L’amendement n° 18 rectifié ter défendu par Mme Cayeux, comme l’amendement n° 182, vise à soumettre à autorisation tous les travaux portant sur les éléments d’architecture et de décoration à l’intérieur de tous les immeubles situés dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable, dès lors qu’un plan de sauvegarde et de mise en valeur est mis à l’étude.
Je peux comprendre cette volonté de mieux protéger les intérieurs, mais si l’on adopte cet amendement, il faudra soumettre à autorisation tous les travaux réalisés sur des décors intérieurs dès la mise à l’étude du plan de sauvegarde et de mise en valeur, y compris pour ceux qui ne seront finalement pas reconnus comme ayant une valeur patrimoniale.
Nous y voyons un risque, celui de dissuader la mise à l’étude d’un plan de sauvegarde, d’inciter à réaliser des travaux sans autorisation et peut-être de surcharger les services.
S’agissant de la fiscalité du patrimoine, autre thème évoqué dans votre présentation, madame la sénatrice,… (Plusieurs sénatrices et sénateurs du groupe Les Républicains entrent dans l’hémicycle et regagnent leur place) il s’agit évidemment d’un élément incitatif à la protection du patrimoine. Il m’apparaît donc essentiel de la faire évoluer de manière cohérente avec les dispositions que nous allons adopter dans ce projet de loi. C’est pourquoi je vous propose qu’un groupe de travail parlementaire spécifique soit consacré à cette question,…
Mme Audrey Azoulay, ministre. … puisque des spécialistes et des passionnés siègent sur toutes les travées. Ce groupe pourra être réuni à temps afin que la loi de finances intègre les mesures qui s’imposent et que nous disposions ainsi d’une fiscalité cohérente avec l’évolution de la protection de notre patrimoine.
J’émets donc un avis défavorable sur les amendements nos 18 rectifié ter et 182, ainsi que sur l’amendement n° 185.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 18 rectifié ter et 182.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 185 n’a plus d’objet.
Je signale à nos collègues qui viennent d’arriver qu’ils donnent l’image d’un Sénat dissipé, alors que des élèves d’un lycée professionnel qui assistent à notre séance sont très sages et très attentifs !
M. Michel Bouvard. Madame la présidente, nous pouvons faire les choses sérieusement sans nous prendre au sérieux ! (Sourires.)
Mme la présidente. L’amendement n° 110, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 127
Remplacer le mot :
donné
par le mot :
refusé
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Chers collègues, vous allez donc essayer de m’écouter sérieusement sans me prendre au sérieux… Pardon, sans vous prendre au sérieux ! (Nouveaux sourires.)
Selon l’alinéa 127 de l’article 24, l’accord de l’architecte des Bâtiments de France, ou ABF, sur les permis de démolir ou d’aménager est réputé donné en cas de silence de l’ABF. Il est courant, en droit, que le silence soit considéré comme un accord tacite, mais nous voulons mettre l’accent sur le danger que cette mesure représente pour la préservation du patrimoine. Nous l’avons dit, à peine 120 architectes des Bâtiments de France doivent s’occuper de près de 44 000 monuments. Nous craignons donc que leur silence ne soit davantage motivé par un manque de temps et de moyens que par un accord réel, ce qui pourrait avoir pour conséquence que des démolitions ou des aménagements interviennent dans des conditions non conformes au droit.
Nous vous proposons donc de transformer cet alinéa afin d’imposer un avis exprès et positif des architectes des Bâtiments de France pour la délivrance d’un permis de démolir ou d’aménager.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Les chiffres montrent que les ABF ont, en 2013, rendu près de 130 000 avis ou accords pour des immeubles situés dans le champ de visibilité d’un monument historique, près de 50 000 avis pour des immeubles situés dans une zone couverte par une ZPPAUP ou par une AVAP, et un peu plus de 10 000 avis pour des immeubles situés en secteur sauvegardé !
Compte tenu du faible nombre d’architectes des Bâtiments de France, il était nécessaire de prendre une mesure de simplification. Je reconnais, comme vous, qu’un accord exprès aurait été plus favorable à la protection du patrimoine, mais cet accord n’aurait pu être obtenu qu’au prix de l’allongement des délais d’instruction de l’ABF. Or nous savons tous que ces délais sont déjà jugés trop longs.
C’est pourquoi la solution retenue me semble la seule possible : elle permettra aux ABF de se concentrer sur les décisions de refus, de manière à pouvoir les motiver comme il se doit. Dans ces conditions, je vous invite à retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement a pour objet de supprimer le principe de l’accord tacite de l’architecte des Bâtiments de France en cas de silence. Vous le savez, le Gouvernement souhaite, c’est pour lui un principe de politique générale, que les demandes adressées à l’administration soient réputées acceptées en cas de silence de celle-ci. Il ne me paraît pas souhaitable de déroger à ce principe général pour l’accord de l’architecte des Bâtiments de France et c’est pourquoi je vous demanderai de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. Michel Bouvard. Très bien !
Mme la présidente. Monsieur Abate, l’amendement n° 110 est-il maintenu ?
M. Patrick Abate. Nous comprenons bien que l’accord tacite permet de désengorger les ABF. Nous voulions simplement mettre l’accent sur un point important pour la qualité de leur travail dans ce domaine, à savoir la nécessité de renforcer leurs capacités. À notre sens, les ABF devraient être un peu plus nombreux pour pouvoir travailler plus sereinement.
Quoi qu’il en soit, la bonne marche de l’administration et les contingences excluent que l’on crée des blocages potentiels. C’est la raison pour laquelle je retire cet amendement, madame la présidente.
MM. Michel Raison et Michel Bouvard. Très bien !
Mme la présidente. L’amendement n° 110 est retiré.
L’amendement n° 111, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 129, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
En cas de silence, l’autorité administrative est réputée n’avoir pas encore statué.
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Cet amendement s’inscrit dans le même esprit que le précédent et nous y exprimons la même préoccupation de principe. J’imagine que je recevrai les mêmes réponses, donc je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 111 est retiré.
L’amendement n° 164 rectifié, présenté par MM. Barbier, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Mézard, Guérini, Requier et Vall et Mme Laborde, est ainsi libellé :
Alinéa 130, dernière phrase
Remplacer le mot :
confirmé
par le mot :
rejeté
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement vise à améliorer le régime d’autorisation des travaux sur les immeubles protégés au titre des sites patrimoniaux remarquables lorsque des formalités comme le permis de construire, de démolir ou d’aménager doivent être réalisées.
Nous souhaitons que, en cas de contestation par le demandeur du refus d’autorisation des travaux par l’autorité locale compétente à la suite de l’avis négatif de l’architecte des Bâtiments de France, une décision positive, explicite et motivée du préfet de région soit fournie lors de ce recours.
Si cet amendement n’était pas adopté, la procédure de recours pour obtenir l’autorisation des travaux serait peu effective, car un simple silence du préfet de région confirmerait le refus de l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation. Il convient donc que l’autorité administrative statue obligatoirement lors du recours, afin que les blocages soient levés et que le recours du demandeur soit effectif. Il s’agit, en fait, de toujours motiver une décision, même négative.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Si j’ai bien compris votre amendement, monsieur Requier, le silence du préfet doit valoir rejet de la décision du maire en cas de recours par un demandeur.
Vous nous proposez, là encore, de revenir sur une disposition pourtant protectrice pour le patrimoine. Le texte prévoit en effet que, dans le cas où un particulier contesterait un refus d’autorisation de travaux donné par le maire, le silence du préfet doit être interprété comme la confirmation de la décision du maire, c’est-à-dire la confirmation du refus d’autorisation de travaux.
Si nous adoptions cet amendement, le silence du préfet aurait pour conséquence d’autoriser le demandeur à engager les travaux que le maire avait refusés.
C’est ainsi que j’ai compris cet amendement. Voilà pourquoi je vous demande de bien vouloir le retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.