Mme la présidente. La parole est à M. Henri Tandonnet, auteur de la question n° 1380, adressée à Mme la ministre du logement et de l'habitat durable.
M. Henri Tandonnet. Je souhaite appeler l’attention sur les conditions de prise en compte, à l’échelle intercommunale, des obligations résultant de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, et de la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social.
L’article 55 de la loi SRU a créé l’obligation, pour les communes les plus urbaines, de compter au moins 20 % de logements locatifs sociaux dans leur parc de résidences principales à l’échéance de 2020.
La loi du 18 janvier 2013 renforce cette obligation pour certaines communes, en relevant le seuil à 25 % de logements sociaux, et introduit un échéancier de rattrapage par période triennale, en reportant à 2025 la date butoir à laquelle les communes devront avoir atteint l’objectif de 20 % ou de 25 % de logements sociaux.
L’article L. 302-8, alinéa 2, du code de la construction et de l’habitation offre la possibilité d’appréhender cette obligation dans un cadre territorial mutualisé, en cohérence avec la prise de compétence des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, en matière de logement social.
En effet, sans remettre en cause les obligations introduites par la loi SRU et la loi du 18 janvier 2013, ledit article permet de confier le soin à l’EPCI compétent en matière de programme local de l’habitat de fixer un objectif de réalisation de logements locatifs sociaux par commune, dès lors que le cumul des objectifs communaux à réaliser sur l’ensemble du territoire communautaire est au moins égal à ce que prévoient les obligations de la loi SRU applicables aux communes qui y sont assujetties.
Alors que les territoires sont invités à raisonner sur la base d’un ensemble cohérent de collectivités pour la mise en œuvre du schéma de cohérence territoriale, le SCOT, du plan local d’urbanisme intercommunal, du programme local de l’habitat, le PLH, et du plan de déplacements urbains, le PDU, il apparaît plus conforme à la bonne réalisation de l’objectif d’offre de logements sociaux de répartir ceux-ci sur l’ensemble des territoires de l’ensemble concerné, ainsi mieux organisé.
Dans ce contexte, je souhaite savoir s’il est possible que soit admise, par les services de l’État, cette application mutualisée à l’échelle d’un EPCI, plutôt que commune de plus de 3 500 habitants par commune de plus de 3 500 habitants, des obligations de réalisation de logements sociaux.
Tout blocage lié à une interprétation restrictive de l’article des dispositions de L. 302-8 du code de la construction et de l’habitation remettrait en cause, d’une part, les possibilités de développement de la mixité sociale offertes par cette approche mutualisée et plus harmonieuse, et, d’autre part, les compétences dévolues aux EPCI en matière d’habitat, de politique du logement et de planification de l’urbanisme, ainsi que la cohérence promue par les nouveaux outils de l’urbanisation.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur Henri Tandonnet, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser la ministre du logement et de l’habitat durable, qui préside ce matin la réunion de l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne et m’a chargée de vous apporter une réponse.
Vous interrogez la ministre du logement et de l’habitat durable sur la possibilité d’appliquer aux intercommunalités les obligations issues de l’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, et ainsi de confier à l’EPCI la responsabilité de répartir entre les communes l’effort à mettre en œuvre sur son territoire en vue d’y proposer de 20 % à 25 % de logements sociaux.
De façon constante, le législateur a considéré que l’article 55 de la loi SRU devait s’appliquer à l’échelle de la commune, maille pertinente d’appréciation de la mixité sociale de l’habitat.
Cette mixité sociale de l’habitat constitue l’un des socles de la cohésion nationale ; pour qu’elle puisse être efficace, il convient qu’elle irrigue chacun de nos territoires, chacun de nos bassins de vie et d’emploi. L’article 55 ne saurait par conséquent s’appliquer à une échelle plus large que celle de la plus petite entité de notre découpage administratif. C’est donc au maire et à son conseil municipal de prendre en compte les enjeux de mixité sur le périmètre communal dans son ensemble, y compris au niveau des quartiers qui le constituent.
On ne saurait, dans notre pays, procéder autrement que par le recours à cet échelon communal pour rééquilibrer durablement la production et l’offre de logement social.
On ne saurait procéder autrement pour enfin rompre avec les logiques de ségrégation spatiale et sociale actuellement à l’œuvre, y compris à l’échelle de territoires intercommunaux qui s’agrandissent par ailleurs de plus en plus, notamment dans le cadre du redécoupage en cours de la carte intercommunale. Les logiques de « ghettoïsation » freinent le parcours résidentiel et la mobilité des ménages les plus fragiles.
La faculté, que vous avez rappelée, de mutualiser, conjoncturellement et sur une période limitée, les objectifs fixés par la loi SRU entre les communes d’un même territoire intercommunal, a jusqu’alors été souvent dévoyée par certaines communes, désireuses de s’affranchir d’obligations de rattrapage et d’éviter le constat de carence prévu par la loi SRU.
Le Gouvernement veille donc à une application rigoureuse de l’article 55. Toutes les communes concernées doivent prendre leur part dans l’effort de solidarité nationale, afin de permettre à tous nos concitoyens de se loger dans la commune de leur choix.
Cela n’est en rien contradictoire avec les orientations récentes, qui conduisent les intercommunalités à prendre et à assumer le rôle de chef de file des politiques locales de l’habitat sur leur territoire. Une intercommunalité peut mettre en œuvre une politique volontariste, à l’échelle de la communauté, des attributions de logements sociaux, élaborer et piloter des programmes locaux de l’habitat à même de répondre à tous les besoins identifiés localement.
C’est d’ailleurs tout le sens de l’action du Gouvernement, telle qu’illustrée par le projet de loi Égalité et citoyenneté, en cours d’examen à l’Assemblée nationale, qui vous sera soumis dans quelques semaines.
Dans cette attente, vous comprendrez, monsieur le sénateur, que le Gouvernement ne souhaite pas modifier le territoire d’application de la loi SRU.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. Elle a au moins le mérite d’être très claire, mais vous comprendrez qu’elle me déçoive beaucoup.
Il a fallu trente ans pour percevoir la nécessité de passer d’un PLU communal à un PLU intercommunal ; j’espère qu’il ne faudra pas trente ans pour comprendre que la question du logement social doit s’apprécier, sur un territoire donné, de manière globale. Dès lors que le SCOT, le PLU intercommunal, le plan de déplacements urbains, le PLH sont réalisés à l’échelle intercommunale, c’est à cette échelle qu’il faut raisonner pour le logement social !
Je souhaite donc attirer l’attention de Mme la ministre du logement et de l’habitat durable, à la veille de l’examen du projet de loi Égalité et citoyenneté, sur la nécessité d’une telle évolution, dont je crains néanmoins qu’elle n’intervienne pas dans l’immédiat.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, auteur de la question n° 1405, adressée à Mme la ministre du logement et de l’habitat durable.
M. Michel Le Scouarnec. Le littoral breton, en particulier morbihannais, représente un atout indéniable en termes d’attractivité et de possibilités de développement. Toutefois, les difficultés relatives à l’application des nouvelles dispositions en matière d’urbanisme dans les hameaux et les villages sont très importantes pour ce territoire. Les secteurs ruraux de centre Bretagne sont tous concernés, alors même que la loi relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi Littoral, ne s’y applique pas. C’est dire l’importance de cette question ; je souhaite qu’une réponse précise y soit apportée, et surtout qu’une évolution concrète de la législation intervienne rapidement.
Je suis convaincu de la nécessité de préserver les terres agricoles. Mon intention n’est pas de remettre en cause les dispositions des lois SRU, ALUR ou Littoral dont l’objet commun est de lutter contre l’étalement urbain et l’artificialisation de ces terres. Cependant, cet empilement de textes aux dispositions parfois contradictoires est venu complexifier fortement l’urbanisation des « dents creuses » dans les hameaux. L’interdiction de construire dans ces espaces posée par la loi ALUR fragilise fortement le développement équilibré de nos territoires. Dans nos communes rurales, les hameaux et les constructions isolées constituent des formes d’urbanisation prégnantes.
En outre, l’application stricte des lois ALUR et Littoral est souvent mal perçue et incomprise par les administrés, dont certains voient leur parcelle, auparavant constructible, ne plus l’être. Ces situations provoquent de la détresse, à la fois morale et matérielle.
Permettre que les « dents creuses » des hameaux deviennent ou redeviennent constructibles, tout en poursuivant les efforts de réduction de la taille des parcelles, favoriserait la densification des espaces et la préservation des paysages. Cela serait conforme à l’esprit de la loi ALUR et compatible avec la loi Littoral. Outre qu’elle fournirait une réponse pertinente aux problèmes rencontrés par les nombreux élus et citoyens concernés, cette mesure permettrait de renforcer l’attractivité de nos territoires par le développement d’une offre de logements répondant aux attentes des habitants recentrée sur des centres-bourgs disposant d’un minimum de services publics.
Mme Pinel, alors ministre du logement, avait reconnu la nécessité de renforcer l’accompagnement des collectivités et des citoyens dans l’appropriation des possibilités réglementaires en la matière. Cela est bien, mais quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour mettre la législation en cohérence avec la réalité des territoires ? Pouvoir construire dans les « dents creuses » est une question de survie et de dynamisme pour les territoires ruraux.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur Le Scouarnec, vous interrogez la ministre du logement et de l’habitat durable sur les difficultés rencontrées localement pour renforcer l’urbanisation des hameaux, compte tenu de l’application conjointe de la loi ALUR et de la loi Littoral. Il s’agit là d’une conséquence indirecte du durcissement de l’institution des secteurs de taille et de capacité limitée, les STECAL.
Permettez-moi, tout d’abord, de rappeler quelques éléments de contexte. Afin d’éviter certaines dérives, il a été décidé, par la loi ALUR, de restreindre le recours aux secteurs de taille et de capacité limitée, en précisant que ce dernier devait rester exceptionnel.
Les PLU approuvés avant la promulgation de la loi ALUR et encore en vigueur contiennent cependant de tels secteurs définis selon le droit antérieur, à savoir de manière moins stricte que ne le prévoit dorénavant ladite loi.
Ces secteurs de taille et de capacité limitée ont permis de classer comme constructibles certains terrains, dits en « dents creuses ». Ces PLU sont cependant, aujourd’hui, appelés à évoluer, en vertu des obligations de mise en conformité avec la loi ALUR, mais également de la profonde refonte de la carte intercommunale. C’est la raison pour laquelle cette situation n’apparaît qu’aujourd’hui.
Cette règle n’est bien entendu pas spécifique aux territoires littoraux, mais, dans ces territoires, elle vient s’ajouter à celles de la loi Littoral. Par ailleurs, dans le Morbihan, l’habitat traditionnel est dispersé, avec un ensemble de terrains classés constructibles en diffus. Cette particularité rend la problématique plus sensible encore.
Toutefois, des solutions existent dans le droit actuel. Il faut les utiliser. C’est pourquoi la ministre du logement a demandé à ses services de travailler spécifiquement sur ces territoires, pour accompagner les élus dans leur appropriation des nouveaux outils. Ce travail s’inscrira dans le cadre du réseau « littoral et urbanisme », animé par le ministère du logement, dont la vocation est précisément de mieux décliner les principes de la loi Littoral, et plus généralement des règles d’urbanisme, en fonction des spécificités de chaque territoire.
Une question essentielle, que vous avez soulevée, monsieur le sénateur, concerne la définition des hameaux. Dans ces derniers, définis comme des regroupements structurés de constructions en nombre limité destinées principalement à l’habitation, isolés et distincts du bourg ou du village, il est possible, de manière exceptionnelle, de délimiter des secteurs de taille et de capacité limitée qui autoriseront le comblement des « dents creuses » dans les PLU en cours de révision.
La ministre du logement est donc sensible aux difficultés rencontrées par les élus dans cette phase de transition des documents d’urbanisme, mais c’est bien par le biais d’une meilleure déclinaison des principes des lois ALUR et Littoral dans les documents d’urbanisme que seront sécurisées les autorisations de construire et évitée la frustration, voire la colère, compréhensible, de certains de nos concitoyens.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Je prends bonne note de votre réponse, madame la ministre, mais je ne suis pas convaincu qu’elle éclairera l’ensemble des maires et des acteurs locaux. Je n’y vois d’ailleurs moi-même pas très clair…
Les STECAL méritent d’être mieux définis. C’est en associant les élus et les citoyens à la réflexion pour démêler les fils de cette situation législative bien complexe.
Les juges ne prennent pas nécessairement en compte les circulaires et recommandations ministérielles : ils appliquent la loi. Peut-être faut-il modifier celle-ci, ou du moins en préciser par décret les modalités d’application. La circulaire Perben de 2006, hélas, n’a pas été reconnue par les juges.
Construire dans les « dents creuses » permettrait de réduire le coût du foncier, notamment sur le littoral, soumis à une pression foncière exceptionnelle, et de mieux répartir l’urbanisation, plutôt que de consommer des terres agricoles pour créer des lotissements géants : ce sont parfois des dizaines d’hectares qui sont ainsi mobilisés en périphérie des villes.
En ce qui concerne les STECAL, nous attendons des précisions. Mme Pinel avait elle-même reconnu que la législation, sur ce point, était susceptible d’interprétations diverses. Tel ne doit pas être le cas : la loi doit être la même pour tous !
Quant aux propriétaires des terres concernées, ils se sentent légitimement spoliés. Dans le Morbihan, de nombreuses associations ont été créées : les gens se réunissent pour se défendre et attendent, en la matière, une évolution de la législation.
Nous sommes nombreux à penser que l’inconstructibilité des « dents creuses » n’est pas conforme à l’objectif de densification et d’économies de terrains. L’évolution demandée serait également un moyen de soutenir le secteur de la construction, et ainsi de créer des emplois.
J’espère, madame la ministre, qu’une rencontre sera bientôt organisée sur ce sujet, comme me l’avait promis Mme Cosse.
mise en œuvre des nouveaux programmes scolaires
Mme la présidente. La parole est à M. François Bonhomme, auteur de la question n° 1375, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M. François Bonhomme. Ma question porte sur les disparités qui risquent d’apparaître entre établissements scolaires dans le cadre de la mise en œuvre des nouveaux programmes, dès la rentrée 2016.
En effet, le décret entérinant cette nouvelle mouture des programmes scolaires du cours préparatoire à la troisième n’a été pris que fin novembre 2015, d’où un délai bien trop court pour que les éditeurs aient le temps, d’ici à la prochaine rentrée, de refaire les manuels de toutes les matières pour toutes les années de l’école élémentaire et du collège et de transmettre les spécimens aux professeurs avant que les établissements n’opèrent leurs choix.
Ainsi, dans la plupart des cas, l’acquisition s’étalera sur deux ans et tous les collégiens n’auront pas accès en même temps aux mêmes programmes. Pour autant, on estime que 11,2 millions de manuels de collège seront renouvelés dès la rentrée 2016 ; les autres le seront à la rentrée 2017.
Pour le collège, le financement de ces acquisitions est prévu dans la loi de finances de 2016, à hauteur de 150 millions d’euros pour la première année.
Toutefois, il en va différemment pour l’école élémentaire. En effet, si l’achat des manuels n’est pas une obligation pour les communes, il est néanmoins fréquent, dans la pratique, que ces dernières acceptent de le prendre en charge, partiellement ou totalement. À l’heure actuelle, le budget des communes pour l’équipement des écoles varie déjà, estime-t-on, entre 13 et 130 euros par enfant et par an. Le coût total du renouvellement des manuels scolaires de l’école primaire est estimé à 240 millions d’euros étalés sur plusieurs années.
Le Sénat avait, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2016, budgété 50 millions d’euros pour venir en aide aux communes, mesure qui, malheureusement, n’a pas été retenue par les députés.
Or la mise en œuvre des nouveaux programmes scolaires représente bel et bien une charge nouvelle pour les communes, alors même que ces dernières ont déjà dû financer la réforme des rythmes scolaires et qu’elles sont confrontées à une baisse drastique des dotations de l’État.
Je voudrais donc savoir ce que le Gouvernement entend faire pour que, sur notre territoire, tous les élèves, du cours préparatoire au collège, aient en même temps accès aux mêmes programmes.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ericka Bareigts, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité réelle. Monsieur le sénateur Bonhomme, comme vous le soulignez à juste titre, les communes ont la charge des écoles publiques, et notamment de leurs dépenses de fonctionnement. Elles assurent, à ce titre, la prise en charge financière des manuels scolaires, sans que leur acquisition ait cependant de caractère obligatoire. Le choix d’y procéder ainsi que la fixation du niveau de la dépense correspondante relèvent donc de la seule démocratie locale.
Par ailleurs, les manuels scolaires ne constituent pas des supports obligatoires d’enseignement. En effet, les enseignants peuvent décider de substituer à ceux-ci des documents photocopiés. La dépense liée aux droits de reprographie est alors à la charge de l’État, conformément aux dispositions de l’article L. 212-4 du code de l’éducation. À ce titre, un montant de 7,7 millions d’euros a été inscrit en loi de finances initiale de 2016 pour le premier degré.
En outre, en vertu de la liberté pédagogique qui leur est légitimement reconnue, les enseignants peuvent adapter les contenus des manuels scolaires qui sont à leur disposition. À partir des programmes définis par le ministère, ils peuvent choisir la méthode et les outils didactiques qui leur paraissent les mieux adaptés à la progression de leurs élèves.
Enfin, des documents d’accompagnement ont été élaborés et mis en ligne pour chaque matière, afin de faciliter la mise en œuvre des nouveaux programmes.
S’agissant par exemple de l’école maternelle, un livre numérique présente le programme 2015 au travers de supports variés tels que des commentaires audio ou vidéo et des extraits de séances de classe, ainsi que d’une offre de ressources scientifiques, didactiques et pédagogiques d’aide dans différents domaines d’apprentissage, produites avec le concours de groupes d’experts et de l’Inspection générale de l’éducation nationale.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, le ministère propose des pistes concrètes afin d’accompagner les enseignants dans la mise en œuvre effective des nouveaux programmes de la scolarité obligatoire, sans que cela nécessite obligatoirement de nouvelles dépenses pour les collectivités locales.
Mme la présidente. La parole est à M. François Bonhomme.
M. François Bonhomme. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse, qui me laisse néanmoins quelque peu dubitatif.
Certes, en vertu de la liberté pédagogique dont ils jouissent, les enseignants peuvent substituer aux manuels des photocopies, dans certaines conditions.
Madame la ministre, vous nous renvoyez au caractère non obligatoire de l’acquisition des manuels, mais vous n’êtes pas sans savoir comment cela se passe dans la réalité : les enseignants et les établissements scolaires se tournent vers les maires ou, le cas échéant, vers les EPCI pour obtenir une réponse à une situation créée par une décision de l’État.
Bien entendu, ce n’est pas la première fois que l’État, indirectement, se décharge d’une dépense quasiment obligatoire, mais il a, en la matière, une responsabilité qui ne peut être ignorée. En tout cas, on ne peut se borner à renvoyer cette responsabilité à la seule démocratie locale : c’est bien à l’État qu’elle incombe !
prise en compte des projets de logement pour la définition de la carte scolaire
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Bailly, auteur de la question n° 1388, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M. Dominique Bailly. Je souhaite interroger le Gouvernement sur la définition de la carte scolaire et, plus précisément, sur les ouvertures ou suppressions de classes.
Dans la perspective de la rentrée de septembre 2016, les directeurs d’établissement ont dû, dès octobre ou novembre 2015, faire remonter des éléments concernant leurs effectifs prévisionnels, en fonction de l’évolution scolaire des enfants et des quelques préinscriptions déjà enregistrées. Au mois de février, le directeur académique des services de l’éducation nationale, le DASEN, établit une orientation, qui fait l’objet d’une confirmation adressée aux municipalités en juin.
Je voudrais souligner l’absence de prise en compte d’une variable aux incidences pourtant fortes. Je prends l’exemple de ma commune, Orchies, qui compte 8 500 habitants : depuis janvier 2016, avec les bailleurs sociaux, nous avons construit et surtout attribué plus de 170 logements, dont un certain nombre, bien entendu, à des familles avec enfants. Le DASEN me dit qu’il sera toujours possible, en septembre, en vertu de la clause de revoyure, d’ouvrir ou de fermer des classes. Pour ma part, je souhaiterais plutôt que le nombre de logements attribués dans une commune soit pris en compte en amont, en vue d’anticiper la décision de fermer ou d’ouvrir des classes.
Quelles évolutions pourrions-nous envisager sur ce point ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ericka Bareigts, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité réelle. Monsieur le sénateur, nous avons l’ambition, avec les nouvelles modalités de répartition des moyens entre académies incluant des critères sociaux et territoriaux, de rétablir l’égalité des chances entre tous les élèves.
Je tiens donc à vous assurer que la préparation de la carte scolaire dans le premier degré, compétence partagée entre l’État et les communes, fait l’objet d’échanges nourris entre les représentants de la commune, responsables des locaux et du fonctionnement de l’école, et l’inspecteur d’académie.
Je vous rappelle que ce dernier implante ou retire des moyens après avis du conseil départemental de l’éducation nationale. Cette instance, qui associe les élus, les parents et les personnels auprès de l’administration, constitue un lieu de concertation et de réflexion stratégique sur la politique éducative et ses conséquences sur la carte scolaire.
Le seuil retenu, en matière d’effectif d’élèves, pour ouvrir ou fermer une classe est défini par l’inspecteur d’académie. À cette fin, celui-ci est incité, par une circulaire du 3 juillet 2003, à réunir, en sus des procédures de consultation précédemment évoquées, les représentants des municipalités, les parents d’élèves et les enseignants, afin de permettre une information en amont sur le projet de carte scolaire.
Dans ce cadre, l’ensemble des acteurs peuvent ainsi faire valoir les variables socioéconomiques qui seraient de nature à modifier les prévisions d’effectifs d’élèves. La circulaire prescrit en outre de tenir compte des perspectives pluriannuelles des situations locales, qui peuvent donc inclure les projets immobiliers.
Par ailleurs, dans le cadre des conventions « ruralité » récemment signées pour assurer un service éducatif de qualité en zones rurales et de montagne, le Gouvernement a prévu de rappeler l’importance du contexte socioéconomique pour la prise de décisions en matière de carte scolaire. Il compte attirer l’attention des services déconcentrés sur la nécessité d’inscrire leur action dans le cadre de schémas territoriaux pluriannuels prenant en compte ces données socioéconomiques.
Vous le voyez, c’est bien au-delà de la seule estimation des effectifs scolaires qu’est menée la réflexion sur la définition de la carte scolaire.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Bailly.
M. Dominique Bailly. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.
Le travail en commun avec les DASEN pour élaborer les critères socioéconomiques auxquels vous avez fait référence est effectivement une évolution positive. Pour autant, la qualité des relations entre les mairies et l’académie demeure un déterminant fort. C'est la raison pour laquelle j’insiste sur la nécessité de faire de la construction et de l’attribution de logements un critère majeur.
Continuons à travailler ensemble pour la refondation de notre école !
violences en milieu scolaire et agressions contre les enseignants
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 1411, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Didier Marie. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les phénomènes de violence en milieu scolaire.
Pendant l’année scolaire 2014-2015, les établissements publics du second degré ont signalé, en moyenne, 12,4 incidents pour 1 000 élèves. Ce chiffre est comparable à celui de l’année scolaire précédente. Celle qui se termine connaît aussi son lot d’incidents. Ainsi, le 15 juin, un garçon de onze ans a poignardé un élève et, selon un rapport remis mercredi dernier à Mme la ministre de l’éducation nationale, une collégienne sur cinq a été victime de cyberviolences.
Au mois de janvier 2016, au Havre, dans mon département, nous avons connu un autre événement inquiétant : un enseignant a été agressé par un lycéen, pour avoir évoqué avec ce jeune les inquiétudes de plusieurs enseignants quant à son comportement. Il ne s’agit malheureusement pas d’un cas isolé. Insultes et menaces pouvant aller jusqu’à la violence physique, de la part tant d’élèves que de parents, deviennent fréquentes. Plus de 20 % des enseignants s’estiment victimes ou, à tout le moins, concernées par des attitudes agressives.
De tels comportements se manifestent souvent devant la classe ou dans la cour de récréation, au vu de tous les élèves, ce qui remet en cause l’autorité des enseignants et les pénalise dans l’exercice de leur métier.
Je souhaite donc connaître les dispositions prises par le Gouvernement pour lutter contre les violences scolaires, en particulier celles qui sont commises à l’encontre des enseignants, et les mesures qui pourraient être mises en œuvre à la prochaine rentrée pour réduire le nombre d’agressions subies par les enseignants et améliorer ainsi significativement leurs conditions de travail.