M. Roger Karoutchi. Allons !
M. Vincent Capo-Canellas. Je me sens donc tout à fait à l’aise pour parler de la règle d’or !
Cela étant, il faut trouver une solution. J’ai essayé d’élaborer une formule permettant de concilier l’application de la règle d’or, à laquelle je tiens, et la réalisation du projet. Mais on a déjà posé tellement de verrous que si nous en ajoutions encore un aujourd’hui en excluant le recours à un financement bancaire par l’application de la règle d’or, la mise en œuvre du projet se trouverait de fait gravement fragilisée. Ainsi, l’une des principales réformes que notre pays doit conduire serait mise en péril.
Je défendrai tout à l’heure un amendement, dont j’espère qu’il pourra prospérer, visant à permettre au Sénat de réaffirmer son attachement au respect de la règle d’or sans pour autant bloquer le projet. C’est tout l’enjeu de notre discussion.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, il faudra débattre, aujourd’hui et lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, du financement global et de la question de la taxe, dont vous nous avez dit qu’elle n’entrerait en vigueur qu’en 2024 : dont acte ! C’est tant mieux pour la compétitivité du transport aérien, mais attention à ne pas répéter l’expérience de l’écotaxe. Il faudra veiller à rendre crédible la mise en place de cette taxe en 2024, faute de quoi les banques nous opposeront l’exemple funeste de l’écotaxe.
Je souhaite que ce projet puisse être mené à bien, dans le respect de l’environnement et des attentes des usagers des transports du quotidien, et qu’il permette à la France de régler un très ancien problème. La seule question à se poser est la suivante : comment en finir avec les atermoiements du passé et faire aboutir ce projet ? (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a une quinzaine d’années, je recevais Antoine Veil dans mon bureau de président de groupe au conseil régional. Il venait m’exposer le projet du Charles-de-Gaulle Express. Depuis lors, j’ai vu défiler bien d’autres porteurs de projet, les uns se prévalant du concours des banques, les autres de celui des collectivités locales, d’autres encore de l’apport de financements publics. Au final, quinze ans plus tard, pas un coup de pioche n’a été donné ! Rien n’a bougé… La République est fidèle à elle-même : plus on tarde, moins on avance !
En définitive, nous nous trouvons devant une situation extraordinairement compliquée, car chacun, en Île-de-France, a son projet, son dada, et tente de faire prévaloir sa volonté. « Qui paye ? » demande-t-on volontiers quand il s’agit de financer un projet. En Île-de-France, la réponse est simple : nous payons tout !
Mme Nicole Bricq. Mais non, pas tout ! Il s’agit d’une société de projet !
M. Roger Karoutchi. Si ! Le Grand Paris Express coûte 32 milliards d’euros : une paille !
Mme Évelyne Yonnet. C’est pour la Seine-Saint-Denis, pas pour Neuilly !
M. Roger Karoutchi. Au début, on nous expliquait que l’État allait apporter des sommes importantes. J’ai été le premier, à l’époque où Jean-Marc Ayrault était Premier ministre, à voter, avec le président Huchon, des projets miraculeux de conventions financières. Puis Manuel Valls nous a dit que, plutôt que d’apporter de l’argent, il nous autoriserait à opérer des prélèvements fiscaux, ce qui n’est pas exactement la même chose ! (Sourires.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. En effet !
M. Roger Karoutchi. Mais enfin, nous voulions la réalisation du Grand Paris Express et, comme finalement je suis finalement une bonne pâte (Nouveaux sourires.), j’ai voté le plan de rénovation présenté par le président Huchon, d’un montant de 7 milliards d’euros. Lorsque je demandais combien mettait l’État, on me répondait peut-être 1 milliard d’euros et l’on m’invitait à solliciter les départements, les collectivités, pour qu’ils bouclent le financement… Et voilà maintenant le Charles-de-Gaulle Express !
Je le dis tranquillement, dans cette région qui vit mal, les moyens de transport sont usés parce que nous avons été très maltraités : même l’amortissement des matériels circulant en Île-de-France servait à financer le TGV. En réalité, les investissements nécessaires sur nos réseaux et nos matériels n’ont pas été effectués pendant dix à quinze ans. (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)
Tous les gouvernements successifs se sont dit que, en Île-de-France, le public était captif ! Quel que soit le modèle des trains, qu’ils roulent ou non, qu’ils soient climatisés ou non, qu’ils soient équipés de toilettes ou non, les usagers montent dedans et se font transporter, souvent « comme du bétail », disait André Santini. Il n’y a pas le choix !
Concernant le Charles-de-Gaulle Express, je suis hésitant. Dans le cadre de travaux sur la modernisation et le financement de la ligne B du RER, j’avais proposé le doublement du tunnel entre Châtelet et Gare du Nord. On m’avait rétorqué que c’était techniquement impossible, puis que c’était financièrement inenvisageable. Finalement, entre la réalisation du Charles-de-Gaulle Express, la création du Grand Paris Express et la rénovation de l’existant, il faudra trouver au minimum 40 milliards d’euros.
J’entends bien, monsieur le rapporteur, votre réticence à déroger à la règle d’or, mais, dans cette région, on déroge déjà depuis très longtemps à une règle de base : assurer des transports de qualité aux citoyens ! (MM. Vincent Capo-Canellas et Yves Pozzo di Borgo applaudissent.)
N’étant pas un spécialiste, je ne sais pas s’il faut respecter ou non la règle d’or, mais il me semble que l’amendement présenté par Vincent Capo-Canellas va dans le bon sens. Je suis en effet intimement persuadé qu’il faut laisser les collectivités, la société du Grand Paris et le STIF se concentrer sur la réalisation du Grand Paris Express et la rénovation de l’existant. Si l’on veut construire en parallèle le Charles-de-Gaulle Express, il faut recourir à d’autres financements et à d’autres structures, sinon on aboutira à un blocage général dont l’usager des transports franciliens subira les conséquences.
Nous avons besoin du Charles-de-Gaulle Express, sachant que nous avons perdu plus d’un million de touristes depuis le début de cette année et que les investissements internationaux ont reculé de près d’un quart en trois ans. Cette réalité ne s’explique pas seulement par les attentats : la baisse avait commencé avant. Les étrangers se plaignent du poids de la fiscalité en France, de l’insécurité en Île-de-France. Pourquoi s’installer chez nous, même après le Brexit, alors que Bruxelles est si accueillante ?
Nous devons envoyer des signaux positifs, pas seulement en vue d’obtenir l’organisation des jeux Olympiques ou de l’Exposition universelle, et affirmer notre volonté de développer cette région, d’offrir à l’usager des transports publics de qualité sur les lignes classiques, d’inciter les collectivités et le secteur privé à s’engager. Monsieur le rapporteur, cessons d’invoquer à chaque fois des règles qui interdisent d’agir ! À la fin, c’est toujours le Francilien qui « trinque », à la fois sur le plan financier et sur celui de la qualité des transports ! L’État, désargenté, ne manque jamais d’annoncer que, en définitive, au lieu d’apporter de l’argent, il autorise la région à pratiquer un prélèvement fiscal… Cela suffit !
Il convient, à mon sens, de voter l’amendement que défendra Vincent Capo-Canellas, de trouver des solutions de financement et de faire en sorte que les transports en Île-de-France cessent d’être une perpétuelle galère, pour les Franciliens comme pour les étrangers qui viennent dans notre région pour faire du tourisme ou créer de la richesse. Je le dis à l’attention de nos collègues de province : l’Île-de-France n’est pas une région riche qui a les moyens de tout faire ; elle connaît de grandes difficultés en matière de transports. (Mme Catherine Troendlé, MM. Philippe Dominati, Vincent Capo-Canellas et Yves Pozzo di Borgo applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne suis pas une spécialiste des transports. J’interviens dans ce débat en tant qu’élue francilienne, surtout pour exercer une sorte de droit de suite parlementaire. En effet, c’est l’article 8 de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, la loi Macron, qui a autorisé le Gouvernement à préciser par voie d’ordonnance les nouvelles modalités de réalisation de l’infrastructure. Cet article a été adopté par le Sénat, en particulier par le groupe socialiste et républicain.
Je soutiens sans aucun état d’âme ce projet national, considérant que sa réalisation placera la France au premier rang en termes d’attractivité touristique et économique. Nous nous félicitons souvent d’accueillir le plus grand nombre de touristes au monde, mais, en termes de chiffre d’affaires, nous sommes derrière l’Espagne. Il y a des raisons à cela.
Nicole Bonnefoy vient de le rappeler, les chiffres pour les dix premiers mois de 2016 sont mauvais. Il est vrai qu’il y a eu les attentats, les grèves, du mauvais temps, mais nous avons un vrai problème en matière d’accueil des touristes. Surtout, nous peinons à attirer ceux qui peuvent le plus alimenter notre chiffre d’affaires touristique. Nous avons du mal, par exemple, à retenir, en fin de semaine, la clientèle d’affaires, qui préfère traverser la Manche pour passer le week-end à Londres, notamment parce que notre offre d’accueil et de transports n’est pas à la hauteur.
Nous avons déjà débattu de ce sujet à plusieurs reprises, en particulier lors de l’examen du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, il y a plus d’un an et demi. Nos collègues des groupes écologiste et CRC avaient alors souligné avec force, comme ils viennent encore de le faire, l’importance des trains du quotidien et la nécessité d’investir sur le RER B.
Depuis, un fait majeur s’est produit, que M. Karoutchi aurait pu rappeler, lui qui connaît bien les affaires de la région d’Île-de-France : un contrat de projet, un CPER, a été signé entre l’État et la région concernant le volet des transports. La programmation et le financement des travaux d’amélioration du fonctionnement du RER B sont prévus dans ce contrat de projet. Certes, des difficultés, notamment techniques, se posent, s’agissant en particulier de la station Châtelet, point d’engorgement des transports franciliens.
Monsieur le secrétaire d’État, il faut placer la région-capitale à la hauteur de ses homologues étrangères. Londres, Stockholm, Oslo, Tokyo et d’autres villes-mondes sont en concurrence avec nous. Dans cette perspective, nous devons améliorer notre offre de transports et d’accueil.
Ce n’est pas un hasard si Mme Hidalgo propose aujourd’hui même à son conseil municipal d’étendre à douze dimanches la possibilité du travail dominical, alors qu’elle y était férocement opposée il y a moins d’un an !
Mme Catherine Procaccia. Il y a tout de même cinquante-deux dimanches dans l’année !
Mme Nicole Bricq. L’amélioration de la qualité de l’accueil sera également évoquée par le comité interministériel réuni sous la présidence du Premier ministre pour traiter des problèmes de sécurité. Nous devons consentir un énorme effort dans ce domaine, nous le savons.
Cela a été dit, le CDG Express sera financé sur fonds privés. Monsieur le secrétaire d’État, concernant la rentabilité du projet, si nous avions eu les mêmes préventions lorsqu’il s’est agi de creuser le tunnel sous la Manche, nous ne l’aurions jamais fait ! La rentabilité d’un tel investissement s’apprécie sur le long terme, comme pour Eurotunnel. Le projet qui nous occupe n’est certes pas de la même ampleur, mais, en matière de réalisation d’infrastructures, le facteur temps doit toujours être pris en compte.
Il reste que les recettes d’exploitation ne couvriront pas forcément les coûts. Je vous fais confiance pour trouver une solution de remplacement à la création d’une taxe qui, il est vrai, fait presque l’unanimité contre elle, et pas seulement chez Air France. On ne doit pas s’arrêter à cela !
Nos amis Toulousains ont la volonté de créer une voie dédiée à la desserte de la zone d’emploi la plus importante de l’agglomération, où est implanté Airbus. Cela coûtera 2,4 milliards d’euros, soit bien plus cher que l’équipement dont nous parlons. J’aurais honte qu’ils nous passent devant en réalisant cet investissement avant que la région-capitale ait pu faire aboutir son projet ! L’impulsion est donnée, suivons-la et les problèmes se règleront. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cela aurait pu être un beau débat. Nous attendions un vrai projet, mais je dois dire que mon trouble est grand.
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas nouveau, il l’a toujours été !
M. Philippe Dominati. Il a fallu quarante-deux ans pour essayer de corriger une anomalie française : la deuxième plateforme aéroportuaire d’Europe est dépourvue d’une liaison directe avec la capitale. Le premier responsable de cette situation est l’État, qui, bien qu’il puisse s’appuyer sur la SNCF et la RATP, auxquelles se sont ajoutés, depuis la construction de l’aéroport Charles-de-Gaulle, Réseau ferré de France et la Société du Grand Paris, n’a toujours pas été en mesure d’assurer aux Franciliens un service répondant à leurs besoins. L’Île-de-France est pourtant l’une des seules régions d’Europe où l’État dispose d’un monopole sur les transports publics. Quarante-deux ans après l’ouverture de Roissy-Charles-de-Gaulle, on se dit qu’il serait bon de recourir aux mêmes solutions que les autres pays, mais on refuse de laisser faire l’initiative privée : l’État veut toujours tout contrôler, alors que, comme l’a dit Roger Karoutchi, il n’a pas d’argent et se contente d’emboîter des structures vides, telles des poupées russes. Le contribuable paiera…
Pour autant, ce projet est en soi nécessaire. Il serait intéressant que notre aéroport international soit desservi par une liaison directe de qualité. Cependant, nombre de Parisiens, dont je suis, ne sont pas persuadés que le centre de Paris se situe gare de l’Est, terminus prévu de la ligne projetée. On peut en outre s’interroger sur la rentabilité de celle-ci, sachant par exemple qu’il en coûtera 48 euros à un couple pour rejoindre l’aéroport depuis un quartier d’affaires du centre ou de l’ouest de Paris, via, donc, la gare de l’Est…
Par ailleurs, qu’en est-il de la création d’une liaison directe et moderne entre les deux aéroports d’Orly et de Roissy-Charles-de-Gaulle, qui n’est pas abordée dans ce projet ? Faudra-t-il, là aussi, patienter une quarantaine d’années ?
Enfin, la commission des finances a entendu des représentants d’Air France, principal utilisateur de l’aéroport Charles-de-Gaulle. Lorsqu’on les interroge sur l’utilité de ce projet, ils répondent grosso modo qu’ils y sont hostiles si sa réalisation doit nuire à la compétitivité de la compagnie du fait d’un renchérissement du coût du transport aérien. Dans ces conditions, comment peut-on défendre ce projet en invoquant la nécessité de renforcer l’attractivité de Paris et de l’Île-de-France ? Je voudrais comprendre…
Les difficultés auxquelles nous nous heurtons et le malaise que j’éprouve tiennent au fait que nous débattons sur la base d’un projet très ancien, qui a fait l’objet d’une tentative de concession à un groupe connu de BTP, retenu en 2008 parmi cinq candidats. La concession a été signée en janvier 2010. En mai de la même année, lors de l’examen de la loi relative au Grand Paris, nous avons débattu du projet du Grand Paris Express. Plusieurs d’entre nous se sont alors interrogés sur l’opportunité d’intégrer à ce dernier la réalisation d’une liaison directe entre l’aéroport Charles-de-Gaulle et la capitale. Le rapporteur du texte, Jean-Pierre Fourcade, dont vous contestiez d’ailleurs, madame Bricq, les conclusions, était partisan de cette solution et estimait que le projet du CDG Express devait être abandonné, ce qui fut fait.
Le groupe ayant remporté la concession est entré au capital d’ADP, à hauteur de 3 %, cette participation étant ensuite portée à 8 %. Un changement de président entraîna un changement de politique d’ADP, le nouveau président étant favorable à la réalisation de la liaison directe, contrairement à son prédécesseur. Pourquoi le contribuable devrait-il payer ? Soyons sérieux : si ADP, ayant changé de position, considère désormais qu’une liaison ferroviaire directe et moderne reliant Paris à l’aéroport Charles-de-Gaulle est un élément essentiel d’attractivité, il lui revient de la financer. Appliquer la « règle d’or », comme l’a réclamé le rapporteur, est absolument nécessaire. Il est trop facile de verser des dividendes à ses actionnaires et de laisser au contribuable le soin de payer les équipements !
Quant à la taxe sur les passagers du transport aérien, vous avez annoncé, monsieur le secrétaire d’État, qu’elle n’entrerait en vigueur qu’en 2024. Elle vous permettra peut-être de passer à la postérité, mais il faudra que vous m’apportiez des arguments nettement plus convaincants sur le plan économique pour me décider à voter ce texte !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. On peut être contre ce projet à condition de l’appréhender correctement. À cet égard, on ne saurait souscrire à l’argumentation de ceux qui l’opposent aux transports du quotidien : cela n’a strictement rien à voir.
Le CDG Express reliera l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle au centre de Paris et a vocation à renforcer l’attractivité touristique de la capitale. Soit dit en passant, monsieur Dominati, le gouvernement Fillon avait envisagé d’autres terminus que celui qui a finalement été retenu, avant de conclure que faire un autre choix pourrait remettre en cause les TER de Picardie. Vous le savez parfaitement.
Il n’est pas très raisonnable de suggérer à nos concitoyens que ce projet d’un coût de 1,4 milliard d’euros constituerait une remise en cause des transports du quotidien, alors que le coût du Grand Paris Express dépasse 32 milliards d’euros ! Je ne nie pas les difficultés rencontrées par les Franciliens en matière de transports, mais elles ne sont pas liées au projet du Charles-de-Gaulle Express. Je rappelle d’ailleurs qu’une partie de cette somme de 1,4 milliard d’euros servira à améliorer des infrastructures utilisées par les transports du quotidien.
L’on peut être contre ce projet, penser qu’il y a autre chose à faire,…
Mme Éliane Assassi. Nous l’avons dit !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. … mais il ne mobilise pas d’argent public et l’on ne peut donc pas prétendre que sa réalisation se fera au détriment du financement des transports du quotidien. Les modes de financement sont distincts.
En ce qui concerne les incidences de la circulation du Charles-de-Gaulle Express en cas de difficultés sur le RER B, il s’agit d’une vraie question. (Mme Évelyne Yonnet opine.) Sur ce point, permettez-moi de vous renvoyer au compte rendu de mon audition devant la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale : « Je le dis très clairement : sans vouloir ignorer le CDG Express, les solutions techniques prendront naturellement en compte de manière prioritaire les trains du quotidien, en l’occurrence le RER B. » La feuille de route donnée aux techniciens est donc très claire.
M. Karoutchi a dit des choses justes sur l’état du réseau. Nous aurons l’occasion d’en débattre prochainement, et je reviendrai sur l’évolution des enveloppes financières. J’indiquerai simplement qu’il faut bien distinguer les opérations de maintenance des actions visant à la régénération du réseau. Pendant des années, l’argent qui restait n’a servi qu’à faire de la maintenance. On se contentait de boucher des trous.
Les crédits destinés à la régénération ont augmenté et l’enveloppe globale est passée de 3 milliards à 4,9 milliards d’euros cette année. L’importance des besoins et la situation insatisfaisante en Île-de-France résultent d’une histoire collective. Le Charles-de-Gaulle Express n’y est pour rien.
Madame Bonnefoy, le Gouvernement est très attentif à la compétitivité du transport aérien. Ce ne sont pas que des mots ; il y a déjà eu des actes : Air France bénéficie du CICE à hauteur de 70 millions d’euros par an. Au regard du résultat d’exploitation de cette entreprise, ce n’est pas rien !
Par ailleurs, à la suite du rapport Le Roux sur la compétitivité du transport aérien français, nous avons mis en œuvre la suppression de la taxe en correspondance. À ce jour, cette mesure représente 65 millions d’euros en année pleine.
Ces deux mesures ont amélioré le résultat d’Air France à concurrence de 135 millions d’euros.
Comme vous le savez, les compagnies aériennes se trouvent néanmoins dans une situation de fragilité. J’ai donc pris une initiative pour obtenir de la Commission européenne l’engagement d’une négociation sur la concurrence, que nous estimons déloyale, des compagnies du Golfe, notamment. Nous avons été suivis par une majorité d’États membres.
Par ailleurs, après arbitrage du Premier ministre, l’application de la taxe sur les passagers du transport aérien a été repoussée à 2024, afin de prendre en compte la situation d’Air France.
Enfin, la direction d’Air France est en train d’engager la négociation d’un plan de compétitivité et, surtout, d’un plan de développement. Le Gouvernement accompagnera les efforts qui seront faits dans ce cadre. Il n’est pas spectateur et interviendra si nécessaire.
M. Didier Guillaume. C’est très clair !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Voter ce texte tout en maintenant la règle d’or reviendrait à convoquer les obsèques du Charles-de-Gaulle Express… On me dit que cette règle est intangible et doit être respectée. C’est une position nouvelle de votre part. En effet, alors qu’un décret de 1997 prévoyait déjà que SNCF Réseau ne pourrait pas participer à des investissements futurs, vous avez pourtant choisi de déroger à cette règle pour le financement du TGV Grand Est. Votre assemblée a ainsi décidé, à titre exceptionnel, d’aggraver l’endettement de SNCF Réseau, et elle a eu raison de le faire, car sinon cette ligne à grande vitesse n’aurait pas vu le jour.
M. Didier Guillaume. Bien sûr !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Nous proposons que SNCF Réseau investisse uniquement en fonds propres, au côté de partenaires privés, tel ADP aujourd'hui, qui seront attentifs au résultat d’exploitation : cela devrait rassurer ceux qui craindraient que ce ne soit pas le cas de SNCF Réseau.
Le risque d’exploitation sera supporté par le concessionnaire. À ceux qui s’inquiètent d’une privatisation, je rappelle que des acteurs publics peuvent aussi répondre à l’appel d’offres, dans les mêmes conditions que les entreprises privées.
La seule question qui demeure est celle de l’attractivité. Elle doit être prise en compte dans la politique globale de l’État, car on ne peut se borner à répéter qu’il faut faire revenir les étrangers à Paris pour que notre capitale reste la première destination touristique au monde. Il faut aussi poser des actes pour remédier à nos lacunes, en l’occurrence en créant une infrastructure telle qu’il en existe déjà dans beaucoup de pays au monde, et promouvoir du même coup la candidature de la France à l’organisation des jeux Olympiques et de l’Exposition universelle.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, j’espère que le Sénat voudra bien soutenir ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Nicole Bricq. Bravo !
M. le président. La discussion générale est close.