Sommaire

Présidence de M. Jean-Marc Gabouty

Secrétaires :

Mmes Agnès Canayer, Annie Guillemot.

1. Procès-verbal

2. Décès d’un ancien sénateur

3. Projet de loi de finances rectificative pour 2017. – Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi

Discussion générale :

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances

M. Julien Bargeton

M. Pascal Savoldelli

M. Bernard Delcros

M. Claude Raynal

M. Emmanuel Capus

M. Yvon Collin

M. Jean-François Husson

Clôture de la discussion générale.

Question préalable

Motion n° 1 de la commission. – M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général ; M. Julien Bargeton ; M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général ; M. Emmanuel Capus. – Rejet par scrutin public n° 12.

Suspension et reprise de la séance

Première partie

Article 1er

M. Claude Raynal

M. Pascal Savoldelli

M. Philippe Dominati

Adoption, par scrutin public n° 13, de l’article.

Article 3 et état A annexé – Adoption.

Vote sur l’ensemble de la première partie du projet de loi

Adoption de l’ensemble de la première partie du projet de loi.

Vote sur l'ensemble

Rejet, par scrutin public n° 14, du projet de loi.

M. le président

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

4. Hommage à Georges Clemenceau

5. Questions d'actualité au Gouvernement

prélèvement à la source

M. Thierry Carcenac ; M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics ; M. Thierry Carcenac.

élus interdits d'entrée en israël

Mme Esther Benbassa ; M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères ; Mme Esther Benbassa.

cop23

M. Jean-Louis Lagourgue ; M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

prières de rue

M. Philippe Pemezec ; Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur ; M. Philippe Pemezec.

politique de la ville (I)

M. Olivier Henno ; M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires.

prévention

M. Michel Amiel ; Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé.

agriculture biologique

M. Joël Labbé ; M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

état des forces de sécurité

M. Henri Leroy ; Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur ; M. Henri Leroy.

politique de la ville (II)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio ; M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires ; Mme Jacqueline Eustache-Brinio.

apprentissage

M. Martin Lévrier ; Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail.

politique de la ville (III)

M. Patrick Kanner ; M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Marc Gabouty

6. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

7. Financement de la sécurité sociale pour 2018. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Rappel au règlement

M. Dominique Watrin ; M. le président.

Première partie

Article 1er – Adoption.

Article 2 et annexe A – Adoption.

Adoption de l’ensemble de la première partie du projet de loi.

Deuxième partie

Article 3

Amendement n° 31 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 4

Amendement n° 443 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles 4 bis (nouveau) et 5 – Adoption.

Article 6

Amendement n° 230 rectifié de M. Cyril Pellevat. – Rejet.

Adoption de l’article.

Vote sur l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi

Adoption de l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi, modifiée.

Article 7

Mme Patricia Schillinger

Mme Laurence Cohen

M. Maurice Antiste

M. Yves Daudigny

M. Alain Joyandet

M. Daniel Chasseing

Mme Marie-Noëlle Lienemann

M. Roland Courteau

M. Gérald Darmanin, ministre

Amendements identiques nos 444 de Mme Laurence Cohen et 522 de M. Stéphane Ravier. – Rejet, par scrutin public n° 15, des deux amendements.

Amendements identiques nos 168 rectifié ter de M. Philippe Mouiller, 412 rectifié bis de M. Maurice Antiste et 447 rectifié ter de Mme Laurence Cohen. – Adoption, par scrutin public n° 16, des trois amendements.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

Amendement n° 2 rectifié de M. Christophe-André Frassa. – Non soutenu.

Amendements identiques nos 10 rectifié de M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis, 32 de la commission, 313 de M. Yves Daudigny, 367 rectifié de M. Jean-Claude Requier et 445 de Mme Laurence Cohen. – Après une demande de priorité de la commission, adoption.

Amendement n° 406 de Mme Élisabeth Doineau. – Devenu sans objet.

Amendement n° 278 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Devenu sans objet.

Amendements identiques nos 314 de M. Yves Daudigny et 446 de Mme Laurence Cohen. – Devenus sans objet.

Amendement n° 407 rectifié de Mme Élisabeth Doineau. – Devenu sans objet.

Amendement n° 414 rectifié de M. Maurice Antiste. – Devenu sans objet.

Amendement n° 562 rectifié de M. Jean-Claude Requier. – Non soutenu.

Amendement n° 155 rectifié ter de Mme Florence Lassarade. – Retrait.

Amendement n° 33 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 34 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 35 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 315 de M. Yves Daudigny. – Rejet.

Amendements identiques nos 7 rectifié ter de Mme Marie-Thérèse Bruguière, 247 rectifié de M. Cyril Pellevat, 254 rectifié bis de Mme Françoise Férat, 357 rectifié ter de M. Laurent Duplomb, 371 rectifié de M. Franck Menonville, 410 de M. Didier Marie, 428 de M. Michel Amiel, 436 de M. Jean-Pierre Decool et 516 rectifié bis de M. Daniel Gremillet. – Retrait de l’amendement n° 428 ; adoption des amendements nos 7 rectifié ter, 254 rectifié bis, 357 rectifié ter, 371 rectifié, 410, 436 et 516 rectifié bis, l’amendement n° 247 rectifié n'étant pas soutenu.

Amendement n° 397 rectifié bis de Mme Jocelyne Guidez. – Devenu sans objet.

Amendement n° 215 rectifié de M. Yannick Botrel. – Devenu sans objet.

Amendement n° 36 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 235 de M. Jean-Marie Morisset. – Adoption.

Amendement n° 362 rectifié de Mme Hélène Conway-Mouret. – Rejet.

Amendement n° 252 rectifié de M. Mathieu Darnaud. – Rejet.

Amendement n° 38 de la commission. – Adoption.

Amendements identiques nos 244 de M. Philippe Adnot et 255 rectifié de Mme Françoise Férat. – Adoption de l’amendement n° 255 rectifié, l’amendement n° 244 n'étant pas soutenu.

Amendement n° 570 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Adoption.

Amendement n° 218 de Mme Sylvie Robert. – Devenu sans objet.

Amendement n° 546 de Mme Catherine Procaccia. – Rejet.

Amendement n° 556 de Mme Catherine Procaccia. – Rejet.

Mme Laurence Cohen

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l'article 7

Amendement n° 276 rectifié de M. Olivier Cadic. – Rejet.

Amendements identiques nos 1 rectifié de M. Christophe-André Frassa, 185 rectifié bis de Mme Claudine Lepage et 275 rectifié de M. Olivier Cadic. – Adoption des trois amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° 183 de M. Jean-Yves Leconte. – Devenu sans objet.

Amendement n° 450 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 451 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 449 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

M. Gérald Darmanin, ministre

Renvoi de la suite de la discussion.

8. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Marc Gabouty

vice-président

Secrétaires :

Mme Agnès Canayer,

Mme Annie Guillemot.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente-cinq.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Décès d’un ancien sénateur

M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Jean Peyrafitte, qui fut sénateur de la Haute-Garonne de 1980 à 1998.

3

 
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2017
Discussion générale (suite)

Projet de loi de finances rectificative pour 2017

Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, de finances rectificative pour 2017. (projet n° 84, rapport n° 85).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2017
Question préalable

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, si nous sommes de nouveau réunis dans votre hémicycle, pour une nouvelle lecture de ce premier projet de loi de finances rectificative, c’est parce que le Sénat n’a pas voté l’article 1er de ce texte en première lecture. Votre commission des finances a décidé, ce matin, de présenter une motion tendant à opposer la question préalable, confirmant ainsi l’opposition de principe du Sénat au projet de loi. Je regrette cette décision, car je pense, pour ma part, n’avoir jamais refusé la discussion.

Je sais qu’il s’agit d’une décision politique difficile. Je sais que nous demandons à nos grandes entreprises, celles dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros, un effort important. Mais cet effort est nécessaire, et ce, d’abord, pour garantir la bonne tenue de nos comptes publics.

Il aurait été beaucoup plus facile pour moi de dire : puisque nous n’avons rien à voir avec ces 10 milliards d’euros, imputables à la gestion du gouvernement précédent, laissons faire et intégrons-les au déficit ! Mais ce n’est pas ma conception de ce que doit être la bonne tenue des comptes de la Nation.

Il aurait été beaucoup plus facile pour moi d’aller expliquer à nos partenaires européens que nous ne sommes pas responsables de ces 10 milliards d’euros et que, dès lors, nous laissons filer les déficits et ignorons nos engagements européens. Mais ce n’est pas ma conception de ce que doit être le respect de nos engagements à l’égard de nos partenaires européens et envers la construction européenne.

Je constate que vous avez pris la décision d’annuler cette proposition, mais que personne ne m’a fourni une proposition alternative qui puisse tenir la route.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Si !

M. Jean-François Husson. Les participations d’État !

M. Bruno Le Maire, ministre. Vous assumez donc cette idée d’avoir des déficits plus importants et de ne pas respecter nos engagements européens.

Nous avons une exigence de rendement – 5 milliards d’euros –, une exigence de solidité juridique et, enfin, une exigence comptable, qui consiste à pouvoir imputer ces 5 milliards d’euros sur l’exercice 2017, c’est-à-dire avant le 20 décembre. À tous ceux qui estiment que nous allons trop vite, permettez-moi de leur dire que, si nous n’allons pas à cette vitesse-là, il sera demain trop tard pour imputer ces 5 milliards d’euros sur l’exercice 2017, respecter nos engagements européens et, donc, assurer une bonne tenue des comptes de la Nation.

Monsieur le rapporteur général, je vous suis reconnaissant d’avoir admis que, au regard des exigences comptables, nous devions trouver ces 5 milliards d’euros pour 2017. Vous avez même formulé des propositions alternatives pour atteindre un tel objectif. Je le reconnais bien volontiers, même si nous n’avons pas pu trouver d’accord autour de ces propositions.

Je n’ai rien caché sur les effets de cette contribution exceptionnelle. J’ai toujours indiqué qu’il y aurait des gagnants et des perdants. J’ai toujours procédé avec la plus grande transparence, et je vous informe, mesdames, messieurs les sénateurs, que je transmettrai tous les chiffres relatifs à cette contribution exceptionnelle au Parlement, dans un rapport qui sera fourni en décembre. Des chiffres complémentaires seront apportés quand nous disposerons de l’intégralité des demandes de remboursement, dans le courant du mois de janvier. Je tiens, sur cette affaire, comme pour toute la gestion des comptes publics de la Nation, à ce que le Parlement soit intégralement informé et que la transparence soit de mise dans le cadre de nos discussions. Sans elle, en effet, il ne peut y avoir de débat responsable.

Je tiens à rappeler à ceux qui jugent cette contribution injuste que, ayant un caractère exceptionnel, celle-ci n’a pas vocation à être renouvelée, et elle ne le sera pas !

Je tiens également à rappeler que les grandes orientations du projet de loi de finances pour 2018 et les grandes orientations fiscales du Gouvernement ne sont en rien modifiées : baisser l’impôt sur les sociétés – de 33,3 % à 25 % –, mettre en place un prélèvement forfaitaire unique à 30 % sur les revenus du capital, supprimer l’impôt sur la fortune. Toutes ces décisions fiscales restent inchangées et cette contribution est bien exceptionnelle.

Je tiens enfin à ce que toutes les responsabilités soient établies, s’agissant de cette annulation de la taxe à 3 % sur les dividendes. C’est le sens du rapport que j’ai demandé à l’Inspection générale des finances et qui m’a été remis hier. L’objectif n’est pas de désigner un coupable et de se transformer en procureur. Là encore, il s’agit de faire toute la lumière sur ce qui nous a amenés à devoir rembourser 10 milliards d'euros dans des délais extraordinairement courts.

Ce rapport est à votre disposition. Je vous en recommande la lecture, car il est passionnant, remarquablement écrit et très précis, comprenant, notamment, une chronologie extrêmement fine. Ainsi, il établit que, au moment de la décision sur la taxe à 3 % sur les dividendes, personne n’a perçu la difficulté. Des parlementaires, notamment à l’Assemblée nationale, avaient évoqué des difficultés, mais ils les avaient soulevées sur le fondement du mauvais article de la directive concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents, la directive mère-fille. Ils avaient effectivement évoqué son article 5, relatif à la retenue à la source de ce prélèvement, en s’interrogeant sur la légitimité d’une telle retenue, alors même que la Cour de justice de l’Union européenne et la Commission européenne, par la suite, devaient s’intéresser à la conformité de la taxe sur les dividendes avec l’article 4 de cette directive, soit à l’égalité de traitement entre les sociétés au regard de cette taxe.

Donc, il me semble que, en 2012, il était impossible d’établir les responsabilités des uns ou des autres. En revanche, je vous recommande de regarder attentivement les événements de 2015.

Une procédure est engagée par la Commission européenne en février 2015. Une note de la Direction de la législation fiscale alerte sur l’éventualité d’une annulation et les risques importants que celle-ci ferait peser sur les finances publiques françaises. Dès lors, vous pouvez constater une augmentation très marquée des contentieux à la fin de l’année 2015. Les entreprises, tenant compte de la procédure engagée par la Commission européenne et de l’avis de la Direction de la législation fiscale, multiplient les procédures à l’encontre de l’État français.

À partir de 2015, donc, il était clair que cette taxe était contraire au droit européen, que les risques d’annulation étaient réels et la menace pour les finances publiques, considérable.

Le plus important à mes yeux, c’est moins le passé que les leçons que nous pouvons tirer de cet épisode pour l’avenir. En conséquence, j’avance un certain nombre de propositions pour que les failles établies par ce rapport de l’IGF ne perdurent pas.

Nous sommes tous concernés : le Gouvernement, les parlementaires, etc. Il revient à l’ensemble des responsables politiques français d’améliorer les dispositions politiques et institutionnelles concernant la loi fiscale pour garantir à nos compatriotes la sécurité et la stabilité de la législation fiscale. Telles sont, en tout cas, les deux orientations que je fixe : sécurité et stabilité de notre législation fiscale dans les années à venir. À cette fin, je vous soumets trois objectifs.

En premier lieu, je vous propose de renforcer la sécurisation de la procédure d’élaboration de la loi fiscale, car on voit bien, à l’aune de cette affaire, que notre procédure est insatisfaisante, incomplète et insuffisamment rigoureuse. Nous devons prendre le temps de garantir la robustesse juridique des dispositifs votés. Nous devons davantage associer les parties prenantes : les entreprises, les contribuables, le Conseil d’État, la Commission européenne. Il faut davantage les consulter pendant la procédure d’élaboration de la loi fiscale.

En deuxième lieu, je vous propose une plus grande transparence sur les risques de contentieux. Une alerte de la Commission européenne ou de la Cour de justice de l’Union européenne ne doit pas rester confinée au secret au sein de l’administration fiscale ou du Gouvernement. Elle doit être relayée, et je vous propose qu’elle donne lieu à une information de la commission des finances de l’Assemblée nationale et de la commission des finances du Sénat, qui disposeront ainsi de toutes les informations nécessaires sur les risques de contentieux et en tireront les conséquences.

En troisième lieu, je vous propose de remettre à plat le dispositif administratif de suivi du contentieux fiscal, avec une procédure d’alerte plus efficace pour que, quand nous savons que le contentieux peut déboucher, les décisions nécessaires soient prises. Cela n’a pas été le cas pour la taxe à 3 % sur les dividendes.

Je souhaite que nous engagions un travail en ce sens. Je vous propose que Sénat, Assemblée nationale et Gouvernement travaillent ensemble sur le fondement de ces objectifs et des autres propositions formulées par l’IGF pour améliorer l’élaboration de la loi fiscale. J’y attache une très grande importance, car je considère que les événements qui se sont produits une fois, faisant peser une menace sur nos finances publiques et mettant à mal le respect de nos engagements européens, ne doivent pas se reproduire. Or ce n’est qu’en allant au fond du sujet, en traitant les problèmes à la racine que nous remédierons aux failles constatées au niveau de l’élaboration de la loi fiscale française.

Telles sont les propositions que je voulais vous faire aujourd'hui, en profitant de ce débat. Bien évidemment, elles sont ouvertes à discussion, et je souhaite que nous puissions continuer à échanger sur le sujet.

Nous aurons d’autres occasions pour évoquer plus globalement le projet de loi de finances pour 2018, et je défendrai devant vous, la semaine prochaine, la transformation en profondeur de la fiscalité de notre pays, telle que proposée par le Gouvernement. Mais ce n’est pas le sujet du présent débat. Il s’agit ici de tourner la page de cette histoire de taxe, d’arriver à financer le manque à gagner pour l’État et de garantir le respect de nos engagements européens. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, demain, le conseil des ministres examinera le « vrai » collectif budgétaire, si je puis dire, celui qui procède traditionnellement aux ajustements nécessaires de fin d’année. Cet après-midi, nous sommes amenés à revenir sur un collectif budgétaire d’urgence – sujet que nous connaissons bien –, sur lequel, comme cela a été dit à l’instant, la commission mixte paritaire n’est pas parvenue à un accord.

Ce texte comptait six articles à l’issue de la discussion en première lecture à l’Assemblée nationale. Le Sénat en a adopté quatre conformes – ce n’était pas les plus importants – et en a modifié deux, ce qui a conduit à l’échec de cette commission mixte paritaire, réunie vendredi dernier. Notre divergence, vous le savez, porte sur l’article 1er du projet de loi, les modifications de l’article 3 – l’autre article n’ayant pas été adopté conforme – n’étant que des conséquences des premières modifications souhaitées. Le Sénat a effectivement refusé la création d’une contribution exceptionnelle et d’une contribution additionnelle de 15 % à l’impôt sur les sociétés touchant les grandes entreprises,…

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. … c'est-à-dire les entreprises qui enregistrent plus de 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires. Comme le ministre vient de le redire à l’instant, le Gouvernement justifie cette imposition nouvelle par la nécessité de faire face aux remboursements de la taxe invalidée, sans pour autant compromettre le respect de l’objectif de sortie de la France de la procédure de déficit excessif en 2017.

Le Sénat a bien évidemment examiné l’incidence de cette taxe, qui touche particulièrement certains secteurs : le commerce, les services financiers, notamment les banques mutualistes. Cette incidence a été très largement soulignée lors de nos débats, de même que le message quelque peu contradictoire entre la baisse annoncée du taux de l’impôt sur les sociétés, dans le cadre du projet de loi de finances, et ces surtaxes, certes exceptionnelles. C’est la raison pour laquelle le Sénat les a supprimées.

En nouvelle lecture, l’Assemblée nationale a souhaité revenir à son texte de première lecture, moyennant une légère correction rédactionnelle à l’article 1er au travers d’un sous-amendement du Gouvernement. Ce sous-amendement supprime, dans le rapport qui sera présenté au Parlement, les mentions d’entreprises « perdantes » et « gagnantes », pour les remplacer par une présentation plus large, à l’échelle de la société ou du groupe de sociétés, des effets de la suppression. Nous disposerons donc, dans quelques semaines ou quelques mois, de l’impact du projet de loi de finances rectificative que nous examinons aujourd'hui. Autrement dit, nous connaîtrons précisément les conséquences de ces mesures fiscales après leur adoption !

Pour être complet, j’ajoute que l’Assemblée nationale a adopté l’article 3 dans sa rédaction issue des travaux de première lecture.

Pourquoi avoir déposé une motion tendant à opposer la question préalable ? Je ne m’étendrai pas sur le sujet, car nous avons déjà eu un long débat et différentes positions se sont exprimées la semaine dernière. Nous sommes manifestement dans l’impossibilité de rapprocher les positions exprimées par l’Assemblée nationale, d’une part, et par le Sénat, d’autre part, ce désaccord ayant été confirmé en commission mixte paritaire.

La commission des finances n’entend pas approuver ou désapprouver la position du Gouvernement ; elle considère que le débat a largement eu lieu, qu’il n’est pas nécessaire d’y revenir et que les positions exprimées par les deux assemblées sont irréconciliables. Cela explique la présentation d’une motion tendant à opposer la question préalable sur le projet de loi de finances rectificative. Il me semble que nous partageons tous, sur toutes les travées, une même opinion : il est temps de clore ce débat, qui appartiendra bientôt au passé.

M. le ministre a évoqué les conclusions de l’Inspection générale des finances. Pour ma part, ce n’est pas tant la partie sur le passé qui m’intéresse – le passé, c’est le passé –, ce sont plutôt les propositions qui viennent tout juste d’être formulées. Je souscris notamment à celles qui consistent à mieux anticiper, mieux préparer la loi de finances et mieux informer – je pense tout particulièrement à cette proposition très précise du rapport de l’IGF sur l’information des présidents et rapporteurs généraux des commissions des finances des deux assemblées sur le risque contentieux.

Oui, monsieur le ministre, nous souscrivons à ces propositions, et nous sommes tout à fait prêts à travailler pour une meilleure préparation de la loi et pour éviter, à l’avenir, de se retrouver confrontés à ce type de contentieux. Je citerai ici la taxe à 75 % des hauts revenus, pour laquelle, rappelez-vous, la commission des finances avait alerté le gouvernement de l’époque sur le risque constitutionnel. Nous n’avions pas été entendus !

Nous aurons effectivement à mieux prendre en compte les risques communautaires et constitutionnels à l’avenir.

À cet égard, monsieur le ministre, j’exprimerai une demande. Je le répète, nous souscrivons à ce que vous formulez aujourd'hui comme une bonne intention, mais celle-ci ne doit pas se restreindre aux projets de loi de finances : elle doit aussi concerner les projets de loi de finances rectificative. En effet, l’expérience le prouve, les collectifs budgétaires de fin d’année donnent souvent lieu à la présentation, parfois en séance, très tardivement ou dans la précipitation, d’amendements qui peuvent être techniques et qui, s’ils le sont moins, seront sans doute plus politiques. Il arrive que ceux-ci nous parviennent avec une absence totale ou quasi totale d’expertise juridique. Le Conseil constitutionnel est régulièrement amené à statuer, soit par des questions prioritaires de constitutionnalité, soit par une saisine initiale, et à annuler ces dispositions.

La précipitation et le bricolage fiscal, malheureusement, donnent de mauvais résultats. C’est peut-être l’enseignement que nous pouvons tirer de cette mauvaise passe, afin d’en sortir positivement.

Sans souscrire sur le fond, mes chers collègues, j’espère que vous voterez la motion tendant à opposer la question préalable, afin d’éviter de revenir sur un débat qui, malheureusement, ne nous rapprochera pas des positions adoptées par l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton.

M. Julien Bargeton. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les séances se suivent et, hélas, se ressemblent ! La lecture est nouvelle ; le débat l’est moins. C’est de bonne guerre ! N’y voyez pas là le signe d’un spleen baudelairien de l’automne : il s’agit plutôt d’une réelle déception, à la suite de l’échec de la commission mixte paritaire de vendredi dernier.

Monsieur le rapporteur général, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, nous aurions pu nous mettre d’accord sur ce texte. Vous en avez décidé autrement – en six minutes chrono ! Je le regrette, car le sujet traité ici est grave.

Le Gouvernement a su tirer les conséquences budgétaires de la décision du Conseil constitutionnel rendue le 6 octobre 2017. Pas de dilution, pas de jeu de cache-cache : la sincérité ! Ce collectif budgétaire n’est pas qu’une affaire de chiffres, il est une affaire de souveraineté. La crédibilité budgétaire de notre pays est la condition sine qua non du retour de la France en Europe.

Depuis 2009 – des majorités se sont succédé –, la France est en procédure pour déficit excessif. Avec le texte proposé par le Gouvernement, nous avions une occasion de sortir par le haut de cette épreuve, en sécurisant la trajectoire de nos finances publiques. Vous en avez décidé autrement, chers collègues de la majorité sénatoriale. Vous auriez pu prendre des gants ; vous avez préféré rejeter tout de go la rédaction de l’article 1er, instituant deux contributions exceptionnelles à l’imposition sur les sociétés.

Je ne reviens pas sur le dispositif, mais je rappelle que le Gouvernement s’est efforcé de concentrer ces contributions sur les plus grandes entreprises bénéficiaires, et j’insiste à dessein sur le mot « bénéficiaires ». C’est le principe même de l’impôt sur les sociétés. Il ne faut donc pas dire que l’ensemble des grandes entreprises seront taxées. Comme dans tout dispositif fiscal, il y a des gagnants et des perdants, entre ceux qui seront remboursés au titre de la taxe sur les dividendes et ceux qui devront s’acquitter dans quelques semaines de la contribution exceptionnelle.

M. Gérard Longuet. C’est la loterie !

M. Julien Bargeton. Cela n’est en rien inhabituel, et le Gouvernement – ce rôle incombe d’ailleurs aussi aux parlementaires – veillera aux effets de transfert.

Vous avez donc préféré un texte déséquilibré, qui penche beaucoup, laissant apparaître la dépense de remboursement, sans la recette. Paradoxal pour les thuriféraires des équilibres financiers publics !

Je ne le mentionne pas parce qu’une exposition, que je vous invite à aller voir, est actuellement consacrée à René Goscinny à Paris, mais le texte du Sénat ressemblait d’une certaine manière aux constructions, quelque peu bancales, de Numérobis, l’architecte de Cléopâtre. (Oh ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Dallier. N’allez pas jusque-là !

M. Julien Bargeton. Il ne suffit pas de dénoncer les trains en retard, les déraillements à venir : il faut faire en sorte de ne pas laisser les Français sur une voie de garage. Comment qualifier autrement une attitude qui consiste à supprimer un dispositif permettant à notre pays de respecter ses engagements européens ?

M. Gérard Longuet. Ce n’est pas le seul !

M. Julien Bargeton. Comment expliquer à nos concitoyens qu’il est finalement urgent d’attendre ? Comment justifier cette décision devant nos partenaires européens ?

Je ne peux pas croire que vous ne partagiez pas mon jugement, monsieur le rapporteur général. Une impasse budgétaire est une impasse politique ; c’est une impasse démocratique !

Un texte d’urgence n’est pas le véhicule juridique approprié pour revoir les hypothèses de croissance, sauf à vouloir faire passer un chameau par le trou d’une aiguille. Je suis convaincu que nous parviendrons à travailler de nouveau de manière intelligente et constructive, une fois le mois de décembre passé. Vivement décembre, si j’ose dire !

La première partie du projet de loi de finances pour 2018 que nous allons examiner, demain, en commission, comporte des mesures extrêmement positives et attendues en faveur du pouvoir d’achat des ménages et de la compétitivité des entreprises. J’ignore à quoi il faut s’attendre de la part de la majorité sénatoriale, mais j’espère, plutôt qu’un rejet en bloc, une attitude responsable et constructive.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ce sera le cas !

M. Julien Bargeton. L’état d’esprit du groupe La République en Marche est d’être résolument tourné vers l’avenir. Nous devons collectivement nous poser la question de savoir comment mieux travailler, nous, parlementaires, vous, représentants du Gouvernement, pour éviter ce genre d’OFNI, d’objet fiscal non identifié.

Je l’avais indiqué jeudi soir, et ma position est constante : je suis favorable à la mise en place de nouveaux outils de contrôle du suivi des contentieux fiscaux au Parlement. C’est d’ailleurs la partie la plus intéressante du rapport de l’IGF qui a été remis sur cette triste histoire : la sécurisation de l’élaboration de la loi fiscale. Nous avons le devoir de veiller à la bonne gestion des deniers publics par le Gouvernement, et cet épisode ne fait que renforcer cette exigence.

Les censures du Conseil constitutionnel ne sont que le reflet de nos insuffisances collectives. Il faut donc s’attacher à mieux prendre le temps de l’évaluation, plutôt que de céder, comme c’est parfois le cas, à l’emballement et à la précipitation.

Monsieur le ministre, vous avez formulé des propositions et, là encore, je ne doute pas de la bonne volonté de la majorité sénatoriale et, plus largement, de tous les groupes pour les examiner avec attention.

En résumé, et sans naïveté aucune, cette nouvelle lecture aurait dû être une invitation à renouer le dialogue. Cela aurait donné une belle image de notre assemblée à nos concitoyens. Nous leur aurions montré que, au-delà de nos parcours et couleurs politiques, nous savons aussi nous rassembler dans les moments difficiles.

La motion tendant à opposer la question préalable est l’ultime illustration de cette attitude d’obstruction, qui n’est pas à la hauteur des enjeux du texte. À défaut de vous convaincre, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, je regrette cette attitude, sans préjuger des débats plus fructueux à l’avenir, notamment sur les sujets de fond abordés par M. le ministre en matière d’élaboration de la loi fiscale. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un petit propos trivial pour commencer : j’ai l’impression, avec mon groupe, d’assister à une petite dispute des droites dans cette affaire. Pour deux raisons essentielles, qu’on peut comprendre, de nature politique : premièrement, vous êtes d’accord avec les contraintes posées par le traité voté il y a cinq ans – et vous les appliquez ! – ; deuxièmement, vous votez ensemble, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, la baisse de la dépense publique. Évidemment, je peux comprendre les difficultés qui peuvent survenir après.

M. le ministre nous a parlé des perdants et des gagnants. Je vais me permettre, monsieur le ministre, de vous livrer un exemple, celui d’une entreprise qui, auparavant, rapportait 15 milliards à l’État – et je ne me situe pas dans le passé –, ce qui est tout de même intéressant. Cette entreprise, c’est Orange.

L’opérateur historique du téléphone a, durant l’année 2016, généré un chiffre d’affaires de 23,5 milliards d’euros environ. L’excédent brut d’exploitation de l’entreprise est proche de 4 milliards, et sa politique de distribution de dividendes l’a amenée à accorder près de 1,6 milliard d’euros à ses actionnaires à ce titre. En 2016 – catastrophe ! –, Orange SA a été obligée de payer 200 millions d’euros d’impôt sur les sociétés. En tant que rapporteur spécial de la commission des finances de la mission « Remboursements et dégrèvements », je peux vous dire qu’elle n’a même pas payé ces 200 millions d’euros en fin de compte.

La surtaxe de l’impôt sur les sociétés peut se concevoir, mais elle a quand même quelques défauts et sa portée est limitée : si je fais un calcul, cela fait 0,2 % du PIB – sauf à ce que certains collègues me contredisent.

Vous le voyez, personne n’a le monopole de l’entreprise, et l’on pourrait prendre d’autres exemples. Parlons de l’entreprise, y compris ici, au Sénat, mais en donnant la réalité des chiffres !

Par ailleurs, on nous dit qu’on aurait pu laisser passer le contentieux et laisser se creuser le déficit de l’État. Vous allez me dire que le groupe communiste républicain citoyen et écologiste est irresponsable : il veut laisser se creuser le déficit de l’État ! Or l’État, c’est nous, ce sont les collectivités, ce sont les citoyens. Mais nous avons fait preuve de responsabilité, puisque, à travers nos amendements, tant à l’Assemblée nationale qu’ici, au Sénat, nous sommes allés chercher d’autres recettes – et nous aurions été irresponsables si nous ne l’avions pas fait. On nous répond que ça ne va pas du tout, que c’est la catastrophe. Or je viens de voir que l’Agence France Trésor a émis il y a un mois 4 371 millions d’obligations de moyen terme à taux zéro. Ce n’est quand même pas la grande catastrophe des comptes publics ! Et puis, si l’on voulait s’épargner tous ces désagréments, ne pas avoir à se jeter des mots à la figure, engager de fausses disputes ou inventer de fausses divergences pour masquer les accords, eh bien, il existait un truc très simple, mes chers collègues, qui ne soulevait aucun problème technique ou juridique : il fallait prolonger la majoration de l’impôt de solidarité sur la fortune !

M. Éric Bocquet. Très bien !

M. Pascal Savoldelli. Auquel cas, il n’y aurait pas eu de problème ni juridique ni administratif, la navette n’aurait pas été nécessaire, il n’y aurait pas eu besoin de réunir une commission mixte paritaire !

Pour toutes ces raisons, notre groupe ne votera pas ce projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros.

M. Bernard Delcros. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vendredi, la commission mixte paritaire s’est soldée par un échec. Ce n’est pas une surprise, c’était prévisible. Nous examinons donc, en nouvelle lecture et au lendemain du vote de l’Assemblée nationale, le projet de loi de finances rectificative pour 2017.

Que ressort-il de nos débats de la semaine dernière ?

En première lecture, une majorité s’est dégagée au Sénat pour supprimer l’article 1er à l’issue d’un scrutin public, et ce, malheureusement, sans proposition alternative permettant de respecter nos objectifs budgétaires et nos engagements européens. Pour notre part, nous le regrettons, d’autant que tous les amendements déposés sur l’article 1er avaient préalablement été rejetés, y compris un amendement de suppression de l’article.

En réalité, l’article 1er est au cœur même du projet de loi, c’est celui qui instaure la taxe exceptionnelle sur les sociétés dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard d’euros. Le Gouvernement veut la mettre en place pour faire face, au mieux, aux conséquences financières de la censure par le Conseil constitutionnel en octobre dernier de la taxe sur les dividendes créée en 2012.

Ce rejet pur et simple de l’article 1er a eu pour effet de supprimer les deux contributions prévues. Nous avons donc dû tirer les conséquences de cette décision en adoptant dans la foulée un amendement présenté par le Gouvernement visant à procéder à l’ajustement de l’équilibre financier consécutif à cette perte de 5,4 milliards d’euros de recettes. Par voie de conséquence, le déficit budgétaire de l’État, tel qu’il résultait des délibérations du Sénat, ressortait à 81,7 milliards d’euros à la place des 76,9 milliards d’euros prévus, soit une dégradation de notre déficit de 4,8 milliards d’euros.

Le Sénat ayant supprimé le cœur du projet de loi de finances rectificative, la commission mixte paritaire n’a pu que constater l’impossibilité d’un accord entre les deux chambres. Sans surprise, après l’échec de celle-ci, l’Assemblée nationale a rétabli l’article 1er en nouvelle lecture.

Alors, quelle est la situation aujourd’hui ?

Nous sommes face à une obligation, une obligation à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire : rembourser 10 milliards d’euros aux entreprises taxées sur les montants distribués depuis 2013. Voilà ce qu’est concrètement la situation à laquelle nous devons répondre en responsabilité !

Le contenu du dispositif proposé par le Gouvernement est aujourd’hui bien connu : couvrir la moitié de la somme par cette imposition progressive sur les bénéfices et l’autre moitié par un prélèvement sur le budget de l’État. Il ne s’agit pas de savoir si la solution proposée est idéale : il n’y a pas de solution idéale. Il s’agit de savoir s’il en existe une meilleure ! Et, si oui, laquelle ?

Quelles autres solutions avons-nous ? Taxer tous les Français ? Creuser les déficits ? Laisser filer l’endettement ? On voit bien qu’aucune de ces solutions n’est crédible au regard de la situation de notre pays.

Alors qu’il ne reste plus que trois pays sous le coup de la procédure pour endettement excessif dans l’Union européenne, dont la France depuis huit ans, serait-il responsable, mes chers collègues, de creuser encore le déficit public du pays ? Et même au-delà des règles européennes, que nous avons par ailleurs voulues, ne devons-nous pas tout faire pour alléger une dette insoutenable pour notre société et pour la France de demain ?

On peut se dire que, 5 milliards d’euros supplémentaires, ce n’est pas grand-chose au regard de notre dette. C’est vrai !

M. Philippe Dallier. Pas pour les entreprises !

M. Bernard Delcros. Mais c’est justement en choisissant toujours cette solution-là, qui consiste à dire que, après tout, ce n’est pas grand-chose, que notre dette frôle aujourd’hui les 100 % du PIB, avec 2 200 milliards d’euros.

Ce texte, au-delà de ce qu’il contient, est une occasion d’agir en responsabilité. Nous devons le faire au nom des générations qui viennent. C’est pourquoi, au groupe Union Centriste, nous voulons affirmer cette conviction, et c’est aussi pour cela que nous avons soutenu à l’unanimité le texte présenté par le Gouvernement la semaine dernière.

Je rappelle que la solution inscrite dans le projet de loi ne dégrade pas notre déficit en 2017. Elle le creuse légèrement en 2018 – 0,2 point de PIB –, sans toutefois remettre en cause nos engagements européens. Certes, nous aurions tous préféré ne pas avoir à gérer cette situation et à prendre une telle décision, mais, quand on a dit cela, on n’a rien fait avancer et l’on n’a pas apporté le moindre début de solution.

M. Bernard Delcros. Je considère, pour ma part, monsieur le ministre, que vous apportez une réponse pragmatique et réaliste.

M. François Patriat. Et efficace !

M. Bernard Delcros. Nous pensons que le Sénat, dans sa sagesse, peut encore faire preuve de responsabilité en réexaminant sa position. Aussi, au groupe Union Centriste, nous voterons unanimement contre la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Claude Raynal. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Claude Raynal. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas ici sur les origines de ce projet de loi de finances rectificative ni sur les raisons de l’abstention de notre groupe en première lecture, me bornant à renvoyer à notre débat en discussion générale de la semaine dernière.

Je note cependant que, dans son rapport publié jeudi, que vous aviez commandé, monsieur le ministre, l’Inspection générale des finances déclare « vouloir sécuriser la loi fiscale et […] vouloir sécuriser le contribuable ». Elle formule quelques préconisations en ce sens. À la lecture de ce rapport, nous sommes bien loin du « scandale d’État » évoqué, voire de « l’amateurisme » stigmatisé.

Je vous rappelle les quelques difficultés que nous avons pointées en première lecture : des entreprises nouvelles touchées par la surtaxe sur l’impôt sur les sociétés, notamment celles qui ne distribuent pas de dividendes ; une liste de gagnants et de perdants non documentée à ce jour.

J’ai entendu certains collègues qui sont intervenus avant moi dire qu’il n’y avait pas de solutions alternatives. Mais si ! Et nous en avons proposé, de même que le groupe communiste, notamment le report d’un an ou deux des mesures sur l’ISF ou le prélèvement forfaitaire unique, autant de sources de financement. Des solutions alternatives existent donc, il ne faut pas le nier.

Autant de points qui, en tant que tels, auraient dû, dès la première lecture, nous conduire à nous opposer directement. Nous avons préféré donner une chance à un accord au Sénat en nous abstenant – c’est un signal –, tout en marquant notre désaccord avec l’article 5, qui ratifie le décret d’avance du 20 juillet 2017.

Je dois vous dire, monsieur le ministre, que si, malgré les réserves que je viens de formuler, le calendrier faisait que l’intérêt de notre pays appelle à un vote immédiat, notre groupe aurait sans doute fait l’effort nécessaire que le groupe Les Républicains, par son vote négatif, s’est refusé à faire.

L’Assemblée nationale étant convoquée dès ce soir pour une lecture définitive, nous en resterons à notre position initiale, ne pouvant valider les dispositions très largement critiquées par notre groupe et au-delà, ayant fait l’objet du décret d’avance du 20 juillet 2017, notamment celles qui concernent la baisse des aides personnalisées au logement, la suppression des contrats aidés ou la diminution de certaines aides aux collectivités.

Concernant la question préalable, par principe, nous ne la voterons pas – nous ne votons jamais une question préalable –, car elle est la négation du travail parlementaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus.

M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons à nouveau le projet de loi de finances rectificative pour 2017. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires défend en la matière une approche de responsabilité devant une situation impérieuse d’intérêt général.

L’héritage d’insincérité budgétaire et de laxisme du précédent gouvernement menace de dégrader le solde budgétaire de l’année et de sérieusement compromettre notre sortie de la procédure pour déficit excessif. Face à cette urgence, nous partageons la volonté du Gouvernement et du Président de la République de mettre fin le plus tôt possible à cette procédure. Nous estimons que là se trouve l’intérêt national. Nous estimons que c’est une condition nécessaire à la restauration du crédit de la France en Europe. Nous admettons, enfin, que, dans cette situation exceptionnelle, des mesures exceptionnelles sont nécessaires pour respecter nos engagements.

Pour toutes ces raisons, nous ne nous opposons pas à ce texte présenté en l’état. Le projet de loi de finances rectificative est néanmoins loin de répondre à l’idéal de justice que nous défendons, vous le savez. Non content de faire payer aux entreprises les erreurs de l’État, il pénalise les entreprises qui investissent et créent des emplois. Il crée des gagnants et des perdants, sans rapport avec les politiques de distribution des entreprises, sans lien avec leur exposition à la taxe à 3 %, sans mesure, enfin, de leur situation financière sur le long terme.

Nous déplorons que le Gouvernement n’ait pas pu proposer une mesure plus fine, qui répartisse plus justement l’effort entre les entreprises. Néanmoins, vous héritez, monsieur le ministre, d’une situation budgétaire critique. Nous le comprenons. Dans cette optique de responsabilité, nous ne nous opposons pas à cette mesure urgente et nécessaire à la restauration de notre crédibilité en Europe.

J’aurais aimé que cette nouvelle lecture soit l’occasion d’une prise de conscience : si nous échouons à sortir de la procédure pour déficit excessif en 2018, il se peut que cet échec hypothèque l’ensemble du quinquennat avec les incertitudes pesant sur l’année 2019. Cela, nous ne pouvons pas l’accepter. Il nous faut collectivement solder, une fois pour toutes, l’héritage de la crise et des errements budgétaires du passé, pour enfin nous tourner vers l’avenir.

Sachez néanmoins, monsieur le ministre, que l’indulgence de la représentation nationale s’accompagnera d’une vigilance accrue pour le futur : nous demandons que le processus d’élaboration de la loi fiscale soit amélioré en profondeur, tout au long de la chaîne législative. « Sécurité et stabilité », avez-vous indiqué. Nous vous en donnons acte et nous partageons ces objectifs. Nous demandons que cette malheureuse affaire soit pour vous et vos services l’occasion d’une réflexion sérieuse sur la manière d’élaborer la norme fiscale. Nous demandons, enfin, que des mécanismes d’alerte performants soient mis en place. Il faut, à l’avenir, empêcher que des annulations contentieuses de cette importance ne viennent mettre en péril la trajectoire budgétaire de la Nation.

Nous devons avoir conscience que nos concitoyens ne nous pardonneront pas les remèdes superficiels, les expédients qui ne traitent pas les causes du mal. Le précédent gouvernement a épuisé leur patience : les limites du consentement à l’impôt ont été atteintes. Cette énième rustine doit mettre un point final à cette ère d’irresponsabilité et ouvrir, enfin, la période de courage et de sincérité budgétaire que le Président de la République nous a promis, la période de sécurité et de stabilité que vous nous proposez, monsieur le ministre. (MM. Jean-Pierre Decool et Jean-Louis Lagourgue applaudissent.)

M. Michel Raison. Applaudissements nourris !

M. Gérard Longuet. Mesurés… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l’ont rappelé mes prédécesseurs, après l’échec de la commission mixte paritaire la semaine dernière, nous sommes amenés à réexaminer le projet de loi de finances rectificative pour 2017.

Jeudi dernier, après des débats prolongés, la Haute Assemblée a rejeté en première lecture la principale mesure du texte, à savoir l’impôt exceptionnel sur les grandes entreprises. Je le regrette, comme l’ensemble de mon groupe, car le refus de cette contribution signifierait, s’il était acté, le passage du déficit public de 2,9 % à 3,1 % du PIB en 2017, alors que la France est l’un des derniers États de la zone euro soumis à la procédure de déficit public excessif.

Le projet de loi de finances rectificative, cela a été expliqué, prévoit la création, pour l’exercice 2017, d’une contribution exceptionnelle à l’impôt sur les bénéfices des sociétés applicable aux sociétés réalisant plus de 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires, ainsi que d’une contribution additionnelle pour les sociétés réalisant plus de 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires. C’est une réponse législative à l’invalidation par le Conseil constitutionnel, le 6 octobre dernier, de la taxe additionnelle de 3 % sur les dividendes instituée par la loi de finances rectificative de l’été 2012, décision fondée sur la « différence de traitement entre les sociétés mères, selon que les dividendes qu’elles distribuent proviennent ou non de filiales établies dans un État membre de l’Union européenne autre que la France ».

Le 17 mai dernier, la Cour de justice de l’Union européenne avait d’ores et déjà jugé la contribution de 3 % sur les revenus distribués incompatible avec le régime fiscal européen commun applicable aux sociétés mères et aux filiales.

À la suite de ces décisions, l’État est donc tenu de rembourser les sommes perçues aux entreprises concernées, soit près de 10 milliards d’euros, un montant important qui comprend notamment les intérêts moratoires de 4,8 % par an, qui s’ajoutent au remboursement des sommes perçues depuis 2012. Je note d’ailleurs que le taux des intérêts moratoires devrait être réduit de moitié dans le prochain projet de loi de finances rectificative pour le rapprocher des taux d’intérêt actuels.

D’après les estimations données par le Gouvernement, ces dispositions concerneront environ 320 entreprises au total, dont 110 seront assujetties au taux de 30 %. Le rendement est estimé à 5,4 milliards d’euros, dont 4,8 milliards d’euros versés en 2017 au titre d’un acompte payé avant le 20 décembre de cette année.

Le solde public 2017 serait inchangé par rapport à l’estimation réalisée lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2018, à 2,9 %. Au-delà de 2017, le coût lié au contentieux serait intégré à la trajectoire des finances publiques sans compromettre le respect par la France de ses engagements européens. La prévision de solde pour 2018, prévue dans le projet de loi de finances à 2,6 %, serait réévaluée à 2,8 %.

Le rapport de l’Inspection générale des finances, remis hier au ministre de l’économie et des finances, a établi la chronologie de l’adoption de la taxe sur les dividendes, de son maintien et, enfin, de son annulation.

Cette taxe était née de la volonté de couvrir un autre contentieux sur les OPCVM et de la mise en œuvre des engagements de campagne de l’ancien Président de la République. Sa constitutionnalité et sa compatibilité avec le droit européen n’avaient pas été mises en cause par l’administration, ni par le Conseil d’État, ni par les parlementaires auteurs de la saisine du Conseil constitutionnel sur la loi de 2012. En revanche, les signes d’incompatibilité avec le droit européen étaient apparus en 2015 avec une question préjudicielle sur une taxe belge similaire, mais surtout après la mise en demeure de la France par la Commission européenne sur l’incompatibilité avec la directive mère-fille et les principes de liberté d’établissement et de circulation des capitaux, et, enfin, avec la multiplication des contentieux à partir de cette même année.

Le rapport tire des leçons importantes pour l’avenir : renforcer la solidité de la loi fiscale, à l’image de bonnes pratiques existant dans d’autres pays européens, en associant davantage les acteurs publics, dont le Parlement, et les acteurs privés ; améliorer la transparence sur les risques de contentieux ; redéfinir le suivi administratif du contentieux fiscal et mettre en place une procédure d’alerte efficace.

Concernant le présent projet de loi, la position du groupe du RDSE reste identique à celle exprimée en première lecture : si le dispositif n’apparaît pas satisfaisant au regard du calendrier et de la méthode, qui fera nécessairement des gagnants et des perdants, et, à plus long terme, au regard du projet du Gouvernement de renforcer l’attractivité de la fiscalité des entreprises, nous pensons qu’il n’y a pas de solution alternative qui n’aurait lourdement pénalisé les finances publiques. Rappelons également que l’État prend à sa charge dans ce dossier pas moins de 5 milliards d’euros, soit environ la moitié du remboursement de la taxe sur les dividendes.

C’est pourquoi nous ne pourrons suivre la position du rapporteur général sur la motion tendant à opposer la question préalable. Majoritairement favorables à l’examen et à l’adoption du texte du Gouvernement, nous voterons donc contre cette motion. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe La République En Marche et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’Inspection générale des finances a rendu son rapport hier et ses conclusions sont sans appel. La taxation d’entreprises pour rembourser d’autres entreprises d’une taxe illégale, au motif que l’urgence ne permettait pas de trouver d’autres solutions, ne tient plus.

L’IGF confirme ce que j’avais dit en première lecture : le problème était identifié depuis longtemps et le choix du gouvernement a toujours consisté à repousser la décision en misant sur la probabilité d’une issue ou d’un dénouement qui ne lui soit pas trop défavorable. Aller plus loin et plus vite dans les économies pour dégager des marges de manœuvre, par exemple en réduisant la dépense publique ou même en vendant des participations de l’État – je le rappelle, elles représentent 100 milliards d’euros –, des solutions existaient bel et bien.

Comme je l’avais indiqué en première lecture, Emmanuel Macron était à Bercy, à la tête du ministère de l’économie, quand, en 2015, le risque a été clairement identifié, pointé et signalé par le secrétaire d’État chargé du budget. L’Inspection générale des finances retient également cette date, dénonçant « le choix politique fait à partir de 2015 de maintenir la taxe et de continuer à la percevoir en dépit d’incertitudes avérées sur sa conformité au droit européen ».

En effet, la mise en demeure par la Commission européenne en 2015 aurait dû constituer une alerte suffisante pour faire réagir Emmanuel Macron et Michel Sapin, alors à la tête de Bercy. D’ailleurs, si le gouvernement avait réagi à la fin de 2015, le coût n’aurait pas dépassé 3 milliards d’euros.

M. Jean-François Husson. Le recours devant le Conseil d’État en 2016 laissait subsister encore moins de doutes. Notre rapporteur général avait alors clairement évoqué le problème constitutionnel.

Le Gouvernement refuse de prendre à sa charge la totalité du remboursement, la somme de 10 milliards d’euros étant trop importante et risquant d’obérer la baisse du déficit public sous les 3 % en 2017. Mais j’ai une question à formuler : la taxe sur les revenus distribués a rapporté au budget de l’État, chaque année depuis 2013, 2 milliards d’euros ; elle a donc, malgré son caractère aujourd’hui illégal, contribué à amoindrir le déficit public, qui, calculé sur des bases corrigées, devrait donc être de 3,3 % en 2017, et non de 2,9 %. Voilà la réalité dont vous êtes non pas responsable, monsieur le ministre, mais comptable. Ce sont des arguments objectifs que je veux livrer à notre assemblée.

Il faut également intégrer le fait que l’économie, pour une part, repose aussi sur de la psychologie. Pour le moment, je dois l’avouer, pour m’en réjouir, le Président de la République bénéficie d’une relative bienveillance, et la confiance revient progressivement. Les investissements reprennent, les embauches en CDI augmentent. Mais cette confiance reste fragile. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire de donner des gages, parce que les acteurs économiques ont besoin de stabilité, de lisibilité et de confiance. Pourtant, les principales mesures qui leur avaient été promises pendant la dernière campagne électorale ont déjà été repoussées à 2019, puisqu’il n’y aura pas d’amélioration sensible à attendre dans le projet de loi de finances pour 2018. Ajouter à cela que toute erreur commise par l’État, selon ce que vous nous proposez aujourd’hui, doit être payée sur le dos des entreprises, c’est, je le crois, mettre dangereusement en péril le lien de confiance que j’évoquais.

Alors que le Gouvernement promet de baisser l’impôt sur les sociétés pour le ramener à 25 % en 2022, voilà qu’il commence par l’augmenter pour certaines entreprises pour le porter à un niveau record qui peut atteindre 43,33 %. Excusez du peu ! Prendre les grandes entreprises en otage ou pour des vaches à lait, c’est parfois oublier que ces fleurons de notre économie sont aussi de formidables pourvoyeurs d’emplois, par milliers, et qu’ils génèrent beaucoup de sous-traitance auprès d’autres entreprises.

Monsieur le ministre, vous nous avez dit que 318 entreprises seraient concernées, dont 109 par la contribution additionnelle. Parmi elles, 223 seraient perdantes, c’est-à-dire qu’elles paieraient plus de surtaxe qu’elles ne recevraient de remboursement. Sur ces 223 entreprises perdantes, un tiers seraient même, pour reprendre vos propos, des perdantes « net », c'est-à-dire qu’elles ne bénéficieraient d’aucun remboursement, tout en étant prélevées. Surtout, il y a quinze jours, il n’était même pas question qu’elles le soient. Ce sont d’ailleurs bien souvent des entreprises de taille intermédiaires, les fameuses ETI, qui sont les premières créatrices d’emploi en France, celles-là mêmes qui ont réinvesti leurs bénéfices dans leur croissance plutôt que dans la rémunération d’actionnaires. Ce sont aussi des entreprises ou des groupes mutualistes bancaires ou de protection sociale qui sont impactés à un niveau record, et cela doit nous interpeller.

Ainsi, les entreprises concernées se voient imposer près de 800 millions d’euros de contributions, dont, je le répète, elles n’avaient pas connaissance il y a un peu plus de quinze jours. Et, aujourd’hui, plus de 15 % de cette facture est à la seule charge de trois grands groupes mutualistes et coopératifs.

Monsieur le ministre, vous parlez de perdants nets, de perdants et de gagnants. Je ne poserai qu’une seule question : y a-t-il réellement des gagnants ? Pour ma part, je n’en vois pas ! C’est à tort que les entreprises frappées par la taxe de 3 % sur les dividendes ont été mises à contribution. Le remboursement des créances n’est donc pas un gain, mais la restitution d’un indu. Finalement, toutes les entreprises sont perdantes dans cette affaire.

Je vous ai bien entendu expliquer, il y a quelques instants, que ces taxes seraient exceptionnelles. Mais je fais appel à notre mémoire et je nous mets en garde collectivement quant à certaines taxes, dont le caractère exceptionnel était promis à l’origine et qui, malheureusement, se sont révélées bien durables.

Enfin, je tiens à juxtaposer trois chiffres, qui, à eux seuls, résument en quelque sorte la philosophie du Gouvernement aujourd’hui.

Ce gouvernement pratique ce que j’appelle « l’échantillonnage des 300 et quelques » : 318, 319 et 324 ; 318, c’est le nombre de grandes entreprises surtaxées à un niveau record ; 319, c’est celui des grandes collectivités que l’État convie à des travaux dirigés surveillés par ses soins, qui subissent une forme de tutelle, un plafond de dépenses et un ratio d’endettement mal calibré ; et 324, c’est le nombre d’emplois publics supprimés par l’État en 2018 sur un total de 2 millions.

Avec ces trois chiffres étonnamment proches, nous constatons combien les efforts demandés peuvent être variables entre des entreprises surtaxées, des collectivités déjà lourdement ponctionnées par l’État, au point d’en être parfois à l’os, et un État qui, s’il ne fait pas l’effort de se réformer, n’en continue pas moins à jouer les donneurs de leçons.

Mes chers collègues, vous l’avez compris, avec ce projet de loi de finances rectificative établi dans l’urgence, vite fait, mal fait, on nous propose de passer l’éponge sur une ardoise de 10 milliards d’euros. Cette dernière a été accumulée par l’État avec une forme d’inconséquence, par un enchaînement malheureux d’absence de décision particulièrement préjudiciable aux intérêts de la France. Il s’agit, ni plus ni moins, du plus gros fiasco fiscal de l’État sous la Ve République. D’un fiasco d’État dont le Gouvernement a imaginé, en l’absence pourtant de toute responsabilité et, plus encore, de toute culpabilité des entreprises, de proposer une réparation partagée, à moitié, entre 300 et quelques entreprises objets d’un tirage au sort orienté. Un seul critère de choix a été retenu : le chiffre d’affaires brut, non corrigé de données comme l’emploi, l’exposition à la concurrence, la compétitivité ou la profitabilité.

Votre choix, monsieur le ministre, est injuste. Il augure mal de l’avenir, notamment du pacte de confiance que vous appelez de vos vœux et que vous voulez par ailleurs proposer aux acteurs économiques. Nous ne pouvons le cautionner. C’est pourquoi le groupe Les Républicains demeure opposé à ce projet de loi de finances rectificative et votera, bien sûr, la motion proposée par la commission des finances tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Question préalable

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2017
Article 1er

M. le président. Je suis saisi, par M. de Montgolfier, au nom de la commission, d’une motion n° 1.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement du Sénat,

Considérant que le projet de loi de finances rectificative pour 2017 déposé en urgence par le Gouvernement a pour objet de tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 6 octobre 2017 relative à la contribution de 3 % sur les montants distribués ;

Considérant que, pour faire face au montant des dépenses de contentieux, il prévoit la création de deux contributions exceptionnelle et additionnelle sur l’impôt sur les sociétés dû au titre de 2017 dont le rendement attendu s’élèverait à 4,8 milliards d’euros en 2017 et 600 millions d’euros en 2018 ;

Considérant qu’en première lecture le Sénat a rejeté la création de ces deux nouvelles contributions au motif qu’elles affecteraient particulièrement l’industrie, le commerce et les services financiers, notamment les banques mutualistes, qui ne pourraient prétendre à des remboursements à la hauteur de ces prélèvements ;

Considérant qu’après l’échec de la commission mixte paritaire l’Assemblée nationale a, en nouvelle lecture, rétabli son texte de première lecture sans prendre en compte la position exprimée par le Sénat ;

Considérant qu’il n’y a pas lieu de penser qu’un nouvel examen complet du projet de loi par le Sénat en nouvelle lecture permettrait de rapprocher les positions des deux assemblées ;

Le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances rectificative pour 2017, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 84, 2017-2018).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. le rapporteur général, pour la motion.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Sur un certain nombre de travées s’est exprimé le souhait que le débat se prolonge. À titre personnel, j’y suis prêt ! Monsieur le président de la commission, on pourrait peut-être réunir la commission, ce qui me permettrait de redéposer mon amendement, dont la mise aux voix par scrutin public jeudi soir ne m’a pas été très favorable : en tout et pour tout, j’ai obtenu quatre suffrages… Peut-être que, à main levée, devant une assemblée plus nombreuse que jeudi soir, j’aurais quelques chances de voir cet amendement adopté. Ces dispositions allaient un peu dans le sens du Gouvernement, mais elles prenaient mieux en compte l’élasticité des recettes, ce qui permettait de diminuer la charge pesant sur les entreprises.

Plus sérieusement, j’estime que le débat a eu lieu jeudi dernier. Les positions de fond ont été largement exprimées à cette occasion. Si nous n’adoptions pas la question préalable, les discussions pourraient se prolonger à l’infini sans que les positions respectives de l’Assemblée nationale et du Sénat se réconcilient. Ne faisons pas durer le plaisir ! Nous avons du travail en commission des finances. En particulier, nous débattrons tout à l’heure de l’importante mission « Enseignement scolaire », présentée par notre collègue Gérard Longuet.

Nous sommes donc déjà en plein examen du projet de loi de finances. De son côté, le Gouvernement présentera demain le second projet de loi de finances rectificative pour 2017. Je pense que ces sujets nécessitent un travail de fond plus important que l’épisode dont il s’agit ici. Pour moi, l’essentiel, c’est d’en tirer des enseignements pour l’avenir, et il y en a.

C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous soumets cette question préalable. Je le répète, je considère que le débat a été épuisé jeudi soir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton, contre la motion.

M. Julien Bargeton. Je ne vais pas prolonger le débat. Comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, j’appelle à voter contre cette motion.

Je trouve dommage d’écourter le débat. Cette façon de botter en touche est peut-être un procédé qui fait plaisir à certains, mais, à mon sens, il n’est pas à la hauteur de l’enjeu, en termes de finances publiques comme sur le fond.

Si nous ne votons pas le présent texte, cela veut dire que nous ne trouverons pas de solution. Il n’y aura ni recettes ni dépenses ; ainsi, on ne répondra pas à la question qui nous est posée. Or, face à cette difficulté, il faut bien trouver une solution efficace et pragmatique. Voilà pourquoi il ne faut pas refuser le débat.

Je note d’ailleurs que, très souvent, quand on annonce de bonnes nouvelles ou quand il y a des recettes supplémentaires – je pense notamment au débat que nous avons consacré au projet de loi de programmation des finances publiques –, on propose nécessairement d’affecter les sommes dégagées à la baisse du déficit et à la réduction de l’endettement.

Nous devons rester cohérents dans nos débats, qu’il s’agisse du projet de loi de finances rectificative ou du projet de loi de programmation des finances publiques. Je le répète, pour maintenir le niveau de déficit public, il faut trouver une solution à la question qui est posée. C’est pourquoi nous nous opposons à cette motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, j’avancerai un dernier argument pour vous convaincre. Vous le savez, les intérêts moratoires courent à hauteur de 0,4 % par mois. Chaque heure qui passe alourdit la facture de 48 000 euros ! Il nous faut donc voter au plus vite et mettre un terme à cette affaire.

M. François Bonhomme. C’est imparable !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Vous tous, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, êtes sensibles à l’équilibre des comptes publics. Vous l’avez exprimé d’une manière ou d’une autre. Tenons compte de cet argument, votons au plus vite et finissons-en avec cette sale histoire ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. M. le ministre a exprimé l’avis du Gouvernement précédemment.

La parole est à M. Emmanuel Capus, pour explication de vote.

M. Emmanuel Capus. Je ne comprends pas ce qui motive cette question préalable. L’Assemblée nationale n’aurait pas tenu compte de la position exprimée par le Sénat ? Mais de quelle position parle-t-on ? Le Sénat n’a pas exprimé de position, il a rejeté l’article 1er.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous avons quand même voté un texte !

M. Emmanuel Capus. Parle-t-on de l’amendement Husson, Retailleau et Dominati tendant à supprimer l’article 1er ? Il a été rejeté. Parle-t-on de l’amendement déposé, au nom de la commission des finances, par M. de Montgolfier ? Il s’agissait certes d’une proposition – la division par deux des taux de la taxe additionnelle –, mais, M. le rapporteur général vient de le rappeler, cet amendement a obtenu quatre voix.

Encore une fois, de quelle position parle-t-on ?

Cette question préalable pose donc une véritable difficulté : elle est mal motivée.

De plus, on ne peut pas sérieusement abandonner la discussion sur un sujet aussi sérieux : la réduction de notre déficit public et l’image de la France dans le monde, que met en jeu la procédure de déficit excessif. On ne peut pas faire l’économie du débat, même si, M. le rapporteur général a raison sur ce point, notre séance de jeudi dernier s’est achevée un peu tard.

Enfin, on ne peut pas justifier une question préalable en avançant que l’on a peu d’espoir de faire revenir l’Assemblée nationale à des positions plus conformes aux nôtres. Dans ce cas, mieux vaut fermer boutique, nous n’avons plus de raison d’être !

Pour ces trois raisons, et à l’unanimité, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera contre la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe La République En Marche et du groupe Union Centriste.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de finances rectificative pour 2017.

Je rappelle en outre que l’avis du Gouvernement, exprimé dès la discussion générale, est défavorable.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 12 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l’adoption 146
Contre 195

Le Sénat n’a pas adopté.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je vais donc pouvoir redéposer mon amendement… (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Monsieur le président, je sollicite une suspension de séance.

M. le président. Nous allons donc interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

La motion tendant à opposer la question préalable ayant été rejetée, nous passons à la discussion des articles.

projet de loi de finances rectificative pour 2017

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PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

Question préalable
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2017
Article 3 et état A annexé

Article 1er

I. – Les redevables de l’impôt sur les sociétés prévu à l’article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros sont assujettis à une contribution exceptionnelle égale à une fraction de cet impôt calculé sur leurs résultats imposables, aux taux mentionnés à l’article 219 du même code, des exercices clos à compter du 31 décembre 2017 et jusqu’au 30 décembre 2018.

Cette contribution exceptionnelle est égale à 15 % de l’impôt sur les sociétés dû, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.

Pour les redevables dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard d’euros et inférieur à 1,1 milliard d’euros, le taux de la contribution exceptionnelle est multiplié par le rapport entre, au numérateur, la différence entre le chiffre d’affaires du redevable et 1 milliard d’euros et, au dénominateur, 100 millions d’euros.

Le taux de la contribution exceptionnelle est exprimé avec deux décimales après la virgule. Le deuxième chiffre après la virgule est augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à 5.

II. – Les redevables de l’impôt sur les sociétés qui réalisent un chiffre d’affaires égal ou supérieur à 3 milliards d’euros sont assujettis à une contribution additionnelle à la contribution prévue au I du présent article, égale à une fraction de l’impôt sur les sociétés calculé sur leurs résultats imposables, aux taux mentionnés à l’article 219 du code général des impôts, des exercices clos à compter du 31 décembre 2017 et jusqu’au 30 décembre 2018.

Cette contribution additionnelle est égale à 15 % de l’impôt sur les sociétés dû, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.

Pour les redevables dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 3 milliards d’euros et inférieur à 3,1 milliards d’euros, le taux de la contribution additionnelle est multiplié par le rapport entre, au numérateur, la différence entre le chiffre d’affaires du redevable et 3 milliards d’euros et, au dénominateur, 100 millions d’euros.

Le taux de la contribution additionnelle est exprimé avec deux décimales après la virgule. Le deuxième chiffre après la virgule est augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à 5.

III. – 1. Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du code général des impôts, la contribution exceptionnelle et, le cas échéant, la contribution additionnelle sont dues par la société mère. Ces contributions sont assises sur l’impôt sur les sociétés afférent au résultat d’ensemble et à la plus-value nette d’ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D du même code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.

2. Le chiffre d’affaires mentionné aux I et II s’entend du chiffre d’affaires réalisé par le redevable au cours de l’exercice ou de la période d’imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d’un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du code général des impôts, de la somme des chiffres d’affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

3. Les réductions et crédits d’impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont imputables ni sur la contribution exceptionnelle ni sur la contribution additionnelle.

4. La contribution exceptionnelle et la contribution additionnelle sont établies, contrôlées et recouvrées comme l’impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ce même impôt.

5. La contribution exceptionnelle et la contribution additionnelle sont payées spontanément au comptable public compétent, au plus tard à la date prévue au 2 de l’article 1668 du code général des impôts pour le versement du solde de liquidation de l’impôt sur les sociétés.

Elles donnent chacune lieu à un versement anticipé à la date prévue pour le paiement du dernier acompte d’impôt sur les sociétés de l’exercice ou de la période d’imposition. Par dérogation au troisième alinéa du 1 du même article 1668, les redevables clôturant leur exercice au plus tard le 19 février 2018 s’acquittent au plus tard le 20 décembre 2017 du versement anticipé de la contribution exceptionnelle et, le cas échéant, de la contribution additionnelle.

Les montants des versements anticipés sont fixés à 95 % des montants respectifs de la contribution exceptionnelle et de la contribution additionnelle estimés au titre de l’exercice ou de la période d’imposition en cours et déterminés selon les modalités prévues aux I, II et 1 à 3 du présent III.

Si les montants des versements anticipés sont supérieurs, respectivement, à la contribution exceptionnelle et à la contribution additionnelle dues, les excédents respectifs sont restitués dans un délai de trente jours à compter de la date mentionnée au premier alinéa du présent 5.

6. L’intérêt de retard prévu à l’article 1727 du code général des impôts et la majoration prévue à l’article 1731 du même code sont appliqués à la différence entre, d’une part, 95 % du montant de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés due au titre d’un exercice et, d’autre part, 95 % du montant de cette contribution estimé au titre du même exercice servant de base au calcul du versement anticipé, sous réserve que cette différence soit supérieure à 20 % du montant de la contribution et à 1,2 million d’euros.

Le premier alinéa du présent 6 s’applique également à l’insuffisance de versement anticipé de la contribution additionnelle mentionnée au II, déterminée selon les mêmes modalités.

Les premier et deuxième alinéas du présent 6 ne s’appliquent pas si le montant estimé de la contribution exceptionnelle et, le cas échéant, de la contribution additionnelle a été déterminé à partir de l’impôt sur les sociétés, lui-même estimé à partir du compte de résultat prévisionnel prévu à l’article L. 232-2 du code de commerce, révisé dans les quatre mois qui suivent l’ouverture du second semestre de l’exercice, avant déduction de l’impôt sur les sociétés. Pour la société mère d’un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du code général des impôts, le compte de résultat prévisionnel s’entend de la somme des comptes de résultat prévisionnels des sociétés membres du groupe.

IV. – La contribution exceptionnelle et la contribution additionnelle ne sont pas admises dans les charges déductibles pour l’établissement de l’impôt sur les sociétés.

V. – Le 2° de l’article 7 de l’ordonnance n° 2013-837 du 19 septembre 2013 relative à l’adaptation du code des douanes, du code général des impôts, du livre des procédures fiscales et d’autres dispositions législatives fiscales et douanières applicables à Mayotte est complété par les mots : « ainsi qu’à l’article 1er de la loi n° … du … de finances rectificative pour 2017 ».

VI. – Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er décembre 2017, un rapport exposant, pour les sociétés et groupes de sociétés, les effets respectifs, d’une part, de la suppression de la contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés au titre des montants distribués prévue à l’article 235 ter ZCA du code général des impôts, et, d’autre part, de l’instauration des contributions exceptionnelle et additionnelle prévues respectivement aux I et II du présent article d’autre part. Ce rapport expose les effets attendus par décile des sociétés ou groupes de sociétés assujettis à ces contributions exceptionnelle et additionnelle.

M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.

M. Claude Raynal. Je tiens à préciser les propos que j’ai tenus précédemment.

Il me semble que deux questions nous sont posées.

La première porte sur l’article 5 relatif au décret d’avance. Nous avons combattu tous les éléments de ce décret d’avance. Mais, même si nous le regrettons, ce dernier a été approuvé par le Sénat.

La seconde question porte sur la taxe. À ce titre, nous ne voudrions pas qu’il y ait de confusion.

M. Philippe Dominati. Comment ça ?

M. Claude Raynal. En effet, il y a, d’une part, l’opposition exprimée par les élus du groupe Les Républicains et, de l’autre, notre opposition, qui se résume ainsi : nous regrettons qu’un certain nombre d’entreprises qui n’étaient pas incluses dans le prélèvement initial, en particulier des entreprises mutualistes, soient désormais touchées. C’est un point qui, pour nous, est extrêmement important. De plus, pour le dire simplement, nous ne disposons pas d’une vision complète des gagnants et des perdants, ce qui nous apparaît comme une faiblesse.

Néanmoins, nous ne voudrions pas mêler des voix d’abstention et des voix d’opposition. En conséquence, nous, membres du groupe socialiste et républicain, prenons acte du vote qui a eu lieu au titre de l’article 5. Mais, dans l’intérêt de notre pays, nous voterons l’article 1er. (M. Didier Guillaume applaudit.)

M. Yvon Collin. Très bien !

M. Roger Karoutchi. Quelle gymnastique…

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Il est bon d’en faire un peu, cher collègue ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Comme nous avons un esprit de suite et une cohérence, nous ne participerons pas au vote sur l’article 1er.

M. François Bonhomme. On s’en doutait !

M. Pascal Savoldelli. En outre, pour les raisons que M. Raynal vient d’exposer, nous voterons contre l’article 5.

In fine, nous voterons contre ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Puisque nous ouvrons pour quelques instants le débat de fond, je rappellerai très rapidement les trois raisons qui ont conduit le groupe Les Républicains à voter contre le présent projet de loi.

Tout d’abord, cette taxe sur les dividendes a été conçue par l’ancien Président de la République. Il s’agit d’une mesure socialiste, ce qui explique probablement le revirement du groupe socialiste sur l’article 1er : c’était la mesure emblématique de François Hollande disant « Mon ennemi, c’est la finance ». Le réflexe immédiat avait été de taxer les entreprises, et les entreprises les plus performantes ou les plus grandes du pays.

Ensuite, nous avons rejeté ce texte au nom de la stabilité fiscale.

À cet égard, le nouveau Président de la République et le nouveau gouvernement ont commencé par déclarer : « Les choses ont changé. Nous avons compris que ce pays avait besoin, comme le monde économique, de stabilité fiscale. » Moyennant quoi, en cinq semaines, au moment où toutes les entreprises avaient fixé leur budget et leur politique vis-à-vis de leurs actionnaires, dans l’urgence, ne trouvant pas d’autre cible, le Président de la République et le Gouvernement ont décidé de faire fi de la stabilité fiscale.

M. François Patriat. C’est un mauvais procès !

M. Philippe Dominati. Tous ceux qui, dans cet hémicycle, à longueur de débats, réclament de la stabilité fiscale ont embrayé en cinq semaines en disant : « On trouvera les 5 milliards d’euros de cette manière. Ce n’est pas grave, ce sont les grandes entreprises, c’est le monde de l’entreprise qui vont payer. »

Pourtant, d’autres mesures ont été proposées. Le Gouvernement parle, en ce moment même, de privatisations d’entreprises publiques. Peut-être y aurait-il eu une solution de cette nature ? Monsieur le ministre, c’est précisément ce que nous vous avons proposé. Lorsque nous disons que l’Assemblée nationale n’a pas tenu compte des débats du Sénat, c’est vrai. On aurait pu attendre, de la part du Gouvernement, d’autres propositions.

Enfin, depuis le Brexit, la place financière de Londres est concurrencée par les places financières de Paris et de Francfort. Dans le même temps, un certain nombre d’autorités, à commencer par le Président de la République et le Premier ministre, ont parlé de mesures nouvelles. Or cette taxe va totalement à contresens. On se contente de dire qu’il s’agit d’une exception ; mais elle ne sera pas compensée au cours de l’exercice prochain.

Le Gouvernement aurait pu nous dire : « Il y a urgence et, pendant quelques semaines, facialement, au nom de la sincérité budgétaire, nous allons tenter de rester dans les clous vis-à-vis de Bruxelles. L’an prochain, nous compenserons cette mesure en faveur du monde économique, en faveur du monde de l’entreprise. » Mais ce n’est absolument pas le cas !

Dans ces domaines, il y a une philosophie, il y a une éthique. Or, en l’occurrence, cette éthique n’est pas respectée : le monde économique est automatiquement la vache à lait, dès que l’on constate une difficulté ou un imprévu au titre des finances publiques.

Nous sommes face à une faute gouvernementale faite par le Président Hollande il y a cinq ans. Aujourd’hui, ce nouveau gouvernement fait donc une double faute ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 13 :

Nombre de votants 325
Nombre de suffrages exprimés 315
Pour l’adoption 171
Contre 144

Le Sénat a adopté. (MM. Philippe Bonnecarrère et François Patriat applaudissent.)

TITRE II

RATIFICATION DE DÉCRETS RELATIFS À LA RÉMUNÉRATION DE SERVICES RENDUS

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TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2017
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 3 et état A annexé

I. – Pour 2017, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :

(En millions d’euros *)

Ressources

Charges

Solde

Budget général

Recettes fiscales brutes / dépenses brutes

1 698

4 398

À déduire : Remboursements et dégrèvements

4 398

4 398

Recettes fiscales nettes / dépenses nettes

-2 700

0

Recettes non fiscales

-1 492

Recettes totales nettes / dépenses nettes

-4 192

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne

-695

Montants nets pour le budget général

-3 497

0

-3 497

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

-3 497

0

Budgets annexes

Contrôle et exploitation aériens

Publications officielles et information administrative

Totaux pour les budgets annexes

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

Contrôle et exploitation aériens

Publications officielles et information administrative

Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

Comptes spéciaux

Comptes d’affectation spéciale

Comptes de concours financiers

Comptes de commerce (solde)

Comptes d’opérations monétaires (solde)

Solde pour les comptes spéciaux

     Solde général

-3 497

* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million d’euros le plus proche ; il résulte de l’application de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul.

II. – Pour 2017 :

1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :

 

(En milliards d’euros)

Besoin de financement

Amortissement de la dette à moyen et long termes

115,2

Dont amortissement nominal de la dette à moyen et long termes

112,8

Dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés)

2,4

Amortissement des autres dettes

-

Déficit à financer

76,9

Autres besoins de trésorerie

-

Total

192,1

Ressources de financement

Émissions de dette à moyen et long termes nettes des rachats

185,0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

-

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

4,2

Variation des dépôts des correspondants

-4,6

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État

1,0

Autres ressources de trésorerie

6,5

Total

192,1

;

2° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an demeure inchangé.

III. – (Non modifié)

État A

VOIES ET MOYENS POUR 2017 RÉVISÉS BUDGET GÉNÉRAL

 

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2017

1. Recettes fiscales

11. Impôt sur le revenu

-1 014 541 000

1101

Impôt sur le revenu

-1 014 541 000

12. Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles

-213 164 000

1201

Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles

-213 164 000

13. Impôt sur les sociétés

4 113 881 000

1301

Impôt sur les sociétés

3 984 881 000

1302

Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

129 000 000

14. Autres impôts directs et taxes assimilées

-439 852 000

1401

Retenues à la source sur certains bénéfices non commerciaux et de l’impôt sur le revenu

153 344 000

1402

Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes

-190 736 000

1405

Prélèvement exceptionnel de 25 % sur les distributions de bénéfices

-6 000 000

1406

Impôt de solidarité sur la fortune

-306 760 000

1408

Prélèvements sur les entreprises d’assurance

-14 208 000

1410

Cotisation minimale de taxe professionnelle

14 000 000

1411

Cotisations perçues au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction

-2 393 000

1412

Taxe de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue

2 932 000

1413

Taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d’art, de collection et d’antiquité

-800 000

1416

Taxe sur les surfaces commerciales

-14 680 000

1421

Cotisation nationale de péréquation de taxe professionnelle

2 000 000

1498

Cotisation foncière des entreprises (affectation temporaire à l’État en 2010)

5 000 000

1499

Recettes diverses

-81 551 000

15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

-163 157 177

1501

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

-163 157 177

16. Taxe sur la valeur ajoutée

-418 281 000

1601

Taxe sur la valeur ajoutée

-418 281 000

17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

-166 872 000

1701

Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d’offices

5 000 000

1702

Mutations à titre onéreux de fonds de commerce

11 000 000

1703

Mutations à titre onéreux de meubles corporels

1 000 000

1705

Mutations à titre gratuit entre vifs (donations)

90 808 000

1706

Mutations à titre gratuit par décès

-181 077 000

1707

Contribution de sécurité immobilière

29 760 000

1713

Taxe de publicité foncière

-16 345 000

1714

Prélèvement sur les sommes versées par les organismes d’assurances et assimilés à raison des contrats d’assurances en cas de décès

49 609 000

1716

Recettes diverses et pénalités

-68 928 000

1721

Timbre unique

-30 688 000

1753

Autres taxes intérieures

81 805 000

1754

Autres droits et recettes accessoires

-4 500 000

1755

Amendes et confiscations

-17 201 000

1756

Taxe générale sur les activités polluantes

-131 400 000

1758

Droit de licence sur la rémunération des débitants de tabac

-900 000

1768

Taxe spéciale sur certains véhicules routiers

113 788 000

1769

Autres droits et recettes à différents titres

27 584 000

1774

Taxe spéciale sur la publicité télévisée

-10 759 000

1776

Redevances sanitaires d’abattage et de découpage

-646 000

1777

Taxe sur certaines dépenses de publicité

-3 000 000

1782

Taxes sur les stations et liaisons radioélectriques privées

2 906 000

1785

Produits des jeux exploités par la Française des jeux (hors paris sportifs)

29 000 000

1786

Prélèvements sur le produit des jeux dans les casinos

17 764 000

1787

Prélèvement sur le produit brut des paris hippiques

-2 148 000

1788

Prélèvement sur les paris sportifs

-15 414 000

1789

Prélèvement sur les jeux de cercle en ligne

3 282 000

1797

Taxe sur les transactions financières

-196 048 000

1799

Autres taxes

48 876 000

2. Recettes non fiscales

21. Dividendes et recettes assimilées

492 084 000

2110

Produits des participations de l’État dans des entreprises financières

630 671 000

2111

Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés

196 000 000

2116

Produits des participations de l’État dans des entreprises non financières et bénéfices des établissements publics non financiers

-334 587 000

22. Produits du domaine de l’État

-166 797 000

2201

Revenus du domaine public non militaire

-23 344 000

2202

Autres revenus du domaine public

46 429 000

2203

Revenus du domaine privé

-2 380 000

2204

Redevances d’usage des fréquences radioélectriques

-164 000 000

2209

Paiement par les administrations de leurs loyers budgétaires

-17 000 000

2212

Autres produits de cessions d’actifs

-9 000

2299

Autres revenus du Domaine

-6 493 000

23. Produits de la vente de biens et services

22 181 000

2301

Remboursement par l’Union européenne des frais d’assiette et de perception des impôts et taxes perçus au profit de son budget

-19 000 000

2303

Autres frais d’assiette et de recouvrement

45 146 000

2304

Rémunération des prestations assurées par les services du Trésor Public au titre de la collecte de l’épargne

-466 000

2305

Produits de la vente de divers biens

-34 000

2306

Produits de la vente de divers services

-1 785 000

2399

Autres recettes diverse.

-1 680 000

24. Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

-66 572 000

2401

Intérêts des prêts à des banques et à des États étrangers

-23 552 000

2403

Intérêts des avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

-12 440 000

2411

Avances remboursables sous conditions consenties à l’aviation civile

-33 000 000

2413

Reversement au titre des créances garanties par l’État

126 000

2499

Autres remboursements d’avances, de prêts et d’autres créances immobilisées

2 294 000

25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites

-884 833 000

2501

Produits des amendes de la police de la circulation et du stationnement routiers

38 208 000

2502

Produits des amendes prononcées par les autorités de la concurrence

-500 000 000

2503

Produits des amendes prononcées par les autres autorités administratives indépendantes

29 352 000

2504

Recouvrements poursuivis à l’initiative de l’agence judiciaire de l’État

-729 000

2505

Produit des autres amendes et condamnations pécuniaires

-460 000 000

2510

Frais de poursuite

-3 522 000

2511

Frais de justice et d’instance

2 816 000

2512

Intérêts moratoires

-136 000

2513

Pénalités

9 178 000

26. Divers

-888 162 000

2601

Reversements de Natixis

-15 000 000

2602

Reversements au titre des procédures de soutien financier au commerce extérieur

-926 000 000

2603

Prélèvements sur les fonds d’épargne gérés par la Caisse des dépôts et consignations

108 000 000

2604

Divers produits de la rémunération de la garantie de l’État

-15 000 000

2611

Produits des chancelleries diplomatiques et consulaires

6 000 000

2612

Redevances et divers produits pour frais de contrôle et de gestion

-2 904 000

2613

Prélèvement effectué sur les salaires des conservateurs des hypothèques

9 000

2614

Prélèvements effectués dans le cadre de la directive épargne

-33 920 000

2615

Commissions et frais de trésorerie perçus par l’État dans le cadre de son activité régalienne

-248 000

2616

Frais d’inscription

586 000

2617

Recouvrement des indemnisations versées par l’État au titre des expulsions locatives

-534 000

2618

Remboursement des frais de scolarité et accessoires

-81 000

2620

Récupération d’indus

4 764 000

2621

Recouvrements après admission en non-valeur

4 471 000

2622

Divers versements de l’Union européenne

-3 215 000

2623

Reversements de fonds sur les dépenses des ministères ne donnant pas lieu à rétablissement de crédits

-3 155 000

2624

Intérêts divers (hors immobilisations financières)

4 384 000

2625

Recettes diverses en provenance de l’étranger

-10 384 000

2626

Remboursement de certaines exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties (art. 109 de la loi de finances pour 1992)

77 000

2698

Produits divers

30 000 000

2699

Autres produits divers

-36 012 000

3. Prélèvements sur les recettes de l’État

31. Prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales

125 950 000

3101

Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la dotation globale de fonctionnement

62 888 000

3106

Prélèvement sur les recettes de l’État au profit du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée

62 678 000

3135

Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation des pertes de recettes liées au relèvement du seuil d’assujettissement des entreprises au versement transport

384 000

32. Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de l’Union européenne

-821 000 000

3201

Prélèvement sur les recettes de l’État au profit du budget de l’Union européenne

-821 000 000

RÉCAPITULATION DES RECETTES DU BUDGET GÉNÉRAL

 

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2017

1. Recettes fiscales

1 698 013 823

11

Impôt sur le revenu

-1 014 541 000

12

Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles

-213 164 000

13

Impôt sur les sociétés

4 113 881 000

14

Autres impôts directs et taxes assimilées

-439 852 000

15

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

-163 157 177

16

Taxe sur la valeur ajoutée

-418 281 000

17

Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

-166 872 000

2. Recettes non fiscales

-1 492 099 000

21

Dividendes et recettes assimilées

492 084 000

22

Produits du domaine de l’État

-166 797 000

23

Produits de la vente de biens et services

22 181 000

24

Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

-66 572 000

25

Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites

-884 833 000

26

Divers

-888 162 000

3. Prélèvements sur les recettes de l’État

-695 050 000

31

Prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales

125 950 000

32

Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de l’Union européenne

-821 000 000

Total des recettes, nettes des prélèvements (1 + 2 - 3)

900 964 823

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l'article 3 et de l’état A annexé.

(L'article 3 et l’état A annexé sont adoptés.)

M. le président. Les autres dispositions de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2017 ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.

Vote sur l’ensemble de la première partie du projet de loi

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2017, je rappelle que, en application de l’article 42 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances et de l’article 47 bis, alinéa 2, du règlement, lorsque le Sénat n’adopte pas la première partie d’un projet de loi de finances, l’ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté.

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2017.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte la première partie du projet de loi.) (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. Nous allons maintenant examiner les dispositions de la seconde partie.

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE PREMIER

AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2017. – CRÉDITS DES MISSIONS

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

État B

(Article 4 du projet de loi)

RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 2017 OUVERTS PAR MISSION ET PROGRAMME, AU TITRE DU BUDGET GÉNÉRAL

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

TITRE II

RATIFICATION D’UN DÉCRET D’AVANCE

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

M. le président. Les autres dispositions du projet de loi de finances rectificative pour 2017 ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.

Vote sur l'ensemble

Article 3 et état A annexé
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2017
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2017.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 14 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 263
Pour l’adoption 102
Contre 161

Le Sénat n'a pas adopté. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Roger Karoutchi. C’est de la brasse coulée !

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux afin de permettre la tenue de la cérémonie d’hommage à Georges Clemenceau dans le salon des Messagers d’État.

La séance reprendra à l’issue de la cérémonie, à seize heures quarante, pour poursuivre cet hommage en séance publique.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures quarante, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2017
 

4

Hommage à Georges Clemenceau

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, il y a un siècle, le 16 novembre 1917, Georges Clemenceau, sénateur du Var, président de la commission de l’armée au Sénat, était nommé président du Conseil par le Président Raymond Poincaré. La France paraît alors à bout de force : les morts se comptent par centaines de milliers, les combattants sont épuisés, des mutineries éclatent, l’arrière est affecté par des grèves et des pénuries alimentaires.

Alors que le doute s’installe, Georges Clemenceau rassemble toutes les énergies du pays en vue de la victoire. Combatif et déterminé, il résume son objectif sur le plan intérieur comme extérieur en un seul mot d’ordre : « Je fais la guerre ! »

Le président du Conseil, accompagné de son chef de cabinet, Georges Mandel, multiplie les visites dans les tranchées, ignorant les balles qui sifflent autour de lui, sous le regard d’abord étonné, puis admiratif, des soldats, des poilus. Georges Clemenceau restaure alors la confiance et le courage non seulement des troupes, mais aussi des élites politiques et intellectuelles tentées par le défaitisme.

Dès lors, ce travailleur infatigable consacre ses jours et ses nuits à son combat ; il ne quitte son bureau de la rue Saint-Dominique que pour le front et pour le Parlement. Accompagné de son sous-secrétaire d’État à la guerre, Jules Jeanneney, qui deviendra, en 1932, président du Sénat, il soumet ses actes au contrôle des commissions des deux assemblées. Il ne fuit jamais les débats publics et affronte la question de confiance, une confiance qui lui est chaque fois accordée. Il répète qu’il n’a de comptes à rendre qu’au Président de la République et aux chambres.

Le 17 septembre 1918, dans notre hémicycle, ici même, il déclare : « Que voulons-nous ? Combattre, combattre, victorieusement encore et toujours jusqu’à l’heure où l’ennemi comprendra qu’il n’y a plus de transaction possible entre le crime et le droit ! »

Le maréchal Foch lance alors trois offensives qui seront déterminantes.

Le 11 novembre 1918, Georges Clemenceau, cet homme de soixante-dix-sept ans, courbé, monte à la tribune de l’Assemblée pour annoncer la victoire. Grâce à lui, la France retrouve sa place dans le monde pour poursuivre, dit-il alors, sa course magnifique pour le progrès humain.

Il allume cette flamme de la résistance qui ne s’éteindra pas. Le 11 novembre 1941, de Londres, le général de Gaulle s’adresse à Georges Clemenceau : « Au fond de votre tombe vendéenne […], Clemenceau ! vous ne dormez pas. Car, certainement, la vieille terre de France qui vous enterre pour toujours a tressailli avec colère tandis que le pas insolent de l’ennemi et la marche feutrée des traîtres foulaient le sol de la patrie. […] Quand la victoire sera gagnée et que justice sera faite, les Français viendront vous le dire. Alors, avec tous les morts, dont est pétrie la terre de France, vous pourrez dormir en paix. »

Charles de Gaulle, le 12 mai 1946, vient se recueillir sur la tombe de Clemenceau à Mouchamps, en Vendée : il vient, en quelque sorte, lui annoncer la victoire. C’était, une fois encore, la victoire du courage face au renoncement.

Ce courage dont nos soldats font preuve aujourd’hui au Sahel, au Levant et, au quotidien, sur notre terre de France. Le courage de ces jeunes tombés dans les sables du désert, tout comme leurs frères d’armes du même âge tombés, il y a un siècle, en Artois, dans la Somme, à Verdun et ailleurs.

Ce courage, nous le devons à Clemenceau, qui sut faire vibrer au sein de notre hémicycle un véritable élan.

Non, décidément, « il n’y a plus de transaction possible entre le crime et le droit ! » C’était vrai hier, c’est vrai aujourd’hui. Voilà le message de Clemenceau ! (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le Premier ministre et Mmes et MM. les membres du Gouvernement applaudissent longuement.)

5

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, le site internet du Sénat et Facebook.

Dans ce temps de débats et d’échanges, chacun aura à cœur d’incarner les valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres et, d’une manière pragmatique, celui du temps de parole.

prélèvement à la source

M. le président. La parole est à M. Thierry Carcenac, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Thierry Carcenac. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

Monsieur le ministre, vous avez confirmé l’entrée en vigueur au 1er janvier 2019 du prélèvement à la source, levant ainsi l’incertitude sur l’avenir de la réforme engagée par le précédent gouvernement. C’est une excellente nouvelle, car cette réforme constitue une modernisation sans précédent du recouvrement de l’impôt sur le revenu. Pour nos concitoyens, elle permet de rendre le paiement de l’impôt contemporain de la perception des revenus. C’est également une mesure de justice qui protège ceux dont le revenu évolue ; chaque année, 30 % des contribuables sont concernés.

Toutefois, monsieur le ministre, à la suite de votre annonce d’hier à Toulouse, quelques interrogations demeurent.

D’abord, la mise en place au 1er janvier 2019 s’inscrira-t-elle dans la continuité du dispositif prévu par le précédent gouvernement, dont les objectifs étaient, je le rappelle, l’adaptation de l’impôt à la vie professionnelle de nos concitoyens et une meilleure répartition dans l’année de l’impôt, désormais étalé sur douze mois ?

Une autre interrogation consécutive à votre annonce concerne le coût pour les entreprises. En effet, vous aviez justifié le report d’un an de la mise en place du prélèvement à la source par un coût insupportable pour les entreprises. J’espère que ce problème est aujourd’hui résolu, sachant que le dispositif initial prévoyait le déploiement de la déclaration sociale nominative, dont on nous dit aujourd’hui que la mise en œuvre se passe dans les meilleures conditions.

Par ailleurs, pouvez-vous confirmer la division par deux de l’amende applicable en cas d’erreur de la part des employeurs, que vous avez annoncée hier ? Cette mesure serait en effet de nature à rassurer les entreprises, en particulier les plus petites.

Enfin, qu’en sera-t-il de l’année blanche ? Cette disposition concernera-t-elle l’ensemble des revenus, ce qui aurait le mérite de la simplicité, ou allez-vous prévoir des dispositifs dérogatoires qui seront source de complexité et donc d’erreur ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Claude Haut et Alain Richard applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le sénateur, comme vous l’avez indiqué, et à la suite du débat que nous avons eu ici peu après que le Gouvernement eut pris ses fonctions, nous avons confirmé que le prélèvement à la source de l’impôt serait mis en place au 1er janvier 2019, après, donc, un report d’un an.

Je tiens à remercier tous les agents de la Direction générale des finances publiques qui ont travaillé, sous l’ancien gouvernement comme sous l’actuel, pour que le recouvrement de l’impôt sur le revenu, assuré aujourd’hui à 98 %, se fasse dans les conditions les plus simples possible, au service, en effet, des contribuables. Presque la moitié de ceux qui acquittent l’impôt sur le revenu voient leurs revenus fluctuer ; je pense qu’il s’agit d’une mesure de simplicité pour eux.

Toutefois, nous avons eu raison de reporter d’un an, à la demande du Premier ministre, la mise en place de l’impôt à la source. En effet, le rapport de l’Inspection générale des finances et du cabinet Mazars montre que, si nous l’avions mis en place au 1er janvier 2018, il y aurait eu de graves risques de défaillances – non pas du fait des agents de l’administration, mais du fait, simplement, de la révolution de simplification que constitue, comme vous l’avez souligné, l’impôt à la source.

Nous avons organisé une phase de test en grandeur réelle avec plus de 600 collecteurs, entreprises, collectivités territoriales et associations employeurs. Je me suis rendu à Toulouse avec plusieurs de vos collègues pour rencontrer l’une des entreprises concernées, qui compte quelques centaines de salariés. Les conclusions de cette phase de test nous permettent d’améliorer le dispositif.

Un rapport sénatorial a conclu à un coût pour les entreprises supérieur à 1 milliard d’euros. Notre évaluation se situe plutôt autour de 300 millions d’euros.

Oui, je confirme qu’il faut diviser par deux l’amende : cette mesure sera incluse dans le projet de loi de finances rectificative.

Oui, il faut généraliser la déclaration sociale nominative ; elle est à 97 % aujourd’hui et sera, j’espère, à quasiment 100 % à la fin de l’année.

Oui, nous allons prendre des mesures, à la faveur du débat parlementaire, au cours duquel je serai très ouvert aux amendements, pour simplifier la vie des entreprises, notamment des plus petites, afin de rendre ce service à nos concitoyens au coût le plus bas possible. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Carcenac, pour la réplique.

M. Thierry Carcenac. Je partage les remerciements adressés par M. le ministre aux agents des impôts pour leur grand professionnalisme. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche.)

élus interdits d'entrée en israël

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Esther Benbassa. Les autorités israéliennes ont annoncé qu’elles refuseraient l’entrée sur leur territoire à des élus français, parmi lesquels sept parlementaires, issus des diverses gauches et qui s’apprêtaient à se rendre en Israël pour porter un message de paix et de fraternité et afin d’alerter sur la situation des prisonniers politiques palestiniens. Cette délégation entendait également rencontrer l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri, en détention administrative en Israël depuis quatre-vingt-quatre jours.

Le motif de ce refus d’entrée serait d’abord le supposé soutien de la délégation au mouvement international Boycott, désinvestissement et sanctions. Connu sous l’acronyme BDS, ce mouvement vise à dénoncer et à punir la poursuite de l’occupation en Cisjordanie. Or le soutien supposé des responsables politiques concernés au BDS est loin de constituer une menace pour Israël et relève des convictions personnelles de chacun. Il s’agit en réalité de prétextes de dernière minute, vu que ce voyage, initié par l’association pour le jumelage entre les camps de réfugiés palestiniens et les villes françaises, l’AJPF, avait été préparé en collaboration avec le consulat français de Jérusalem.

Que compte faire le gouvernement français pour remédier à cette décision inique ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Comme vous l’indiquez, madame la sénatrice, les autorités israéliennes viennent d’annoncer qu’elles n’autoriseraient pas des parlementaires français et européens à entrer sur leur territoire dans le cadre d’une visite organisée par une association ayant annoncé qu’elle rencontrerait Marouane Barghouti et Salah Hamouri, tous deux emprisonnés. On peut regretter cette décision israélienne ; elle reste néanmoins souveraine.

De façon générale, la France souhaite ardemment que les parlementaires puissent avoir accès aux personnes qu’ils souhaitent rencontrer lors de leurs déplacements, en Israël comme dans n’importe quel pays. D’ailleurs, notre consulat général était intervenu pour appuyer cette demande. Plus généralement, il est mobilisé au quotidien en ce qui concerne la situation de Salah Hamouri : il a rendu visite à celui-ci sur son lieu de détention et assisté à l’ensemble des audiences publiques auxquelles il a comparu.

Je puis vous assurer, pour l’avoir fait personnellement, que nous avons signalé aux autorités israéliennes toute l’attention que nous portons à ce cas, parce qu’il soulève le problème plus large du recours extensif à la détention administrative. Nous ne savons d’ailleurs pas quels sont les griefs retenus contre M. Salah Hamouri.

Mme Cécile Cukierman. Tout à fait !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Nous demandons instamment aux autorités israéliennes de respecter les droits de M. Hamouri et nous espérons que celui-ci pourra être libéré. Nous sommes, madame la sénatrice, pleinement mobilisés.

Sans nous décourager, nous devons faire en sorte que la France continue de porter une parole de paix et d’apaisement, notamment à travers des initiatives culturelles, en direction des territoires palestiniens – je pense à l’ouverture d’un lycée français à Ramallah – comme d’Israël – je pense à la saison culturelle croisée France-Israël. Puissent ces initiatives être des ferments de paix et de compréhension ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour la réplique.

Mme Esther Benbassa. En refusant l’entrée de cette délégation en Israël, le gouvernement de M. Benyamin Netanyahou ne fait que confirmer que les efforts pour la paix n’entrent pas actuellement dans ses objectifs. Il me semble que la France ne devrait pas devenir complice en optant pour le silence.

cop23

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour le groupe Les Indépendants - République et Territoires.

M. Jean-Louis Lagourgue. Ma question s’adresse à M. le ministre de la transition écologique et solidaire.

Monsieur le ministre d’État, vous le savez, la ville de Bonn accueille actuellement la COP23, dernière échéance en date des négociations internationales sur le changement climatique. Un collègue de notre groupe, Jérôme Bignon, s’y trouve d’ailleurs pour participer aux débats. Il s’agit d’un rendez-vous international de première importance, puisqu’il vise à définir les modalités pratiques d’application de l’accord climatique de Paris, signé à l’issue de la COP21.

Malheureusement, l’engagement de limiter le réchauffement global est aujourd’hui menacé. Menacé, d’abord, par la décision de l’administration américaine de se retirer de cet accord, au risque de fragiliser le consensus international sur l’urgence climatique. Menacé, ensuite, par la difficulté technique à tenir notre engagement d’un réchauffement climatique limité à deux degrés à l’horizon de 2100.

Le 30 octobre dernier, à l’occasion de son rapport annuel sur les perspectives de réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’ONU a présenté une simulation de réchauffement autour de trois degrés.

Cette situation a des conséquences directes pour notre environnement, exposées lors de l’examen du projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels. Nous avons ainsi évoqué ce qu’une hausse du niveau des mers signifierait pour notre pays : transformation de la Camargue et de l’estuaire de la Gironde, entre autres territoires ; et, bien entendu, engloutissement des côtes d’une large partie de nos territoires ultramarins, dont le département de La Réunion.

Il faut donc agir vite. Loin de baisser les bras, nous devons redoubler d’efforts pour promouvoir des énergies propres et des pratiques durables !

Le territoire de La Réunion est pleinement engagé dans cet effort de transition énergétique. Ainsi, 36 % de la production électrique locale est fondée sur les énergies renouvelables.

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Louis Lagourgue. Monsieur le ministre d’État, pouvez-vous nous préciser les mesures que vous entendez prendre pour poursuivre la transition énergétique et ne pas manquer le virage de cette révolution des mentalités et des pratiques ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires. – MM. André Gattolin et Alain Richard applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, permettez-moi d’excuser le ministre d’État Nicolas Hulot, qui porte actuellement la voix de la France à la COP23.

Vous avez raison, il y a urgence à agir en matière de transition écologique et énergétique. C’est ce que les scientifiques ont rappelé hier dans le journal Le Monde. La France d’outre-mer n’a d’ailleurs pas besoin qu’on le lui rappelle, puisqu’elle vit très directement les dérèglements climatiques ; vous, à La Réunion, le savez bien. Le Premier ministre s’est rendu dernièrement aux Antilles avec une délégation de ses ministres : nous avons pu constater à quel point l’avancée du trait de côte et la montée du niveau de la mer sont extraordinairement préoccupantes.

La réponse de la France, et du Gouvernement depuis le mois de mai dernier, consiste à agir sur trois plans.

D’abord, au plan international, nous participons à la COP23 et au pacte mondial pour l’environnement signé en septembre dernier à l’Assemblée générale des Nations unies. Je pense aussi, bien évidemment, au sommet du 12 décembre prochain, qui doit permettre, deux ans après l’Accord de Paris, de rendre celui-ci opérationnel et de parler très clairement des financements, à l’heure où les États-Unis se retirent peu à peu de l’accord.

Ensuite, au plan national, Nicolas Hulot a présenté le plan Climat aux Français en juillet dernier et vous avez récemment examiné le projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels. Des mesures de transition sont prises pour aider les Français, y compris les plus modestes, qu’il s’agisse de leur logement ou de leur voiture. Une prochaine programmation pluriannuelle pour l’énergie est en préparation, qui fixera un nouveau mix énergétique à l’élaboration duquel le Gouvernement souhaite que le Sénat soit étroitement associé. Bref, la réponse nationale est ambitieuse.

Enfin, comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, il y a une réponse territoriale. C’est pour cela que le Premier ministre a validé une enveloppe exceptionnelle de 75 millions d’euros pour répondre à l’urgence en ce qui concerne les territoires à énergie positive pour la croissance verte, pour lesquels il y avait une difficulté de financement. C’est pour cela aussi que nous développons les contrats de transition écologique pour l’année prochaine ; La Réunion, monsieur le sénateur, pourra y candidater. C’est pour cela enfin que nous souhaitons développer les énergies renouvelables, en particulier dans les outre-mer, comme le souhaite également Mme Girardin. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

prières de rue

M. le président. La parole est à M. Philippe Pemezec, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Pemezec. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur chargé des cultes.

Monsieur le ministre, à Clichy, dans les Hauts-de-Seine, chez notre collègue Rémi Muzeau, voilà huit mois que plusieurs centaines de musulmans envahissent le trottoir chaque vendredi pour faire leurs prières, juste en face de la mairie, qui est tout de même le symbole de la République.

Cela fait huit mois que ces personnes refusent d’occuper des lieux qui sont pourtant prévus à cet effet, sous les prétextes les plus fallacieux qui soient, et cela fait huit mois que l’État ne fait rien et laisse ce territoire abandonné ! Il a fallu qu’une centaine d’élus manifestent au chant de la Marseillaise pour faire reculer cet abandon du territoire.

Monsieur le ministre, ma question est simple : comptez-vous, oui ou non, faire quelque chose pour faire cesser cette situation ? Comptez-vous faire en sorte que, demain, les élus n’aient plus à se substituer aux forces de l’ordre pour faire tout simplement respecter l’ordre républicain ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Pemezec, vous avez rappelé ce qui se passe effectivement à Clichy à la suite d’une décision de justice.

L’une des deux salles de prière que comptait la ville de Clichy a été fermée le 22 mars dernier. Depuis, des prières de rue sont organisées par l’ancienne association gestionnaire, d’abord sur un rythme quotidien, désormais sur un rythme hebdomadaire. Personne ne peut se satisfaire de cette situation. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Il revient au ministre de l’intérieur de veiller au respect de la loi, entendue au sens général.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. À Clichy, une décision de justice autorise la mairie à affecter les locaux de la rue d’Estienne-d’Orves à d’autres finalités. Cette décision de justice doit être respectée.

Le week-end dernier, le maire de Clichy-la-Garenne a fait part de l’existence de prêches contenant des appels au meurtre et de tracts antisémites diffusés à l’occasion des prières.

Monsieur le sénateur, ce que je vais vous dire n’est pas une provocation, mais un fait : l’État n’a pas connaissance de ces documents. J’invite donc tous ceux qui disposent de telles informations à en faire part à la justice (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Ça, c’est un peu fort !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. … et aux services de l’État, auxquels j’ai demandé de maintenir la plus grande vigilance.

M. Marc-Philippe Daubresse. Le préfet est en vacances ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Dans le respect des conditions fixées par la loi de 1905, il faut bien sûr que toutes les religions puissent exercer de façon convenable leur culte.

Il y a quelques jours, une piste possible pour trouver un nouveau local pour l’association vient malheureusement d’échouer. J’ai demandé au préfet de poursuivre son travail pour mettre très rapidement un terme définitif à la situation actuelle.

Toutefois, monsieur le sénateur, nous comptons aussi sur le maire de Clichy pour mettre fin à tous ces événements. (Vives exclamations et quelques huées sur les travées du groupe Les Républicains.) Le maire et le ministre de l’intérieur doivent en effet travailler de concert pour trouver une solution à ce problème. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Pemezec, pour la réplique.

M. Philippe Pemezec. Madame la ministre, alors que je croyais que nombre d’élus étaient inutiles, je constate que vous faites en permanence appel à eux !

Vous nous dites ne pas avoir les mêmes informations que nous. Je vous rappelle que, à Clichy, il y a deux églises, une synagogue et deux lieux de prière pour les musulmans.

Nous n’avons tout simplement pas la même conception de l’ordre public. Pourtant, un certain nombre de ceux qui se trouvent ici ont été maire avant d’être ministre…

La réalité, vous la connaissez : à certains endroits, nous sommes envahis par le fait religieux. Cela provoque nos convictions, quelles qu’elles soient, cela constitue également une provocation pour la liberté et notre démocratie.

Madame la ministre, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, j’en appelle à vous pour restaurer la République en tout lieu du territoire, parce que, pour moi, et pour vous aussi, j’imagine, la République est une et indivisible ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

politique de la ville (I)

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour le groupe Union Centriste.

M. Olivier Henno. Ma question s’adresse à M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires.

Depuis plusieurs mois, nous attendions de la part du Président de la République et du Gouvernement une vision et des perspectives en matière de politique de la ville. En effet, avant de démolir ou de passer un coup de rabot financier, il est toujours plus pertinent de préciser sa vision, de définir une alternative et, surtout, d’organiser un débat national pour que cette alternative soit la plus féconde possible.

En déplacement dans le Nord, le Président de la République a fait quelques annonces sur ce que nous pouvons considérer comme un énième plan en faveur des quartiers et territoires cumulant de nombreuses difficultés urbaines, sociales, de sécurité et d’emploi.

Certaines pistes annoncées semblent sorties de ce que certains appellent « l’ancien monde ». J’invite d’ailleurs ceux qui le pensent à lire ou relire L’Ecclésiaste. Comment comprendre l’annonce de la création d’emplois francs quand, au même moment, les collectivités locales et les associations des mêmes quartiers doivent faire face à la disparition des contrats aidés ?

Des annonces ont été faites en matière d’éducation, de culture, de lutte contre les discriminations et d’accès aux services publics. Nous les partageons. Ces annonces, attendues par de nombreux acteurs dans nos territoires, ont cependant comme un goût de trop peu. Quelle est la vision du Gouvernement en matière de sécurité, de logement ou de service public de l’emploi ? Quelle place entend-il donner aux territoires et à leurs élus locaux et quelle concertation compte-t-il engager avec eux ?

Il n’y a pas de fatalisme dans le domaine de la politique de la ville. J’ai encore à l’esprit les métamorphoses des quartiers consécutives au plan de Jean-Louis Borloo.

Monsieur le ministre, pouvez-vous éclairer notre assemblée sur votre vision à court, moyen et long terme en faveur des quartiers et des territoires les plus fragiles de notre République ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Marc-Philippe Daubresse applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la cohésion des territoires.

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Henno, le Président de la République a très clairement expliqué sa vision de la politique de la ville. Il l’a fait, bien sûr, en concertation avec le Premier ministre et l’ensemble du Gouvernement. C’est un enjeu considérable.

Ce qui se passe dans nombre de quartiers n’est pas le résultat de la politique menée depuis cinq mois, mais le résultat d’au moins cinquante années au cours desquelles ces quartiers ont été malheureusement marginalisés.

M. Pierre-Yves Collombat. C’est à cause du libéralisme !

M. Jacques Mézard, ministre. Aujourd’hui, des constats montrent les difficultés, les problèmes de sécurité, d’emploi, d’éducation.

Vous avez cité Jean-Louis Borloo.

M. Marc-Philippe Daubresse. Il avait eu des résultats, à l’époque !

M. Jacques Mézard, ministre. Monsieur Daubresse, vous qui connaissez également bien la politique de la ville, sachez que nous avons justement décidé de confier une mission à Jean-Louis Borloo, lequel travaillera avec le secrétaire d’État Julien Denormandie et moi-même.

Nous voulons défendre une vision de « rassemblement » – c’est l’expression du Président de la République lui-même – dans un dossier qui est une priorité nationale. Au nom de ce rassemblement, nous avons pris la décision de nommer M. Klein, maire socialiste de Clichy-sous-Bois, président de l’ANRU. Il est en effet nécessaire de rassembler toutes les sensibilités dans le cadre de ce débat extrêmement important.

Vous avez rappelé ce qui se passe dans certaines communes : on y observe un retrait de la République, des comportements que nous ne pouvons pas tolérer, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, quelles que soient nos sensibilités. C’est d’ailleurs le message très fort qu’a livré le Président de la République en indiquant qu’il veillerait à réunir tous les trois mois les acteurs de la politique de la ville à l’Élysée pour faire le point et pour avancer en totale concertation, bien sûr, avec le Premier ministre et l’ensemble du Gouvernement.

Nous engageons ainsi une véritable politique de relance de la politique de la ville, telle qu’elle n’avait pas été envisagée depuis bien longtemps ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste. – Exclamations sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

prévention

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour le groupe La République En Marche.

M. Michel Amiel. Ma question s’adresse à Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, et concerne les dispositions du PLFSS relatives à la prévention des cancers de l’utérus.

Madame la ministre, alors que le PLFSS que nous examinons en ce moment même au Sénat prévoit de nombreuses innovations, je tenais à saluer la position du Gouvernement en faveur d’une meilleure prévention des cancers.

Selon les recommandations de la HAS, le dépistage commence chez les femmes à 25 ans pour le cancer du col de l’utérus et à 50 ans pour les cancers du sein et du colon.

Dans le cadre de la prévention des cancers féminins, la mise en place d’une consultation spécifique et sa prise en charge à 100 % par la sécurité sociale pour les assurées âgées de 25 ans est essentielle pour diffuser les messages de prévention et favoriser un dépistage effectif de la population. Cette consultation offrira en plus d’un dépistage du cancer du col de l’utérus à l’ensemble de la population la possibilité d’identifier, dans la population féminine, les patientes qui auront besoin d’un dépistage plus précoce, avant 50 ans pour le cancer du sein, par exemple.

Si je salue votre initiative, l’âge de 25 ans pourrait cependant paraître trop tardif pour de la prévention primaire. En effet, les outils à disposition, tels que le vaccin anti-papillomavirus du col de l’utérus, ont démontré leur efficacité quand ils ont été administrés à des filles plus jeunes, dès l’âge de 12 ans, comme le montre par exemple une récente étude au Royaume-Uni.

C’est la raison pour laquelle je souhaiterais connaître votre sentiment sur l’instauration d’une première consultation de prévention pour les assurées entre 11 et 14 ans. Cette consultation faciliterait la discussion autour du vaccin, mais pas seulement : elle permettrait également de rappeler l’utilité de l’activité physique, du contrôle de la charge pondérale et le nécessaire évitement de la toxicomanie. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Amiel, vous avez raison, la prévention doit être une priorité. C’est pourquoi nous avons instauré une consultation de prévention gratuite pour les femmes âgées de 25 ans dans le cadre du PLFSS. Cette consultation permettra d’identifier leur niveau de risque pour les cancers du sein, de sorte qu’elles bénéficient d’un dépistage plus précoce et qu’elles soient alertées sur l’utilité du dépistage du cancer du col de l’utérus par frottis. En effet, on pourrait totalement prévenir le cancer du col de l’utérus aujourd’hui si l’ensemble des femmes françaises se soumettaient à un frottis tous les trois ans.

Par ailleurs, il existe une prévention primaire par la vaccination anti-HPV. Depuis 2007, de nombreux pays, notamment l’Angleterre et l’Australie, ont lancé de grandes campagnes de vaccination chez l’ensemble des enfants, filles ou garçons. En Australie, ces campagnes ont permis de faire diminuer la prévalence du virus, du cancer du col de l’utérus et des lésions du col utérin chez 75 % des femmes. Il a donc été vraiment prouvé scientifiquement qu’une telle vaccination constituait une excellente mesure de prévention primaire.

L’enjeu pour notre pays est de parvenir à lancer une large campagne de vaccination contre le virus HPV pour les filles comme pour les garçons. Cela permettrait, d’une part, de faire diminuer la prévalence du virus HPV dans la population et, d’autre part, de prévenir chez les jeunes garçons homosexuels le cancer du canal anal, ainsi que les cancers ORL.

Il faut donc mener une réflexion plus générale sur la consultation de prévention que l’on pourrait mettre en place pour favoriser la vaccination anti-HPV de l’ensemble de nos jeunes.

Par ailleurs, vous avez raison, nous devons nous interroger sur l’intérêt d’un dépistage précoce de l’obésité. C’est la raison pour laquelle Jean-Michel Blanquer et moi-même voulons rendre effective la visite médicale à 6 ans pour l’ensemble des enfants, de façon à dépister le surpoids et l’obésité notamment.

Nous menons actuellement une réflexion très large sur l’ensemble des consultations de prévention qui pourraient être utiles aux Français et avons ouvert ce débat sur la vaccination anti-HPV, mais pour un public plus large que les seules jeunes filles. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Fabienne Keller applaudit également.)

agriculture biologique

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

M. Joël Labbé. Je suis très déçu que le ministre de l'agriculture ne soit pas là. J’aurais bien sorti mon joker, mais ça ne se fait pas !

Je voudrais interpeller le Gouvernement concernant le soutien à l’agriculture biologique.

M. Joël Labbé. En ces temps où l’agriculture dite « conventionnelle » démontre ses limites au point de ne plus nourrir ses serviteurs que sont les agricultrices et les agriculteurs, un nombre de plus en plus important de paysannes et de paysans choisissent d’engager une transition vers l’agriculture biologique, plus rémunératrice pour les producteurs et plus vertueuse pour la fourniture de productions de qualité, pour la préservation de la vie des sols, des équilibres environnementaux, de la biodiversité, de la qualité des eaux, de la santé humaine, du climat, et j’en passe.

Aujourd’hui, cette agriculture d’avenir occupe près de 6,5 % de la SAU, représente 7,3 % des exploitations et 10,8 % des emplois agricoles et connaît une croissance exponentielle. Pourtant, elle perçoit à peine 3 % des aides de la PAC, dont le montant s’élève, je vous le rappelle, à 7,44 milliards d’euros par an.

Monsieur le ministre de l’agriculture – enfin, vous lui direz… –, vous avez décidé que l’État se désengagerait des aides au maintien pour se recentrer sur les aides à la conversion, estimant que – je vous cite – « c’est désormais au marché de soutenir le marché de l’agriculture biologique ». Votre message est absolument inacceptable et incompréhensible, et ce alors même que le Président de la République a annoncé la reconnaissance de la valorisation des services environnementaux produits par les agriculteurs, au travers d’un investissement de 200 millions d’euros pour mettre en place…

M. le président. Il faut conclure !

M. Joël Labbé. … rapidement des paiements pour services écosystémiques.

Ma question (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.), monsieur le ministre ou madame la ministre qui allez me répondre, est la suivante : qu’en est-il de ce financement annoncé par le Président de la République ? Le Gouvernement va-t-il suivre (Même mouvement sur les mêmes travées.)

M. Joël Labbé. … le groupe La République en Marche de l’Assemblée nationale, qui a voté un amendement de rétablissement de l’aide au maintien ? (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Labbé, je tiens à vous rassurer : le ministre Travert a une bonne raison de ne pas être avec nous cet après-midi pour cette séance de questions d’actualité au Gouvernement, puisqu’il se trouve avec l’ensemble des acteurs d’une filière pour négocier une plus juste répartition de la valeur entre transformateurs et distributeurs. Il m’a chargé de vous communiquer sa réponse et, sous l’autorité du Premier ministre, celle du Gouvernement.

Je vous confirme que l’action du Gouvernement vise à conforter et à accompagner la filière bio. Vous le savez, nous avons fait le choix en juillet dernier de transférer les crédits du pilier 1 vers le pilier 2 de la politique agricole commune pour poursuivre résolument nos actions en faveur du bio et des agriculteurs les plus fragiles, car nous nous sommes trouvés dans une impasse budgétaire et avons souhaité que les aides au bio ne constituent pas la variable d’ajustement.

Par ce transfert, nous garantissons les aides à la conversion dans la dynamique de croissance qu’elles connaissent. Nous confions désormais aux conseils régionaux le soin de continuer à financer des aides au maintien sur de nouveaux contrats, mais ils devront le faire en responsabilité et sans mobiliser les crédits de l’État.

Outre ces aides à la conversion, les agriculteurs bio bénéficient de mesures agroenvironnementales. Naturellement, ils bénéficient aussi de toutes les autres aides de la PAC, dont la réforme sera conduite avec cette ambition, notamment.

Par ailleurs, nous avons la conviction qu’il nous faut mener une réflexion en profondeur sur la filière bio et son développement dans le cadre des états généraux de l’alimentation. Malgré une demande croissante des consommateurs pour le bio et après cinq ans d’aides à la conversion, comment expliquer que les agriculteurs ne parviennent toujours pas à vendre leurs produits bio à un prix qui leur permette d’en vivre ? Il s’agit là du défi à relever dans les prochaines années, et nous le ferons en amplifiant les efforts de tous pour que la croissance du marché bénéficie aux acteurs de l’agriculture biologique, ainsi qu’aux consommateurs.

Les agriculteurs bio n’ont aucune raison d’être inquiets, car nos objectifs pour le bio sont intacts : nous voulons passer de 6 % à 8 % des surfaces cultivées à la fin de la programmation, voire davantage, parce que c’est possible et que c’est le sens de notre ambition pour l’agriculture française. Nous souhaitons également atteindre les 50 % de produits bio de qualité issus de circuits courts dans la restauration collective en 2022. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

état des forces de sécurité

M. le président. La parole est à M. Henri Leroy, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Henri Leroy. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Quarante-six policiers et seize gendarmes se sont donné la mort depuis le début de l’année.

La semaine dernière, sept membres des forces de l’ordre se sont suicidés. Cela fait un suicide par semaine depuis le début de l’année, un suicide par jour la semaine dernière ! Ces drames sont épouvantables et nos premières pensées vont aux familles de ces fonctionnaires.

Les forces de l’ordre font bien leur travail et le font tous les jours, confrontées à la violence, à une absence totale de respect de l’autorité, parfois même à un rejet de ce que nous sommes.

Les forces de l’ordre ne supportent plus le manque de soutien, le manque de moyens et le manque de considération. Elles ne supportent plus d’être trop souvent narguées par ceux qui ne respectent pas la loi, insultées et menacées sur les réseaux sociaux. La recrudescence des suicides illustre dramatiquement un malaise très profond. Il s’agit d’un épouvantable révélateur.

Monsieur le ministre, votre réponse apparaît malheureusement bien convenue. La prévention des risques psychosociaux constitue votre priorité : recrutement de psychologues, redynamisation des cellules de veille, déploiement de réseaux de référents. Tout cela est important, mais il n’y a rien de nouveau là-dedans, et c’est bien loin d’être suffisant !

Ne pensez-vous pas qu’il est temps d’appliquer la loi pénale sur notre territoire pour redonner le moral à nos hommes, qu’il est temps de sortir de l’angélisme qui nous mène aux polices de sécurité du quotidien et aux travaux d’intérêt général, qu’il est temps de sortir de l’impunité dont bénéficie toute une partie des délinquants en France ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sylvie Goy-Chavent applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Henri Leroy, c’est avec une grande émotion que nous avons appris la semaine dernière que six fonctionnaires de police et deux fonctionnaires de gendarmerie s’étaient donné la mort. Je veux assurer leur famille, leurs proches, leurs collègues de travail, de tout mon soutien, de celui du Gouvernement et de l’ensemble du Sénat.

Il est toujours difficile d’expliquer de tels gestes, dont les raisons sont multiples, dont les causes sont complexes. Si ce sont souvent des raisons intimes, liées à la maladie, à la vie personnelle, qui expliquent le passage à l’acte, il est incontestable, monsieur le sénateur, qu’on ne peut pas éluder la dureté des tâches de nos policiers et de nos gendarmes. Eux qui doivent maintenir l’ordre public, eux qui sont amenés à lutter contre le terrorisme, eux qui traquent les criminels et les délinquants sont en effet sans cesse confrontés à la violence, à la désespérance, ce qui peut mener à une tension et un stress extrêmes.

De nombreuses actions ont été mises en œuvre depuis plusieurs mois pour prévenir de tels actes.

Tout d’abord, une action a été engagée pour le soutien psychologique aux agents. Le service dédié est doté de quatre-vingts psychologues pour la police et de trente-huit agents pour la gendarmerie.

Ensuite, nous avons souhaité sensibiliser les élèves policiers et gendarmes dès la fin de leur scolarité avec une cellule de veille, des référents à l’accompagnement dans les commissariats et les brigades.

Pour réagir à cette situation plus directement, nous avons demandé, dès dimanche, au directeur général de la police nationale et au directeur général de la gendarmerie nationale de mener une évaluation très précise de ces mesures. Nous en tirerons toutes les conséquences.

Enfin, je voulais vous dire que le ministre de l’intérieur va recevoir très rapidement les syndicats de l’ensemble de la police sur le sujet. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe La République En Marche et du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Henri Leroy, pour la réplique.

M. Henri Leroy. Madame la ministre, votre réponse montre que votre logique est malheureusement de traiter les conséquences plutôt que les causes.

Les forces de l’ordre retrouveront le moral lorsque la loi pénale sera appliquée partout sur notre territoire, lorsque les voyous…

M. le président. Il faut conclure !

M. Henri Leroy. … seront traités comme des délinquants et les policiers et les gendarmes respectés comme ils doivent l’être ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

politique de la ville (II)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Ma question s’adresse à M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires.

Des dizaines de milliards d’euros ont été consacrés aux quartiers depuis des décennies. Lorsque l’on demande à leurs habitants ce qui a changé, ils vous répondent : rien ou si peu. C’est la preuve des échecs successifs des politiques de la ville, qui ont consisté à saupoudrer beaucoup d’argent, une façon d’acheter la paix sociale.

Aujourd’hui, après les annonces faites par le Président de la République, quel désespoir pour les habitants de ces quartiers !

Jusqu’à ces derniers jours, j’étais maire d’une commune comprenant un quartier classé en politique de la ville. Mon expérience de terrain me conduit à penser que la question de l’avenir de nos banlieues et de nos quartiers en difficulté n’est pas tant une question de moyens qu’une question de volonté.

Pour remettre la République au cœur des quartiers, il faut redonner du sens à l’autorité, il faut y réhabiliter les valeurs de la République et rester intransigeant sur leur respect. Cela doit commencer dès le plus jeune âge. C’est la condition sine qua non pour y retrouver une qualité de vie et l’espoir d’y trouver un emploi.

En annonçant des mesures dérogatoires et particulières pour les banlieues, bien souvent déjà vues, comme les emplois francs ou le name and shame par exemple, le Président de la République tombe dans le piège de la discrimination positive.

Outre le fait que ces mesures ont peu de chances de porter leurs fruits, ne croyez-vous pas, monsieur le ministre, qu’elles constituent également une entorse à l’égalité républicaine ? Ne croyez-vous pas que la discrimination positive, présente en filigrane dans le discours du Président de la République et inspirée du modèle anglo-saxon, est contraire aux principes fondamentaux d’une République une et indivisible ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la cohésion des territoires.

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Madame la sénatrice, vous n’avez pas raison de dire que rien n’a été fait. Si j’ai pu moi aussi dresser un bilan négatif d’un certain nombre de politiques touchant des quartiers dits prioritaires ou fragiles, il n’en reste pas moins que beaucoup de travail a été réalisé par les gouvernements successifs.

M. Jacques Mézard, ministre. Lorsque l’on va sur le terrain, on peut le constater dans nombre de quartiers.

Quand vous affirmez que l’argent, c’est une chose, mais que cela ne suffit pas, je peux vous suivre. Mais il faut tout de même de l’argent ! D’ailleurs, on nous reproche de ne pas en mettre suffisamment…

Là où vous avez raison, c’est qu’il faut une volonté. En revanche, là où je ne suis pas d’accord avec vous, c’est que ce n’est pas de la discrimination positive – je vous renvoie à celui qui a utilisé ces mots pour la première fois – que de prendre des mesures pour rattraper le retard, amener le droit commun ou rétablir l’accès aux services publics dans les quartiers. S’il existe des problèmes dans les territoires ruraux, il y en a aussi dans nombre de ces quartiers, où on trouve moins de bureaux de poste ou de commissariats qu’ailleurs et où nos concitoyens se trouvent manifestement confrontés à des problèmes de mobilité.

Il faut bien le reconnaître, nous sommes parfois confrontés à des situations exceptionnelles : c’est le cas lorsque 60 % de la population de certains de ces quartiers est allophone, c’est-à-dire qu’elle ne parle pas le français mais l’une des vingtaines d’autres langues pratiquées. Nous sommes donc obligés de travailler à la mise en place de mesures, qui ne sont pas spécifiques, mais qui permettent de ramener le droit commun, la République dans ces quartiers.

Là où vous avez raison, c’est qu’il faut de l’autorité, ce qu’a très fermement rappelé le Président de la République, car il faut que la sécurité puisse régner dans ces quartiers, comme ailleurs ! (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe La République En Marche et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour la réplique.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Monsieur le ministre, je crois que nous aurons gagné, et que la politique de la ville aura atteint son but, lorsque la police pourra travailler dans les quartiers sans se faire caillasser, que les enseignants pourront y enseigner en toute quiétude, que les travailleurs sociaux accepteront d’y rester, bref, quand les habitants pourront vivre au quotidien dans le climat de paix et de sécurité auquel chacun d’entre nous a droit ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

apprentissage

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour le groupe La République En Marche.

M. Martin Lévrier. Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail.

Vendredi dernier, madame la ministre, vous avez posé le premier jalon de la profonde réforme de l’apprentissage promise par le candidat Emmanuel Macron. Nous le savons, la France compte aujourd’hui environ 7 % de jeunes apprentis, tandis que notre voisin allemand frôle les 15 %.

Nos entreprises industrielles ne trouvent plus de jeunes à embaucher en apprentissage. Alors que la rentrée est déjà loin, les centres de formation d’apprentis disposent encore de nombreuses offres qu’ils ne parviennent pas à satisfaire – situation paradoxale dans un pays où 23 % des jeunes de moins de 25 ans sont au chômage.

Malheureusement, la filière de l’apprentissage est méprisée par les familles, par les jeunes et, plus globalement, par le système. C’est pourtant une voie de réussite : plus de 70 % des apprentissages débouchent sur un emploi stable.

Nous ne pouvons que déplorer ce manque de considération. Non seulement l’apprentissage facilite l’insertion professionnelle de nos jeunes, mais il contribue aussi à permettre à chacun de trouver sa voie. Des jeunes qui ne trouvent pas leur équilibre dans le système scolaire s’épanouissent et réussissent grâce à l’apprentissage. Ce n’est donc pas un cursus de second rang, mais bien plus une grande voie de réussite en complément de l’éducation nationale, avec des passerelles entre les deux qu’il nous faut renforcer.

Aujourd’hui, le système de l’apprentissage doit s’adapter aux aspirations des jeunes et aux besoins des entreprises. Il est l’un des outils à même de remettre l’ascenseur social en marche.

Une fois dressé ce constat, je tiens à vous renouveler tout mon soutien dans cette réforme devant faciliter l’insertion professionnelle des jeunes, transformer notre économie et faire évoluer les mentalités.

Madame la ministre, dans le cadre des concertations collectives que vous avez initiées, comment construirez-vous un triptyque solide qui associera entreprises, CFA et régions, au service de ces jeunes en recherche d’emploi et de diplômes valorisants ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Monsieur le sénateur Martin Lévrier, je tiens tout d’abord à vous remercier de votre question. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Je sais l’attachement de très nombreux sénateurs, depuis fort longtemps, et notamment du président Larcher, à la question de l’apprentissage. Nous sommes tous concernés par ce sujet.

L’apprentissage est aujourd’hui une voie de réussite, mais il reste mal vu et décrié. C’est une voie de réussite, parce que 70 % des apprentis trouvent un emploi, la moitié d’entre eux dans l’entreprise qui les a embauchés.

Cette voie est aussi parsemée d’obstacles. Vous l’avez souligné, c’est une situation paradoxale dans un pays où 1,3 million de jeunes ne sont ni en emploi, ni à l’école, ni à l’université, ni en apprentissage. C’est un scandale, un gâchis humain, une perte d’opportunité économique et un risque pour notre cohésion sociale.

Oui, l’apprentissage a besoin d’être amplifié et transformé. C’est une cause qui nous concerne tous. C'est la raison pour laquelle, vendredi dernier, avec Jean-Michel Blanquer et Frédérique Vidal, en présence également de Sophie Cluzel – car les handicapés ne représentent que 1 % des apprentis en France – et de Laura Flessel, nous avons commencé la concertation avec les régions, avec les partenaires sociaux, avec les organismes consulaires, avec les CFA et avec les professionnels du secteur.

Nous ne pouvons nous contenter d’une petite réforme tant les obstacles sont nombreux : un jeune ne sait pas comment trouver l’entreprise, ou même le CFA, qui l’accueillera. Il ne sait pas non plus quels débouchés s’ouvrent à lui, ni s’il aura un diplôme ou s’il pourra poursuivre ses études jusqu’à devenir – ce qui est le cas – ingénieur.

Les entreprises doivent également se livrer à une véritable course d’obstacles. Sans me lancer dans une énumération, je rappellerai simplement qu’elles ne peuvent signer de contrats d’apprentissage que durant deux mois par an et qu’elles sont gênées par toute une série de règlements.

Oui, cette concertation, que j’ai confiée à Sylvie Brunet, présidente de la section travail et emploi du CESE, est à nos yeux très importante.

J’aurai l’honneur de vous présenter, au printemps prochain, un projet de loi intégrant cette dimension de la transformation de l’apprentissage. Il y va de l’avenir de notre jeunesse. Je vous remercie par avance de votre soutien. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste.)

politique de la ville (III)

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, j’étais à Tourcoing ce matin pour entendre le discours du Président de la République sur la politique de la ville : un discours de conviction et, je le pense, sincère.

Dans ce domaine si complexe, si sensible, il n’y a pas d’ancien monde ou de nouveau monde. Il s’agit seulement de créer les conditions d’un monde juste, sans quartier perdu pour la République.

Emmanuel Macron a rappelé, avec raison, qu’il faut casser le cercle vicieux de l’assignation de fait à résidence et, disons-le, des ghettos. Il a raison d’affirmer que ces quartiers ne doivent pas s’habituer à l’insécurité. Il a raison de dénoncer le poids grandissant, dans certains quartiers, d’un islam radical, sans angélisme ni amalgame.

En rappelant ces priorités, ces valeurs, Emmanuel Macron n’a pas remis en cause l’action des gouvernements précédents qui avaient établi une nouvelle géographie prioritaire, lancé avec succès l’ANRU 2, renforcé la loi SRU, créé les conseils citoyens, établi dans chaque contrat de ville un plan d’action contre la radicalisation, mis en œuvre la Garantie jeune, rétabli les moyens au secteur associatif que la droite avait largement amputés (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Parlons des budgets, monsieur Kanner !

M. Patrick Kanner. … et créé le testing contre les discriminations. Toutefois, monsieur le Premier ministre, où est la cohérence entre la création expérimentale des emplois francs et la baisse drastique des emplois aidés ? Où est la cohérence entre l’annonce de milliards supplémentaires pour l’ANRU et le garrot financier imposé aux bailleurs sociaux sans lesquels il n’y a pas de rénovation urbaine ?

M. Philippe Dallier. Ça, c’est vrai !

M. Patrick Kanner. Où est la cohérence entre le principe affiché d’une sanctuarisation des crédits de la politique de la ville et la suppression de 46 millions d’euros d’action en plein été 2017 ?

Monsieur le Premier ministre, il y a l’épreuve des mots, il y a aussi l’épreuve des faits. Oui à une mobilisation nationale, dans le respect des 5,5 millions d’habitants de ces 1 500 quartiers, mais surtout pas dans une logique comptable. Ces habitants n’ont pas à justifier de leur appartenance à la République française. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la cohésion des territoires.

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Monsieur Kanner, je ne ferai ni le panégyrique ni la critique de votre action en tant que ministre de la ville. Alors que nous venons de rendre hommage à Georges Clemenceau, je pense qu’il est plus que jamais nécessaire d’adopter une vision qui dépasse les critiques que nous échangeons d’ailleurs de manière très démocratique.

Vous avez raison de saluer les propos du Président de la République. Il a pris conscience, comme le Premier ministre (Tardivement ! sur des travées du groupe socialiste et républicain.),…

Non, pas tardivement : durant sa campagne électorale, il avait beaucoup insisté sur ces questions. Il a très clairement exprimé la volonté de l’État de mener une politique forte pour aller de l’avant et bâtir un plan de relance de la politique de la ville – je ne suis d’ailleurs pas convaincu que les termes « politique de la ville » soient les plus appropriés.

Nous présenterons ce plan de relance à la fin du mois de février prochain. Nous l’élaborerons en concertation, en coconstruction, tant avec les collectivités locales, qui sont en première ligne sur ces dossiers, qu’avec les associations et les conseils citoyens. Cette coconstruction est indispensable à la réussite de cet enjeu absolument fondamental.

Nous sommes tous confrontés, dans nos communes, dans nos départements, à ces difficultés. Vous avez rappelé, monsieur Kanner, que ce périmètre comptait plus de 1 500 quartiers prioritaires. J’ignore si le découpage est juste, mais nous ne reviendrons pas dessus.

Ce qui importe maintenant, c’est de prendre des mesures fortes, interministérielles, portées par l’ensemble du Gouvernement, avec le concours des collectivités et en concertation avec tous ceux qui ont compris et qui savent aujourd’hui qu’il s’agit d’un enjeu national. (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le jeudi 23 novembre 2017 et seront retransmises sur Public Sénat, France 3, sur le site internet du Sénat et sur Facebook.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante, sous la présidence de M. Jean-Marc Gabouty.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Marc Gabouty

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

6

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

M. le président. Mes chers collègues, j’ai le très grand plaisir, au nom du Sénat tout entier, de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d’une délégation de députés du Burkina Faso, conduite par M. Bindi Ouaba, président de la commission des affaires étrangères et des Burkinabès de l’étranger. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre de l'action et des comptes publics se lèvent et applaudissent.)

La délégation effectue actuellement un séjour d’étude en France sur le thème du rôle et du fonctionnement des groupes politiques parlementaires. Elle a rencontré notamment notre collègue Philippe Mouiller, sénateur des Deux-Sèvres, président délégué pour le Burkina Faso du groupe d’amitié France-Afrique de l’Ouest, et membre de la section française de l’Assemblée parlementaire de la francophonie. Notre collègue a représenté le président du Sénat aux Assises de la coopération décentralisée à Ouagadougou, début octobre dernier, où il a été reçu en audience par M. Bénéwendé Stanislas Sankara, premier vice-président de la représentation nationale.

Les relations entre nos deux assemblées sont anciennes et fructueuses, et nous sommes particulièrement sensibles à l’intérêt que la délégation porte à notre institution.

Au nom du Sénat de la République, je lui souhaite la plus cordiale bienvenue, et je forme des vœux pour que son séjour en France lui soit profitable et contribue à renforcer encore les liens qui unissent nos deux pays. (Applaudissements.)

7

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Autre (dans une discussion de texte de loi)

Financement de la sécurité sociale pour 2018

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2018 (projet n° 63, rapport n° 77 [tomes I à III], avis n° 68).

Je rappelle que la discussion générale a été close.

Rappel au règlement

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Article 1er

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour un rappel au règlement.

M. Dominique Watrin. Lors de chaque dépôt d’amendement sur un texte, comme ce fut le cas pour ce PLFSS, la commission des finances exerce un contrôle de la recevabilité des amendements sur le fondement de l’article 40 de la Constitution, aux termes duquel « les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique ».

Depuis la mise en place de la LOLF, en 2001, l’initiative parlementaire a été fortement limitée, d’autant plus que le Sénat a désormais pour pratique établie de refuser les demandes de rapport.

Nous ne comprenons pas l’irrecevabilité opposée à des amendements pourtant gagés par leurs auteurs sur le prix du tabac, sur les revenus des entreprises ou sur une cotisation additionnelle, par exemple. Ainsi, notre amendement ayant pour objet de décaler la prime à la naissance avant l’accouchement, comme c’était le cas avant 2015, a été refusé au motif qu’il induirait un coût de trésorerie entre les deux exercices comptables pour l’État. De même, notre amendement visant au remboursement de la procréation médicalement assistée pour tous les couples ou les femmes seules, financé par la hausse d’une contribution sur les entreprises du tabac, a également été déclaré irrecevable.

Nous éprouvons un véritable sentiment d’injustice. Nous ne comprenons pas cet aléa quant au sort réservé aux amendements. Il nous semble que le président de la commission des finances devrait, a minima, donner une motivation claire de chaque irrecevabilité.

Nous souhaiterions que le Sénat engage une réflexion plus générale sur le sujet afin de garantir les droits du Parlement et, de fait, l’équité entre groupes politiques. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Nous passons à la discussion des articles.

projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018,

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2016

Autre (dans une discussion de texte de loi)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Article 2 et annexe A

Article 1er

Au titre de l’exercice 2016, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

195,9

200,7

-4,7

Accidents du travail et maladies professionnelles

14,1

13,3

0,8

Vieillesse

228,8

227,2

1,6

Famille

48,6

49,6

-1,0

Toutes branches (hors transferts entre branches)

473,7

477,1

-3,4

Fonds de solidarité vieillesse

16,7

20,3

-3,6

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

470,5

477,5

-7,0

;

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

194,6

199,4

-4,8

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,6

11,8

0,8

Vieillesse

123,7

122,8

0,9

Famille

48,6

49,6

-1,0

Toutes branches (hors transferts entre branches)

366,6

370,7

-4,1

Fonds de solidarité vieillesse

16,7

20,3

-3,6

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

365,0

372,7

-7,8

;

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

16,7

20,3

-3,6

;

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 185,1 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;

7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 14,4 milliards d’euros.

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Article 3

Article 2 et annexe A

Article 2

Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi présentant un tableau, établi au 31 décembre 2016, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits, tels qu’ils sont constatés dans les tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2016 figurant à l’article 1er.

ANNEXE A

Rapport retraçant la situation patrimoniale, au 31 décembre 2016, des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents et la couverture des déficits constatés pour l’exercice 2016

I. - Situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2016

 

(En milliards d’euros)

Actif

2016 (net)

2015 (net)

Passif

2016

2015

Immobilisations

7,0

6,9

Capitaux propres

-101,4

-109,5

Immobilisations non financières

4,5

4,4

Dotations

25,9

27,4

Régime général

0,6

0,6

Prêts, dépôts de garantie

1,6

1,6

Autres régimes

5,4

4,9

Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

0,2

0,2

Avances / prêts accordés à des organismes de la sphère sociale

0,9

0,9

Fonds de réserve pour les retraites (FRR)

19,7

21,8

Réserves

16,5

14,3

Régime général

2,6

2,7

Autres régimes

6,9

6,1

FRR

7,0

5,5

Report à nouveau

-155,6

-158,8

Régime général

-1,3

-14,2

Autres régimes

-3,7

-4,2

FSV

-0,1

-0,1

CADES

-150,4

-140,3

Résultat de l’exercice

8,1

4,7

 

Régime général

-4,1

-6,8

Autres régimes

0,7

0,4

 

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

-3,6

-3,9

 

CADES

14,4

13,5

 

FRR

0,7

1,5

 

Écart d’estimation (réévaluation des actifs du FRR en valeur de marché)

3,7

2,9

 

Provisions pour risques et charges

15,8

15,8

Actif financier

55,1

60,8

Passif financier

173,1

181,6

Valeurs mobilières et titres de placement

46,8

50,1

Dettes représentées par un titre (obligations, billets de trésorerie, europapiers commerciaux)

161,2

165,2

Régime général

0

0

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)

20,4

27,4

Autres régimes

8,3

7,8

CADES

140,8

137,8

CADES

4

9,5

Dettes à l’égard d’établissements de crédits

5,2

10,6

FRR

34,5

32,8

ACOSS (prêts Caisse des dépôts et consignations)

0

4,0

Encours bancaire

7,6

10,3

Régime général (ordres de paiement en attente)

3,8

4,6

Régime général

1,1

1,6

Autres régimes

0,4

1,1

Autres régimes

2,9

2,1

CADES

1

1,0

FSV

0,9

0,0

Dépôts reçus

1,1

1,1

CADES

1,6

2,3

ACOSS

1,1

1,1

FRR

1,1

3,4

Créances nettes au titre des instruments financiers

0,7

0,4

Dettes nettes au titre des instruments financiers

0,5

0

CADES

0,3

0,2

ACOSS

0,5

0

FRR

0,4

0,2

Autres

5,2

4,6

Autres régimes

0

0

CADES

5,2

4,6

Actif circulant

80,2

75,0

Passif circulant

54,9

54,7

Créances de prestations

8,7

8,1

Dettes et charges à payer à l’égard des bénéficiaires

28,8

27,4

Créances de cotisations, contributions sociales et d’impôts de sécurité sociale

10,5

10,7

Dettes et charges à payer à l’égard des cotisants

2,0

2,6

Produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et autres impositions

40,9

38,7

Créances sur entités publiques et organismes de sécurité sociale

10,5

8,3

Dettes et charges à payer à l’égard d’entités publiques

8,8

10,5

Produits à recevoir de l’État

0,5

0,5

Autres actifs

9,1

8,8

Autres passifs

15,3

14,2

Total de l’actif

142,4

142,7

Total du passif

142,4

142,7

Sur le champ des régimes de base, du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), le passif net (ou « dette ») de la sécurité sociale, mesuré par ses capitaux propres négatifs, et qui recouvre pour l’essentiel le cumul des déficits passés restant à financer, s’élevait à 101,4 milliards d’euros au 31 décembre 2016, soit l’équivalent de 4,5 points de PIB.

Après une dégradation très marquée à la fin de la précédente décennie, en partie imputable à la crise économique, le passif net est en diminution depuis trois exercices. Cette inversion de tendance s’est confirmée et s’est amplifiée en 2016 (baisse de 7,9 milliards d’euros par rapport à 2015). Elle reflète la poursuite de la réduction des déficits des régimes de base et du FSV (7,0 milliards d’euros en 2016 contre 10,2 milliards d’euros en 2015, 12,8 milliards d’euros en 2014 et 16,0 milliards d’euros en 2013) dans un contexte de maintien d’un niveau élevé d’amortissement de la dette portée par la CADES (14,4 milliards d’euros en 2016 après 13,5 milliards d’euros en 2015).

Cette amélioration se traduit en particulier par un résultat consolidé positif sur le périmètre d’ensemble de la sécurité sociale retracé ci-dessus (8,1 milliards d’euros en 2016 contre 4,7 milliards d’euros en 2015).

Le financement du passif net de la sécurité sociale est assuré à titre principal par un recours à l’emprunt, essentiellement porté par la CADES et l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). L’endettement financier net de la sécurité sociale, qui correspond à la différence entre les dettes financières et les actifs financiers placés ou détenus en trésorerie, suit donc en premier lieu les mêmes tendances que le passif net auquel il est fait référence ci-dessus, en subissant secondairement les effets de la variation du besoin en fonds de roulement lié au financement des actifs et passifs circulants (créances et dettes) et des acquisitions d’actifs immobilisés, qui ont également un impact sur la trésorerie. Malgré l’augmentation du besoin en fonds de roulement à fin 2016, l’infléchissement de l’endettement financier amorcé en 2015 se confirme en 2016 (118,0 milliards d’euros contre 120,8 milliards d’euros en 2015).

 

Évolution du passif net, de l’endettement financier net et des résultats comptables consolidés de la sécurité sociale depuis 2009

(En milliards d’euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Passif net au 31/12 (capitaux propres négatifs)

-66,3

-87,1

-100,6

-107,2

-110,9

-110,7

-109,5

-101,4

Endettement financier net au 31/12

-76,3

-96,0

-111,2

-116,2

-118,0

-121,3

-120,8

-118,0

Résultat comptable consolidé de l’exercice

(régimes de base, FSV, CADES et FRR)

-19,6

-23,9

-10,7

-5,9

-1,6

1,4

4,7

8,1

II. – Couverture des déficits et affectation des excédents constatés sur l’exercice 2016

Le déficit du régime général s’est élevé à 4,1 milliards d’euros en 2016. Il est essentiellement constitué des résultats comptables des branches Maladie et Famille, qui ont respectivement enregistré des déficits de 4,8 milliards d’euros et d’1 milliard d’euros. Les branches Vieillesse et Accidents du travail et maladies professionnelles ont quant à elles dégagé des excédents respectivement de 0,9 et 0,8 milliard d’euros. Par ailleurs, le FSV a enregistré un déficit de 3,6 milliards d’euros.

Dans le cadre fixé par la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a organisé le transfert à la CADES, dès l’année 2011, des déficits 2011 des branches Maladie et Famille du régime général. Elle a également prévu la reprise progressive, à compter de 2012, des déficits des années 2011 à 2018 de la branche Vieillesse du régime général et du FSV, dans la double limite de 10 milliards d’euros chaque année et de 62 milliards d’euros au total. Conformément aux dispositions organiques, la CADES a été affectataire de ressources lui permettant de financer ces sommes.

Sans remettre en cause la priorité donnée à la reprise des déficits de la branche Vieillesse et du FSV, compte tenu des marges rendues disponibles par les différentes mesures prises en matière de redressement financier, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a prévu que les déficits des exercices 2012 à 2017 des branches Maladie et Famille pourraient être intégrés dans le champ de la reprise, sans modification des plafonds globaux de reprise ni de l’échéance d’amortissement de la dette transférée à la CADES.

L’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a modifié ce schéma et supprimé le plafond annuel de 10 milliards d’euros afin de tenir compte de conditions de financement à moyen et long termes particulièrement favorables. Il a ainsi ouvert la possibilité d’une saturation du plafond de 62 milliards d’euros dès 2016 et d’une reprise anticipée dont les modalités de mise en œuvre ont été précisées par le décret n° 2016-110 du 4 février 2016 et un arrêté du 14 septembre 2016.

Un montant total de 23,6 milliards d’euros a été repris en 2016, correspondant au transfert de la totalité des déficits de la branche Famille et de la branche Maladie au titre de 2013 et 2014 et de ceux de la branche Vieillesse et du FSV au titre de 2015, ainsi que d’une partie du déficit de la branche Maladie au titre de 2015. Le plafond de reprise par la CADES étant désormais saturé après les transferts intervenus en 2016, c’est désormais l’ACOSS qui porte en dette à court terme les déficits qui ne sont pas financés par la CADES.

Au titre de l’exercice 2016, le résultat cumulé des régimes de base autres que le régime général s’est élevé à 0,7 milliard d’euros. La plupart de ces régimes présentent par construction des résultats annuels équilibrés ou très proches de l’équilibre. Il en est ainsi des branches et régimes intégrés financièrement au régime général (ensemble des branches maladie des différents régimes de base depuis la mise en œuvre, en 2016, de la protection universelle maladie, branches vieillesse de base du régime des salariés agricoles depuis 1963 et du régime social des indépendants depuis 2015), des régimes de retraite équilibrés par des subventions de l’État (SNCF, RATP, régimes des mines et des marins) et des régimes d’employeurs (fonction publique de l’État, industries électriques et gazières), équilibrés par ces derniers. Concernant le régime des mines, les déficits passés cumulés de la branche Maladie ont par ailleurs été transférés à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) à hauteur de 0,7 milliard d’euros en application de la loi de financement de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Plusieurs régimes ne bénéficiant pas de tels mécanismes d’équilibrage ont néanmoins enregistré en 2016 des résultats déficitaires. S’agissant de la branche retraite du régime des exploitants agricoles, le déficit s’est élevé à 0,3 milliard d’euros en 2016, au même niveau qu’en 2015, portant le montant des déficits cumulés depuis 2011 (les déficits 2009 et 2010 ayant été repris par la CADES en 2011) à 3,5 milliards d’euros. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a prévu que ce déficit puisse être financé par des avances rémunérées de trésorerie octroyées par l’ACOSS, en complément des financements bancaires auxquels avait recours jusque-là la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) pour couvrir ces déficits cumulés. Au 31 décembre 2016, ces déficits ont été financés en totalité (3,5 milliards d’euros) par une avance de l’ACOSS.

Enfin, la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a dégagé, pour la troisième année consécutive, un excédent (0,3 milliard d’euros en 2016). Cet excédent a été affecté aux réserves du régime, portant celles-ci à 2,1 milliards d’euros.

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 2 et de l’annexe A.

(L'article 2 et l’annexe A sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

(La première partie du projet de loi est adoptée.)

DEUXIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2017

Article 2 et annexe A
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Article 4

Article 3

I. – La loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017 est ainsi modifiée :

1° L’article 57 est ainsi modifié :

a) Au I, le montant : « 400 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 250 millions d’euros » ;

b) Au IV, le montant : « 59,8 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 67,4 millions d’euros » ;

2° L’article 100 est ainsi modifié :

a) Au I, le montant : « 44,4 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 59,4 millions d’euros » ;

b) Au premier alinéa du II, le montant : « 70 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 30 millions d’euros ».

II. – Par dérogation au IV de l’article L. 862-4 du code de la sécurité sociale, en 2017, les recettes mentionnées à l’article L. 862-3 du même code sont réduites de 150 millions d’euros au profit de la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 dudit code.

M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. – Par dérogation au IV de l’article L. 862-4 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la présente loi, le produit de la taxe perçue au titre des contrats mentionnés aux trois premiers alinéas du II de l’article L. 862-4 du même code affecté au fonds mentionné à l’article L. 862-1 du même code est réduit de 150 millions d’euros en 2017 au profit de la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du même code.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3
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Article 4 bis (nouveau)

Article 4

I. – Le titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 241-3, la référence : « , L. 245-13-1 » est supprimée ;

2° L’article L. 245-13-1 est abrogé ;

3° à 6° (Supprimés)

II. – Au 6° du 1 de l’article 39 du code général des impôts, les mots : « les contributions additionnelle et supplémentaire mentionnées aux articles L. 245-13 et L. 245-13-1 » sont remplacés par les mots : « la contribution additionnelle mentionnée à l’article L. 245-13 ».

III. – Le second alinéa du III de l’article 112 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 est supprimé.

M. le président. L'amendement n° 443, présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

À la quatrième phrase du premier alinéa de l’article L. 651-3 du code de la sécurité sociale, les mots : « 19 millions » sont remplacés par le nombre : « 760 000 ».

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Les personnes morales de droit privé ou public ayant une activité dans le secteur concurrentiel sont soumises à une contribution sociale de solidarité des sociétés, dite C3S, lorsque le chiffre d’affaires dépasse 19 millions d’euros.

Depuis 2017, les très grandes entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard d’euros doivent s’acquitter en sus de la contribution additionnelle et de la contribution supplémentaire à la contribution sociale de solidarité des sociétés.

L’article 4 prévoit de supprimer cette contribution additionnelle et de rationaliser la C3S, ce qui entraînera une perte de recettes pour la sécurité sociale de 480 millions d’euros.

Pour notre part, il nous semble juste que les grandes entreprises participent au financement de la sécurité sociale à la mesure de leurs moyens. Cette nécessité est d’autant plus forte que le projet de loi de financement de la sécurité sociale acte l’adossement du RSI, le régime social des indépendants, au régime général. Vous connaissez comme moi les inquiétudes des indépendants, qui craignent à terme un alignement de leurs cotisations sociales sur celles du régime général. Il ne serait pas juste non plus de faire supporter les conséquences d’une telle mesure aux salariés. La solidarité doit donc d’abord s’exercer entre les entreprises, mais je reviendrai sur ce sujet au moment de l’examen de l’article 11.

Nous avions dénoncé, sous le quinquennat précédent, la suppression programmée de la C3S sur trois ans, qui rompait ce principe de solidarité, et nous n’avons pas changé d’avis.

Pour ces raisons, nous proposons, d’une part, une réécriture de l’article 4 visant à maintenir la contribution additionnelle pour les très grandes entreprises et, d’autre part, à remplacer le montant de 19 millions d’euros au-delà duquel les entreprises sont redevables de la C3S par celui de 760 000 euros, qui préexistait avant 2014.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à rétablir la C4S. C’est une mesure de cavalerie consistant, sans augmenter les recettes, à imputer sur l’année 2017 une partie des recettes de C3S de 2018.

Il s’agit de supprimer les abattements sur la C3S adoptés dans le cadre du pacte de responsabilité, ce qui alourdirait la fiscalité des entreprises de plus de 2 milliards d’euros.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 443.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4
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Article 5

Article 4 bis (nouveau)

Ne donnent pas lieu à compensation à la sécurité sociale :

1° Le crédit d’impôt prévu à l’article 231 A du code général des impôts, au titre de l’année 2017 ;

2° L’exonération de taxe sur les salaires prévue au I de l’article 231 bis Q du même code. – (Adopté.)

Article 4 bis (nouveau)
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Article 6

Article 5

Au titre de l’année 2017, sont rectifiés :

1° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

203,2

207,3

-4,1

Accidents du travail et maladies professionnelles

14,3

13,2

1,1

Vieillesse

232,2

231,1

1,5

Famille

49,9

49,6

0,3

Toutes branches (hors transferts entre branches)

486,3

487,6

-1,3

Fonds de solidarité vieillesse

16,0

19,7

-3,6

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

483,1

488,0

-4,9

;

2° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

201,9

206,0

-4,1

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,8

11,8

1,0

Vieillesse

126,2

124,9

1,3

Famille

49,9

49,6

0,3

Toutes branches (hors transferts entre branches)

377,8

379,4

-1,6

Fonds de solidarité vieillesse

16,0

19,7

-3,6

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

376,1

381,3

-5,2

;

3° Les prévisions de recettes, les prévisions de dépenses et le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

 

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

16,0

19,7

-3,6

;

4° L’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, qui est fixé à 14,8 milliards d’euros ;

5° Les prévisions des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, qui demeurent fixées conformément au III de l’article 41 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016 ;

6° Les prévisions de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, qui demeurent fixées conformément au IV du même article 41. – (Adopté.)

Article 5
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Article 7

Article 6

Au titre de l’année 2017, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs sont rectifiés ainsi qu’il suit :

(En milliards d’euros)

Sous-objectif

Objectif de dépenses

Dépenses de soins de ville

86,8

Dépenses relatives aux établissements de santé

79,0

Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées

9,0

Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées

10,9

Dépenses relatives au Fonds d’intervention régional

3,3

Autres prises en charge

1,6

Total

190,7

M. le président. L'amendement n° 230 rectifié, présenté par M. Pellevat, Mme Gruny, MM. Lefèvre, Longuet, D. Laurent et Cambon, Mme Di Folco, M. Paul, Mme Garriaud-Maylam, M. Kennel, Mme Deromedi, M. Mayet, Mme Micouleau, M. Mandelli, Mmes Duranton, F. Gerbaud et Lopez et MM. Le Gleut, Poniatowski, B. Fournier, Husson et Paccaud, est ainsi libellé :

Alinéa 2, tableau, seconde colonne

1° Deuxième ligne

Remplacer le montant :

86,8

par le montant :

86,7

2° Troisième ligne

Remplacer le montant :

79,0

par le montant :

79,1

La parole est à M. Cyril Pellevat.

M. Cyril Pellevat. Cet amendement est soutenu par les trois fédérations hospitalières, la FHP, la Fédération de l’hospitalisation privée, la FHF, la Fédération hospitalière de France, et la FEHAP, la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne.

La nouvelle convention médicale conclue en 2016 se traduit par des augmentations importantes des charges. Une telle évolution est en cohérence avec le virage ambulatoire annoncé, mais il reste à s’assurer que ces dépenses nouvelles auront des effets restructurants réels et réorganisateurs afin de limiter véritablement les hospitalisations évitables, en vue de ne pas se cantonner à de simples, mais très coûteux effets de revenus additionnels.

De ce point de vue, il manque encore un dispositif prudentiel sur la médecine de ville, à la hauteur de la surexécution de l’ONDAM 2016 et, très probablement, de l’ONDAM 2017, avec de forts risques de dépassements en 2018.

Telles sont les raisons pour lesquelles cet amendement vise à introduire un rééquilibrage de l’article 6 et, donc, de l’article 54, pour un partage plus équilibré de l’effort.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Comme le relèvent les auteurs de cet amendement, la régulation de l’ONDAM ne peut porter que sur les crédits des établissements de santé et médico-sociaux, car il n’existe pas de mécanisme de réserve prudentielle pour la ville.

C’est une question importante, mais elle ne pourra malheureusement pas se régler de manière immédiate, à la faveur d’un amendement, vous le comprendrez aisément, sur l’article visant à rectifier les prévisions d’exécution de l’ONDAM pour 2017.

La commission vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, mon cher collègue ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, vous proposez, par cet amendement, de transférer 100 millions d’euros de dépenses de l’ONDAM du sous-objectif « dépenses de soins de ville » vers le sous-objectif « dépenses relatives aux établissements de santé ». Or, compte tenu des dernières données disponibles, notamment sur l’évolution des dépenses de soins de ville, toute modification en la matière porterait atteinte à la sincérité du budget.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

(La deuxième partie du projet de loi est adoptée.)

TROISIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2018

Titre Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Chapitre Ier

Mesures relatives au pouvoir d’achat des actifs

Article 6
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Articles additionnels après l'article 7 (début)

Article 7

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° A (nouveau) Au dernier alinéa de l’article L. 131-7, la référence : « au second alinéa de l’article L. 242-11 » est remplacée par la référence : « à l’article. L. 613-1 » ;

1° Le premier alinéa de l’article L. 131-9 est supprimé ;

2° Au deuxième alinéa du III de l’article L. 136-7-1, les taux : « 9,5 % » et « 12 % » sont remplacés, respectivement, par les taux : « 11,2 % » et « 13,7 % » ;

3° L’article L. 136-8 est ainsi modifié :

a) Au 1° du I, le taux : « 7,5 % » est remplacé par le taux : « 9,2 % » ;

b) Au 2° du même I, le taux : « 8,2 % » est remplacé par le taux : « 9,9 % » ;

c) Au 3° du même I, le taux : « 6,9 % » est remplacé par le taux : « 8,6 % » ;

d) Au 2° du II, le taux : « 6,6 % » est remplacé par le taux : « 8,3 % » ;

e) Au a du 4° du IV, le taux : « 6,05 % » est remplacé par le taux : « 7,75 % » ;

f) Au b du même 4°, le taux : « 5,75 % » est remplacé par le taux : « 7,45 % » ;

g) Au e du même 4°, le taux : « 5,15 % » est remplacé par le taux : « 6,85 % » ;

h) À la fin du 1° du IV bis, le taux : « 7,6 % » est remplacé par le taux : « 9,3 % » ;

4° Au 5° du I de l’article L. 162-14-1, les références : « L. 242-11, L. 612-1 » sont remplacées par les références : « L. 613-1, L. 621-1, L. 621-2, L. 642-1 » ;

5° Au deuxième alinéa de l’article L. 172-3, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017, les mots : « moyens correspondant aux cotisations versées » sont remplacés par les mots : « soumis à cotisations au sens de l’article L. 242-1 perçus » ;

6° Après le mot : « les », la fin de la première phrase du 1° du II de l’article L. 241-2 est ainsi rédigée : « employeurs des professions agricoles et non agricoles ; »

6° bis (nouveau) À l’avant-dernier alinéa de l’article L. 242-1, la référence : « L. 242-11 » est remplacée par la référence : « L. 613-1 » ;

7° L’article L. 242-11 est abrogé ;

8° Au dernier alinéa du I de l’article L. 313-1, les mots : « cotisé sur la base d’un salaire au moins égal » sont remplacés par les mots : « perçu des rémunérations soumises à cotisations au sens de l’article L. 242-1 au moins égales » ;

9° À l’article L. 381-30-4, les mots : « et salariale » sont supprimés ;

10° Le 1° de l’article L. 382-22 est abrogé ;

10° bis (nouveau) À la fin de l’article L. 612-5, la référence : « L. 242-11 » est remplacée par la référence : « L. 613-1 » ;

11° À la section 1 du chapitre III du titre Ier du livre VI, dans sa rédaction résultant de l’article 11 de la présente loi, il est rétabli un article L. 613-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 613-1. – Le taux des cotisations d’allocations familiales des travailleurs indépendants dont les revenus d’activité sont inférieurs à un seuil fixé par décret fait l’objet d’une réduction dans la limite de 5,25 points, dans des conditions fixées par décret. Le bénéfice de cette réduction ne peut être cumulé avec aucun autre dispositif de réduction ou d’abattement applicable à ces cotisations, à l’exception de ceux prévus aux articles L. 131-6-4 et L. 621-3. » ;

12° Le chapitre Ier du titre II du livre VI, dans sa rédaction résultant de l’article 11 de la présente loi, est complété par un article L. 621-3 ainsi rétabli :

« Art. L. 621-3. – Le taux des cotisations mentionnées aux articles L. 621-1 et L. 621-2 dues par les travailleurs indépendants dont les revenus d’activité sont inférieurs à un seuil fixé par décret fait l’objet d’une réduction, dans la limite de 5 points, qui décroît à proportion de ces revenus, dans des conditions fixées par décret. Le bénéfice de cette réduction ne peut être cumulé avec aucun autre dispositif de réduction ou d’abattement applicable à ces cotisations, à l’exception de ceux prévus aux articles L. 131-6-4 et L. 613-1. » ;

13° (nouveau) À l’article L. 755-2-1, la référence : « L. 242-11 » est remplacée par la référence : « L. 613-1 ».

II. – Le livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Au second alinéa de l’article L. 731-25, la référence : « au dernier alinéa de l’article L. 242-11 » est remplacée par la référence : « à l’article L. 613-1 » ;

2° L’article L. 731-35 est ainsi modifié :

a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le taux de la cotisation due pour la couverture des risques mentionnés aux 1° et 3° de l’article L. 732-3 par le chef d’exploitation ou d’entreprise agricole exerçant son activité à titre exclusif ou principal fait l’objet d’une réduction dans les conditions prévues à l’article L. 621-3 du code de la sécurité sociale. » ;

b) Au second alinéa, après la référence : « L. 321-5 », sont ajoutés les mots : « du présent code » ;

3° À la fin du a du 1° du I de l’article L. 741-9, les mots : « et des assurés » sont supprimés.

II bis (nouveau). – A. – À l’article 11-1 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales, la référence : « L. 242-11 » est remplacée par la référence : « L. 613-1 ».

B. – Au IV de l’article 7 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d’ordre social, la référence : « L. 242-11 » est remplacée par la référence : « L. 613-1 ».

C. – Au second alinéa du II de l’article 5 de la loi n° 2007-294 du 5 mars 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur, la référence : « L. 242-11 » est remplacée par la référence : « L. 613-1 ».

III. – A. – Les I et II du présent article s’appliquent :

1° Pour les revenus d’activité, les revenus de remplacement et les sommes engagées ou produits réalisés à l’occasion des jeux, aux cotisations et contributions dues au titre des périodes intervenant à compter du 1er janvier 2018 ;

2° À compter de l’imposition des revenus de l’année 2017, en ce qu’ils concernent la contribution mentionnée à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, sous réserve du II de l’article 34 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 ;

3° Dans les conditions et sous les réserves définies par le présent III, aux faits générateurs intervenant à compter du 1er janvier 2018, en ce qu’ils concernent la contribution mentionnée à l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale.

B. – Au titre des faits générateurs intervenant à compter du 1er janvier 2018, pour les primes d’épargne mentionnées aux 1° et 2° bis du II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale et les produits définis au c du 3° et aux 4° à 8° du même II, nonobstant les articles 5 et 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 (n° 97-1164 du 19 décembre 1997), l’article 19 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, l’article 72 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, l’article 28 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, l’article 6 de la loi n° 2010-1657 du 9 décembre 2010 de finances pour 2011, l’article 10 de la loi n° 2011-1117 du 19 septembre 2011 de finances rectificative pour 2011, l’article 2 de la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 et l’article 3 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 :

1° L’assiette des contributions et prélèvements sociaux définis aux articles L. 136-7 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale, au 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles en ce qu’il renvoie à l’article L. 245-15 du code de la sécurité sociale, au 2° du I de l’article 1600-0 S du code général des impôts et à l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est celle définie au II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale ;

2° Les taux mentionnés au 2° du I de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, au I de l’article L. 245-16 du même code, au 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles, au III de l’article 1600-0 S du code général des impôts et à l’article 19 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 précitée s’appliquent à la totalité de l’assiette définie au II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale.

C. – Le B n’est pas applicable :

1° Aux produits des contrats d’assurance-vie mentionnés au c du 3° du II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, pour la fraction de ces produits attachés à des primes versées avant le 26 septembre 1997 acquis ou constatés au cours des huit premières années suivant la date d’ouverture du contrat, pour ceux de ces contrats souscrits entre le 1er janvier 1990 et le 25 septembre 1997 ;

2° Aux produits et primes de plans d’épargne populaire mentionnés au 4° du II du même article L. 136-7, pour la fraction acquise ou constatée au cours des huit premières années suivant la date ouverture du plan ;

3° À la fraction des gains de plans d’épargne en actions mentionnés au 5° du II dudit article L. 136-7, acquise ou constatée avant le 1er janvier 2018 et, pour ceux de ces plans détenus à cette date depuis moins de cinq ans, au cours des cinq premières années suivant leur date d’ouverture ;

4° Au revenu mentionné au 6° du II du même article L. 136-7, acquis ou constaté avant le 1er janvier 2018 et, le cas échéant, au cours des périodes d’indisponibilité mentionnées aux articles L. 3323-5 ou L. 3324-10 du code du travail lorsqu’il est attaché à des sommes résultant de répartitions de la réserve spéciale de participation intervenant avant le 1er janvier 2018 ;

5° Au revenu mentionné au 7° du II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, attaché à des sommes versées sur un plan d’épargne pour la retraite collectif, au sens du chapitre IV du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail, antérieurement au 1er janvier 2018 ;

6° Au revenu mentionné au 7° du II du même article L. 136-7, attaché à des sommes versées sur un plan d’épargne entreprise ou interentreprises, au sens des chapitres II et III du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail, antérieurement au 1er janvier 2018, pour la part de ce revenu acquise ou constatée avant cette date ou au cours des cinq premières années suivant ce versement lorsque celui-ci est intervenu entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017 ;

7° À la fraction des gains nets mentionnés au 8° du II dudit article L. 136-7, réalisés dans les conditions prévues aux 1 et 1 bis du III de l’article 150-0 A du code général des impôts, acquise ou constatée avant le 1er janvier 2018 ou, le cas échéant, au cours des cinq premières années suivant la date de souscription ou d’acquisition des titres lorsque ces titres ont été souscrits ou acquis entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017.

D. – Le b du 3° du I du présent article ne s’applique qu’aux produits acquis ou constatés à compter du 1er janvier 2018 pour ce qui concerne, le cas échéant, les produits mentionnés au C du présent III ainsi qu’aux a et b du 2° et au 9° du II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale.

E. – Le IV de l’article 8 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 est abrogé pour les faits générateurs intervenant à compter du 1er janvier 2018.

IV. – Pour l’année 2018, les contributions salariales prévues à l’article L. 5422-9 du code du travail sont prises en charge par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, dans la limite des contributions salariales dues, à hauteur de :

1° 1,45 point au titre des contributions dues au titre des périodes courant entre le 1er janvier et le 30 septembre ;

2° 2,40 points au titre des contributions dues au titre des périodes courant à compter du 1er octobre.

Cette prise en charge est intégrée dans le calcul de la contribution globale prévue à l’article L. 5422-24 du code du travail.

V. – Pour l’année 2018, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale assure la notification et le versement des produits correspondant au montant des contributions salariales mentionnées à l’article L. 5422-9 du code du travail dues au titre de ce même exercice à l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5427-1 du même code et recouvrées en application du premier alinéa de l’article L. 5422-16 dudit code, y compris pour les contributions qu’elle prend en charge en application du IV du présent article.

La prise en charge de la part exonérée des cotisations dues, et recouvrées en application des b et e de l’article L. 5427-1 du code du travail et par l’organisme mentionné à l’article L. 133-9 du code de la sécurité sociale, est centralisée, sur la base des informations transmises par les organismes chargés du recouvrement de ces contributions, par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui reverse les montants et notifie les produits correspondants à l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5422-9 du code du travail.

VI. – Par dérogation à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les dispositions du présent article ne donnent pas lieu à compensation intégrale par le budget de l’État.

VII. – Le b du 3° du I et le III du présent article sont applicables à Mayotte.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l'article.

Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, cet article met en œuvre, je veux le rappeler, l’une des mesures phares du programme présidentiel, annoncée de longue date et largement discutée tout au long de la campagne électorale.

Celle-ci vise à opérer un allégement sans précédent des prélèvements sur les revenus d’activité, financé par une augmentation de 1,7 point de la CSG.

Il s’agit d’une mesure globale de justice sociale, pour répartir plus équitablement le financement de la protection sociale, en sollicitant les revenus du travail, les retraites soumises au taux normal de CSG et les revenus du capital.

Certes, un effort de solidarité intergénérationnelle est demandé à 60 % des retraités. Néanmoins, cette hausse sera neutralisée pour 75 % d’entre eux, compte tenu de la suppression progressive de la taxe d’habitation, y compris pour une large partie de ceux qui vivent en maison de retraite ou en EHPAD, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Les pensionnaires des EHPAD privés non lucratifs en profiteront indirectement grâce au dégrèvement dont bénéficieront les établissements.

Aussi, avec la ferme volonté de soutenir cette mesure de justice sociale, le groupe La République En Marche votera contre les amendements tendant à remettre en cause l’équilibre de l’article 7.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, l’une des intentions affichées pour justifier le basculement des cotisations maladie et chômage sur la CSG est de donner du pouvoir d’achat aux salariés du secteur privé.

On pourrait fort bien se contenter, pour aller plus vite, de majorer quelque peu le SMIC et d’inviter les branches professionnelles à ouvrir un nouveau tour de table de négociations salariales. Toutefois, nous le savons, le Gouvernement s’y refuse. Il privilégie une fiction de hausse du pouvoir d’achat, que permettrait la disparition des 0,75 % restants de cotisation maladie après le premier basculement de 1998 et de la part « salarié » de la cotisation d’assurance chômage.

Le problème, c’est qu’il n’y a pas de hausse du pouvoir d’achat. En effet, les cotisations sociales sont un élément de la rémunération des salariés et le fait de les réduire revient donc à réduire la rémunération des salariés.

On appelle cela « alléger le coût du travail », au motif que les salaires sont, depuis quelques années, devenus plus un coût que la juste rémunération du travail accompli. Telle n’est pas notre conviction.

Mais la réduction est double, si l’on peut dire. En effet, le principe même de la sécurité sociale, que nous connaissons toutes et tous ici, je l’ai d’ailleurs rappelé au cours de la discussion générale, veut que le salarié et sa famille, face aux événements de la vie, ne restent pas sans ressources, qu’il s’agisse de la maladie, de l’éducation des enfants ou encore de l’interruption de l’activité.

Or qu’observe-t-on dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Un basculement de la cotisation maladie résiduelle, mais aussi un ONDAM contraint à la moitié de son évolution « naturelle », et ce pour les cinq années à venir, conformément à l’orientation de la loi de programmation des finances publiques.

S’agissant du chômage, que doit-on penser, au moment où la négociation en cours sur les régimes complémentaires de retraite du secteur privé risque de s’achever en retenant le principe de mise en cause du niveau des pensions ?

Je me permets de le rappeler ici, avant de revenir sur toute autre considération, le système actuel d’indemnisation est plutôt défaillant et le nombre de personnes privées d’emploi prises en charge par le régime de l’UNEDIC est plutôt minoritaire. Cela signifie que toute indemnisation éventuelle des chômeurs se fait dans un contexte de ressources déjà insuffisantes.

Nous sommes donc bien, avec l’article 7, en face d’un véritable miroir aux alouettes, simple promesse électorale qui ne change rien au problème posé par le partage de la valeur ajoutée entre travail et capital ni à celui de la répartition des gains de productivité.

Le salaire, direct ou non, individuel ou socialisé, n’est pas l’ennemi de l’emploi. La mesure que vous préconisez est non seulement injuste, mais aussi inefficace. Elle porte un coup très fort à notre système de protection sociale. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre.

M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l'article.

M. Maurice Antiste. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 acte le transfert des cotisations sociales vers la CSG. Ainsi, pour compenser la suppression en plusieurs étapes des cotisations salariales « maladie » et « chômage » dues par les salariés, le taux de CSG sera augmenté de 1,7 point pour tout le monde, qu’il s’agisse des actifs, des retraités ou des fonctionnaires.

Ce taux passera de 7,5 % à 9,2 % dès le 1er janvier 2018, avec suppression des cotisations sociales en deux fois. Le texte que nous examinons prévoit une baisse de 2,25 % des cotisations au 1er janvier prochain, puis la suppression du reliquat au 1er octobre.

Une telle mesure augmentera certes le SMIC de 132 euros par an en 2018, puis de 263 euros en 2019. Toutefois, elle impliquera également une hausse équivalente du revenu net imposable, avec des conséquences certaines sur les diverses prestations ou exonérations dont peuvent bénéficier certains salariés. Il en sera de même pour les auto-entrepreneurs et indépendants, dont le taux de CSG passera de 7,5 % à 9,2 %.

Concernant les retraités, le taux de CSG, actuellement fixé à 6,6 %, passera à 8,3 % dès le 1er janvier 2018, ce qui aura pour conséquence une baisse de leurs revenus. Celle-ci ne sera compensée ni par la suppression des cotisations sociales ni par la revalorisation de 0,8 % des retraites au 1er octobre. Je tiens, à ce titre, à rappeler que près de 80 % des retraités estiment que leur situation financière s’est déjà dégradée.

Enfin, les personnes dédommagées au titre de la prestation de compensation du handicap, la PCH, seront, pour leur part, lourdement impactées. Elles sont en effet assujetties à la CSG, mais ne paient pas de cotisations salariales. Ainsi cette mesure concernera-t-elle spécifiquement les aidants familiaux, qui verront ce prélèvement augmenter sans compensation, alors même que le dédommagement qu’ils perçoivent est déjà très faible : 75 % du SMIC horaire au maximum pour un nombre d’heures souvent très sous-évalué par rapport au temps réellement consacré à leurs proches. Le Conseil national consultatif des personnes handicapées s’est d’ailleurs publiquement inquiété de la situation dans un communiqué en date du 17 octobre dernier.

C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un certain nombre d’amendements sur cet article, afin d’y introduire plus d’équité et de justice sociale.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l'article.

M. Yves Daudigny. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 7 permet d’ouvrir la discussion sur trois sujets.

Lorsqu’elle fut créée par Michel Rocard en 1991, la CSG avait pour objet l’élargissement du périmètre de financement de la protection sociale. On pouvait alors parler de mesure de justice sociale, puisqu’il s’agissait de prendre en compte l’ensemble des revenus, et en particulier les revenus du patrimoine et du capital.

Lorsque la CSG se substitue à des cotisations sociales, comme ce fut le cas en 1997, cela a pour conséquence une augmentation des revenus des salariés du secteur privé, à condition bien sûr que l’augmentation de CSG soit inférieure à la diminution des cotisations.

Lorsque les revenus de remplacement ne sont pas compensés, l’augmentation de CSG induit des transferts entre les catégories de population. C’est le cas aujourd'hui, mais tel n’a pas été le cas en 1997, sous le gouvernement Jospin. À l’époque, l’augmentation de CSG des retraités avait été entièrement compensée.

Nous n’approuvons pas, je l’ai dit hier au cours de la discussion générale, ce transfert sur les retraités. Nous proposerons donc un amendement visant à supprimer une telle disposition.

Je souhaite, monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, profiter de votre présence pour vous poser une question.

Des commentateurs évoquent la différence entre les recettes entraînées par l’augmentation de la CSG dès le 1er janvier 2018 et les pertes de recettes dues à la diminution des cotisations. Cet écart est parfois évalué à 3 milliards ou 3,5 milliards d’euros. Pourriez-vous nous donner, monsieur le ministre, les chiffres précis concernant, d’une part, les recettes nouvelles de CSG et, d’autre part, les pertes de cotisations ? Pouvez-vous également nous dire quelle sera la destination des sommes résultant de l’écart entre les recettes et les pertes de recettes ?

M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, sur l'article.

M. Alain Joyandet. Monsieur le ministre, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dirai quelques mots sur cet article 7, au nom du groupe Les Républicains.

Tout d’abord, nous saluons le transfert vers d’autres sources d’une partie du financement de notre modèle social, qui reposait sur les revenus du travail, vers d’autres sources de financement. La CSG remplacera donc les cotisations sociales, ce qui nous paraît aller dans le bon sens. Bien sûr, nous aurions préféré que la TVA joue ce rôle. C’est un sujet qui fait l’objet d’un vieux débat. Nous avions d’ailleurs voté ensemble, monsieur le ministre, une telle mesure, au sein de la majorité de 2012. Hélas, ce fut un peu tardif ! La fameuse « TVA compétitivité » devait remplacer une partie des charges pesant sur le travail. Nous ne voyons que des avantages à ce dispositif, qui permet d’améliorer la compétitivité et de diminuer les charges. À l’époque, la mesure avait été présentée comme favorisant la compétitivité plus que le pouvoir d’achat, puisqu’il s’agissait surtout de réduire les charges patronales.

Toujours est-il que le groupe Les Républicains se félicite du transfert de financement que vous proposez aujourd'hui. Nous sommes preneurs de cette augmentation de la CSG, même si nous aurions préféré une augmentation de la TVA ! Notre groupe politique n’est d’ailleurs pas le seul à penser ainsi, nous le verrons au cours de l’examen des amendements.

Reste la question des retraités, pour lesquels l’augmentation de la CSG n’est pas compensée. Il s’agit de retraités tout de même modestes : pour une pension de 1 400 euros par mois, l’impact sera d’environ 300 euros par an. À ce sujet, j’ai déposé en commission des finances un amendement qui a été adopté et qui est en tout point identique à celui qui sera présenté par le rapporteur général. Il s’agit d’exonérer une tranche concernant près de huit millions de personnes, qui auraient cette somme à payer, sans qu’aucune compensation ne soit prévue.

Telle est la position du groupe Les Républicains, qui votera les amendements qui seront présentés par M. le rapporteur général, appuyé par le président de la commission.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, sur l'article.

M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 7 prévoit la suppression des cotisations sociales d’assurance maladie et d’assurance chômage, prélevées sur les salaires à hauteur de 3,5 % de la rémunération brute des salariés. Ainsi, pour un salarié au SMIC, le gain sera de 263 euros. Pour une personne rémunérée 2 000 euros nets, il s’élèvera à près de 500 euros.

Une mesure équivalente est prévue pour les travailleurs indépendants, avec des baisses de cotisations « famille » et l’accroissement de l’exonération des cotisations d’assurance maladie. Par ailleurs, pour les agents publics, la compensation est prévue.

Le financement est opéré par une hausse de la CSG sur les revenus d’activité et de remplacement, les revenus du patrimoine, les produits de placement, les produits des jeux et les pensions de retraite. Cette hausse ne concernera pas, cela vient d’être dit, les retraités de plus de 65 ans percevant moins de 1 400 euros par mois, ce qui exclut du champ de la mesure 40 % des retraités, ceux qui ont les revenus les plus faibles.

S’agissant de la suppression de la taxe d’habitation, le seuil d’exonération sera de 25 000 euros de revenus annuels pour une personne seule.

L’objet de cette mesure est donc bien de redistribuer 7 milliards d’euros aux actifs.

Certes, nous pensons que les retraités, comme les actifs, doivent participer au financement de la sécurité sociale. À nos yeux, la participation doit être intergénérationnelle. Je le rappelle, la dette de la France est de 2 200 milliards d’euros, et la sécurité sociale est en déficit.

Toutefois, une augmentation de 1,7 point de CSG nous paraît trop forte. Nous souhaitons, pour les retraités, la limiter à 1,2 point, ce qui diminuerait les recettes de la sécurité sociale de 1,2 milliard d’euros, contre 4,5 milliards si l’exonération était totale.

Nous souhaitons stopper les déficits, voir la sécurité sociale en excédent et la dette de la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, apurée en 2022 ou 2023. Pour autant, nous pensons que l’effort demandé aux retraités est un peu trop important. Selon nous, il est possible de trouver 1 milliard d’euros ; cela ne devrait pas mettre en difficulté le budget de la sécurité sociale. Nous défendrons donc un amendement en ce sens. (Mme Colette Mélot applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l'article.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis défavorable au basculement de ces deux cotisations vers la CSG, pour des raisons structurelles de principe et aussi pour des raisons liées au budget qui nous est proposé.

En ce qui concerne le principe, j’estime que le financement de la protection sociale mérite une clarification. Autant on peut considérer que la santé et la question des allocations familiales s’apparentent à un droit universel garanti à toutes et tous, autant il me paraît dangereux pour l’avenir de notre protection sociale d’accepter que la retraite, comme l’indemnisation du chômage, change de nature, en devenant une aide et en perdant son statut d’assurance collective et de « salaire différé », comme l’appellent certains.

Il s’agit d’un vieux débat, qui court depuis la Libération. Il n’est pas sans conséquence sur la manière de traiter les problèmes. En effet, une aide finit toujours par être conditionnée : à chaque débat budgétaire, Bercy trouve mille raisons pour expliquer qu’il faut soit la réduire soit la cibler. On finit alors avec des allocations chômage ou des retraites qui fondent comme neige au soleil, tuant ainsi une forme de solidarité nationale.

Selon moi, la mesure proposée est dangereuse pour l’avenir, notamment le basculement des cotisations chômage.

C’est d’autant plus vrai que le basculement s’opère vers un impôt ou, en tout cas, un prélèvement injuste, la CSG n’étant pas un impôt progressif. Pour ma part, j’ai toujours plaidé en faveur d’une convergence entre CSG et impôt sur le revenu, afin de former un grand impôt structurant dans la fiscalité française. Qui plus est, la part provenant du capital au sein de la CSG représente environ 10 % de la recette.

Par ailleurs, une telle évolution intervient – le contexte est important – à un moment où le capital sera très fortement exonéré d’une contribution aux efforts et aux besoins de la nation. Je pense à la diminution de l’impôt de solidarité sur la fortune et au mécanisme de la flat tax.

C’est bien beau d’en appeler à la solidarité entre les retraités, fussent-ils les plus aisés, et les jeunes générations, mais on tue complètement le débat sur la solidarité nécessaire entre le capital et le travail. De ce point de vue, il existe une disproportion me paraissant tout à fait révélatrice d’un certain nombre de choix que je ne partage pas. Je ne crois pas que, dans ce pays, il y ait à ce point besoin d’alléger toute contribution du capital. Dans ce cadre, faire de la CSG, qui n’est pas une contribution progressive, un outil de redistribution paraît compliqué. C’est donc un mauvais transfert qui nous est proposé. (Mme Nelly Tocqueville et Mme Laurence Cohen applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.

M. Roland Courteau. Avec cet article, il y a quelque chose de vraiment nouveau, qu’aucun gouvernement n’avait osé faire : baisser le pouvoir d’achat des uns pour améliorer celui des autres. On est là dans l’inédit, l’original et, même, le « révolutionnaire » !

La CSG d’un retraité doit-elle augmenter pour financer les allocations chômage auxquelles ce dernier n’aura jamais droit ? Partant de cette nouvelle conception de la cohésion sociale, ira-t-on demain jusqu’à appliquer l’augmentation de la CSG aux allocations chômage ou aux indemnités journalières ?

Mais il y a autre chose d’entièrement nouveau, inédit et original, que les retraités ont été « heureux » d’apprendre : avec une pension de retraite mensuelle de 1 198 euros, on se situe dans la catégorie très enviée des retraités dits « aisés ». C’est toujours bon à savoir…

Bref, voilà un projet de loi de financement de la sécurité sociale dur aux faibles, avec l’augmentation de la CSG, tandis que le projet de loi de finances semble, au contraire, faible envers les nantis, avec la combinaison de la flat tax et de l’allégement de l’ISF. Ainsi chacune des 100 plus grandes fortunes françaises devrait-elle bénéficier en moyenne d’un cadeau fiscal de l’ordre de 1,5 million d’euros.

Tout cela est injuste, anachronique et contre-productif. Nous sommes là, convenons-en, dans l’entièrement nouveau. Le FMI, qui n’est pas un repaire de gauchistes, s’est d’ailleurs permis de rappeler que, pour favoriser l’économie, mieux vaut prendre aux riches pour donner aux pauvres, plutôt que l’inverse ! Je tenais à le souligner en m’exprimant sur l’article 7. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l’article 7 étant un article très important du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je répondrai peut-être un peu longuement aux orateurs, afin de pouvoir apporter des réponses plus rapides sur les différents amendements, qu’ils aient été déposés par la majorité ou l’opposition parlementaire, même s’ils concernent de nombreuses professions.

De quoi s’agit-il ? Certes, nous avons été éclairés par les débats qui se sont déroulés à l’Assemblée nationale s’agissant de l’augmentation de 1,7 point de la CSG et de la suppression des cotisations sociales.

Il faut retenir deux seuils, qui doivent être complétés par les dispositions contenues dans le projet de loi de finances. Notre vie institutionnelle est organisée ainsi, et c’est dommage. D’ailleurs, le Gouvernement, par mon intermédiaire, a formulé des propositions en faveur de la modernisation du débat parlementaire. Nous examinons en effet le volet « recettes » du projet de loi de finances et le volet « recettes » du projet de loi de financement de la sécurité sociale à deux moments différents, ce qui nuit peut-être au contrôle du Gouvernement par les parlementaires et à la présentation politique des choix gouvernementaux devant l’opinion publique.

En attendant la réforme institutionnelle qui nous permettrait de passer plus de temps sur le projet de loi de règlement et un peu moins sur le projet de budget et qui organisera une discussion plus approfondie des volets communs des recettes et des crédits budgétaires ou du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous sommes bien obligés de différencier projet de loi de financement de la sécurité sociale et projet de loi de finances. Quoi qu’il en soit, je vous demande de bien vouloir considérer, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous parlons aujourd'hui à la fois de la taxe d’habitation, de l’augmentation de la CSG et de la suppression des cotisations sociales.

Il existe deux seuils. À partir de 65 ans, l’augmentation de la CSG s’appliquera aux retraités contribuables touchant 1 394 euros mensuels. Avant 65 ans, ce seuil est fixé à 1 289 euros, considérant l’abattement qui existe à 65 ans.

Si les revenus d’une personne seule retraitée sont inférieurs à 1 394 euros par mois, il n’y a pas d’augmentation de la CSG. J’ajoute que le Gouvernement a prévu pour le minimum vieillesse une augmentation de 100 euros par mois.

Je suis tout à fait d’accord avec les orateurs qui l’ont souligné, avec 1 394 euros mensuels, un retraité n’est pas riche. Mais je fais tout de même remarquer que les petites retraites, que nous observons dans nos territoires – je pense notamment au territoire dont je suis l’élu, qui compte nombre de retraités de l’industrie et de l’agriculture –, s’élèvent à 600, 700 ou 800 euros. Il existe outre-mer, dans les territoires agricoles notamment, des personnes dont les retraites sont de l’ordre de 250 à 300 euros.

Certains retraités touchent des pensions très basses, en dessous du seuil de pauvreté. Or, à leur intention – c’est la première des choses qu’il faut souligner ! –, le Gouvernement met en œuvre une augmentation sans précédent du minimum vieillesse.

Pour ceux dont les pensions se situent entre le minimum vieillesse et 1 394 euros, la fiscalité au titre de la CSG reste inchangée ; pour ceux qui touchent plus de 1 394 euros, ils bénéficieront dès l’année prochaine de la neutralité de l’augmentation du taux de CSG, grâce à la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des Français. Nous le verrons lors de la discussion du projet de loi de finances, jusqu’à 2 500 euros nets de revenus pour une personne seule – je prends les cas les plus simples pour que chacun ici puisse comprendre – est prévue une diminution d’un tiers de la taxe d’habitation, dès 2018. Ces réformes fiscales seront donc neutres pour les contribuables.

Quand nous parlons d’augmentation de la fiscalité pour les retraités – nous nous apprêtons à discuter ensemble de ce point pendant quelques soirées –, nous visons les personnes qui touchent plus de 2 500 euros nets par personne.

Le débat est ouvert : faut-il ou non mettre à contribution ces personnes dont les revenus sont supérieurs à 2 500 euros nets ?

Par cette mesure, le Gouvernement met en œuvre non seulement la promesse du Président de la République, mais aussi celle de la majorité élue à l’Assemblée nationale. La nature exacte du projet du Gouvernement pour les personnes touchant plus de 2 500 euros nets avait été, ici ou là, très largement développée au cours de la campagne électorale, et nous assumons la solidarité intergénérationnelle.

Je répondrai aux arguments très divers qui ont été avancés sur l’article, notamment à la question que M. le sénateur Daudigny a posée concernant le montant des recettes fiscales et des recettes de cotisations.

Tout d’abord, permettez-moi de le dire au sénateur Joyandet, avec toute l’amitié et l’estime que je lui porte, je n’étais pas parlementaire en 2012 ; je n’ai donc pas pu voter la TVA sociale. J’aurais bien voulu être plus jeune encore sur les bancs de l’Assemblée nationale ; je sais que vous me prêtez beaucoup de vertus, monsieur le ministre, mais je n’ai pas été jusque-là ! (Sourires.)

Je souligne avec lui – il a eu l’honnêteté de le dire ! – que la TVA sociale est en fait une « TVA emploi » – c’est un débat économique intéressant –, qui consiste à augmenter le taux de TVA d’un ou deux points en contrepartie d’une suppression partielle des charges patronales. Ce débat sur la TVA sociale, « TVA emploi » ou « TVA compétitivité » traverse le pays depuis au moins dix ans ; cette mesure a été mise en place à la fin du quinquennat du président Sarkozy, avant d’être annulée au début du quinquennat de M. Hollande. Depuis, les temps ont quelque peu changé.

Qu’est-ce qui a changé ?

En premier lieu, notre différentiel de fiscalité avec l’Allemagne, notre premier partenaire commercial, a changé. Lorsque François Fillon et Nicolas Sarkozy ont mis en place la TVA sociale, à la fin du quinquennat, les taux de TVA respectifs de l’Allemagne et de la France n’étaient pas ceux que nous connaissons actuellement. Je vous rappelle que, sous le gouvernement précédent, la TVA a augmenté. La différence s’est donc creusée avec nos partenaires allemands.

En second lieu, monsieur Joyandet, même dans le projet présidentiel de François Fillon, il n’était plus question de supprimer en nombre des cotisations sociales salariales : il s’agissait, là encore, de diminuer des charges patronales.

Attardons-nous-y quelques instants. Permettez-moi de vous expliquer la politique économique du Gouvernement sur ces sujets.

Nous suivons trois axes, les deux premiers dès cette année, dans le cadre des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale, le troisième, je l’espère, personnellement, l’année prochaine.

Premier axe : « zéro charge » pour les entreprises qui embauchent des salariés payés jusqu’à 1,4 SMIC. La suppression des charges patronales souhaitée par les tenants de la TVA sociale au sens où vous la défendez, monsieur le ministre, existe dans le projet de loi de finances. Nous allons voter ce que beaucoup attendaient depuis très longtemps, à savoir la transformation du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, en allégement général de charges, notamment pour les plus bas salaires – nous savons que c’est le principal problème d’embauche en France. La baisse massive de charges – on ne peut pas faire plus que « zéro charge » à partir du 1er janvier 2019, vous en conviendrez avec moi ! (Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.) – est prévue dans le projet de loi de finances pour 2018.

Deuxième axe : nous avons le souci d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés, de ceux qui travaillent – ce n’était pas ce que vous défendiez, et je reconnais là votre honnêteté, monsieur Joyandet. Le principe qui nous guide est assez simple : le travail doit payer, et mieux payer ! (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Marie-Noëlle Lienemann proteste également.)

Une personne seule payée au SMIC, soit 1 152 euros nets par mois, ayant élevé ses enfants, n’a malheureusement pas les moyens de faire vivre sa famille correctement. Il faut donc augmenter les salaires et le pouvoir d’achat.

Comment faire ? En baissant la fiscalité des ménages. C’est ce que nous faisons : 10 milliards d’euros de baisse de fiscalité au titre de la réforme de la taxe d’habitation, laquelle touche des familles extrêmement modestes, vous le savez– à partir de 11 000 euros nets de revenu fiscal environ, on paie la taxe d’habitation dans notre pays. Cette mesure, c’est autant de pouvoir d’achat, très concrètement, pour nos concitoyens.

Parallèlement, nous faisons en sorte – et les premières prémices sont positives – que la vie économique soit dans une dynamique de croissance, avec une augmentation des salaires par les entreprises. C’est tout l’intérêt des ordonnances Travail et de la libération des énergies impulsée par le Président de la République et le Premier ministre.

Enfin, la suppression des cotisations sociales de 3,15 % que nous évoquons se traduira par une augmentation nette du pouvoir d’achat pour l’ensemble des salariés de France, quel que soit leur revenu.

L’augmentation de CSG que nous proposons est évidemment assez différente de l’augmentation de la TVA.

Monsieur le ministre, l’augmentation de la TVA aurait touché tout le monde ! « Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés », dit le poète. L’augmentation de 2 points de TVA figurait dans le projet de François Fillon – certains candidats à la primaire proposaient de ne pas augmenter la TVA, ou de ne l’augmenter que d’un point. Cette hausse, qui devait s’assortir d’une suppression de charges patronales, aurait concerné tous les Français, quel que soit leur âge, y compris, d’ailleurs, ceux qui sont au minimum vieillesse.

À l’argument selon lequel il serait terrible d’augmenter le taux de CSG de 1,7 point pour les retraités, je réponds que cette augmentation concerne ceux dont les pensions sont supérieures ou égales à 2 500 euros nets, certes ; mais que l’augmentation de la TVA, elle, aurait touché tout le monde : ceux qui perçoivent 4 000 euros nets, ceux qui perçoivent 2 500 euros nets, 1 800 euros nets, 700 euros nets !

Et arguer, comme je l’ai entendu à l’Assemblée nationale, que les produits de première nécessité seraient exemptés reviendrait à imaginer que les plus pauvres de nos concitoyens n’achètent que des produits de première nécessité, qu’il ne leur arrive pas d’acheter des véhicules, de partir en congé, d’avoir une vie comme tout le monde !

L’augmentation de la TVA est donc une mesure qui aurait touché tous les Français ; c’eût été une augmentation généralisée de la fiscalité.

À l’intention de ceux qui n’auraient pas été tout à fait convaincus par cet argument de bon sens, je prends quelques cas pratiques.

Imaginons un contribuable gagnant 2 501 euros nets – essayons d’être le plus sincère possible– , concerné, donc, par l’augmentation de CSG sans compensation par l’allégement de la taxe d’habitation – nous verrons, lors du débat sur la taxe d’habitation, qu’un lissage est prévu, mais caricaturons, pour que chacun comprenne. L’augmentation de 1,7 point de la CSG représente 510 euros de contribution fiscale supplémentaire à la solidarité nationale. L’augmentation de 2 points du taux de TVA, c’est 516 euros. L’impact en termes d’augmentation de la fiscalité est donc sensiblement le même, si l’on compare ce que vous proposez, monsieur le ministre, et ce que nous proposons.

Considérons ensuite le cas d’un retraité dont la pension s’élève à 900 euros nets par mois. Il ne bénéficie pas de l’augmentation du minimum vieillesse – encore une fois, soyons très sincères, laissons de côté les effets d’aubaine –, mais ses impôts n’augmentent pas, puisque la hausse de la CSG commence à 1 400 euros nets de revenus par mois. Il serait en revanche affecté par l’augmentation de 2 points de la TVA que vous proposez, monsieur le ministre. Si nous appliquions le projet législatif qui se dessine au travers de vos amendements, il connaîtrait donc une augmentation de 150 euros de sa contribution fiscale. Notre réforme, elle, est pour lui fiscalement neutre s’il est retraité ; et même, s’il travaille, il bénéficie d’un gain de pouvoir d’achat.

L’augmentation de la TVA est un débat qui peut être intéressant. D’une part, la TVA sociale n’en est pas vraiment une, puisqu’elle touche les charges patronales, mesure comblée par la transformation du CICE en baisse de charges. D’autre part, elle est, par définition, antisociale, par opposition à la nouvelle politique de solidarité que nous promouvons – je reviendrai plus tard sur la question très intéressante du modèle social et de son financement.

Troisième axe – vous ne l’avez pas évoqué, monsieur le ministre, mais c’est un tout – : nous proposons une mesure qui ne figure plus dans le projet de la droite républicaine, et je l’ai personnellement regretté, y compris pendant le débat présidentiel ; vous avez arrêté de défendre les heures supplémentaires défiscalisées !

Mme Annie Guillemot. Arrêtez de parler à la droite ! Parlez aussi à la gauche !

M. Gérald Darmanin, ministre. Cette mesure n’était pas dans le projet présidentiel. J’ai même entendu, lors de la campagne présidentielle, le candidat de la droite représentant les Républicains expliquer qu’il ne pouvait la défendre, au motif qu’il était par ailleurs favorable à la fin du temps de travail, et qu’il serait contradictoire d’appuyer sur le frein en même temps que sur l’accélérateur.

Dans le projet de loi de programmation des finances publiques que le Président de la République et le Premier ministre vous ont proposé la semaine dernière par ma voix, on y trouve la défiscalisation et, même plus, la « décotisation », si j’ose dire, des heures supplémentaires.

Pour toutes ces raisons, monsieur Joyandet, si votre argumentation se tient, elle date, je le crains, de dix ans !

M. Alain Joyandet. C’est un peu vachard, monsieur le ministre !

M. Gérald Darmanin, ministre. Ce n’est pas une attaque personnelle !

M. Alain Joyandet. Quand même !

M. Gérald Darmanin, ministre. Mais non, je ne me le permettrais pas, cher Alain Joyandet !

M. Alain Joyandet. Il y a dix ans, vous étiez avec nous, cher monsieur le ministre !

M. Gérald Darmanin, ministre. Il y a dix ans, …

M. Alain Joyandet. Dans les cabinets ministériels !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous étiez encore à l’école ! (Sourires.)

M. Pierre Ouzoulias. Ne vous inquiétez pas, il est encore des vôtres !

M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur le ministre Joyandet, vous me prêtez bien des cheveux blancs : il y a dix ans, je n’étais pas dans les cabinets ministériels. Et j’ai toujours défendu, y compris lors de la primaire, comme vous, un candidat qui ne proposait pas d’augmentation de TVA. Je me rappelle d’ailleurs bien des meetings où il disait qu’une telle proposition était antisociale. Mais nous avons le droit, vous comme moi, de changer d’avis ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Je souhaite maintenant évoquer une question soulevée à gauche de l’hémicycle, et qui s’entend : comment concevons-nous le mode de financement de la protection sociale ?

Comme il l’avait annoncé de façon extrêmement claire durant sa campagne électorale, le Président de la République propose – je veux dire à M. le sénateur Courteau qui a dit que tout cela était « révolutionnaire » que la mesure proposée participe à la fois de l’originalité et de la transformation – de substituer un système universel à une société qui fonctionne, et qui a jusqu’à présent bien fonctionné, par des cotisations et des statuts.

Il n’y a aucun secret dans la transformation de la protection sociale que nous vous présentons ! Et cette transformation ne signifie pas un seul instant que la sécurité sociale, ou même le dialogue social qui se noue autour d’elle, serait oubliée. D’ailleurs, avec Mme la ministre de la santé et des solidarités, nous avons présenté le projet de loi de financement de la sécurité sociale à la Commission des comptes de la sécurité sociale : nous discutons avec les caisses et, évidemment, avec les partenaires sociaux.

Nous disons donc que la protection sociale doit être assurée par un financement universel et non plus par un système par statuts. Eh oui, ce gouvernement, via la suppression de cotisations, procède à une augmentation de pouvoir d’achat et oblige l’ensemble des acteurs concernés à repenser notre modèle social, pour le bien-être de nos concitoyens.

M. le sénateur Daudigny me pose la question de l’avantage en termes de recettes fiscales dont résulterait le mécanisme proposé par le Gouvernement. Les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale obéissent à des motifs de finances publiques, mais répondent en même temps à la volonté d’inscrire la suppression de la taxe d’habitation dans la loi dès cet automne : ils respectent notre trajectoire budgétaire, tout en permettant la mise en place des réformes voulues par le Gouvernement.

Pour le dire vite, monsieur le sénateur, les Français, notamment ceux qui travaillent, ceux qui sont salariés, vont connaître une baisse de deux tiers de leurs cotisations et une augmentation d’un tiers de leur pouvoir d’achat. La mesure se fait en deux temps : en octobre, ils bénéficieront du dernier tiers de cotisation à supprimer et des deux tiers d’augmentation du pouvoir d’achat.

Au total, un salarié payé au SMIC bénéficiera l’année prochaine d’une augmentation de pouvoir d’achat de 150 euros, qui deviendront, en année pleine, soit dès 2019, environ 250 euros.

Monsieur le sénateur, si je comprends votre argument, vous dites qu’une partie des recettes fiscales tirées de la hausse de la CSG ne sont pas répercutées. D’abord, en année pleine, le mécanisme que nous proposons ne donne lieu à aucun gain, si vous me permettez cette expression ; votre question ne se pose que pour l’année prochaine. Le montant du gain est d’un peu plus de 3 milliards d’euros, ce qui correspond exactement, vous le remarquerez, monsieur le sénateur, au montant de la baisse fiscale inscrit dans le projet de loi de finances au titre de la diminution de la taxe d’habitation. (M. Yves Daudigny approuve.) Nous avons fait le choix de compenser ainsi, à coups de 3 milliards d’euros par an dans la chronique jusqu’en 2020, la baisse de la taxe d’habitation pour 80 % des Français, qui représente à peu près 9 à 10 milliards d’euros. Avec la baisse de la fiscalité en termes de cotisations, la baisse de la taxe d’habitation et la hausse de la CSG, cela correspond à 3 milliards.

Le débat qui consiste à dire que nous augmentons la fiscalité pour les plus pauvres et pas pour les plus riches est totalement injuste. Nous augmentons la fiscalité pour les contribuables dont les revenus sont supérieurs à 2 500 euros nets par mois, et donc pas, par définition, pour ceux qui se situent en dessous de ce seuil. En outre, la CSG a aussi l’avantage de toucher le capital.

M. Gérald Darmanin, ministre. Mme la ministre Lienemann a souligné que d’autres mesures fiscales, en la matière, sont à prendre en considération. Mais la CSG présente l’énorme avantage de ne pas être prélevée sur les seuls revenus d’activité, mais d’être assise, par définition, sur l’ensemble des revenus, conformément à l’esprit dans lequel Michel Rocard avait souhaité sa création.

D’ailleurs – on pourrait avoir ce débat assez longuement dans l’hémicycle, même si certains peuvent combattre le principe même de la CSG –, si je peux comprendre que le côté droit de l’hémicycle défende la TVA – le débat sur le caractère juste ou non de la TVA, par comparaison avec d’autres impôts, est très intéressant –, j’ai plus de mal à comprendre – nous avons eu ce débat très longuement à l’Assemblée nationale – pourquoi le côté gauche en viendrait à remettre en cause un impôt qui est, par nature, redistributif, et a d’ailleurs été inventé par les sociaux-démocrates, et imaginé par Michel Rocard.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous défendons une CSG progressive, cela ne vous aura pas échappé !

M. Gérald Darmanin, ministre. Je sais combien cette vérité peut être embêtante : elle convie chacun à la cohérence.

Surtout, si l’on met de côté les propositions de dépenses nouvelles – ce n’est pas très original ! –, et à l’exception de la proposition défendue par M. Joyandet, je n’ai pas entendu d’alternative à notre modèle.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous allons y venir !

Mme Laurence Cohen. L’article 40 nous en empêche !

M. Gérald Darmanin, ministre. En tout cas, ce que propose le Gouvernement a le mérite de la cohérence et du changement. Et ce n’est pas un petit article que l’article 7 !

Mme Laurence Cohen. C’est certain !

M. Gérald Darmanin, ministre. Vous avez raison, il s’agit bel et bien d’un article de transformation. Le rapporteur général du budget n’est pas parmi nous ce soir, mais M. Joyandet représente la commission des finances ; il a évoqué les nécessaires réformes de structure et de transformation de notre modèle. Eh bien, après quelques mois seulement, le Gouvernement propose une telle réforme !

Pour terminer, je veux dire qu’il est extrêmement important que nous liions, dans nos débats, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale avec le projet de loi de finances. Je répondrai plus particulièrement, au fil de la discussion, aux représentants de la nation qui se sont intéressés, via divers amendements, à différents statuts, corps de métier, domaines spécifiques. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 444 est présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L'amendement n° 522 est présenté par M. Ravier.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 444.

M. Dominique Watrin. Nous demandons la suppression de l’article 7, qui prévoit l’augmentation de la CSG de 1,7 point. Je rappelle que la CSG est la deuxième recette fiscale de l’État derrière la TVA.

Contrairement à ce que dit le Gouvernement, nous ne pensons pas qu’il s’agisse d’une mesure favorable au pouvoir d’achat, bien au contraire. D’ailleurs, si tel était le cas, il aurait mieux valu, tout simplement, augmenter le SMIC, dégeler le point d’indice des fonctionnaires et revaloriser les pensions des retraités, par exemple. Monsieur le ministre, vous qui êtes pour la simplification, vous devriez être d’accord !

La hausse de la CSG ne sera pas compensée du tout pour 2,5 millions de retraités modestes. Vous avez rappelé les seuils d’imposition, je ne les répéterai pas ici. Pour notre part, nous ne considérons pas que les retraités dont les pensions sont de l’ordre de 1 300 ou 1 400 euros seraient des « riches » – vous non plus, vous l’avez dit –, ni même qu’ils feraient partie d’une mythique classe moyenne qu’il faudrait toujours taxer.

Il est d’ailleurs scandaleux d’opposer ici des retraités qui gagnent 800 euros, voire moins, à des retraités qui en gagnent 1 300. J’habite moi aussi les Hauts-de-France, et j’estime que ce procédé est tout à fait irrespectueux.

Ce qu’il importe de dire, c’est que les vrais riches…

M. François Patriat. C’est toujours les autres !

M. Dominique Watrin. … sont les 500 plus grandes fortunes de France, qui ont gagné 600 milliards d’euros en 2016, et auxquelles vous accordez encore 3 milliards d’euros de cadeaux, avec la suppression de l’ISF, sans parler du milliard et demi accordé via la diminution des prélèvements sociaux et fiscaux sur les dividendes au titre du prélèvement forfaitaire unique – mais nous y reviendrons.

Enfin, nous refusons cet article en ce qu’il prévoit la suppression des cotisations en général et met ainsi à mal notre système de sécurité sociale, fondé sur le principe suivant lequel « chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ».

Non, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas vous dire du côté de je ne sais quelle « révolution » ! Vous travaillez ici à la remise en cause d’un système de solidarité, la sécurité sociale, conquis de haute lutte par les travailleurs.

D’ailleurs, je précise à votre intention la différence entre cotisation et impôt : la première ouvre des droits – des droits à des prestations définies et des droits des travailleurs à participer à la cogestion de cette part prise sur les profits des entreprises. Et c’est, me semble-t-il, ce qui vous dérange ! Tel est le sens de votre politique.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour présenter l'amendement n° 522.

M. Stéphane Ravier. Comme d’habitude depuis des décennies, on exige toujours plus d’efforts de la part des mêmes personnes, cette France qui travaille, se lève tôt, met un point d’honneur à gagner honnêtement sa vie et a pour objectif, pour luxe, diraient certains, d’acquérir un bien immobilier, pour mettre ainsi sa famille à l’abri des accidents de la vie, des accidents sociaux et économiques, et transmettre ce bien à ses enfants.

Avec cette hausse de 22 % de la CSG pour les retraités, vous vous attaquez à ceux qui se sont levés tôt, ont travaillé toute leur vie et, pour certains, l’ont mise en danger, en combattant pour notre pays, pour son drapeau, pour ses libertés.

Qui sont ces retraités, monsieur le ministre ? Une catégorie de Français bien modestes, en réalité, qui ne fait que bénéficier du fruit d’une vie de labeur. Cette génération est aujourd’hui votre cible, en particulier celles et ceux qui touchent 1 300 ou 1 400 euros par mois.

Votre mesure vise un gain de pouvoir d’achat pour les actifs ; son efficacité est d’ores et déjà remise en cause par les travaux de notre commission. On alourdit une fois de plus l’imposition sur les revenus. Monsieur le ministre, vous allez toujours plus loin dans la fiscalité confiscatoire : cette mesure est insupportable pour des millions de retraités, inacceptable pour nous.

Je ne résiste pas, enfin, monsieur le ministre, à rappeler le retournement de point de vue, pour ne pas dire de veste, de notre ministre de l’économie, M. Le Maire. Il préconisait hier – souvenez-vous, ce n’est pas si vieux ! –, dans son programme présidentiel, une baisse d’ampleur de la CSG dès le début du quinquennat pour les revenus du travail et les pensions de retraite, mais également pour les fruits de l’épargne.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il a trouvé son chemin de Damas !

M. Stéphane Ravier. Il indiquait en outre qu’elle bénéficierait à tous les Français. « Cette baisse importante est un gage de confiance dans le succès à venir des grandes réformes annoncées », précisait-il. Faut-il en rire ou en pleurer ? Les retraités, eux, ne souriront pas ; ils pleureront. Mais on sait depuis Edgar Faure que c’est non pas la girouette qui tourne, mais le vent. (Mme Claudine Kauffmann applaudit.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis de la commission est défavorable, car ces deux amendements identiques sont en totale contradiction avec la position de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. D’abord, le Gouvernement est défavorable aux deux amendements identiques.

Je veux dire à M. le sénateur du groupe CRCE que je comprends son argumentation, sans la partager, au nom du Gouvernement. Le débat que vous soulevez est intéressant ; il y va d’un débat de société qui, me semble-t-il, a été tranché, si ce n’est par l’élection présidentielle, du moins par l’élection législative.

M. Dominique Watrin. Cela ne nous empêche pas, ici, de faire de la politique !

M. Gérald Darmanin, ministre. Je l’entends bien et c’est pourquoi je vous réponds, monsieur le sénateur : je respecte tout à fait vos arguments et votre vision de la société ; simplement, le Gouvernement en a choisi d’autres.

Monsieur Ravier, votre candidate à l’élection présidentielle a fait toute sa campagne sur la sortie de l’euro, avant de se rétracter au lendemain de sa défaite ; je vous retourne donc à bon droit l’argument de la réversibilité des vestes. Je ne sais si la vôtre est de fabrication française, mais réversible, elle l’est !

M. Gérald Darmanin, ministre. Par ailleurs, j’ai du mal à comprendre votre argument, car vous vous contredisez du début à la fin !

Vous commencez par nous opposer que nous taxerions, comme toujours, ceux qui se lèvent tôt le matin et vous finissez par souligner que certains ont pu mettre de côté de l’argent pour acquérir un bien immobilier – c’est tout à fait leur droit. Il me semble quand même que le programme économique du Front national – vous le défendez encore, j’imagine – ne comportait aucune suppression des impôts sur l’immobilier, Mme Le Pen étant elle-même absolument opposée à toute suppression, y compris de l’ISF. Mais mettons cela de côté.

C’est précisément ce que nous proposons, monsieur Ravier. Nous disons que la politique menée jusqu’à présent ne donne malheureusement pas à ceux qui travaillent, aux jeunes qui commencent à 1 152 euros nets par mois, les moyens, le pouvoir d’achat que vous évoquez. Nous devons donc tout faire, sur divers pans de la politique publique – c’est le cas avec les ordonnances Travail, les heures supplémentaires, la suppression des cotisations –, pour mettre en œuvre une augmentation du pouvoir d’achat.

Le débat a déjà eu lieu tout à l’heure, avec l’un de vos collègues : vous faites semblant de rester bloqué sur 1 400 euros de revenus, alors que le seuil d’augmentation de la fiscalité, seuil assumé – le Gouvernement ne se cache pas derrière son petit doigt –, est fixé à 2 500 euros nets par personne.

Le PLF sera voté dans la foulée du PLFSS, et les mesures qui y sont proposées entreront en vigueur au 1er janvier de la même année. Jusqu’à 2 500 euros nets par personne, je le répète, il n’y a pas d’augmentation de fiscalité ! Oui, au-dessus de ce seuil, pour les retraités, la fiscalité augmente.

Une telle augmentation est assumée par le Gouvernement, au nom de la solidarité intergénérationnelle. Vous avez tout à fait le droit de combattre cette idée, et on peut entendre qu’elle soit combattue. Toutefois, la démocratie, pour qu’elle soit respectueuse, exige au moins que l’on argumente sur les vrais chiffres présentés par le Gouvernement dans ses projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale.

Avis défavorable sur ces deux amendements identiques, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Pourquoi ce système est-il injuste ? J’ai entendu la réponse de M. le ministre. Il nous explique que le Gouvernement va financer l’allégement de la taxe d’habitation par l’augmentation de la CSG. Des collègues affirment que la CSG est trop élevée. On peut quand même s’interroger.

Le système fiscal que vous êtes en train de mettre en place est un imbroglio dans lequel on constate une interférence entre ce qui relève du financement de la protection sociale – en la matière, on peut avoir des désaccords, c’est tout à fait normal – et le reste de la fiscalité, notamment la taxe d’habitation. Tout est mélangé. Ce système me semble dangereux dans la durée. Pourquoi ?

Comme la base est injuste – la CSG, les retraités, les actifs, etc. –, on fait ce qu’on appelle des niches fiscales, c’est-à-dire des exemptions : compensation pour les fonctionnaires, plafonnement pour les retraités de moins de 2 500 euros. Mais, avec le temps, cela ne tiendra pas. Les fondamentaux de ce système étant injustes, celui-ci s’effritera : on nous expliquera que les ressources viennent à manquer, et on diminuera les prestations.

M. François Bonhomme. Cela s’appelle du bricolage !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Telle est la dynamique enclenchée !

Ce système me semble d’autant plus dangereux que l’on pouvait attendre autre chose du Président de la République, qui prétend porter – je dirais plutôt : qui veut porter – une vision d’avenir structurante pour un nouveau monde.

Mais on ne construit pas l’avenir de la protection sociale en partant d’un tel cafouillage fiscal. Derrière ce cafouillage, en réalité, se font des choix très injustes.

J’ai parlé du capital, mais parlons des salariés et des retraités.

Un salarié gagnant 5 000 euros par mois percevra 600 ou 700 euros supplémentaires, mais, de son côté, comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, un retraité dont la pension s’élève à 2 500 euros, qui touche donc moins que le salarié, devra payer davantage, au nom de la solidarité intergénérationnelle. Vous l’avez répété, un retraité de plus de soixante-cinq percevant une pension de plus de 2 500 euros cotisera. Or le salarié qui touchera 5 000 euros par mois aura 500 ou 600 euros en plus, car c’est un pourcentage. On peut parler du SMIC, c’est un vrai sujet. Mais les salaires élevés, eux, seront favorisés par rapport aux retraités ayant des ressources comparables.

Tout cela est globalement injuste et scabreux du point de vue de la durabilité du dispositif.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je ne voterai évidemment pas ces deux amendements identiques de suppression de l’article 7. J’accepte que nous continuions de discuter de la CSG et de la façon dont nous pourrions l’adapter dans le cadre du PLFSS.

Je voudrais revenir sur deux points.

Premièrement, comme l’a dit fort justement M. Watrin, nous arrivons, monsieur le ministre, à la suppression assurantielle du régime chômage. C’est clair.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Deuxièmement, vous avez dit, avec beaucoup d’éloquence, au début et à la fin de votre intervention, deux choses importantes, dont je souhaite qu’elles n’échappent pas à l’ensemble de mes collègues.

Vous avez clairement affirmé, d’une part, que vous souhaitiez, avec ce gouvernement, mettre en place un régime fiscal pour assurer le financement de l’assurance maladie, de la branche famille et des différentes branches de la sécurité sociale. Vous avez tout aussi clairement affirmé, d’autre part, que vous souhaitiez que les recettes soient considérées dans le cadre d’une discussion globale regroupant PLF et PLFSS, si du moins ce dernier continue d’exister dans quelques années. Cela me conduit à m’interroger.

J’en ai parlé lors de la discussion générale, je ne souhaite pas que la distinction entre ce qui relève du budget de l’État, donc du financement de la solidarité, et ce qui relève de la cotisation, donc de la logique assurantielle du PLFSS, disparaisse au profit d’un budget global contrôlé uniquement par Bercy. (Mme Marie-Noëlle Lienemann manifeste son approbation.)

Un tel dispositif serait, me semble-t-il, extrêmement dangereux pour la santé, la famille, la branche AT-MP et les retraites. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Je suis très fier d’être à la tête d’une administration qui a le sens de l’État, à l’instar de Mme la ministre des solidarités et de la santé. Et je ne crois pas qu’il y ait, d’un côté, les monstres et, de l’autre, les gentils !

Madame Lienemann, on peut, certes, distinguer dans l’hémicycle ce qui relève du projet de loi de financement de la sécurité sociale et ce qui relève du projet de loi de finances ou ce qui relève de la cotisation et ce qui relève de l’impôt. Mais, pour les Français, tout cela sort de la même poche ; c’est le même budget ! Et c’est le même travail qui est fiscalisé.

On peut débattre à l’infini. Mais je crois que le fossé entre le peuple et ses représentants – nous en faisons tous partie, d’une manière ou d’une autre – tient aussi à l’incompréhension ou à l’incohérence des politiques publiques qui ont été menées. Sous le quinquennat précédent, un gouvernement a, me semble-t-il, payé cher le fait que son projet de loi de financement de la sécurité sociale et son projet de loi de finances, certes peut-être conformes aux engagements du candidat François Hollande, aient eu pour conséquence d’augmenter fortement la fiscalité de nos concitoyens. Et pourtant, certains, après avoir entendu les applaudissements des uns et les oppositions des autres, se sont étonnés que les Français doivent payer de la même poche…

Veillons donc à ce que nos débats techniques n’occultent pas la réalité de la situation de nos concitoyens. Ceux qui gagnent 1 200 euros nets par mois se demandent comment ils vont boucler leur fin de mois. Ils ont besoin d’un système de santé protecteur, d’une politique familiale encourageante et d’une fiscalité qui ne soit pas confiscatoire.

Madame Lienemann, vous affirmez que la CSG est un impôt injuste. Mais si nous augmentions la TVA, qui est la première recette de l’État, vous diriez aussi que c’est un impôt injuste !

Mme Laurence Cohen. Oui, car c’est un impôt injuste !

M. Gérald Darmanin, ministre. Et qu’en est-il de l’impôt sur le revenu ? J’imagine que beaucoup d’entre vous estiment aussi qu’il est injuste !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il l’est quand même moins !

M. Gérald Darmanin, ministre. Idem pour la taxe d’habitation, qui – c’est d’ailleurs l’argument du Gouvernement – est un impôt injuste à la fois pour les collectivités locales et pour les particuliers ! De même, la taxe foncière, dont les valeurs locatives n’ont pas été revues depuis les années soixante-dix, est aussi un impôt injuste.

J’aimerais donc que vous m’indiquiez ce qu’est un impôt juste. Et je regrette d’ailleurs que vous ne l’ayez pas mis en place lorsque vous étiez aux responsabilités…

M. Gérald Darmanin, ministre. Par définition, l’impôt est normal ; c’est une contribution tout à fait nécessaire à la puissance publique et à l’intérêt général.

N’entrons donc pas dans un débat sur l’impôt injuste. D’ailleurs, j’estime – peut-être suis-je minoritaire, y compris au sein de ma propre sensibilité politique – que la CSG est probablement l’un des impôts les moins injustes.

On peut raisonner, comme vous le faites, à partir de cas extrêmes, en opposant celui qui gagne 20 000 euros par mois au retraité qui perçoit 2 500 euros par mois.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. J’ai parlé de 5 000 euros !

M. Gérald Darmanin, ministre. Mais je pense que vous êtes vous-même trop honnête pour être convaincue par de tels arguments, madame la ministre Lienemann.

Il est certain que le Gouvernement n’a pas caché un seul instant son souhait de transformer fondamentalement le mode de financement de la sécurité sociale et de la politique familiale, ainsi que la fiscalité de nos concitoyens. Cela n’a jamais été caché ! Si le Président de la République de la République a été élu, ce n’est pas pour poursuivre une politique qui a, certes, permis de grandes avancées par le passé, mais qui n’est plus adaptée aujourd'hui, car le monde a changé.

J’ai répondu tout à l’heure à la question portant sur la différence de ressources avec la plus grande honnêteté. Ne laissez pas à penser que c’est la CSG qui financera la réforme de la taxe d’habitation ! Je le rappelle, la baisse de la taxe d’habitation, c’est 10 milliards d’euros sur trois ans. Le ressaut de CSG, lui, s’effectuera en deux étapes, au nom de la responsabilité dans la gestion des finances publiques. La semaine dernière, dans un autre débat, tous les groupes politiques nous exhortaient à faire preuve de responsabilité par rapport à l’objectif de baisse des déficits ; on n’en faisait pas assez. Je constate que ce souci de responsabilité varie beaucoup selon les débats… Dont acte.

Pour des raisons à la fois de sérieux dans la gestion des finances publiques et de justice fiscale, nous avons fait le choix de baisser la taxe d’habitation la première année, tout en ayant, dans le même temps, le ressaut de CSG, soit 3 milliards d’euros. Mais il n’y a aucun lien de cause à effet entre les deux.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cette année, si !

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est l’argumentation que j’ai avancée à M. Daudigny, mais elle vaut pour une année. À partir de 2019, la baisse de 3 milliards d’euros de la dépense publique, je l’espère, nous permettra de réduire d’autant la fiscalité. Idem pour les années suivantes.

Évitez donc les raisonnements consistant à démontrer que Socrate est un chat ou que « Si A=B et B=C, alors A=C ». Car Molière vous répondrait : « Voilà justement ce qui fait que votre fille est muette. »

Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est quand même vrai cette année !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Tourenne. J’ai écouté avec beaucoup de patience – il en fallait ! – les explications qui ont été apportées.

On nous affirme que la baisse des cotisations sociales représentera un gain de pouvoir d'achat pour un grand nombre de nos concitoyens. Mais c’est oublier un peu vite que l’augmentation de la CSG s’accompagne d’une diminution des cotisations sociales, d’une réduction de la prestation d’accueil du jeune enfant, la PAJE, d’une non-revalorisation des retraites l’an prochain – ce sera une année blanche – ou d’une majoration du forfait hospitalier… Autant d’éléments qui vont sérieusement amputer le gain de pouvoir d'achat que l’on nous annonce.

Par ailleurs, la nouvelle CSG ou l’augmentation de CSG ne servira pas seulement à financer les dépenses sociales. Le supplément ira au budget de l’État. En effet, de bonne mémoire, la hausse de 1,7 point de CSG devrait rapporter 23 milliards d’euros supplémentaires, tandis que les exonérations de cotisations sociales seront, à la louche, de 14 milliards d’euros. Cela fait donc un boni de 9 milliards d’euros pour l’État. Il ne s’agit donc pas que du pouvoir d'achat des salariés ; la décision est aussi motivée par des préoccupations liées au budget de l’État.

Vous nous indiquez que cela servira à financer l’exonération de la taxe d’habitation. Autrement dit, ce sont ceux qui ne bénéficieront pas d’une compensation ; je pense aux 8 millions de retraités – car ce sont eux les perdants de vos mesures –, qui vont financer la suppression d’une partie de la taxe d’habitation. C’est tout de même à la limite de l’indécence !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 444 et 522.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 15 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 265
Pour l’adoption 16
Contre 249

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 168 rectifié bis est présenté par MM. Mouiller et de Legge, Mmes Deseyne et Dumas, MM. B. Fournier et Frassa, Mmes Gruny et Imbert, M. Karoutchi, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre, Morisset, Paccaud, Panunzi, Paul, Pellevat, Savary et Vial, Mme Deromedi, MM. Kennel, Gilles, Chatillon, Revet, Mayet, Kern, Courtial et Médevielle, Mme Billon, MM. Brisson, Darnaud, Genest et Mandelli, Mmes Keller et Lavarde, MM. Longeot et Daubresse, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Raison, Perrin, L. Hervé, Longuet et Husson et Mmes Lopez et Canayer.

L'amendement n° 412 rectifié est présenté par M. Antiste, Mme G. Jourda, M. Iacovelli, Mmes Jasmin, Féret et Ghali, M. Todeschini, Mmes Lepage et Lienemann, MM. Leconte et Devinaz, Mmes Monier, Espagnac et Conconne, M. Fichet, Mme Blondin et MM. Daudigny et Temal.

L'amendement n° 447 rectifié bis est présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 7

Après le taux :

9,9 %

insérer les mots :

, à l’exception des personnes dédommagées en vertu de l’article L. 114-1-1 du code de l’action sociale et des familles,

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Mouiller, pour présenter l’amendement n° 168 rectifié bis.

M. Philippe Mouiller. Alors que la hausse de la CSG est compensée pour les salariés, les personnes dédommagées au titre de la prestation de compensation du handicap, la PCH, seront impactées par l’augmentation du taux de 1,7 point. En effet, contrairement aux salariés, ces personnes sont assujetties à la CSG, mais ne paient pas de cotisations salariales.

Une telle mesure va spécifiquement toucher les aidants familiaux, qui vont voir ce prélèvement augmenter sans compensation, alors même que le dédommagement qu’ils touchent est déjà très faible : rappelons-le, cela représente 75 % du SMIC horaire au maximum, et pour un nombre d’heures souvent très sous-évalué par rapport au temps qu’ils consacrent réellement à leurs proches. Alors qu’ils ne peuvent toucher qu’au maximum 1 143 euros par mois pour un aidant parent isolé, ils souffriront d’une perte de pouvoir d’achat supérieure à celle d’un retraité touchant moins de 1 394 euros nets par mois. Le Conseil national consultatif des personnes handicapées s’est d’ailleurs très justement publiquement inquiété de la perte de pouvoir d’achat pour ces familles comptant un aidant.

La CSG acquittée par ces personnes passera ainsi de 8,2 % à 9,9 %, ce qui est le taux le plus élevé et le taux applicable aux revenus du patrimoine. Après prélèvement de la CSG, le montant attribué pour une heure d’aide à un proche percevant la PCH va ainsi passer – notez bien le chiffre ! – de 3,42 euros à 3,36 euros.

Pour des raisons d’équité, il est proposé que les personnes dédommagées au titre de la PCH soient exclues de la hausse de la CSG.

Plus généralement, il serait fondamental, madame la ministre, de revoir de manière très pragmatique la place et le statut des aidants familiaux, notamment s’agissant de l’accompagnement et de l’évolution des parcours des personnes handicapées.

M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l'amendement n° 412 rectifié.

M. Maurice Antiste. Alors que la hausse de la CSG est compensée pour les salariés, les personnes dédommagées au titre de la prestation de compensation du handicap seront lourdement impactées par l’augmentation du taux de 1,7 point. En effet, contrairement aux salariés, ces personnes sont assujetties à la CSG, mais ne paient pas de cotisations salariales.

Mon amendement étant rigoureusement identique à celui qui vient d’être présenté par notre collègue Philippe Mouiller, je ne reprendrai pas l’ensemble des arguments. Simplement, pour des raisons d’équité et de justice sociale, il est proposé que les personnes dédommagées au titre de la PCH soient exclues de la hausse de la CSG. Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l'amendement n° 447 rectifié bis.

M. Dominique Watrin. La prestation de compensation du handicap, qui permet aux personnes en situation de handicap et à leur famille de compenser, imparfaitement, la perte de revenu de l’aidant, sera, elle aussi, victime de la hausse de la CSG.

Pourtant, comme cela a été souligné, si cette hausse est compensée pour les salariés, les personnes dédommagées au titre de la PCH seront lourdement impactées par l’augmentation du taux de 1,7 point, et ce sans contrepartie. En effet, contrairement aux salariés, ces personnes ne paient pas de cotisations salariales.

Une telle mesure est d’autant plus injuste qu’elle frappera des personnes déjà en fragilité économique : 75 % du SMIC horaire au maximum lorsqu’elles ont dû arrêter de travailler ou réduire leur temps de travail, et pour un nombre d’heures souvent très sous-évalué par rapport au temps qu’elles consacrent réellement à leurs proches.

Le Conseil national consultatif des personnes handicapées s’est d’ailleurs publiquement inquiété, dans un communiqué en date du 17 octobre, de la « nette perte de pouvoir d’achat pour ces familles » comptant un aidant.

La CSG acquittée par ces personnes va ainsi passer de 8,2 % à 9,9 %, ce qui est le taux le plus élevé et le taux applicable aux revenus du patrimoine. Après prélèvement de la CSG, le montant attribué pour une heure d’aide à un proche percevant la PCH va ainsi passer de 3,42 euros à 3,36 euros, pour un maximum de 1 152 euros par mois pour un aidant parent isolé.

D’ailleurs, et je tiens à le souligner, tout cela est contradictoire avec l’esprit même de la loi, qui a créé un dédommagement maximum correspondant à un SMIC net. C’est cela qui est remis en cause.

À l’inverse, pour des raisons d’équité et de justice sociale, nous proposons que les personnes dédommagées au titre de la PCH soient exclues de la hausse de la CSG.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cela peut paraître paradoxal, mais la PCH est un revenu du patrimoine.

M. Gérald Darmanin, ministre. Exactement !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ses bénéficiaires supporteront donc une augmentation de 1,7 point de la CSG sans compensation par des baisses d’autres prélèvements.

Si votre commission partage l’objectif des auteurs de ces amendements, il ne lui semble ni possible ni souhaitable d’inscrire une telle dérogation dans le texte, en raison du risque d’inconstitutionnalité que cela comporte.

Le Gouvernement s’est engagé devant l’Assemblée nationale à apporter une solution à une réelle difficulté. Cela pourrait prendre la forme d’une modification de la nature de la PCH ou de l’augmentation de son montant.

Grâce au débat sur ces amendements identiques, le Gouvernement aura, je n’en doute pas, l’occasion de préciser ses intentions.

Pour l’instant, l’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Avec Mme la ministre des solidarités et de la santé, nous avons effectivement souhaité donner, monsieur le rapporteur général, un signe fort d’ouverture. Les auteurs de ces amendements identiques ont raison de souligner que l’application du texte tel qu’il est prévu créerait une injustice.

Mais M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales a également tout à fait raison de rappeler que, pour des raisons qui nous échappent quelque peu – en tout cas, elles m’échappent –, la PCH est un revenu du patrimoine, et non un revenu d’activité qui aurait un taux de CSG comparable.

Par souci d’ouverture envers les auteurs de ces amendements identiques, je peux suggérer le retrait de ces amendements dans l’attente de la nouvelle lecture, afin que nous puissions transformer la PCH en revenu d’activité ; vous pourrez le vérifier.

Aujourd'hui, la mesure envisagée par les auteurs de ces amendements identiques coûte 30 millions d’euros, alors que le coût serait ramené à 5 millions d’euros si la PCH était transformée en revenu d’activité. De plus, le dispositif serait aussi plus efficace pour les publics concernés, puisque ceux-ci bénéficieraient alors d’un abattement.

Mais le Sénat peut tout aussi bien adopter ces amendements identiques. D’ailleurs, afin de montrer l’intérêt et l’engagement du Gouvernement sur ce dossier, si ces amendements n’étaient pas retirés, j’émettrais alors un avis de sagesse. Sachez simplement que, dans ce cas, nous reviendrons sur le sujet en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, afin de transformer la PCH en revenu d’activité. Cela répondra, je le crois, aux objectifs qui sont les vôtres, tout en étant moins coûteux pour les finances publiques. (Murmures.)

Face à la foule qui s’esbaudit, j’émettrai un avis de sagesse… Mais que chacun en soit informé, en seconde lecture, les choses seront un peu modifiées si Mme la ministre en est d’accord !

M. le président. Dans ces conditions, le gage est-il levé, monsieur le ministre ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Peut-être chacun pourrait-il faire un pas… Qui sait si, forts de la confiance que leur inspire le Gouvernement, les auteurs de ces amendements n’accepteront pas de les retirer ?… (Sourires.)

Mme Laurence Cohen. Non ! Nous, nous maintenons le nôtre !

M. Gérald Darmanin, ministre. Si tel n’est pas le cas, je m’exprimerais sur le gage.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. La PCH est une prestation de compensation du handicap, de même que l’APA est une prestation de compensation de la dépendance pour les personnes âgées. Elle est largement payée par les départements, et est insuffisamment compensée par l’État. J’ouvre une parenthèse, cela représente, pour le département de la Marne, 16 millions d’euros. Or la recette est de 5 millions d’euros annuels.

La prestation est constituée à la fois d’aide technique ou humaine ou d’aide à l’aidant. C’est véritablement une avancée, permise par la loi de 2005. Mais se pose la question de l’effectivité, avec un contrôle : il faut effectuer des heures, et on paie les heures, avec une différenciation, etc.

Les bénéficiaires ont la possibilité d’opter pour l’allocation compensatrice pour tierce personne, l’ACTP, qui existait déjà avant 2005, allocation sans effectivité, qui est un véritable revenu, tandis que la PCH est une compensation.

Ainsi, si la prestation est effectivement un revenu du patrimoine pour les aidants, elle ne peut pas être considérée comme un revenu du patrimoine, puisque c’est une compensation. C’est donc une anomalie terrible !

M. René-Paul Savary. Une compensation peut concerner l’amélioration au logement, une aide à l’achat d’une voiture, etc. Il faut donc, me semble-t-il, revoir intégralement le dispositif. Il serait tout de même aberrant, voire sidérant qu’une prestation payée par les départements et insuffisamment compensée par l’État, à hauteur de 30 % en moyenne, permette à l’État, par réforme de la CSG interposée, de faire – Mme Dindar ne me contredira pas – de la gratte, si vous me permettez cette expression !

Aujourd'hui, la prestation, qui est bien évidemment très importante pour les personnes handicapées, représente un coût qui devient insupportable pour certains départements. Il n’y a pas suffisamment de personnes qui optent pour la PCH plutôt que pour l’ACTP. Je crains que, faute d’adoption de ces amendements identiques, nous ne soyons obligés de constater dans quelques années que le dispositif n’aura pas atteint ses objectifs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. Il est pour le moins problématique que la PCH soit assimilée à un revenu du capital, d’où le taux de CSG à 8,2 %.

Dans cet esprit, on peut comprendre que les amendements identiques aient été déposés. Mais, et je reprends l’argument de M. le rapporteur général, leur adoption poserait un problème d’ordre constitutionnel.

Il me paraît donc préférable de revaloriser la PCH en transformant son statut lors de la nouvelle lecture de la loi de finances à l’Assemblée nationale, comme l’a suggéré M. le ministre. Cela donnera son effectivité à la réforme et illustrera la priorité que le Gouvernement accorde au handicap.

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Monsieur le ministre, je vous remercie de la clarté et de la franchise de vos propos.

Toutefois, en ayant entendu vos explications, je préfère maintenir mon amendement, dont l’adoption serait, me semble-t-il, un signe important pour le monde du handicap.

Nous suivrons évidemment avec attention les débats à l’Assemblée nationale. Et, comme cela a déjà été souligné par de nombreux sénateurs, il paraît nécessaire de revoir de façon globale l’ensemble du dispositif. Nous souhaitons travailler sur cette évolution.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Il m’avait totalement échappé que la PCH était considérée comme patrimoine ! Il faut revoir le dispositif pour corriger une telle injustice ; la PCH doit être transformée en revenu.

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.

M. Dominique Watrin. Nous maintiendrons également notre amendement. Nous pensons que le vote du Sénat constituera un encouragement à régler la situation. Le monde du handicap attend un signe fort.

M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, pour explication de vote.

M. Maurice Antiste. Pour les mêmes raisons que mes collègues, je maintiens aussi mon amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’ai entendu M. le ministre suggérer d’adopter ces amendements identiques malgré les problèmes de constitutionnalité qu’ils soulèvent, une solution devant être recherchée à l’Assemblée nationale.

Certes, la commission a émis un avis défavorable, pour les raisons que j’ai déjà exposées. Toutefois, à titre personnel, j’estime qu’il ne faut pas décourager la bonne volonté de M. le ministre. (Sourires.)

Je propose donc bien volontiers, à titre personnel, d’adopter ces trois amendements identiques dans l’esprit qui vient d’être indiqué, afin de satisfaire l’espoir que les personnes handicapées peuvent nourrir.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Dans ces conditions, le Gouvernement maintient son avis de sagesse et lève le gage sur ces trois amendements identiques.

M. le président. Il s’agit donc des amendements identiques nos 168 rectifié ter, 412 rectifié bis et 447 rectifié ter.

Je les mets aux voix.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 16 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l’adoption 343

Le Sénat a adopté.

Je constate que ces amendements ont été adoptés à l’unanimité, ce qui est rare. (Applaudissements.)

La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je rappelle aux sénateurs membres de la commission des affaires sociales que celle-ci se réunit pendant la suspension de séance afin d’examiner la suite des amendements.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Dans la discussion des articles du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2018, nous poursuivons l’examen de l’article 7.

L'amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Frassa et Le Gleut, Mmes Deromedi et Garriaud-Maylam, MM. del Picchia et Bansard, Mme Renaud-Garabedian, MM. Retailleau et Mouiller, Mme Procaccia, M. Danesi, Mme Gruny, MM. Pointereau, D. Laurent, Cambon, Dallier, Charon, Courtial, Revet, Houpert, Poniatowski, Lefèvre, Grand, Paccaud, Paul, Brisson et Buffet et Mme Bonfanti-Dossat, n'est pas soutenu.

Je suis saisie de douze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 406, présenté par Mmes Doineau et Guidez, M. Henno, Mme Dindar et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 12

Supprimer cet alinéa.

III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à la taxe sur la valeur ajoutée.

La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Cet amendement, présenté par le groupe Union Centriste, a trait à la « TVA compétitivité » – c’est un peu inscrit dans notre ADN. (Sourires.) Monsieur le ministre, vous disiez tout à l’heure qu’il s’agissait d’une proposition démodée. Pour ce qui me concerne, j’ai été nourrie au lait de Jean Arthuis et, ma foi, je ne le trouvais pas mauvais ! (Nouveaux sourires.)

Cet amendement constitue une alternative à votre proposition d’augmentation de la CSG pour les retraités. Il vise à exonérer les retraités de cette augmentation et à financer le manque à gagner par une augmentation de la TVA, sachant que la TVA en France est à 20 %, contre 21 % pour la moyenne des autres pays européens.

La mesure proposée s’apparente donc à une TVA sociale, car elle finance une baisse de charges sociales ; c’est une position connue des centristes. Elle pourrait d’ailleurs tout aussi bien s’appeler « TVA compétitivité », car elle est remboursée à l’exportation et payée à l’importation. Elle fait donc contribuer l’ensemble des entreprises étrangères au financement de notre système de protection sociale, ce qui permet de financer la suppression de la hausse de la CSG.

Cependant, il ne faudrait pas envisager qu’une hausse de TVA à 0,7 point. Un travail pourrait être réalisé sur les différents taux, y compris sur les taux réduits.

Cela ne constituera pas, à proprement parler, un manque à gagner pour les finances sociales : dans la réforme du Gouvernement, l’augmentation de la CSG sur les retraites ne compense pas la baisse de cotisations sociales, mais va directement dans les caisses de l’État. Ces opérations budgétaires entre finances sociales et finances de l’État nous conduisent à en appeler à une réflexion d’ensemble sur l’impôt et sur les prélèvements sociaux. Tel est l’objet de cet amendement.

Plusieurs questions méritent d’être posées. Est-il juste que les retraités financent les baisses de cotisations sociales bénéficiant aux actifs ? Est-il juste que tous les Français ne contribuent pas aux finances sociales à concurrence de leurs moyens ?

Mme la présidente. Les cinq amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 10 rectifié est présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.

L'amendement n° 32 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.

L'amendement n° 313 est présenté par MM. Daudigny et Guillaume, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Monier, M. Iacovelli et les membres du groupe socialiste et républicain.

L'amendement n° 367 rectifié est présenté par MM. Requier et Arnell, Mme Guillotin, MM. A. Bertrand et Castelli, Mme Costes, MM. Collin, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Menonville et Vall.

L'amendement n° 445 est présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces cinq amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances. J’ai largement présenté l’objet de cet amendement dans mon propos liminaire sur l’article 7.

Il s’agit de supprimer l’augmentation du taux de la CSG sur la partie des retraites pour laquelle cette hausse n’est pas compensée. Nous avons prévu un gage, dont je ne suis d’ailleurs pas très fier. C’est en quelque sorte, monsieur le ministre, un gage provisoire – puisqu’il n’existe pas d’interpénétration parlementaire entre le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances –, en attendant les économies de gestion qui figureront dans la loi de finances. Je le dis d’emblée, car, sur le plan éthique, ce gage peut difficilement être soutenu.

J’utiliserai le peu de temps de parole qui me reste, monsieur le ministre, pour réagir à votre réponse de tout à l’heure. Il est légitime que le Gouvernement s’exprime toujours en dernier, mais ne pensez pas que la TVA soit l’impôt d’hier et la CSG celui d’aujourd’hui et de demain !

Le débat est au centre de nos discussions. J’ai bien précisé précédemment que notre groupe ne proposait pas d’augmenter la TVA. Certes, nous en avons débattu, mais nous avons préféré retenir l’idée de la CSG. Il aurait en effet été très compliqué budgétairement de tout réécrire et de tout détricoter entre le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances.

Je dirai deux mots sur la TVA pour bien répondre à l’argument selon lequel notre position serait datée. Notre position n’est pas datée ! Pas du tout ! Je prends d’ailleurs date pour l’avenir. Cette TVA est un impôt moderne. Pourquoi ? Notre pays est dans une économie européenne ; vous cherchez à taxer les grands groupes qui font du chiffre d’affaires dans notre pays, mais vous n’y arrivez pas. Or la TVA permettrait justement de taxer les produits issus de l’importation. Il s’agit donc d’un impôt d’avenir par rapport à la CSG, qui est un impôt ultra-national taxant uniquement ce qui se passe à l’intérieur de notre pays.

Ce débat est noble. Il n’y a pas, d’un côté, les gens du passé et, de l’autre, ceux de l’avenir, ceux qui seraient à la mode et ceux qui ne le seraient pas. D’ailleurs, il faut un certain temps, plusieurs années, parfois des dizaines d’années pour savoir quels impôts sont devenus des valeurs sûres et lesquels ont fait « pschitt »… Laissons-nous un petit peu de temps. Sur le plan fiscal, je ne crois pas que l’on puisse affirmer qu’un impôt est d’actualité et l’autre du passé. Réfléchissons bien à ce débat entre TVA et CSG.

En ce moment, monsieur ministre, la croissance revient : tant mieux pour vous !

Mme la présidente. Il faut conclure, cher collègue !

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. Je termine, madame la présidente ; je ne prendrai pas beaucoup la parole au cours de la soirée…

La croissance revient, disais-je. Et que voit-on ? Les importations augmentent et la balance du commerce extérieur recommence à se creuser. Tout cela ne servira pas à financer le modèle social français.

Toutes les entreprises françaises qui vont à l’étranger produisent, sont payées et nous renvoient leurs produits. Il faudra donc à l’avenir envisager un mix entre les deux types d’imposition. C’est un peu ce que proposent les centristes avec leur amendement… (Mme Marie-Christine Chauvin applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 32.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne reviendrai pas sur ce qui vient d’être expliqué à propos de la suppression de l’augmentation de 1,7 point du taux de CSG. Tout a en effet été dit, y compris par vous-même, monsieur le ministre.

Je reste cependant, au nom de la commission des affaires sociales, dubitatif quant à vos explications. Il n’en demeure pas moins, comme vient de le rappeler mon collègue Joyandet, qu’une partie des retraités n’aura aucune compensation. Avouons-le clairement : on cherche à faire payer par une partie des retraités l’augmentation d’un certain nombre de prestations, à tout le moins le transfert de certaines prestations vers la CSG. C’est une tuyauterie qui devient un peu compliquée.

Je vous ai montré les tableaux qui ont été établis par les services de la commission. Il eût été préférable d’avoir une convergence – je n’y étais pas, pour ma part, hostile – entre les retraités et les actifs. Or une convergence, cela signifie aussi les mêmes conditions pour ce qui concerne les compensations.

Nous n’avons pas beaucoup développé cette idée, mais le taux de CSG des retraités est à 6,6 %, contre 7,5 % pour les actifs. Brutalement, il passera à 8,3 % pour les retraités les plus aisés, comme on le dit, même si cette formule est un peu contestable. Il n’en demeure pas moins que l’on va accroître – ce sera l’objet d’un autre amendement que j’ai vu fleurir sur les travées, notamment sur les travées centristes – les effets de seuil. Ce serait peut-être là l’occasion de faire un geste en direction des retraités, mais nous aurons l’occasion d’y revenir.

En tout état de cause, la commission a décidé de supprimer cette augmentation de 1,7 point sur les contributions de remplacement.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l'amendement n° 313.

M. Yves Daudigny. Les membres du groupe socialiste et républicain, avec conviction, et unanimement, demandent la suppression de l’alinéa 9 de l’article 7.

La solidarité est exigeante de justice sociale. Aussi, la proposition d’augmentation de la CSG pour les retraités n’est pas, selon nous, acceptable. Elle est même destructrice de notre cohésion sociale quand, dans le même temps, et dans le cadre de la loi de finances, sont proposées d’autres mesures qui vont alléger les contributions des familles les plus aisées de ce pays à la solidarité nationale ; je pense, bien sûr, à l’impôt sur la fortune, qui est transformé, ou aux taxes, dont la flat tax. D’où cet amendement de suppression.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l'amendement n° 367 rectifié.

M. Guillaume Arnell. Cet amendement vise également à supprimer l’alinéa 9 de l’article 7 et à maintenir le taux de la CSG à 6,6 % pour les retraités, ainsi que pour les titulaires de pensions d’invalidité.

Je ne reprendrai pas l’ensemble des arguments qui ont été avancés, pour une question d’efficacité et de gain de temps. Mais peut-être finirez-vous par nous donner raison, monsieur le ministre, à force de nous entendre défendre la même mesure sur toutes les travées… (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l'amendement n° 445.

M. Dominique Watrin. Cet amendement de repli vise à supprimer l’augmentation du taux de la CSG de 1,7 point pour les retraités notamment.

Le Gouvernement a annoncé la compensation de la hausse de la CSG pour l’ensemble des catégories, sauf pour les retraités, au motif que le montant des pensions de retraite a progressé plus rapidement que celui des salaires.

Il nous semble tout à fait injuste de considérer que cette évolution due, comme je l’ai expliqué hier, à la plus forte activité des femmes, ferait des retraités des privilégiés par rapport aux salariés.

Cette situation est aussi injuste, car les retraités subissent déjà le gel ou le quasi-gel de leurs pensions depuis des années, mais aussi une pression fiscale grandissante, avec la suppression de la demi-part des veufs et des veuves, et la fiscalisation des majorations familiales, décidées sous le quinquennat précédent.

Cette accumulation de mesures nous semble peu respectueuse du rôle social, je dirais presque sociétal, joué par les retraités, ainsi que de leur aspiration, qui me semble tout à fait légitime, à vivre le moment de retraite comme un temps plein, un moment d’épanouissement.

Nous dénonçons cette politique de stigmatisation à l’égard des retraités, quand 60 % d’entre eux vivent avec une pension proche du seuil de pauvreté, situé à 1 015 euros par mois. Pour la grande majorité d’entre eux, il est même de plus en plus difficile de se soigner.

Nous demandons au contraire une revalorisation de toutes les retraites, afin qu’aucune d’entre elles notamment ne soit inférieure au SMIC.

Tel est le sens de cet amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 278 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Wattebled, A. Marc et Decool, Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Guerriau et Lagourgue, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 9

Remplacer le taux :

8,3 %

par le taux :

7,8 %

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. Notre groupe considère que la CSG est une mesure positive pour améliorer le pouvoir d’achat des salariés et, donc, augmenter leur consommation.

Une augmentation de la CSG a, selon la majorité des membres du groupe, deux avantages par rapport à une augmentation de la TVA : la base de la première est plus large, et la hausse de son taux n’affecte pas directement le prix des produits à l’achat, notamment pour les personnes à faible pouvoir d’achat.

Au-delà des salariés, les indépendants bénéficieront de cette mesure et les agents publics percevront une compensation.

Les retraités sont les perdants de ce dispositif, ceux qui sont âgés de plus de 65 ans et percevant une retraite supérieure à 1 400 euros par mois. Surtout, les retraités percevant une pension supérieure à 2 500 euros par mois ne pourront pas voir la hausse de la CSG compensée par l’exonération de la taxe d’habitation, laquelle ne concernera que les plus modestes. J’en profite pour dire que si la TVA avait été augmentée, ces derniers auraient été pénalisés.

Les actifs financent les retraites, et les jeunes devront régler l’endettement accumulé par les générations précédentes. La mesure dont nous discutons est donc bien une mesure de solidarité intergénérationnelle,…

M. Gérald Darmanin, ministre. Tout à fait !

M. Daniel Chasseing. … qui contribue au financement de la protection sociale.

Une hausse de 1,7 point nous semble néanmoins beaucoup. Nous proposons donc, par cet amendement, une hausse de 1,2 point. Le financement de 0,5 point doit pouvoir se trouver.

Oui au financement intergénérationnel, mais modulé !

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 314 est présenté par MM. Daudigny et Guillaume, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 446 est présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. - Alinéa 9

Compléter cet alinéa par les mots :

et les mots : « et les pensions d’invalidité » sont remplacés par les mots : « tandis que les pensions d’invalidité demeurent assujetties au taux de 6,6 % »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 314.

M. Yves Daudigny. Il est défendu !

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 446.

Mme Laurence Cohen. À défaut d’avoir réussi à faire supprimer cet article, nous souhaitons, comme les membres du groupe socialiste et républicain, même si M. Daudigny ne l’a pas exprimé, que la hausse de la CSG ne concerne pas les titulaires de pension d’invalidité.

En effet, cette hausse ne sera compensée par aucune baisse de cotisation, puisque les pensionnés n’en paient pas. Cela représente une perte nette de pouvoir d’achat de plusieurs centaines d’euros par an.

Pire encore, les quelques revalorisations obtenues lors des quatre dernières années seront en fait complètement couvertes par la hausse de la fiscalité. Cela équivaut à renvoyer les personnes invalides quatre ans en arrière, en termes de pouvoir d’achat, de revendications, de luttes, notamment celles qui ont été menées par l’Association des paralysés de France.

Mais plus encore que la question financière, monsieur le ministre, il s’agit ici d’une question de dignité pour les titulaires de pensions d’invalidité. Exclus malgré eux du travail, ils le sont aussi souvent sur le plan social, quand ils ne sont pas dans une profonde détresse économique.

Les personnes invalides comme les personnes handicapées ressentent ces attaques comme autant de relégations. La pension d’invalidité, l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, ne sont pas censées devenir des minima sociaux, et leurs bénéficiaires n’ont rien d’assistés. C’était d’ailleurs l’un des combats que portait très fortement notre ancienne collègue Annie David, que je veux ici saluer et qui a choisi de passer la main.

L’objectif de notre société devrait être, au contraire, de garantir qu’aucune de ces personnes ne se retrouve sous le seuil de pauvreté. Il ne saurait être question de leur faire les poches quand, dans le même temps, on baisse les cotisations des employeurs, comme on l’a vu à de nombreuses reprises, et que l’on réforme l’ISF, ainsi que je l’ai dénoncé hier avec mon collègue Dominique Watrin.

Tel est le sens de notre amendement : égalité, équité, justice sociale.

Mme la présidente. L’amendement n° 407 rectifié, présenté par Mme Doineau, MM. Marseille et Maurey, Mme Loisier, MM. Louault, Laugier et Janssens, Mme Vermeillet, MM. Capo-Canellas, Bockel et Delcros, Mme de la Provôté et MM. Détraigne, L. Hervé et Luche, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 9

Insérer dix alinéas ainsi rédigés :

« …) Le III est ainsi rédigé :

« III. – Par dérogation aux I et II, sont assujettis à la contribution sociale au taux de :

« 1° 3,8 % les revenus visés aux 1° et 2° du III de l’article L. 136-2, perçus par les personnes dont les revenus de l’avant-dernière année, définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts :

« a) D’une part, excèdent 10 996 € pour la première part de quotient familial, majorée de 2 936 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 13 011 € pour la première part, majorés de 3 230 € pour la première demi-part et 2 936 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 13 605 €, 3 376 € et 2 936 € ;

« b) D’autre part, sont inférieurs à 14 375 € pour la première part de quotient familial, majorée de 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 726 € pour la première part, majorés de 4 221 € pour la première demi-part et 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 474 €, 4 414 € et 3 838 € ;

« 2° 6,6 % les revenus visés aux 1° et 2° du III de l’article L. 136-2, perçus par les personnes dont les revenus de l’avant-dernière année, définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts :

« a) D’une part, excèdent 14 375 € pour la première part de quotient familial, majorée de 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 726 € pour la première part, majorés de 4 221 € pour la première demi-part et 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 474 €, 4 414 € et 3 838 € ;

« b) D’autre part, sont inférieurs à 18 500 € pour la première part de quotient familial, majorée de 4 939 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 20 238 € pour la première part, majorés de 5 432 € pour la première demi-part et 4 939 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 21 201 €, 5 680 € et 4 939 € ;

« Les seuils mentionnés au présent III sont revalorisés au 1er janvier de chaque année, conformément à l’évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, constatée pour l’avant-dernière année et arrondis à l’euro le plus proche, la fraction d’euro égale à 0,50 étant comptée pour 1.

« Le 2° du III du présent article s’applique du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018. » ;

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Monsieur le ministre, vous avez demandé précédemment des propositions. Même si les centristes sont plutôt attachés à la « TVA compétitivité », nous pensons, comme vous, qu’il convient de baisser le coût du travail. Nous proposons donc une alternative, une solution de repli par rapport à l’amendement n° 406 présenté précédemment, de nature à épargner 10 % des retraités.

Une partie des retraités subira la hausse de 1,7 point de CSG sans, pour autant, bénéficier de l’exonération de la taxe d’habitation. Cet amendement tend à ce que la contribution des retraités à cette réforme soit non pas supprimée, mais atténuée pour les plus modestes. Celle-ci ne s’appliquerait qu’aux retraités ayant un revenu fiscal de référence supérieur à 18 500 euros annuels, contre 14 375 euros dans le projet du Gouvernement.

Cela permet de sortir de la réforme 10 % de retraités, en préservant leur pouvoir d’achat. Je rappelle, mes chers collègues, que nous parlons ici de retraités ayant des pensions de moins de 1 500 euros. J’ajoute que les effets de seuil seraient limités, par le maintien d’un taux à 6,6 % situé entre le taux réduit de 3,8 % et le taux après réforme de 8,3 %.

Enfin, le dispositif prévu assure la transition pour 2018 de la hausse de la CSG avec la mise en œuvre du dégrèvement en trois ans de la taxe d’habitation.

Mme la présidente. L’amendement n° 414 rectifié, présenté par M. Antiste, Mmes Conconne, Féret et Ghali, M. Iacovelli, Mmes Jasmin et G. Jourda, M. Leconte, Mmes Lepage et Lienemann, M. Todeschini, Mmes Monier et Espagnac et MM. Daudigny et Temal, est ainsi libellé :

I. - Après l’alinéa 9

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

…) Le III est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation aux I et au II, sont assujettis à la contribution sociale au taux de 6,3 % les revenus visés aux 1° et 2° du III de l’article L. 136-2, perçus par les personnes dont les revenus de l’avant-dernière année, définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts :

« 1° D’une part, excèdent 14 375 € pour la première part de quotient familial, majorée de 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 726 € pour la première part, majorés de 4 221 € pour la première demi-part et 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 474 €, 4 414 € et 3 838 € ;

« 2° D’autre part sont inférieurs à 33 000 € pour la première part de quotient familial, majorée de 8 810 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 36 101 € pour la première part, majorés de 9 6891 € pour la première demi-part et 8 810 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 37 819 €, 10 133 € et 8 810 € ;

« 3° Enfin, sont inférieurs à 14 375 € pour la première part de quotient familial, majorée de 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 726 € pour la première part, majorés de 4 221 € pour la première demi-part et 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 474 €, 4 414 € et 3 838 €. » ;

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Avec l’article 7, le Gouvernement propose d’augmenter la CSG de 1,7 point. Cette hausse aura des conséquences diverses sur le pouvoir d’achat des Français.

Pour les salariés, elle sera compensée par la baisse des cotisations sociales, laquelle n’interviendra pas de manière totalement concomitante à la hausse de la CSG. En 2018, pendant plusieurs mois, cela risque de faire perdre du pouvoir d’achat aux Français.

Pour les fonctionnaires, le Gouvernement annonce une compensation à hauteur de 3 milliards d’euros, qui, pour l’heure, n’a pas fait l’objet d’engagements inscrits au projet de loi de finances.

Pour les retraités, la hausse s’appliquera à ceux qui sont actuellement assujettis au taux de 6,3 %.

Ainsi, pour une personne seule, cette hausse s’appliquera dès que le revenu fiscal de référence dépasse 14 375 euros, soit 1 289 euros par mois si la personne a moins de 65 ans, et dès 1 394 euros par mois si elle a plus de 65 ans. Ainsi, un retraité avec 1 400 euros par mois aura à payer en plus 285 euros de CSG.

Afin d’obtenir un équilibre entre le maintien du pouvoir d’achat des retraités français et l’exigence de sérieux dans la gestion des finances publiques, il est proposé que la hausse de CSG pour les retraités ne s’applique pas pour les montants de retraite inférieurs au coût moyen d’une maison de retraite médicalisée.

Mme la présidente. L’amendement n° 562 rectifié, présenté par MM. Requier et Gabouty et Mme Guillotin, n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je serai bref : la commission est naturellement favorable à tous les amendements identiques à celui qu’elle a présenté. Elle demande donc aux auteurs des autres amendements de bien vouloir les retirer au profit de ce dernier.

Aussi, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, la commission demande que le Sénat se prononce en priorité sur les amendements identiques nos 10 rectifié, 32, 313, 367 rectifié et 445.

Mme la présidente. Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, la priorité est de droit lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Je suis favorable à la demande de M. le rapporteur général. Il m’apparaît normal et respectueux d’autoriser le Sénat à délibérer dans cet ordre.

Mme la présidente. La priorité est ordonnée.

Quel est maintenant l’avis du Gouvernement sur les cinq amendements identiques ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Je voudrais avancer quelques arguments à l’appui du présent article 7, qui est tout sauf anodin. Les amendements portant sur le même article dont nous discuterons plus tard requerront moins d’ardeur à le défendre.

À écouter votre intervention, monsieur Joyandet, m’est venue la phrase de Jean Cocteau : « La mode, c’est ce qui se démode. » Nous verrons bien dans quelques années ce qui se démodera, ou non !

Je n’ai jamais dit que la TVA n’était pas un impôt important. Aux yeux du ministre des comptes publics, il s’agit tout de même de la première recette du budget de l’État. Je ne pourrais me permettre de censurer une telle imposition. J’ai relevé, en revanche, que le mécanisme de la TVA sociale, ou de la « TVA emploi », était certes intéressant intellectuellement, mais un peu daté, pour des raisons déjà indiquées précédemment et que je ne reprendrai pas ici.

La question de la justice d’un impôt tel que la TVA se discute. Mais j’entends parfaitement qu’il soit très efficace pour les deniers publics et qu’il s’inscrive, comme vous l’avez très bien souligné, dans un cadre européen, voire international. Cependant, ces considérations ne règlent pas notre problème.

Je constate que les divers amendements sur l’article 7 dont nous discutons sont assez différents. Aussi, permettez-moi d’expliciter la position du Gouvernement.

Les sénateurs du groupe CRCE se sont notamment exprimés au sujet des pensions d’invalidité. Le système retenu pour les pensions d’invalidité est exactement calqué sur celui des retraites pour ce qui concerne l’augmentation de la CSG. Il n’y a pas de différenciation de montant entre une pension d’invalidité et une retraite. Comme l’a dit M. le sénateur, qui a évoqué les seuils que j’ai rappelés précédemment, avec l’abattement de 10 % pour les retraités de plus de 65 ans, la CSG augmentera pour ceux qui perçoivent une pension supérieure à 1 400 euros.

Mais, je le répète, le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale se complètent. Vous opposez au Gouvernement la suppression de l’ISF et la mise en place du PFU, le prélèvement forfaitaire unique, soit une baisse d’impôt d’environ 4 milliards d’euros, pour prétendre qu’il mène une politique au profit des plus aisés seulement.

Mme Laurence Cohen. C’est vrai !

M. Gérald Darmanin, ministre. Mais vous ne signalez pas les 10 milliards d’euros de baisses d’impôt consentis par le Gouvernement dans son projet de budget que représente l’exonération de la taxe d’habitation ! Soyons honnêtes : mettons les dispositifs en miroir. « Quand on chante la liberté, on n’en chante pas la moitié », disait Thierry Le Luron, en pastichant Jean Ferrat.

L’augmentation de la fiscalité touchera surtout les retraités percevant chacun plus de 2 500 euros de revenus. Je salue la démarche intellectuelle empreinte d’honnêteté du rapporteur général ; le Gouvernement n’a jamais caché qu’il voulait augmenter la fiscalité de ces personnes. D’ailleurs, pour ma part, je n’ai jamais utilisé le terme de « privilégiés » pour les désigner. Il faut simplement considérer que, à 2 500 euros par mois, par personne, il ne s’agit pas de retraités modestes. Ces retraités modestes, nous les connaissons, dans notre région notamment. Cette somme de 2 500 euros ne fait pas pour autant de ceux qui la perçoivent des gens riches. Elle leur permet seulement de se situer au-dessus du salaire moyen.

À ce stade, arrêtons-nous quelques instants sur la démarche du Gouvernement, qui n’atteint manifestement pas la majorité des membres de cette assemblée. Mais rien de plus normal que d’avoir cette discussion !

Avec ces amendements, vous prenez la défense de ceux qui gagneraient plus de 2 500 euros nets par mois en considérant – l’argument est valable, il n’est pas caricatural ! – que, ayant travaillé toute leur vie, ils en récoltent désormais les fruits. Il serait donc normal que leur fiscalité ne soit pas alourdie.

Toutefois, vous oubliez un argument important. Les dispositifs proposés ne prévoient pas de supprimer les cotisations. Mme Lienemann disait tout à l’heure – je ne voudrais pas trahir sa pensée – que les mesures préconisées par le Gouvernement mettaient fin aux droits ouverts par la perception des cotisations et que nous organisions en quelque sorte la fin de la sécurité sociale telle qu’elle avait été imaginée par le général de Gaulle et Ambroise Croizat.

Or les dispositifs prévus dans les amendements proposés concernent une augmentation de la fiscalité ou le remplacement de l’augmentation de la CSG par une augmentation de la TVA, avec des mix. J’en profite pour vous dire, madame Doineau, que l’amendement n° 406 me semble plutôt gagé sur les droits sur le tabac. Mais je veux bien comprendre que le gage porte sur une augmentation de la TVA, je ne vous en fais pas procès.

Désormais, on ne parle ici que de corriger la copie de Gouvernement, et non plus de fin de l’augmentation du pouvoir d’achat par les cotisations.

Avec tous ces amendements, vous défendez le principe de permettre aux retraités gagnant plus de 2 500 euros par mois de conserver leur pouvoir d’achat. C’est tout à fait louable, mais ce n’est pas le choix du Gouvernement. Le Gouvernement considère que ces retraités, non pas qu’ils soient privilégiés, mais qui sont les moins modestes, doivent faire preuve de solidarité nationale.

Aujourd'hui, la pauvreté, la difficulté concernent plutôt les salariés, notamment les plus jeunes. Vos amendements sont aussi défendables en miroir. La position du Gouvernement est de défendre ceux qui rentrent dans la vie active par la suppression de cotisations, et d’augmenter la fiscalité des retraités gagnant plus de 2 500 euros par mois.

L’argument de M. Watrin sur les pensions d’invalidité n’est pas recevable. Il a certes raison de dire que les retraités ou les personnes souffrant d’un handicap connaissent un important taux de pauvreté. Néanmoins, ils ne sont pas concernés par la mesure, laquelle, je le rappelle, ne touche pas tous ceux qui gagnent moins de 1 400 euros nets par mois. Quant à ceux qui ont des revenus supérieurs, ils paient une taxe d’habitation, qui, en moyenne, s’élève à 600 euros, même si les disparités sur le territoire sont très grandes.

Pour finir, madame la présidente, j’en viens aux personnes âgées placées en maison de retraite, pour lesquelles il est proposé d’aligner la mesure fiscale sur le coût moyen mensuel d’une telle maison. Cela pose la question du montant de la retraite. Il est vrai que percevoir 1 400 euros quand on habite à Paris, Marseille, Tourcoing ou Valenciennes, madame la présidente, ce n’est pas la même chose, mais cette question nous emmène sur un autre terrain. Nous aurons ce débat pour les retraités en maison médicalisée ou en EHPAD plus tard, lorsque nous aborderons les dispositions extrêmement fortes prises par le Gouvernement pour accompagner ceux qui, de ce fait, ne paient pas la taxe d’habitation mais devraient subir une hausse de la CSG.

Au nom de la cohérence de sa position, le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’ensemble des amendements, y compris celui qui a été déposé par la commission des affaires sociales. Mais je suis sûr, monsieur le rapporteur général, que nous ne serons pas fâchés pour autant ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. Je ne pense pas qu’il faille opposer CSG et TVA, la CSG étant l’impôt du monde nouveau et la TVA celui du monde ancien. Il faut tout simplement choisir, et le Gouvernement recourt à la CSG pour combler la dette.

Permettez-moi de citer quelques chiffres.

Tout d’abord, la TVA est régressive ; cela me semble être un argument massue.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est vrai !

M. Michel Amiel. Les 10 % les plus pauvres consacrent 8,1 % de leur revenu au paiement de la TVA, contre 3,4 % pour les 10 % les plus riches.

De même, la TVA à taux réduit, une question abordée, profite aux riches plutôt qu’aux pauvres. Je vous renvoie sur ce point au rapport de l’OCDE de décembre 2014. Voilà pour la CSG et la TVA.

J’en viens aux retraités. Les chiffres ont été suffisamment évoqués : les retraités les plus modestes ne sont pas concernés. Si l’on s’en tient aux revenus, la mesure touchera des retraités qui ne sont certes pas riches, mais qui ont les moyens de participer à la solidarité intergénérationnelle.

J’ajoute néanmoins deux choses. On a parlé uniquement de revenus, mais il faudrait aussi parler de patrimoine. Les retraités sont ceux qui possèdent en grande partie le patrimoine, ce qui leur procure, indirectement, un confort de vie supérieur à celui des actifs, lesquels, souvent, n’en ont pas.

Enfin, je rappelle que les retraités font partie d’une génération qui laisse à la France une dette se chiffrant à plusieurs dizaines de milliards d’euros. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.

M. Jean-Noël Cardoux. Je voterai bien sûr la suppression de l’alinéa 9 de l’article 7, mais permettez-moi de revenir sur la question de la TVA.

Monsieur Amiel, votre raisonnement est imparable. Évidemment que la TVA est régressive : plus les revenus sont élevés, plus l’incidence de la TVA sur la consommation est faible. C’est évident ! Pas besoin d’être polytechnicien pour le dire.

L’argumentation de M. le ministre, en revanche, a été partiale et incomplète. Tout le monde le sait, il existe un taux réduit de TVA pour les biens de première consommation ; il n’est pas question d’y toucher. On pourrait même le réduire.

Mme Françoise Gatel. Absolument !

M. Jean-Noël Cardoux. Tout le monde le sait aussi, la plupart des pays européens ont un taux normal de TVA supérieur à celui de la France : il est de 25 % en Suède et au Danemark, contre 21 % en Espagne et en Italie.

Tout le monde sait encore que, statistiquement, une augmentation de deux points du taux normal de TVA n’est répercutée en moyenne qu’à hauteur de 50 % sur les prix. C’est donc relativement limité.

Il est toujours possible, en outre, comme je l’ai proposé à plusieurs reprises, de créer des taux majorés de TVA sur les biens importés. Ce serait l’occasion de créer une fiscalité écologique. Je verrais très bien une TVA semblable à celle que l’on a connue dans le passé – vous étiez bien jeune, monsieur le ministre –, quand les grosses voitures étaient taxées à 33,33 %.

M. Gérald Darmanin, ministre. Je n’ai pas connu cette époque !

M. Jean-Noël Cardoux. Je verrais bien un tel taux s’appliquer aux voitures polluantes.

La mise en place de ces taux modulés permettrait d’infléchir les consommations et les importations.

Enfin, élément essentiel, les retraités à faibles revenus, avec 1 200 euros par exemple, n’auront pas d’autre choix que de subir la hausse de la CSG, alors qu’ils auraient pu modifier leur consommation en cas d’augmentation de la TVA, étant entendu que les biens de première nécessité resteraient soumis au taux le plus bas.

Il était important, me semble-t-il, d’éclairer le Sénat sur ces points, afin d’avoir un jugement à peu près cohérent de l’effet qu’aurait eu une hausse de la TVA pour pallier l’augmentation de la CSG. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Je ne veux pas ouvrir le débat, mais M. Cardoux évoque un point important. Le débat sur la pertinence de la TVA ou de la CSG n’est pas médiocre ; il est même extrêmement important. Mais l’un des arguments que vous avez avancés me contrarie néanmoins : celui du taux réduit, que j’ai évoqué précédemment.

Vous dites d’abord qu’on pourrait très bien réduire ce taux ; je vous suggère donc de faire une proposition en ce sens ! Il serait alors intéressant de connaître les baisses de dépenses publiques que vous proposez pour compenser la baisse de recettes. Une chose est de dire : « y a qu’à » ; une autre de baisser les dépenses publiques…

Au-delà de cet argument de tribune, monsieur le sénateur, les plus modestes n’achètent pas que des produits à taux réduit. Existerait-il un monde où les classes moyennes hautes et les riches n’achèteraient que des produits imposés à un taux non réduit ?

Cet argument m’a toujours étonné : il y aurait un taux pour les familles les plus modestes, condamnées à n’acheter que des produits de première nécessité, une sorte d’aumône fiscale, ou à choisir de ne pas consommer ; et un taux réservé à ceux qui veulent acheter une voiture, voyager ou acheter des produits pour leur famille et leurs enfants. Cet argument ne plaide pas du tout en faveur de la TVA.

Vous évoquez également le passé à l’appui de vos propositions. C’est un débat très important. Aucun de nous n’a encore trouvé l’impôt le plus juste possible. J’ai seulement le souvenir que, sous le quinquennat précédent, la majorité au Sénat et l’opposition à l’Assemblée nationale, à laquelle j’appartenais, s’étaient opposées à l’augmentation de la TVA proposée par le gouvernement précédent, pour des raisons rigoureusement opposées à celles que vous venez d’avancer, monsieur le sénateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Les retraités touchant plus de 2 500 euros par mois seront perdants parce qu’ils ne se verront pas rembourser leur taxe d’habitation. Aussi, nous considérons qu’il faut moduler la CSG pour les retraités. C’est pourquoi nous proposons une augmentation de 1,2 point au lieu de 1,7. Cette moindre hausse entraînera effectivement une perte de 1,2 milliard d’euros.

Nous souhaitons, comme Mme le ministre, que le budget de la sécurité sociale puisse être à l’équilibre en 2020. Il est peut-être plus facile de trouver 1,2 milliard d’euros que 4,5 milliards d’euros, avec une hausse de 1,7 point.

Pour cette raison, je ne voterai pas les amendements identiques

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Joyandet, pour explication de vote.

M. Alain Joyandet. Notre groupe soutient bien sûr l’amendement de la commission des affaires sociales.

On dit que la TVA n’est pas un impôt progressif. Pourtant, quand on achète une voiture à 10 000 euros, on paie 2 000 euros de TVA, et quand on en achète une à 20 000 euros, on paie 4 000 euros de TVA !

Mme Laurence Cohen. Ce n’est pas cela, la progressivité !

M. Alain Joyandet. On ne conduit pas non plus deux voitures à la fois. Il y a donc une progression dans l’impôt !

Si l’on maintient le taux réduit de TVA, la justice sociale est préservée. On peut continuer de gloser sur ce qui est juste et ce qui ne l’est pas, monsieur le ministre. D’ici à 2022, la TVA sur les produits pétroliers devra rapporter 14 milliards d’euros. Qui va la payer ? Certainement pas les riches. Jusqu’à preuve du contraire, 50 litres de gasoil resteront 50 litres de gasoil : il n’y a pas de plafonnement ni de dégrèvement pour les pauvres en matière de fiscalité sur les produits énergétiques. Par conséquent, on ne peut pas dire que le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale soient justes.

J’ajoute que les prélèvements prévus dans ces textes sont supérieurs aux gains : les impôts sont acquittés tout de suite, tandis que les dégrèvements s’étalent sur trois ans. (M. le ministre fait un signe de dénégation.) On pourrait poursuivre le débat…

Quoi qu’il en soit, on ne peut pas vous délivrer un brevet de justice fiscale ; on pourrait démonter les arguments de ceux qui le prétendent en très peu de temps.

Monsieur le rapporteur général, Les Républicains vont naturellement soutenir votre amendement. Vous avez demandé au Gouvernement l’autorisation que le Sénat se prononce en priorité sur les cinq amendements identiques ; j’aurais pu éventuellement retirer l’amendement de la commission des finances. Je me vois dans l’obligation de préciser que c’est la commission des finances qui est à l’origine de la rédaction et qui avait voté cet amendement en premier, mais, comme on n’a pas de problème de paternité, on soutient la commission des affaires sociales. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Dont acte !

Mme Françoise Férat. Il faut rendre à César ce qui appartient à César !

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.

M. Dominique Watrin. Nous débattons, je vous le rappelle, du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Or vous nous entraînez, monsieur le ministre, sur un autre terrain : il s’agirait de savoir lequel, de la CSG et de la TVA, est le meilleur impôt.

Pour nous, la réponse est claire : les deux impôts sont injustes.

M. Jacques Grosperrin. Il n’y a plus d’impôt ! Alors comment fait-on ?

M. Dominique Watrin. La TVA est injuste, pour les raisons qui ont été avancées, car les couches les plus modestes paient proportionnellement plus que les couches les plus aisées.

La CSG est injuste, car elle est acquittée, à plus de 90 %, me semble-t-il, par des actifs et des retraités touchant des revenus de remplacement.

Le système de solidarité issu du Conseil national de la Résistance, qui n’était pas si mal ficelé, a été détricoté par les gouvernements successifs, soutenus par des majorités différentes. J’en rappelle le fondement : les cotisations patronales et salariales étaient paramétrées – je vous épargne les détails – de telle sorte qu’elles étaient prises en charge à hauteur de 70 % par les employeurs. On est donc loin de la répartition que vous proposez soit avec la CSG, soit avec la TVA.

Certains ont cherché où sont les privilégiés et les ont trouvés chez les retraités qui gagnent 1 400 euros par mois, voire 1 300 euros ; ils sont pénalisés parce qu’ils prennent leur retraite avant 65 ans – autre scandale et autre régression !

Les privilégiés, moi, je les trouve ailleurs ! M. le ministre nous incite à voir les choses dans leur globalité et à lire le projet de loi de financement de la sécurité sociale à l’aune du projet de loi de finances, au sein duquel le Gouvernement a mis en place le prélèvement fiscal unique.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est vrai !

M. Dominique Watrin. Eh bien, désormais, les bénéficiaires de revenus du capital ne seront plus taxés qu’à hauteur de 30 %, prélèvements fiscaux et sociaux compris.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est vrai !

M. Dominique Watrin. Voilà les privilégiés ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour explication de vote.

Mme Élisabeth Doineau. Le groupe Union Centriste suivra le rapporteur général, même si nous étions plus enclins à voter la hausse de la TVA.

Je veux réagir aux propos de mon collègue Michel Amiel, qui a indiqué que les retraités d’aujourd’hui sont ceux qui laissent des dettes. C’est inacceptable parce que ce sont aussi eux qui ont reconstruit la France après la Seconde Guerre mondiale. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Xavier Iacovelli applaudit également.) Ils ont travaillé, et souvent très dur.

La réalité, c’est que l’augmentation de la TVA permet d’asseoir l’accroissement des recettes sur davantage de personnes et de baisser le coût du travail, ce qui correspond à l’objectif du gouvernement actuel. En outre, cela pénalise les importations.

C’est pourquoi cette solution nous semblait tout à fait acceptable, d’autant que cela évite d’opposer les générations. En effet, la difficulté que soulève la proposition du Gouvernement est qu’elle met les retraités face aux jeunes, en laissant à penser qu’ils éprouveraient de la culpabilité à ne pas aider ces derniers. Or on connaît de nombreuses familles dans lesquelles les anciens aident leurs descendants. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. J’interviens – une intervention de plus ! – pour indiquer que notre groupe votera ces amendements identiques de suppression de l’alinéa 9 de l’article 7.

Je veux également faire une démonstration. Parfois, je suis assez concrète, et peut-être même un peu simple, mais je pense que cela va parler à beaucoup d’entre nous.

Il est particulièrement injuste de vouloir, au travers de cette proposition du Gouvernement, augmenter la CSG sur les retraites, sans compensation directe. Une personne qui perçoit une retraite de 1 400 euros verra la CSG augmenter, puis, à terme, verra sa taxe d’habitation diminuer progressivement. Un salarié qui perçoit une rémunération de 1 400 euros verra sa CSG augmenter et les cotisations sociales diminuer – il y a donc un gain de pouvoir d’achat, nous en avons conscience et nous le saluons – et il verra aussi, à terme, sa taxe d’habitation baisser, d’où un nouveau gain de pouvoir d’achat. Pourquoi cette différence de traitement entre les actifs et les retraités ?

Je ne reviens pas sur ce que plusieurs de nos collègues ont dit quant à la contribution des retraités à notre vie, à la société. Aussi, cette mesure est, pour nous, totalement injuste. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 10 rectifié, 32, 313, 367 rectifié et 445.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 406, 278 rectifié, 314, 446, 407 rectifié et 414 rectifié n’ont plus d’objet.

L’amendement n° 155 rectifié ter, présenté par Mmes Lassarade, Deseyne, Di Folco et Gruny, MM. Paul, Paccaud, Revet, Chaize et Carle, Mme F. Gerbaud, MM. Raison et Laménie et Mme Bories, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Le 5° du I de l’article L. 162-14-1 est complété par un membre de phrase ainsi rédigé : « enfin, elles prévoient, avant le 31 mars 2018, des mesures de compensation de l’augmentation de la contribution sociale généralisée pour les professionnels de santé concernés ; »

La parole est à Mme Florence Lassarade.

Mme Florence Lassarade. Les professionnels de santé libéraux vont bénéficier du même allégement de cotisations maladie et famille que les autres travailleurs indépendants, afin de compenser la hausse de la CSG.

Cependant, pour les professionnels de santé libéraux, dont les cotisations maladie et famille sont prises en charge, en totalité ou en partie, par l’assurance maladie, notamment les médecins de secteur 1, la mesure de réduction dégressive des cotisations prévue pour les travailleurs indépendants ne permettra pas de compenser la hausse de CSG, compte tenu de cette prise en charge préexistante.

Des avenants conventionnels doivent donc être conclus au plus vite avec les professions concernées, afin de prévoir des mesures de compensation équitables et sans discrimination pour chaque profession de santé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les compensations de l’augmentation de la CSG, pour les praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés dont les cotisations sont prises en charge par l’assurance maladie, seront définies dans le cadre d’une négociation conventionnelle dont il semble difficile, par nature, de fixer le terme.

À défaut de retrait de cet amendement, la commission émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Madame Lassarade, l’amendement n° 155 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Florence Lassarade. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 155 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 33, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Rédiger ainsi cet alinéa :

5° Au deuxième alinéa de l’article L. 172-1, les mots : « moyens correspondant aux cotisations versées » sont remplacés par les mots : « soumis à cotisations au sens de l’article L. 242-1 perçus » ;

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement, comme les deux suivants, sont rédactionnels, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 34, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au premier alinéa du IV de l’article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « au deuxième alinéa de » sont remplacés par le mot : « à » ;

L'amendement n° 35, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Supprimer cet alinéa.

Quel est l’avis du Gouvernement sur ces trois amendements ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Le Gouvernement est favorable aux trois amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 33.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 34.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 35.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 315, présenté par MM. Daudigny et Guillaume, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 27

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les ministres chargés des solidarités et de la santé et de l’action et des comptes publics remettent au Parlement, au plus tard le 1er janvier 2019, un rapport d’évaluation sur les conséquences financières de la hausse du taux de la contribution sociale généralisée d’1,7 point.

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Le présent amendement vise à évaluer les conséquences de la réforme de la hausse généralisée de la CSG de 1,7 point pour la première année de mise en œuvre.

Vu l’importance de cette réforme, du point de vue tant du financement de la protection sociale que du transfert entre générations, il serait particulièrement utile que des premiers éléments d’appréciation puissent être apportés au bout d’un an.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Comme je l’ai dit en commission, monsieur Daudigny, ce type d’information a vocation à figurer dans les documents annexés au PLFSS ; un rapport spécifique ne me semble donc pas nécessaire.

En conséquence, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Je veux dire au sénateur Daudigny que je comprends sa demande d’évaluation, qui est tout à fait respectable, et que le Gouvernement est évidemment à la disposition du Parlement et de son rapporteur général pour fournir toute information demandée.

Néanmoins, il me semble que la Commission des comptes de la sécurité sociale, d’une part, et le PLFSS, d’autre part, fournissent un certain nombre d’éléments.

Si l’avis du Gouvernement est défavorable, ce n’est pas parce qu’il veut cacher des choses, mais parce qu’il revient à votre assemblée, me semble-t-il, d’évaluer le dispositif que le Gouvernement propose de mettre en place. Un rapport supplémentaire du Gouvernement ne ferait peut-être que jeter l’opprobre sur votre propre position, alors que nous ferons preuve de diligence pour vous répondre si vous nous interrogez, ou si le Sénat évalue une mesure liée aux cotisations ou à la sécurité sociale.

J’émets donc un avis défavorable, même si je ne suis pas défavorable sur le fond.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 315.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les neuf premiers sont identiques.

L’amendement n° 7 rectifié ter est présenté par Mme Bruguière, MM. Mayet et B. Fournier, Mme Keller, MM. Courtial et Paul, Mme Deseyne, M. Lefèvre, Mme Gruny, M. Adnot, Mmes A.M. Bertrand et Lopez, M. Dufaut, Mme Lamure et MM. Pierre, Paccaud et Allizard.

L’amendement n° 247 rectifié est présenté par MM. Pellevat et Bockel.

L’amendement n° 254 rectifié bis est présenté par Mme Férat, MM. Détraigne, Kern et Luche, Mmes Joissains et Sollogoub, MM. Canevet, Janssens, Médevielle et L. Hervé, Mme de la Provôté et M. Savary.

L’amendement n° 357 rectifié ter est présenté par M. Duplomb, Mme Primas, MM. Pointereau, J.M. Boyer et Cuypers, Mme Deromedi, MM. Buffet, Joyandet et Schmitz, Mmes Imbert, Bonfanti-Dossat et Garriaud-Maylam, MM. Panunzi, Mouiller et Bazin, Mme Chauvin, MM. Laménie, Bas, Charon et Brisson, Mme Lassarade et M. Darnaud.

L’amendement n° 371 rectifié est présenté par M. Menonville, Mme Guillotin, MM. Arnell, A. Bertrand, Castelli et Collin, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mmes Laborde et Jouve et M. Vall.

L’amendement n° 410 est présenté par M. Marie.

L’amendement n° 428 est présenté par M. Amiel.

L’amendement n° 436 est présenté par M. Decool.

L’amendement n° 516 rectifié bis est présenté par M. Gremillet, Mme Morhet-Richaud, MM. Revet, Leroux et Poniatowski, Mme Berthet, M. Milon, Mme Canayer, MM. Bonhomme, Raison, Perrin, Cornu, Vaspart, D. Laurent, Houpert, Grosdidier, de Legge, Huré et Gilles, Mme Micouleau, MM. Carle et de Nicolaÿ, Mme Di Folco, MM. Chaize et Pillet, Mmes Troendlé et Estrosi Sassone, MM. Chatillon, Dallier et Bouchet, Mme F. Gerbaud, M. Bizet et Mme Bories.

Ces neuf amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéas 31 et 32

Supprimer ces alinéas.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié ter.

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Le projet de loi vise à remplacer le taux de cotisation maladie des exploitants agricoles, actuellement fixé à 3,04 %, par un taux progressif s’étalant de 1,5 % à 6,5 % selon le revenu professionnel.

Selon l’étude d’impact de la MSA, la Mutualité sociale agricole, cette mesure a un coût de 120 millions d’euros pour l’agriculture française.

Cet amendement vise à rétablir le taux en vigueur de la cotisation d’assurance maladie et maternité des exploitants agricoles. En effet, depuis le 1er janvier 2016, les exploitants agricoles bénéficient d’un taux de cotisation fixe de 3,04 %. Ce taux résulte d’un engagement pris par l’État en 2016 en vue, d’une part, de redonner de la compétitivité aux exploitants agricoles français et, d’autre part, de rapprocher le taux de prélèvement social de nos voisins européens. Ces engagements s’étaient traduits par la baisse de sept points de la cotisation d’assurance maladie et maternité applicable dès 2016.

L’application de la mesure présentée conduirait à une hausse de charges pour tous les agriculteurs disposant d’un revenu professionnel au moins égal à 13 500 euros, soit 75 % du SMIC.

Avec la hausse de la CSG prévue à cet article 7, seuls les agriculteurs ayant de très faibles revenus bénéficieraient d’une compensation intégrale ; ceux qui ont, au contraire, des revenus plus élevés – un peu plus élevés – subiront une perte de 5 points de revenus. Or tout le monde le sait ici, dans leur majorité, les agriculteurs ne roulent pas sur l’or.

Mme la présidente. L’amendement n° 247 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter l’amendement n° 254 rectifié bis.

Mme Françoise Férat. Cet amendement est identique au précédent, mais je me permets d’insister sur un chiffre qui me touche véritablement : le coût de 120 millions d’euros pour l’agriculture française, qui, vous en conviendrez, souffre déjà terriblement et n’a nul besoin d’être davantage maltraitée.

Cet amendement, vous l’avez compris, vise à rétablir le taux en vigueur de la cotisation d’assurance maladie et maternité. Je crains, monsieur ministre, que nous n’ayons pas mesuré les conséquences de cette mesure, qui conduirait en effet à ce que seuls les agriculteurs ayant de faibles revenus bénéficient d’une compensation intégrale. On parle là d’un revenu de 13 500 euros par an ! Monsieur le ministre, je vous laisse méditer… (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour présenter l’amendement n° 357 rectifié ter.

M. Laurent Duplomb. C’est le même sujet : il s’agit de rétablir le taux en vigueur de la cotisation d’assurance maladie à 3,4 %.

Je vous rappelle que ce taux était une mesure de compensation et de compétitivité, introduite à la suite des manifestations, en 2015, des agriculteurs, qui ont soulevé la problématique des revenus inférieurs au cours des années précédentes, en raison des crises agricoles.

En ce qui concerne ces 120 millions d’euros qui vont être pris dans la poche des agriculteurs, je vous rappelle aussi, comme l’ont fait mes collègues, que le niveau de salaire ou de rémunération des agriculteurs qu’on estime aujourd’hui normal est de 13 500 euros, niveau dont il faut se contenter pour bénéficier d’une certaine forme de réduction.

En outre, je tiens à vous le dire, cela ne correspond pas au budget supplémentaire dont on aurait besoin pour compenser cette mesure, puisque, dans le budget pour l’agriculture, 437,9 millions d’euros ont été donnés en 2017 par le ministère de l’agriculture à la MSA pour compenser cette diminution de cotisations. Or, dans le projet de loi de finances pour 2018, ces 437 millions d’euros sont supprimés pour être remplacés par 300 millions d’euros de dotation provisionnelle pour dépenses imprévisibles.

Par conséquent, les agriculteurs vont faire les frais d’une baisse d’exonérations et, dans le même temps, la compensation est remplacée par une dotation provisionnelle, dont on ne sait pas encore si elle sera intégralement utilisée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 371 rectifié.

M. Guillaume Arnell. L’amendement porté par notre collègue Franck Menonville est identique aux amendements précédents.

Je souhaite ajouter que l’agriculture, tant en France hexagonale que dans les outre-mer, pose aujourd'hui problème. On entend partout les cris des agriculteurs, et il ne me semble pas que ce soit le moment d’ajouter encore de la détresse à une détresse déjà largement exprimée.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 410.

M. Didier Marie. Je veux simplement rappeler que le gouvernement précédent, face aux difficultés rencontrées par les agriculteurs, avait pris la décision de baisser de sept points la cotisation d’assurance maladie et maternité, dès 2016, pour redonner des marges de compétitivité et pour rapprocher les taux de prélèvements sociaux de ceux de nos voisins européens.

Le Gouvernement décide de changer la donne et de passer d’un taux de cotisation maladie et maternité de 3,04 % à un taux progressif de 1,5 % à 6,9 %. Au premier abord, cela pourrait paraître séduisant, puisque les plus faibles revenus en seront les principaux bénéficiaires. Cela étant, quand on examine de près les montants des gains en cause, on s’aperçoit que, pour un revenu annuel de 5 000 euros, le gain serait de 48 euros, que, pour un revenu annuel de 10 000 euros, il ne serait que de 134 euros, que l’opération serait neutre à 13 500 euros et qu’elle deviendrait négative au-delà de cette barre.

On demande donc tout simplement que le taux de 3,04 % soit maintenu et que l’ensemble de la profession agricole puisse en bénéficier.

Rappelons au passage qu’un revenu annuel de 13 500 euros correspond à 75 % du SMIC.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Amiel, pour présenter l’amendement n° 428.

M. Michel Amiel. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n°428 est retiré.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour présenter l’amendement n° 436.

M. Jean-Pierre Decool. Cet amendement étant identique aux précédents, je ne présenterai pas une nouvelle fois son objet.

Je rappelle simplement qu’il tend à rétablir le taux en vigueur de la cotisation d’assurance maladie et maternité des exploitants agricoles ; naturellement le groupe Les Indépendants – République et Territoires – le votera.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 516 rectifié bis.

M. Daniel Gremillet. Cet amendement étant identique aux précédents, j’ajouterai simplement deux points.

Premièrement, cela fait pratiquement six ans que la profession agricole – les pouvoirs publics le reconnaissent d’ailleurs au fil des années – souffre d’une situation de distorsion de concurrence à l’égard de différents pays de l’Union européenne. Depuis la fixation, le 1er janvier 2016, du taux actuel de cotisation, on a retrouvé un niveau quasiment identique à la moyenne européenne.

Deuxièmement, je suis surpris, monsieur le ministre, que l’on puisse prendre une telle décision, qui fragilise encore un peu plus l’agriculture, quand on sait la place de celle-ci, des agriculteurs de nos territoires et de l’agroalimentaire dans la balance commerciale. En effet, on peut le constater, depuis un certain temps, le niveau des exportations agroalimentaires françaises n’est pas au beau fixe ; il est plutôt en baisse. Ces formes de distorsion de concurrence faisaient partie du débat, eu égard au niveau de revenu des agriculteurs français.

Revenir sur cette décision, présentée comme durable et de nature à redonner de la compétitivité ainsi qu’un peu d’espoir aux agriculteurs, reviendrait à porter un coup vraiment terrible à notre agriculture, à la balance commerciale de notre pays et, surtout, à la force de l’agroalimentaire français.

Voilà ce que je voulais ajouter aux propos de mes collègues, parce que, derrière cela, il y a des femmes et des hommes et il y a toute la puissance de notre agriculture. C’est un signe de reconnaissance du travail quotidien de celle-ci. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Jean-Pierre Decool applaudit également.)

Mme la présidente. L’amendement n° 397 rectifié bis, présenté par Mmes Guidez, Doineau et Dindar, MM. Henno et Mizzon, Mme Billon, MM. Bonnecarrère et Canevet, Mme de la Provôté, MM. Delcros et Détraigne, Mme Gatel, MM. L. Hervé et Janssens, Mme Joissains, MM. Kern, Lafon et Laugier, Mmes Létard et Loisier, MM. Longeot, Louault, Marseille et Maurey et Mme Sollogoub, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 32

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Pour les personnes mentionnées aux 1°, 2° et 5° de l’article L. 722-10, le taux de la cotisation d’assurance maladie et maternité assise sur les revenus professionnels du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole ou sur l’assiette forfaitaire définis aux articles L. 731-14 à L. 731-21 est plafonné à 3,04 %.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Le Gouvernement a engagé une transformation du régime social des indépendants. Confier la protection sociale des indépendants au régime général suppose d’harmoniser les cotisations et les prestations y afférent. En alignant la protection sociale des agriculteurs sur le régime général, la rédaction actuelle de l’article 7 aurait pour effet de baisser le taux des cotisations jusqu’à 1,5 % pour les exploitations agricoles les plus modestes.

En revanche, pour les agriculteurs dont les revenus professionnels sont supérieurs à 20 000 euros, cette harmonisation se traduirait par l’annulation d’une partie de la baisse de charges du taux de la cotisation d’assurance maladie et maternité de sept points, décidée en 2015.

Aussi, pour ces exploitations agricoles, le taux de cotisations pourrait passer de 3,04 % à 6,5 %, selon le montant des revenus professionnels.

Il est, par conséquent, proposé de plafonner le taux de la cotisation d’assurance maladie et maternité des agriculteurs à 3,04 %, afin que la réforme envisagée par le Gouvernement permette une harmonisation par le haut pour notre agriculture, dont la compétitivité est essentielle, je le rappelle, pour notre pays.

Mme la présidente. L’amendement n° 215 rectifié, présenté par MM. Botrel, Daudigny et Guillaume, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Cabanel et Kerrouche, Mme Cartron et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le a du 2° du II du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2019.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Le présent amendement prévoit le report de la modification du dispositif de cotisations sociales agricoles, le temps qu’une évaluation réelle des conséquences puisse avoir lieu, afin de mieux calibrer un dispositif qui pénaliserait en l’état, d’après les premières estimations, 30 % à 40 % des agriculteurs, ceux qui gagnent plus de 1 300 euros nets par mois.

L’instauration d’un système plus progressif n’est pas mise en cause, mais il conviendrait indubitablement de mieux calibrer le dispositif, pour éviter de précariser des personnes qui se trouvent déjà dans une situation difficile.

Il s’agit non pas d’un amendement de suppression, mais d’une proposition de report d’un an de la mesure.

Au surplus, la tenue des états généraux de l’alimentation pourrait permettre de disposer d’une traduction législative plus adéquate au traitement de ce sujet.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Tout le monde l’aura compris, cet amendement vise à supprimer le principe de la réduction dégressive de la cotisation maladie des exploitants agricoles.

Le taux de la réduction est fixé par voie réglementaire. En mars 2016, dans le cadre d’un plan d’urgence pour l’agriculture, le Gouvernement avait baissé uniformément de sept points, sans considération du revenu, le taux de cotisation des exploitants agricoles, qui a ainsi été fixé à 3,04 % pour les années 2016 et 2017.

Cette mesure a été financée par le ministère de l’agriculture, pour un montant de 520 millions d’euros. D’après l’étude d’impact, la moitié de cette somme, j’y insiste, a bénéficié aux 15 % des exploitants agricoles dont les revenus sont les plus élevés.

M. Michel Raison. C’est normal, c’était sans condition de ressources !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je le précise, mon cher collègue. Ce sont les chiffres ; j’essaie d’être clair.

Dans le cadre de l’article 7, dont nous discutons, il est prévu d’harmoniser le taux de cotisation maladie des exploitants agricoles avec celui des autres travailleurs indépendants, avec une réduction dégressive allant de 1,5 % à 6,5 %, selon le revenu. Le coût est de 400 millions d’euros pour la sécurité sociale, sans compensation. D’où la différence de 120 millions d’euros, que vous avez évoquée, qui n’iront pas à l’agriculture.

Le dispositif proposé est néanmoins plus ciblé sur les agriculteurs à bas revenus, pour lesquels la cotisation maladie est divisée par deux. Au total, selon les chiffres fournis – peut-être M. le ministre pourra-t-il les confirmer ou les infirmer –, 57 % des exploitants agricoles seraient gagnants avec la mesure proposée.

La commission s’est déterminée en essayant de savoir quelle était la mesure la plus juste pour les exploitants agricoles. Peut-être pourrait-on trouver une voie encore plus juste, me direz-vous. Certes, mais je pense, pour ma part, que la proposition va dans le sens de ce que nous entendons depuis deux, voire trois ans, à savoir qu’il faut aider les agriculteurs les plus en difficulté.

C’est la raison pour laquelle, compte tenu des éléments à sa disposition, la commission a émis un avis défavorable sur ces différents amendements, même si j’émets des réserves ; j’attends l’avis du Gouvernement.

Cela dit, nous ne sommes évidemment pas contre les exploitants agricoles ; nous essayons simplement d’être objectifs.

M. Laurent Duplomb. Ce n’est pas leur envoyer un signal positif !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. S’il y a un différentiel de 120 millions d’euros, je propose que celui-ci reste dans les caisses agricoles, sous une forme ou sous une autre.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est une question importante. Vous avez raison, un revenu annuel de 13 000 euros ne constitue pas un revenu important.

Mme Françoise Férat. C’est le moins que l’on puisse dire !

M. Gérald Darmanin, ministre. J’y reviendrai, mais personne ne prétend cela.

Je veux remercier le rapporteur général de l’honnêteté de sa présentation, car il a parlé d’or : ses mots sont justes et ses chiffres ne sont pas contestables.

En revanche, il y a des choix politiques et budgétaires. Quel est le fond de cette affaire ?

Un certain nombre d’entre vous l’ont rappelé, sans jamais préciser qu’il s’agissait d’une mesure pérenne, en 2015 – l’année qui précédait l’élection présidentielle, vous l’aurez remarqué –, au moment de la crise du lait, le ministre de l’agriculture avait expliqué qu’il fallait procéder à une baisse de cotisation très importante, mais temporaire. Ainsi, aujourd’hui, dans le cadre de la réforme de la CSG et de l’alignement sur les indépendants, nous devons rediscuter de ce dispositif pour le pérenniser.

En effet, si l’on considère, en miroir, le projet de loi de finances, les conséquences de nos décisions, passées ou actuelles, se traduisent aussi par des crédits budgétaires. Il ne s’agit pas que de cotisations que l’on baisserait ou que l’on augmenterait. La mesure que vous propose aujourd’hui le Gouvernement est largement supérieure, pour toutes les catégories d’agriculteurs, les plus aisés comme les moins aisés – on sait qu’ils sont majoritairement peu aisés. Tous les agriculteurs seront bénéficiaires par rapport au régime de 2015, qui était en vigueur avant la mesure gouvernementale exceptionnelle de 2016 ; aucun agriculteur ne connaîtra une situation stagnante ou défavorable par rapport à l’année 2016.

C’est le premier point, et je vous prie de m’en excuser, car je ne veux pas alourdir nos débats par des déclarations qui pourraient passer pour de la provocation. Il n’y a là nulle provocation, connaissant les difficultés très fortes vécues par ces personnes extrêmement courageuses – je le sais pour en connaître dans mon territoire. Néanmoins, si le gouvernement de l’époque avait tenu ce genre d’argumentation, on ne serait pas en train d’en discuter maintenant, on parlerait d’un système pérenne.

Deuxième point, je ne peux pas accepter que l’on dise que le ministère de l’agriculture ne sait pas ce que l’on fera des 300 millions d’euros. Monsieur le sénateur, soyons raisonnables ! Le rapport de la Cour des comptes a démontré que la dérive budgétaire du ministère de l’agriculture au cours du quinquennat précédent représentait 7 milliards d’euros, et la France est incapable, depuis des années, de se mettre en accord avec la politique européenne. D’où des apurements communautaires qui nous coûtent une fortune.

Ainsi, demain, je vais de nouveau devoir présenter au conseil des ministres un projet de loi de finances rectificatives ouvrant 1 milliard d’euros de crédits pour le ministère de l’agriculture, ce que nous ferons, évidemment.

Il s’agit certes de remédier à des difficultés climatiques ; à cela, on ne peut pas faire grand-chose, si ce n’est prévoir des provisions pour risques, ce que nous allons faire, car c’est de bonne gestion – même s’il est bien difficile de prévoir ce qui se produira pour telle ou telle crise sanitaire, il faut tout de même provisionner. Mais il s’agit aussi de prévoir 700 millions d’euros – rien que pour cette année ! – d’apurements communautaires. Comme c’est forfaitaire, on ne peut pas réclamer aux agriculteurs, c’est bien logique, des aides qu’ils ont touchées indûment des années plus tôt – connaissant leurs difficultés, il serait à la fois difficile et inhumain de les réclamer. Et tout cela, parce que nous sommes incapables de nous mettre en ligne avec la politique communautaire !

Cela nous conduit à payer des centaines de millions d’euros – la Cour des comptes évoque jusqu’à 7 milliards d’euros sous le quinquennat précédent –, alors que tout cet argent pourrait utilement être utilisé pour l’agriculture française.

Il n’est donc pas juste et, surtout, il n’est pas raisonnable d’affirmer, dans votre démonstration, que le Gouvernement mettrait 300 millions d’euros de côté sans savoir à quoi servira cette somme.

Ne vous inquiétez pas ! La première chose que nous avons faite en arrivant aux responsabilités, comme M. le rapporteur général de la commission des finances a bien voulu le souligner, c’est de nous atteler à la sincérisation du budget, notamment du budget du ministère de l’agriculture, qui, objectivement, ne permettait ni un bon contrôle du Parlement ni une bonne relation de confiance avec les agriculteurs, avec des chiffres qui dépassent l’entendement.

Troisième point, comme M. le rapporteur général l’a dit avec justesse, vous nous proposez à peu près 300 millions d’euros de dépenses supplémentaires, j’y reviendrai ultérieurement, soit un gain de pouvoir d’achat important, si j’ose dire, pour les 15 % d’agriculteurs les plus aisés, alors que la position du Gouvernement vise à proposer une augmentation – et non une stagnation – du pouvoir d’achat pour quasiment les deux tiers d’entre eux – 60 % selon mes chiffres, à quelques chiffres près, monsieur le rapporteur général.

Je suis tout à fait d’accord avec vous, madame la sénatrice, un revenu annuel de 13 000 euros, c’est un problème !

Mme Françoise Férat. C’est pire que cela !

M. Gérald Darmanin, ministre. Toutefois, et c’est mon quatrième point, la difficulté profonde du système agricole français est un problème non pas de cotisations, mais de prix.

On peut s’écharper pendant des jours et des nuits – vous aurez raison et, sans doute, moi aussi ! –, la difficulté des agriculteurs français, qui a alimenté la réflexion des états généraux de l’alimentation et mobilisé les différents gouvernements, tient au fait qu’ils ne vivent pas du fruit de leur travail. C’est un vrai sujet.

On peut toujours jouer sur les cotisations, mais la difficulté structurelle, au-delà du débat sur la baisse des cotisations, qui, certes, pourrait aider les agriculteurs, est un problème profond de prix. Ce n’est pas qu’un problème de cotisations, on est bien d’accord.

M. Pierre Ouzoulias. Quelle est la solution ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Enfin, je veux rappeler à votre assemblée que le ministère de l’agriculture travaille en ce moment – de nombreux sénateurs, de toutes les sensibilités politiques participent à ce travail – à une transformation profonde du monde agricole dans ses relations aux lieux de consommation et à la grande distribution, de manière que les agriculteurs puissent vivre du fruit de leur travail et payer des cotisations comme tous les indépendants. Intervenir nuitamment pour proposer une dépense fiscale supplémentaire ne suffira pas à régler le problème, même si l’on supprimait les cotisations, vu le bas niveau de revenu des agriculteurs. Vous le savez mieux que moi, ces derniers veulent vivre du fruit de leur travail, ce qui n’est pas possible aujourd'hui, loin s’en faut.

M. Jean Sol. Et en attendant ?

M. Gérald Darmanin, ministre. En attendant, nous proposons une augmentation de 60 % du pouvoir d’achat pour ceux qui sont le plus en difficulté et dont les revenus sont très bas.

La semaine dernière, il m’a semblé entendre, dans cet hémicycle, avec des mots extrêmement durs, que nous ne faisions pas assez d’efforts sur la sécurité sociale – je ne sais pas si vous étiez tous présents ; M. Vanlerenberghe, qui était là, peut en témoigner. J’ai entendu qu’il fallait faire beaucoup plus sur le budget du PLFSS – certains réclamaient même deux fois plus d’économies.

Or, en l’espace de quinze minutes, vous avez adopté un amendement qui fait perdre 4,5 milliards d’euros de recettes fiscales, et vous allez – sans doute – maintenant voter une dépense supplémentaire de 300 millions d’euros. Autrement dit, en un quart d’heure, la chambre haute a dégradé la copie gouvernementale de 5 milliards d’euros ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Nous tenons un discours raisonnable. Il est vrai que je m’adressais plutôt à la partie droite de l’hémicycle, puisque ce n’est pas de ce côté-ci, j’en conviens, que l’on me demande de faire plus d’économies… (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Si vous considérez qu’une dette de 2 200 milliards d’euros ne pose pas problème, on peut continuer ainsi, mais le prochain ministre des comptes publics viendra sans doute vous annoncer que la dette s’élèvera alors à 3 000 milliards d’euros.

Ayons un débat – je ne dis pas que le débat est médiocre –, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité, sur les économies que vous proposez par ailleurs, si vous pensez que c’est une solution importante. Mais vous gagez vos propositions sur le tabac.

M. Laurent Duplomb. Les agriculteurs font des économies tous les jours !

M. Gérald Darmanin, ministre. Les agriculteurs en font tous les jours, l’école en fait tous les jours, les collectivités locales en font tous les jours, la santé en fait tous les jours, les quartiers en font tous les jours, la ruralité en fait tous les jours… (M. Laurent Duplomb s’exclame.) C’est un débat de responsabilités. Je suis tout à fait preneur d’un tel débat, mais nous sommes dans une discussion budgétaire.

Vous avez gagé votre proposition sur le tabac. Il s’agirait d’augmenter le paquet de cigarettes de 1,50 euro, qui s’ajoutera au prix de dix euros prévus, si je comprends bien. Le Gouvernement peut toujours lever le gage, mais il faut trouver des économies par ailleurs.

Pour toutes ces raisons, et j’en profite pour remercier une nouvelle fois le rapporteur général de son honnêteté et de sa démarche, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

Arrêtons un seul instant de nous intéresser aux seules cotisations. Attachons-nous à la difficulté profonde du monde de l’agriculture, que vous connaissez bien, à savoir les prix. Les agriculteurs veulent vivre du fruit de leur travail et, comme tous les indépendants, payer leurs cotisations, à condition évidemment qu’il leur reste quelque chose à la fin du mois.

Telle est la vision d’ensemble du Gouvernement.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, pouvez-vous me confirmer que vos avis défavorables valent pour tous les amendements en discussion commune ? (M. le rapporteur général et M. le ministre le confirment.)

La parole est à M. Michel Raison, pour explication de vote.

M. Michel Raison. Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, permettez-moi de faire quelques remarques.

Monsieur le ministre, je ne veux pas me bagarrer sur les chiffres, mais nous n’avons jamais demandé ici la suppression de la taxe d’habitation, qui va coûter 10 milliards d’euros au pays. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Annie Guillemot applaudit également.) Par rapport à ces 10 milliards, notre amendement à quelques millions d’euros ne pèse pas lourd.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est absurde ! Les agriculteurs paient la taxe d’habitation.

M. Michel Raison. Deuxième remarque, contrairement à d’autres problèmes, notamment les relations avec la grande distribution, la vente des denrées agricoles est en effet très spécifique, mais ce problème ne concerne pas que la France. C’est un problème agricole mondial, parce que le cours des denrées agricoles est généralement européen et mondial. Vous le savez ?…

Vous ne pouvez donc pas nous raconter, à nous, ce soir que, après les assises de l’alimentation, parce qu’il y a du renouveau dans la politique, les agriculteurs seront payés en fonction de leur prix de revient. Nous savons que ce ne sera pas possible. Même si l’on peut introduire une notion de prix de revient dans le contrat agricole entre le producteur et le transformateur, le premier acheteur, aucun acheteur ne signera de contrat si celui-ci est établi sur un prix de revient fixé pour cinq ans, sans connaître le cours de sa marchandise, qu’il subira quand il aura à vendre ses produits transformés. C’est une spécificité de l’agriculture, et c’est la raison pour laquelle, comme l’a dit mon collègue Daniel Gremillet, il faudrait aussi trouver des solutions pour se rapprocher du niveau de la compétitivité des autres pays.

Vous avez quasiment opposé les 50 % d’agriculteurs qui gagnent le moins, qui sont en difficulté, à ceux qui, peut-être parce qu’ils ont des méthodes de gestion un peu plus modernes, arrivent à équilibrer leurs comptes. Mais savez-vous pourquoi ces derniers parviennent à les équilibrer ? Parce qu’un agriculteur qui gagne 20 000 euros – j’ai eu des débats, il y a fort longtemps, avec un certain nombre de directeurs de chambres d’agriculture, qui ne l’avaient eux-mêmes pas très bien compris, voyez-vous ! – et se verserait un salaire de 20 000 euros coulerait sa ferme dans les deux ans ! Il paie des charges sociales sur un revenu dont il ne dispose pas comme salaire. (En effet ! sur des travées du groupe Les Républicains.)

C’est l’un des rares métiers à être dans cette situation. Un peintre a des pots de peinture, des pinceaux et une camionnette. Qu’il soit producteur de lait, de vaches allaitantes ou de porcs ou céréalier, le paysan a des stocks : des stocks en animaux dans des bâtiments, des stocks en terre s’il est céréalier… Ces stocks doivent être financés. S’il contracte chaque année un prêt à court terme à la banque pour financer ces stocks, l’agriculteur se retrouve en cessation de paiement au bout de deux ans.

C’est la raison pour laquelle nous avons déposé ces types d’amendements, monsieur le ministre. Nous connaissons tout de même un peu la manière dont se fabrique un prix agricole et la rotation très longue des capitaux et des stocks très importants en terre, en élevage et en autres denrées dans une exploitation agricole. Si vous le voulez, nous vous invitons à venir visiter quelques exploitations agricoles. Vous pourrez y voir un certain nombre de choses et y entendre des propos un peu plus détaillés sur ces questions.

L’agriculture est très spécifique.

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Michel Raison. Elle ne fonctionne pas comme les autres secteurs économiques.

Je vous remercie de votre patience, madame la présidente ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Tout d’abord, je veux préciser que nous voterons l’ensemble des amendements en discussion commune, à l’exception du dernier.

Comme cela a été largement rappelé, leur vote est une nécessité pour l’ensemble de la profession agricole.

Monsieur le ministre, j’ai bien entendu vos arguments, mais, quel que soit le nom qu’on lui donne, la paysannerie française ne peut plus attendre. J’entends ce que vous dites sur les états généraux de l’alimentation pour l’avenir de l’agriculture, mais nous ne pouvons pas attendre encore et reporter les décisions qui en sortiront et les textes de loi qui en découleront à l’année suivante, voire à celle d’après. Agissons année après année ! Pour l’heure, nous discutons du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Nous verrons ce qui sortira réellement des états généraux et votre capacité alors à vous attaquer vraiment à la question des prix et à la manière dont les paysannes et paysans de notre pays peuvent aujourd'hui vivre de leur travail.

Nous verrons la volonté réelle du Gouvernement de s’attaquer à la grande distribution, qui accroît d’année en année la pression sur l’ensemble des prix agricoles dans notre pays.

Nous verrons, monsieur le ministre, la volonté qui est la vôtre, dont je ne doute pas, mais qui sera certainement très différente de celle que vous avez manifestée ces dernières années, quand vous étiez beaucoup plus proche de la majorité sénatoriale, la seule que vous daignez écouter pour ce qui concerne les explications de vote…

J’ai bien entendu vos arguments et vos commentaires. Je peux moi aussi beaucoup dire sur le précédent gouvernement, mais je crois qu’aujourd’hui les Françaises et les Français attendent autre chose de votre gouvernement. Vous nous avez d'ailleurs expliqué, pendant toute une campagne électorale, que vous alliez faire de la politique différemment, de manière moderne. Finalement, vous ne nous dites rien de neuf, si ce n’est que vous êtes obligé d’agir comme vous le faites, parce que cela n’a pas été bien fait auparavant.

Pour ma part, monsieur le ministre, je pense que, ce soir, au Sénat, en votant un certain d’amendements, nous avons la possibilité de prendre des décisions et de nous inscrire dans une logique qui répondra, demain, aux attentes des femmes et des hommes des professions agricoles de notre pays. Eh oui, vous aurez alors à en tirer les conséquences budgétaires en travaillant sur les recettes, parce que, vous le savez bien mieux que moi, un budget peut être équilibré par une augmentation des recettes ou par une réduction des dépenses. L’un ne va pas sans l’autre. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Annie Guillemot applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre, au-delà du sénateur, c’est d’abord l’agriculteur qui vous parle. Quand je ne suis pas au Sénat, je me lève encore tous les matins pour m’occuper de mes animaux.

Aujourd'hui, quand on parle de l’agriculture, c’est toujours pour la critiquer : les agriculteurs seraient des empoisonneurs, des pollueurs ; ils seraient comme ceci ou cela…

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est une nouvelle attaque portée aux agriculteurs : vous êtes en train de donner le signal que le rattrapage de compétitivité n’est plus nécessaire.

Je suis d’accord avec vous sur un point : celui de la pérennité de cette aide. Celle-ci ne doit pas s’étaler dans le temps. Nous espérons bien, d’ailleurs, que nous n’en aurons plus besoin. Cependant, cette aide était obligatoire tant que la compétitivité n’était pas retrouvée. Mais, aujourd’hui, qui peut dire que la compétitivité des exploitations agricoles françaises sera retrouvée en 2018 ? Non, ce ne sera pas le cas.

Monsieur le ministre, je veux aussi m’inscrire en faux par rapport à ce que vous avez dit sur les apurements. Si la France a été autant touchée par les apurements communautaires après de multiples appels et relances de la Commission européenne, c’est parce que l’administration française n’a pas spécialement fait son travail.

M. Gérald Darmanin, ministre. Je suis d’accord !

M. Laurent Duplomb. Les déclarations PAC des agriculteurs datent de 1992 - je les remplissais déjà à l’époque.

S’il y a une chose qui ne change pas, c’est la surface de la planète : un hectare reste un hectare ! Pourtant, pour l’administration française, depuis 1992, cet hectare n’a jamais été le même. Il a fallu faire une déclaration cadastrale en 1992, une déclaration photo un peu plus tard. Aujourd'hui, l’heure est à la télédéclaration et au satellite, et les analyses sont différentes. Les agriculteurs sont sûrement la profession la plus contrôlée. Malgré tout, depuis plus de vingt ans, on n’arrive toujours pas à savoir quelle surface ils cultivent. Eux le savent bien, qui, tous les jours, font le travail, transpirent et ne gagnent pas de fric ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Monsieur le ministre, je souhaite revenir sur des affirmations qui, hélas !, ne sont pas tout à fait justes.

Je reprends le communiqué officiel du ministère de l’agriculture de la République française du 1er avril 2016 : « Cette baisse de charges supplémentaires à destination des agriculteurs va alléger les trésoreries des exploitations de manière durable dans le temps. » Il ne s’agissait pas d’une mesure provisoire ; il s’agissait de redonner de la compétitivité à l’agriculture française.

Monsieur le ministre, vous avez fait un amalgame terrible : l’enjeu est la compétitivité, et non le traitement social des agriculteurs.

Pour ce qui est du traitement social des agriculteurs, en 2016, a été décidée une année blanche en termes de cotisations sociales agricoles. Cette décision n’a pas concerné tout le monde : ce sont les agriculteurs les plus fragiles, les plus exposés, avec les revenus les plus faibles, qui en ont bénéficié.

Je le dis là encore très sincèrement, l’enjeu est de dire aux agriculteurs si, oui ou non, on offre à l’agriculture française les conditions pour lutter sur la scène européenne.

Monsieur le ministre, vous le savez très bien, la seule politique qui existe en matière de formation des prix et des charges est communautaire. C’est la seule politique agricole qui existe au travers de l’Europe. L’Europe est restée en panne sur le reste. D’ailleurs, on voit bien, pour ce qui concerne les salaires, que l’on a beaucoup de travailleurs détachés, etc.

Pour terminer, je veux vous rappeler que le Sénat, dans une autre vie certes, a débattu d’un texte sur la compétitivité de l’agriculture et des entreprises agroalimentaires, dont j’ai été le rapporteur.

M. Daniel Gremillet. Ce texte, qui a été adopté par le Sénat, reprenait la proposition du ministre de l’époque, qui appartenait à un gouvernement d’une sensibilité différente de celle de la majorité de la Haute Assemblée, que nous avons applaudie. Les députés qui appartenaient à la minorité de l’Assemblée nationale, dont vous faisiez partie, me semble-t-il, avaient, eux aussi, adopté ce texte.

Tâchons de garder une lisibilité. Surtout, ne jouons pas avec les agriculteurs. On ne peut pas, d’un côté, donner et les replacer dans la compétitivité, à l’instar des autres agriculteurs européens, et, de l’autre, leur affliger soudainement, brutalement, un handicap. Remettons l’église au centre du village ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur Gremillet, avec tout le respect que je vous porte, j’estime que vous ne pouvez pas faire le procès de la précédente minorité parlementaire.

M. Jean-François Husson. Il ne s’agit pas d’un procès !

M. Gérald Darmanin, ministre. Cela m’étonnerait beaucoup que vous ayez voté la baisse de cotisations, parce que celle-ci figurait dans un décret. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je veux bien que l’on fasse tous les procès du monde pour appuyer une argumentation, mais vous n’en avez pas besoin d’ailleurs, puisque vous défendez votre propre amendement.

Il faut tout de même souligner, et c’est un point que personne, y compris M. Le Foll, à l’Assemblée nationale, n’a pu contredire, qu’il s’agissait bien d’une mesure non pérenne. Il appartient évidemment à la représentation nationale, si elle le souhaite, de la rendre pérenne – je ne peux contester ce point. Mais il est totalement faux d’expliquer qu'elle l’était. Au reste, la baisse de 7 points a porté sur les crédits budgétaires du ministère de l’agriculture.

Nous pouvons tous tirer des exemples de notre vie personnelle. Avec tout le respect que je dois aux agriculteurs, je pense, monsieur Duplomb, que vous n’êtes pas le seul, vous en conviendrez avec moi, à vous lever tôt le matin. Nombreux sont ceux qui se lèvent tôt le matin ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe socialiste et républicain.)

M. Laurent Duplomb. Je n’ai pas dit que vous ne vous leviez pas tôt le matin !

M. Gérald Darmanin, ministre. Je ne parlais pas de moi : j’ai la chance d’avoir un travail nettement moins fatigant que beaucoup de gens, et j’en suis fort heureux.

Mais je suis assez étonné, monsieur le sénateur, que l’argument du rapporteur général, qui ne peut pas être suspecté d’être particulièrement complaisant avec le Gouvernement depuis le début de l’examen du projet de loi,…

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. En effet !

M. Gérald Darmanin, ministre. … ne vous ait pas convaincu de l’intérêt de la mesure que nous proposons.

Au débat portant sur la question de savoir si un revenu de 13 500 euros est important, la réponse est évidemment non. Personne n’a dit que l’on était riche avec un tel salaire, surtout quand le métier est extrêmement difficile.

Cependant, notre mesure assurera à 60 % des agriculteurs – et non à 50 % – un gain de pouvoir d’achat extrêmement important, en comparaison des années 2015 et 2016. Bien sûr, on peut toujours demander plus… Mais je constate une nouvelle fois que la responsabilité budgétaire du pays ne vous pousse pas à me dire où il faut trouver des économies par ailleurs.

M. Raison a évoqué la taxe d’habitation. Je me permets de souligner que les agriculteurs la paient aussi. Pour prendre un cas extrêmement concret, pour quelqu'un qui gagnerait 14 000 euros dans l’année, l’augmentation de 1,7 point de la CSG représenterait une hausse de 240 euros. La première année de la trajectoire budgétaire que nous proposons, cette augmentation de CSG serait compensée par la suppression de la taxe d’habitation.

Ne divisons pas le PLF et le PLFSS.

Vous avez le droit de proposer la suppression de la baisse de la taxe d’habitation ; j’ai cru avoir entendu, d’ailleurs, que c’était un projet de la majorité sénatoriale. Je le respecte, mais ne faisons pas comme si les agriculteurs n’étaient concernés que par le point que nous évoquons ici. Ils sont concernés par toutes les mesures de pouvoir d’achat, y compris la baisse de la taxe d’habitation, que vous voulez supprimer par ailleurs.

Je crois que le Sénat est maintenant assez informé du projet du Gouvernement et des amendements de la majorité sénatoriale.

L’avis du Gouvernement demeure défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. N’étant pas agriculteur, je ne me permettrai pas de reprendre à mon compte les arguments avancés par certains de mes collègues.

Cependant, dans des fonctions que j’exerçais voilà encore quelques jours, j’ai eu l’occasion de rencontrer des agriculteurs, non pas pour qu’ils se vantent de ce qu’ils font sur le territoire, mais parce qu’ils rencontraient des problèmes de revenus, notamment de RSA.

De fait, dans les départements, le nombre d’agriculteurs bénéficiaires du RSA, dont l’indemnité transite, d'ailleurs, par la MSA, est de plus en plus important. Cette croissance est vraiment très significative. Cela montre qu’ils ne se sont pas encore remis de la crise qu’ils ont traversée.

M. Gérald Darmanin, ministre. Bien sûr !

M. René-Paul Savary. La fixation du taux à 3,04 %, qui a été décidée en 2016 – ce n’est pas vieux ! – et qui est l’une des rares mesures prises par le gouvernement précédent que j’ai considérées bonnes, n’a donc pas encore, semble-t-il, porté ses fruits.

Je déplore que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale accumule les coups. On verra, dans la semaine, qu’il s’attaque aux boissons sucrées. C’est la production de sucre qui risque d’en pâtir, alors même que les quotas sucriers viennent cette année de disparaître, ce qui rend le prix du sucre volatil et remet en cause le modèle économique d’un certain nombre d’exploitations.

On verra aussi, à l’article 8, qui transforme le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qu’un certain nombre d’avantages concédés aux emplois saisonniers, permettant, notamment dans les zones de vendanges, d’embaucher plus facilement de la main-d’œuvre locale plutôt que de la main-d’œuvre étrangère, sont également remis en cause.

C’est donc régulièrement que l’on porte de petits coups aux agriculteurs. Ce n’est pas le bon signal à leur donner, à un moment où ils connaissent des difficultés particulières. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne suis pas non plus agriculteur, mais j’essaie de comprendre.

Vous êtes toutes et tous attachés à la justice. Or, en l’espèce, la proposition du Gouvernement me semble plus juste que la situation actuelle, puisque le dispositif va bénéficier à 60 % des exploitants agricoles, qui en sortiront gagnants.

Comme je l’ai indiqué, le dispositif actuel n’a bénéficié qu’à 15 % des exploitants, ceux dont les revenus étaient les plus élevés, pour un montant équivalent à la moitié de la somme de 520 millions d’euros. Je ne suis pas sûr que ce soit véritablement une mesure de justice. Or c’est la justice qui me guide.

Peut-être M. le ministre pourrait-il convaincre la Haute Assemblée s’il prenait l’engagement de maintenir au profit de l’agriculture les 120 millions d’euros de différentiel avec le dispositif actuel… À chacun de prendre ses responsabilités.

En tout état de cause, la commission a émis, sur la base de ce raisonnement, un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 rectifié ter, 254 rectifié bis, 357 rectifié ter, 371 rectifié, 410, 436 et 516 rectifié bis.

(Les amendements sont adoptés.) (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Annie Guillemot applaudit également.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 397 rectifié bis et 215 rectifié n'ont plus d'objet.

L'amendement n° 36, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 37

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… - La seconde phrase du 1° du I de l’article 30 de la loi n° 2015-1702 de financement de la sécurité sociale pour 2016 est supprimée.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 36.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 235, présenté par MM. Morisset et Mouiller, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 40

Remplacer les mots :

de l’imposition des revenus de l’année 2017

par les mots :

des revenus perçus depuis le 11 octobre 2017

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-Marie Morisset.

M. Jean-Marie Morisset. L’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale, prévoit que l’augmentation du taux global des prélèvements sociaux sur les revenus du capital, revenus fonciers et plus-values immobilières s’appliquera à compter de l’imposition des revenus de l’année 2017.

Ainsi, à titre d’exemple, une vente d’immeuble ou de terrain agricole réalisée en juin 2017 sera taxée à un taux supérieur de 1,7 % au taux connu par le contribuable au moment de la cession.

Or une telle rétroactivité aurait pour effet d’appliquer des règles d’imposition autres que celles qui étaient applicables à la date du fait générateur. Elle porterait ainsi atteinte à des situations légalement acquises.

C’est pourquoi il est proposé une entrée en vigueur du dispositif au 11 octobre 2017, ce qui correspond à la date de présentation du PLFSS en conseil des ministres.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. En l’absence de retenue à la source, le changement des règles fiscales s’applique évidemment aux revenus soumis à l’imposition à l’année n+1.

Il en sera de même pour la mise en place du prélèvement forfaitaire unique, qui, d’après les informations contenues dans l’étude d’impact, neutralisera très largement les effets de l’augmentation de la CSG sur les revenus du capital.

Forte de cette explication, la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Indépendamment de la difficulté constitutionnelle que pourrait engendrer la distinction entre CSG sur le capital et CSG sur le revenu, et indépendamment des arguments de M. le rapporteur général, je voudrais attirer l’attention sur le coût de cet amendement : 1 milliard d'euros ! Si je devais tenir un compteur des dépenses publiques de la soirée, nous en serions à 6 milliards d’euros d’aggravation des finances publiques !

Cet argument financier à lui seul, au-delà même de la dimension constitutionnelle de la question, devrait vous encourager à retirer votre amendement, monsieur le sénateur. À défaut, l’avis du Gouvernement, suivi par la majorité gouvernementale, sera défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Morisset. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre. Il n’empêche qu’une personne qui aurait vendu un bien au mois de février dernier et aurait payé la CSG au moment de la cession se verrait réclamer, l’année suivante, l’augmentation de 1,7 %, et ce pour un bien vendu un an auparavant. Cela paraît quelque peu contradictoire.

Par conséquent, je maintiens mon amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 235.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.) (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. L'amendement n° 362 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret, M. Daudigny et Mme Féret, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 41

Supprimer cet alinéa.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Mme Conway-Mouret vous prie d’excuser son absence, mes chers collègues ; elle est actuellement en déplacement à l’étranger.

Au cours des débats à l’Assemblée nationale, un amendement introduit par le Gouvernement est venu modifier la taxation de l’épargne salariale. Il est ainsi prévu que les nouvelles plus-values réalisées par les salariés seront désormais soumises intégralement au dernier taux connu de prélèvements sociaux, et ce dès le 1er janvier 2018.

Le régime précédent, dit des « taux historiques », était plus favorable dans la mesure où les plus-values étaient taxées au taux en vigueur au moment de leur constatation. Les épargnants n’avaient donc pas à subir le renchérissement des prélèvements sociaux sur leurs versements passés.

Cette mesure prévue dans la loi de financement de la sécurité sociale alourdira à terme la taxation de l’épargne des salariés.

Ce serait un très mauvais signal adressé aux 11 millions de salariés qui détiennent un compte d’épargne salariale, notamment à ceux – les plus modestes – qui ne disposent que de cette seule épargne financière après une vie entière de labeur.

Cet alourdissement, même limité, n’incitera pas les épargnants à conserver leur portefeuille de titres sur le long terme, ce qui paraît incohérent avec les réformes engagées par le Gouvernement en faveur de l’épargne longue et avec les annonces très positives du Président de la République, le 15 octobre dernier, sur l’intéressement et la participation.

Le Gouvernement a par ailleurs annoncé, à la fin du mois d’août, qu’il n’y aurait pas de changement dans la fiscalité liée à l’épargne salariale. Cette mesure est contraire à ces annonces, datant de deux mois et demi.

Aussi, il est demandé de revenir sur cet objectif et de permettre à l’ensemble des salariés disposant d’un plan d’épargne d’entreprise de continuer à bénéficier du taux historique de leur épargne salariale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La suppression des taux historiques ne vaut que pour l’avenir. Les prélèvements sociaux sur ce type de revenus sont fixés à 17,5 % depuis 2012. Ce niveau est élevé, et il ne me semble pas dans l’intention du Gouvernement de l’augmenter encore.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 362 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 252 rectifié, présenté par MM. Darnaud, Genest, Magras, Grosdidier et Gilles, Mmes Gruny et Procaccia, MM. Chaize et Brisson, Mme Imbert, MM. Charon, Bazin et D. Laurent, Mme Bories, M. Leroux, Mme Estrosi Sassone, M. Dallier, Mme Lopez, MM. Buffet, Perrin, Raison, Dufaut et Laménie, Mme Lamure, MM. Paccaud et B. Fournier, Mme Deromedi et MM. Revet et Pierre, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 51

Après le mot :

travail

supprimer la fin de cet alinéa.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. L’épargne salariale a de nombreuses vertus, puisqu’elle associe le salarié aux résultats de l’entreprise. Elle le pousse donc à s’engager beaucoup plus dans son travail et renforce la confiance qu’il place dans son entreprise.

L’amendement adopté par l’Assemblée nationale nous paraît en contradiction avec les annonces que le Président de la République a faites lors de son intervention télévisée du 15 octobre. Il est également en contradiction avec celles de M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, lequel a annoncé qu’il ne toucherait pas à la fiscalité de l’épargne salariale.

Le présent amendement, qui modifie l’alinéa 51 de l’article 7, tend donc à maintenir l’applicabilité des taux historiques des contributions sociales sur les plus-values réalisées dans le cadre des plans d’épargne d’entreprise.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’explication est à peu près la même que pour l’amendement précédent : la suppression des taux historiques, au travers de l’article 7 du PLFSS, ne vaut que pour l’avenir.

L’alinéa 51 de cet article prévoit que le revenu attaché aux sommes versées dans un plan d’épargne d’entreprise avant le 1er janvier 2018 ou au cours des cinq premières années suivant un versement, lorsque celui-ci est intervenu entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017, reste soumis aux taux historiques.

Cela semble être de nature, madame Procaccia, à sécuriser le montant des prélèvements sociaux applicables à ces sommes. Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Le Gouvernement n’a pas de meilleure argumentation que celle de M. le rapporteur général.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Procaccia, l'amendement n° 252 rectifié est-il maintenu ?

Mme Catherine Procaccia. Je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 252 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 38, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 60

Après les mots :

en application des

insérer la référence :

a,

et remplacer la référence :

L. 5422-9

par la référence :

L. 5427-1

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement de coordination, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 38.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 244 est présenté par M. Adnot.

L'amendement n° 255 rectifié est présenté par Mme Férat, MM. Détraigne, Kern et Luche, Mmes Joissains et Sollogoub, MM. Canevet, Janssens, Médevielle et L. Hervé, Mme de la Provôté et MM. Bockel et Savary.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. - Après l’alinéa 60

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Pour l’année 2018, le taux de la cotisation prévue à l’article L. 731-23 du code rural et de la pêche maritime ne peut excéder le taux applicable en 2017 diminué de 2,15 points.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L’amendement n° 244 n'est pas soutenu.

La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter l’amendement n° 255 rectifié.

Mme Françoise Férat. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 organise un transfert du financement de la protection sociale des cotisations sociales, qui frappent uniquement les actifs, vers la CSG, dont l’assiette est plus large. L’objectif affiché serait l’augmentation du pouvoir d’achat des actifs.

Or les mesures envisagées affecteront les plus petits exploitants agricoles, dont l’activité est inférieure au seuil d’affiliation à la MSA et qui sont redevables d’une cotisation de solidarité. Il est important d’entendre que cette cotisation, tout à fait particulière, ne donne lieu à aucune contrepartie, ni en termes de prestations sociales, ni en termes de retraite. Il s’agit bien d’une cotisation de solidarité.

Si les choses restaient en l’état, ces petits exploitants subiraient donc une perte de pouvoir d’achat en 2018, par rapport à 2017, contrairement à l’ensemble des autres actifs du secteur privé.

C’est pourquoi le présent amendement prévoit que le taux de la cotisation applicable en 2018, et fixé par décret, ne puisse excéder le taux applicable en 2017, qui serait diminué de 2,15 points, soit 13,85 % au maximum, et ce afin de conserver cet équilibre tout à fait fragile. (Mme Michèle Vullien applaudit.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les revenus concernés ne bénéficieront effectivement pas de la réduction des cotisations sociales, comme vient de le démontrer Mme Férat. La commission émet donc un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Si je peux partager la teneur de cet amendement, ainsi que les propos de M. le rapporteur général, je voudrais malgré tout souligner un point : la disposition proposée, qui vise la seule année 2018, est incomplète par rapport aux mesures que le Gouvernement pourrait prendre par décret.

C’est précisément parce que nous sommes ici, très clairement, dans le domaine décrétal que l’avis du Gouvernement est défavorable, mais engagement est pris pour que les taux soient harmonisés d’ici à la fin de l’examen du projet de loi de finances.

Il est tout à fait possible que cet amendement ne passe pas la deuxième lecture et, si jamais il était tout de même adopté, il serait susceptible d’être censuré par le Conseil constitutionnel dès lors, comme vous l’indiquez vous-même dans l’objet, madame Férat, que vous intervenez dans un domaine du ressort de l’action gouvernementale.

Mais, j’y insiste, si l’avis est défavorable, nous pouvons acter le principe d’un décret, prévu en fin de loi de finances et reprenant l’esprit de ce que vous évoquez ici.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 255 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 570, présenté par Mme Morin-Desailly, est ainsi libellé :

I. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… - Les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 382–1 du code de la sécurité sociale bénéficient d'une réduction du taux de la cotisation mentionnée à l'article L. 241–3 du même code.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Améliorer le pouvoir d’achat des actifs, c’est la raison invoquée par le Gouvernement pour justifier la hausse de 1,7 point de la CSG, rendue nécessaire pour pallier la baisse des cotisations salariales des salariés. Pour les artistes auteurs, cette réforme ne devrait pas se traduire par des gains de pouvoir d’achat.

Écrivains, compositeurs, chorégraphes, scénaristes, photographes, plasticiens ne profiteront pas de la baisse des cotisations d’assurance chômage, et pour cause : leurs revenus sont essentiellement ou totalement tirés des droits d’auteur et des ventes d’œuvres, et les droits d’auteur ne sont pas pris en compte dans le calcul des droits à l’indemnité chômage.

Les artistes auteurs vont donc voir leur rémunération diminuer, et c’est là un effort loin d’être insignifiant, compte tenu de la précarité à laquelle cette profession est parfois confrontée.

Le Gouvernement avait promis de trouver une solution à l’Assemblée nationale – le débat a été lancé dans cette enceinte –, mais il n’en a rien été.

Il est indispensable que la hausse de la CSG puisse, à tout le moins, être compensée pour cette catégorie d’actifs. C’est une question d’équité.

Mon amendement tend à poser le principe d’une telle compensation, via une réduction du taux de la cotisation au régime d’assurance vieillesse de base à laquelle l’ensemble des artistes auteurs, indépendamment de leur catégorie et du montant de leurs revenus professionnels, sont assujettis.

À qui profitera cette mesure ? Aux « artistes auteurs d’œuvres littéraires et dramatiques, musicales et chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques, graphiques et plastiques, ainsi que photographiques », dont il est question à l’article L. 382–1 du code de la sécurité sociale.

Pourquoi se contenter de poser un principe ? Tout simplement parce que la loi renvoie à un décret le soin de fixer le taux de la cotisation vieillesse. Par parallélisme des formes, il appartient donc au pouvoir réglementaire de fixer le montant de la réduction octroyée aux artistes auteurs.

J’attire néanmoins l’attention du Gouvernement sur la nécessité que la prise en charge soit égale à 0,95 point de cotisation, pour permettre une compensation de la hausse de la CSG pour les artistes auteurs.

J’y insiste, j’évoque ici une simple – et juste – compensation, non des gains de pouvoir d’achat.

Mme la présidente. L'amendement n° 218, présenté par Mmes S. Robert et Blondin, MM. Assouline, Daudigny et Guillaume, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

… – Pour l’année 2018, les personnes mentionnées au premier alinéa de l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale bénéficient d’une prise en charge égale à 0,95 point de la cotisation au régime d'assurance vieillesse de base.

… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Puisque cet amendement est en discussion avec le précédent, vous imaginez bien, mes chers collègues, qu’il défend une position identique.

Je veux néanmoins insister sur le fait – Mme Morin-Desailly l’a bien dit – qu’il s’agit d’une question de justice et d’égalité de traitement pour ces artistes auteurs, que vous connaissez, car ils sont présents dans vos territoires. Notre collègue les a cités, il s’agit de plasticiens, d’écrivains, de bédéistes, de scénaristes, et nombre d’entre eux vivent, me semble-t-il, dans la précarité.

Permettre que cette profession bénéficie d’une égalité de traitement avec le reste des salariés est vraiment une question de justice.

Le présent amendement prévoit également pour l’année 2018, rappelons-le – une négociation entre l’État et les représentants de ces professions permettra peut-être de trouver une solution pérenne pour l’année 2019 –, une baisse de la cotisation au régime d’assurance vieillesse de base à due proportion de la hausse de la CSG.

Au moment où nous parlons beaucoup de culture et où nous travaillons sur le budget culturel dans le cadre du projet de loi de finances, il me semble nécessaire de soutenir ces professions, qui comptent beaucoup de personnes en situation précaire. Cette responsabilité incombe autant au Gouvernement qu’à nous-mêmes.

C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous encourage à voter ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces amendements offrent une bonne occasion de poser au Gouvernement la question d’une éventuelle compensation pour les artistes auteurs.

De notre point de vue, les cotisations des artistes auteurs étant déjà très dérogatoires – ce sont des indépendants, et ils n’acquittent que la part salariale des cotisations sociales, comme cela a été souligné –, il est difficile d’envisager des compensations, notamment lorsque celles-ci sont prévues sur l’assurance chômage.

La faisabilité technique de la solution proposée, en l’absence de précompte de la cotisation vieillesse plafonnée, ne me semble pas vraiment avérée.

Dès lors, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Je partage l’argumentation de M. le rapporteur général, et le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Catherine Morin-Desailly, l'amendement n° 570 est-il maintenu ?

Mme Catherine Morin-Desailly. Je souhaite, pour la forme, maintenir mon amendement.

Il me semble effectivement que cette question n’a pas été anticipée. Personne ne s’est interrogé sur l’injustice que je viens d’exposer – et je n’ai pas été la seule à le faire –, et des questions demeurent sur de nombreuses professions. Cela signifie que tout cela est mal préparé. Je regrette de devoir le dire, mais il faut bien que nous, parlementaires, soyons vigilants et évoquions toutes les problématiques auxquelles nous sommes confrontés.

C’est pourquoi je maintiens mon amendement.

Mme la présidente. Madame Sylvie Robert, l’amendement n° 218 est-il maintenu ?

Mme Sylvie Robert. Je souhaite également maintenir mon amendement. C’est une question de principe.

Nous savons très bien que les artistes auteurs, à la différence des intermittents du spectacle, ne contribuent pas à la caisse d’allocations de chômage. Ce n’est pas prévu dans leur système de protection sociale. À un moment, quand on prend des décisions politiques, il faut faire en sorte de ne laisser personne au bord du chemin !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 570.

(L'amendement est adopté.) (Applaudissements sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain. – Mme Michèle Vullien applaudit également.)

Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 218 n'a plus d'objet.

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 546, présenté par Mmes Procaccia, Primas et L. Darcos, est ainsi libellé :

I. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Pour l’année 2018, le taux de la cotisation patronale d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès due au titre des personnes mentionnées au premier alinéa de l’article 28 de la loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012 est diminué de 1,13 point.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Si vous le permettez, madame la présidente, mon argumentation vaudra pour les deux amendements en discussion commune.

Ces deux amendements traitent d’une situation assez particulière, celle de la chambre de commerce et d’industrie – ou CCI – de Paris Île-de-France.

Certains salariés de cette structure bénéficiaient par le passé d’un régime spécial d’assurance maladie.

Dans la continuité de la loi de financement de la sécurité sociale de 2011, un certain nombre de dispositions ont été prises, permettant d’aligner le taux de cotisation d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès due au régime général de sécurité sociale sur le taux de la cotisation employeur applicable dans la fonction publique d’État, pour ces salariés de la CCI de Paris Île-de-France relevant du régime spécial.

Les dispositions proposées dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ont pour conséquence de créer deux catégories de salariés au sein de la CCI.

En effet, seule une partie des salariés pourra bénéficier de la suppression de la cotisation d’assurance maladie, alors que les autres, qui travaillent dans le même organisme et effectuent le même travail, supporteront pleinement la hausse de la CSG, à hauteur de 0,75 %. Cela concerne tout de même 2 228 salariés sur 4 000.

Les responsables de la CCI ont, me semble-t-il, essayé d’en parler au Gouvernement, mais, pour l’instant, aucune réponse ne leur est parvenue. C’est pourquoi, au travers de l’amendement n° 546, j’essaie de faire progresser le dossier.

L’amendement n° 556 traite aussi des conséquences des dispositions du présent projet de loi sur les salariés de la CCI.

Parmi eux, les agents publics ne supportent pas de cotisation sociale pour le risque chômage. Il est donc prévu, dans un article du projet de loi de finances qui va nous être présenté, de compenser la hausse de la CSG qu’ils subiront par la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité à 1 % au 1er janvier 2018.

Mais cette compensation, une fois encore, ne concernera pas une partie de ces agents publics, tous ceux dont la rémunération mensuelle est inférieure à 1 692 euros.

Le Gouvernement doit donc prendre conscience de la complexité de la situation au sein de la CCI et tenter d’y remédier.

Je rappelle que les CCI ont déjà beaucoup contribué en matière de financement. Il est prévu, dans le cadre du projet de loi de finances, de diminuer de 150 millions d’euros leurs ressources. Celles-ci ont déjà décru de 50 % au cours des cinq dernières années. Enfin, pour la CCI Paris Île-de-France, la non-compensation de la CSG représenterait environ 4 millions d’euros et la coupe budgétaire prévu au PLF atteindrait 37 millions d’euros. Ce sont tout de même des sommes importantes.

La CCI Paris Île-de-France a déjà fait des efforts. Elle a fermé une école et licencié 1 000 collaborateurs. Elle consacre 60 % de son budget à l’enseignement, avec 14 000 apprentis.

Alors que l’apprentissage figure parmi les priorités du Gouvernement, je tenais à rappeler un certain nombre de contradictions, eu égard aux objectifs fixés concernant la formation, l’apprentissage, mais aussi le pouvoir d’achat des salariés.

Mme la présidente. L'amendement n° 556, présenté par Mmes Procaccia, Primas et L. Darcos, est ainsi libellé :

I. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Pour l’année 2018, le taux de la cotisation patronale d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès due au titre des personnes mentionnées au premier alinéa de l’article 28 de la loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012 qui ne s’acquittaient pas de la cotisation solidarité avant le 1er janvier 2018 est diminué de 1,61 point.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement a été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces salariés n’ayant pas de cotisations salariales de maladie, ils ne seront effectivement pas compensés.

Les différences de régime au sein de la chambre de commerce et d’industrie de Paris Île-de-France sont un fait historique.

La commission a estimé que ces amendements illustrent bien les effets de bord de la mesure CSG. Toutefois, nous ne pouvons régler tous les particularismes à cette occasion, ces derniers ayant plutôt vocation à s’aligner progressivement sur le régime général et le droit commun.

En conséquence, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. M. le rapporteur général a avancé un argument important en évoquant l’absence de cotisation. Mais, effectivement, se pose aussi une question de principe, et nous serons peut-être conduits à discuter d’autres régimes spéciaux.

Il me semblait que nous étions plutôt tous disposés – c’est en tout cas la position partagée de ce côté-ci de l’hémicycle – à mettre fin aux régimes spéciaux et à faire rentrer la plupart des régimes dans le droit commun.

Votre argumentation, madame la sénatrice, va plutôt vers un renforcement des statuts particuliers, qui ont tous leur histoire – et il ne m’appartient pas d’en juger.

Une telle orientation m’apparaît assez contre-intuitive au regard de ce que les gouvernements successifs, et particulièrement l’actuel Gouvernement, appuyé par sa majorité, tentent de faire.

L’avis est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 546.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 556.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Nous l’avons dit à maintes reprises, cet article est symbolique de la bascule que le Gouvernement opère au niveau de notre système de protection sociale. C’est vraiment la concrétisation de la suppression des cotisations, à la faveur d’une fiscalisation via la CSG.

Monsieur le ministre, vous soutenez cette CSG, son augmentation même, sous prétexte de solidarité intergénérationnelle, voire d’universalité. Mais je voudrais vous rappeler que ce sont des valeurs portées par la sécurité sociale, telle que fondée à la Libération, sécurité sociale que vous faites voler en éclats avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Qu’est-ce qu’une cotisation sociale, si ce n’est un salaire différé ? Quoi de plus juste ?

Au lieu de la conforter, nous allons le voir tout au long de l’examen de ce texte, vous multipliez les exonérations, notamment patronales. Vous fiscalisez et augmentez la CSG, ce qui – faut-il le rappeler ici ? – est tout de même une vieille revendication du MEDEF.

Il s’agit effectivement d’exonérer les employeurs de leur responsabilité sociale, en qualité de financiers des risques sociaux non directs liés à l’emploi, et de faire financer ces risques – je pense notamment à tout ce qui concerne les prestations familiales ou les dépenses de santé – par les bénéficiaires eux-mêmes.

La fiscalisation du financement de la protection sociale participe directement de la réduction des salaires.

La CSG, on l’a dit, est injuste. Cet impôt repose essentiellement sur les salariés et les retraités et, comme l’a souligné Dominique Watrin, contrairement à la cotisation sociale, il n’ouvre droit à aucune prestation sociale.

Alors, oui, cette mesure est particulièrement injuste et on ne peut la soutenir.

Dans le cadre de la discussion de fond que nous avons dans cet hémicycle, particulièrement fréquenté ce soir, et je m’en réjouis, nous avons obtenu des avancées. Nous avons, par exemple, progressé sur la question des retraités – une avancée positive à laquelle nous avons tous contribué.

Pour autant, nous ne pouvons pas soutenir cet article 7, qui va à l’encontre des principes de la protection sociale et contribuera à dégrader les conditions de remboursement de l’ensemble des assurés sociaux. C’est pourquoi nous voterons contre.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7, modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Articles additionnels après l'article 7 (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l'article 7

Mme la présidente. L'amendement n° 276 rectifié, présenté par MM. Cadic et Guerriau, Mmes C. Fournier et Billon et M. Canevet, est ainsi libellé :

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 131–6 du code de la sécurité sociale sont supprimés.

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Olivier Cadic.

M. Olivier Cadic. Le présent amendement vise à supprimer l’assujettissement aux charges sociales des dividendes versés aux dirigeants de société à responsabilité limitée décidé en 2012 par la majorité d’alors.

Lors de l’examen des lois de financement de la sécurité sociale pour 2015 et 2016, le Sénat avait décidé de supprimer cet assujettissement. Il s’agissait en premier lieu de rétablir l’égalité de traitement entre les dirigeants de SARL et les dirigeants de société anonyme ou de société par actions simplifiée, ou SAS, les dividendes perçus par ces derniers n’étant pas soumis à prélèvements sociaux.

Si la loi est aujourd’hui discriminatoire, elle est de plus l’expression d’un contresens économique, comme j’ai eu l’occasion de l’affirmer précédemment. Les dividendes, qui rémunèrent la prise de risque, ne doivent pas être confondus avec un salaire : ils sont en effet issus des résultats des entreprises, lesquels sont eux-mêmes déjà soumis à l’impôt.

L’Assemblée nationale est revenue deux fois sur la suppression votée à deux reprises par le Sénat. Les députés de la majorité précédente n’ont donc pas fait confiance avec constance aux entrepreneurs, surtout aux travailleurs indépendants, qui pourraient, je cite, fictivement « faire passer pour des dividendes la rémunération de leur activité ». C’est là une vision bien étriquée du monde de l’entreprise…

J’espère, chers collègues, que pour votre part vous serez constants, et soucieux de l’équité : les petits entrepreneurs méritent de bénéficier d’une juste récompense de leurs efforts et de leurs prises de risque, plutôt que d’être l’objet d’une suspicion de principe.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. M. Cadic s’était déjà exprimé l’an dernier sur ce même sujet. Comme nous l’avions expliqué alors, un tel amendement doit s’inscrire dans une réflexion plus globale sur l’assiette des cotisations des travailleurs indépendants, afin de neutraliser l’impact sur celles-ci de la forme sociale de l’entreprise. La comparaison avec le régime des dirigeants de SAS peut effectivement nourrir cette réflexion, monsieur le ministre. Néanmoins, à ce stade, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. D’abord, comme l’a très bien dit M. le rapporteur général, la réflexion doit être plus globale. M. Le Maire et Mme Buzyn travaillent à ce chantier.

Ensuite, monsieur le sénateur, en contrepartie de l’augmentation de la CSG, le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoient une baisse sans précédent des prélèvements sociaux sur les revenus d’activité des travailleurs indépendants. Nous aurons l’occasion d’y revenir sinon tout à l’heure, en tout cas demain ou après-demain.

Au bénéfice de ces indications, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Cadic, l'amendement n° 276 rectifié est-il maintenu ?

M. Olivier Cadic. Évidemment, je ne le retire pas, madame la présidente.

Monsieur le ministre, je suis désolé de devoir vous le dire, mais ce n’est pas un très bon signal que vous adressez là, au moment où l’on cherche à attirer ou à faire revenir des entrepreneurs en France. Quand on est gérant majoritaire d’une SARL, les dividendes perçus sont liés aux résultats économiques de l’entreprise. Je rappelle que, en 2014, le gouvernement d’alors avait fait voter par l’Assemblée nationale une disposition ayant pour objet d’assujettir les dividendes des dirigeants de SAS au même régime, en matière de cotisations sociales, que celui qui s’applique aux dividendes des dirigeants de SARL. Cette mesure n’avait finalement pas prospéré, mais les dividendes versés aux dirigeants de SARL demeurent soumis à cotisations. Connaissez-vous des pays qui prélèvent des cotisations sociales sur les dividendes ? Si oui, quels sont-ils ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Je regrette que M. le sénateur ne retire pas son amendement, eu égard à la politique menée par le Gouvernement notamment à destination des travailleurs indépendants.

La mise en œuvre de votre proposition, monsieur le sénateur, coûterait 170 millions d’euros aux finances publiques. Votre amendement est gagé, une nouvelle fois, sur les droits de consommation auxquels sont soumis les tabacs ; le tabac coûtera extrêmement cher à l’issue des débats budgétaires à l’Assemblée nationale et au Sénat…

Au-delà, et surtout, ce que réclament les entreprises et mettent en place le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances, c’est une baisse de la fiscalité. Pour que la fiscalité baisse, encore faut-il réduire les dépenses fiscales, voire les dépenses publiques. Je sais que cela paraît tout à fait révolutionnaire, et que l’on ne s’intéresse à ce sujet que lorsque la Cour des comptes publie son rapport annuel…

Je le répète, eu égard à la baisse importante de la fiscalité, à celle des prélèvements sociaux sur les revenus d’activité des travailleurs indépendants et à la réflexion globale évoquée tout à l’heure par M. le rapporteur général, il ne me semble pas raisonnable d’adopter un tel amendement maintenant.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 276 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les amendements nos 1 rectifié, 185 rectifié bis et 275 rectifié sont identiques.

L'amendement n° 1 rectifié est présenté par MM. Frassa et Le Gleut, Mmes Deromedi et Garriaud-Maylam, MM. del Picchia et Bansard, Mme Renaud-Garabedian, MM. Retailleau et Mouiller, Mme Procaccia, M. Danesi, Mme Gruny, MM. Pointereau, D. Laurent, Cambon, Dallier, Charon, Courtial, Revet, Houpert, Poniatowski, Lefèvre, Grand, Paccaud, Paul, Brisson et Buffet et Mme Bonfanti-Dossat.

L'amendement n° 185 rectifié bis est présenté par Mmes Lepage et Conway-Mouret, MM. Leconte et Iacovelli, Mmes Lienemann, Blondin et Bonnefoy, M. Courteau, Mme Ghali, M. Assouline, Mmes Monier, Espagnac, Jasmin et Tocqueville et MM. Fichet, Raynal et Devinaz.

L'amendement n° 275 rectifié est présenté par M. Cadic, Mme C. Fournier, M. Guerriau, Mme Billon et MM. Bockel, Bonnecarrère, Canevet, Longeot et Médevielle.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :

a) Le I bis est abrogé ;

b) À la première phase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et » ;

2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :

a) Le I bis est abrogé ;

b) Le second alinéa du VI est supprimé ;

3° L’article L. 245-14 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les références : « aux I et II de » sont remplacées par le mot : « à » ;

b) La deuxième phrase est supprimée ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 245-15, la deuxième occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et ».

II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° La seconde phrase du premier alinéa du I de l’article 15 est supprimée ;

2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacés par les mots : « au I ».

III. – 1° Les 1° et 3° du I et le 1° du II s’appliquent aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012 ;

2° Les 2° et 4° du I s’appliquent aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter de la date de publication de la présente loi ;

3° Le 2° du II s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2012.

IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.

M. Ronan Le Gleut. Le présent amendement vise à abroger les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine des non-résidents. Le précédent gouvernement a laissé perdurer, à partir de 2013, une situation injuste, puisque les Français établis à l’étranger paient la CSG et la CRDS sans bénéficier des prestations correspondantes, ce qui est par ailleurs contraire au droit de l’Union européenne.

Pour les Français de l’étranger, la hausse de la CSG et de la CRDS, c’est double imposition et double peine ! La France a déjà été condamnée en février 2015 dans l’affaire de Ruyter par la Cour de justice de l’Union européenne, suivie quelques mois plus tard par le Conseil d’État. Résultat : l’État a dû rembourser les sommes indûment perçues.

À la suite de la condamnation de la France, le précédent gouvernement avait décidé de modifier le fléchage de la CSG- CRDS, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, en affectant les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine principalement au Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, mais aussi à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, et à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES.

En procédant ainsi à compter du 1er janvier 2016, au détriment de nos compatriotes installés à l’étranger, la France a certainement ouvert la voie à un nouveau contentieux avec la Commission européenne, car le règlement communautaire précise bien que ces règles s’appliquent aussi aux prestations spéciales à caractère non contributif. La Commission européenne a engagé une procédure d’infraction à l’encontre de la France pour violation du droit communautaire.

Monsieur le ministre, le redressement des finances publiques ne peut pas passer par une fiscalité abusive et contraire au droit européen. Je vous ai d’ailleurs adressé pas plus tard qu’hier un courrier afin de savoir où en est la procédure d’infraction engagée par la Commission européenne contre la France.

Notre amendement vise donc non seulement à remédier à une injustice à l’égard des Français de l’étranger, mais aussi à épargner à la France une nouvelle condamnation par les instances communautaires. (M. Philippe Mouiller applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour présenter l'amendement n° 185 rectifié bis.

Mme Claudine Lepage. Comme l’a rappelé M. Le Gleut, le vote du projet de budget rectificatif de l’été 2012 a introduit l’assujettissement des revenus immobiliers des non-résidents aux prélèvements sociaux, ce qui a entraîné une double imposition pour ceux-ci. Les réticences que mes collègues représentant les Français établis hors de France et moi-même avions exprimées à l’époque n’ont malheureusement pas été entendues.

En février 2015, comme l’a dit M. Le Gleut, la Cour de justice de l’Union européenne a condamné l’État à rembourser les sommes indûment prélevées. Cette décision a été confirmée par le Conseil d’État quelques mois plus tard et a ouvert la voie à de nombreuses réclamations auprès du fisc, dont l’impact budgétaire est évalué à environ 300 millions d’euros pour la seule année 2013, ce qui n’est pas rien.

L’État a malheureusement persévéré dans une analyse plus que fragile juridiquement. Le produit de la CSG a été affecté au Fonds de solidarité vieillesse et celle-ci constitue donc, selon l’État, un impôt non contributif, et non pas une cotisation sociale.

Outre que cette analyse juridique est d’ores et déjà infirmée par la jurisprudence européenne, le cœur du problème tient au respect du principe constitutionnel d’égalité. Assujettir une personne à un prélèvement social alors qu’elle n’est pas affiliée à un régime obligatoire français, c’est tout d’abord la contraindre à subir une double imposition sociale, en France et dans son pays de résidence, mais également à cotiser sans contrepartie, c’est-à-dire sans bénéficier de prestations.

Pour rappel, une procédure d’infraction ouverte contre la France par les services de la Commission européenne concernant les prélèvements sociaux sur les revenus immobiliers des non-résidents est toujours en cours.

Je crois donc, monsieur le ministre, qu’il est temps de renoncer au prélèvement de la CSG-CRDS sur les revenus immobiliers des non-résidents, sans attendre une nouvelle condamnation de la Cour de justice de l’Union européenne.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour présenter l'amendement n° 275 rectifié.

M. Olivier Cadic. Monsieur le ministre, j’ai demandé que vous me citiez des pays prélevant des cotisations sociales sur les dividendes. J’aimerais que vous me répondiez, car je crois le cas de la France unique.

L’objectif n° 2 au titre des engagements de campagne du candidat Emmanuel Macron était de « réexaminer le régime mis en place en 2013 sur l’assujettissement des Français de l’étranger à la CSG et la CRDS sur leurs revenus du capital ».

Je ne reviendrai pas sur les arguments qui ont été très bien exposés par mes collègues et que je fais miens. Depuis cinq ans, le service des impôts des particuliers non résidents est soumis à une charge de travail énorme, du fait de l’afflux des réclamations. Cette raison pourrait presque suffire à justifier, à elle seule, la suppression de cette contribution.

Comme l’a expliqué Ronan Le Gleut, les non-résidents sont assujettis à une double imposition : ils acquittent la CSG en France puis, en application des conventions bilatérales, ils sont imposés dans leur pays de résidence, par exemple le Royaume-Uni, les États-Unis ou l’Australie, sur le montant de CSG ainsi versé…

Une telle situation est absurde et injuste pour les non- résidents. Je crois que nous sommes d’accord, sur toutes les travées de cet hémicycle, pour qu’il y soit mis un terme. Depuis cinq ans, suffisamment d’arguments en ce sens ont été avancés.

Mme la présidente. L'amendement n° 183, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au I bis de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, après les mots : « code général des impôts », sont insérés les mots : « et qui sont affiliées à un régime obligatoire de sécurité sociale française ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Il s’agit là en quelque sorte d’un petit frère de la taxe sur les dividendes. Nous n’arrivons pas à nous sortir de cette affaire, alors qu’il y a notoirement non-respect du droit européen. En 2015, le Conseil d’État a constaté qu’il existait une contradiction entre, d’une part, notre droit interne et les décisions du Conseil constitutionnel, qui considérait que la CSG était une imposition de toute nature, et, d’autre part, la position de la Commission européenne et de la Cour de justice de l’Union européenne. C’est la raison pour laquelle, comme l’a rappelé M. Le Gleut, l’État a dû prendre des mesures correctrices dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Aujourd’hui pèse toujours sur nos finances publiques la menace de nouvelles condamnations, le dispositif mis en place en 2016 n’étant pas conforme au droit européen. En effet, les prestations sociales non contributives entrent dans le champ de l’article 4 du règlement européen relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté ; par conséquent, affecter le produit des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine au financement de ces prestations ne change rien sur le fond.

Il importe donc, pour la clarté des choses et la sincérité des finances publiques, d’abroger le plus vite possible cette disposition qui est contraire au droit européen et de revenir sur l’interprétation tout à fait fallacieuse qui en est faite s’agissant de ceux de nos compatriotes qui vivent hors de l’Union européenne et n’ont jamais bénéficié jusqu’à présent de remboursements, au contraire des Français résidant dans un pays de l’Union européenne. Cette inégalité devant l’impôt devra un jour être constatée par le Conseil constitutionnel, qui a encore rendu cette année une décision sur la disposition de 2012 relative à l’assujettissement des revenus immobiliers des non-résidents aux prélèvements sociaux.

Par conséquent, je vous invite à revenir au droit le plus vite possible. Sinon, nos comptes publics seront insincères.

Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi, afin de poursuivre l’examen de ce texte.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Quel est l’avis de la commission sur les quatre amendements en discussion commune ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Notre commission s’est déjà déclarée à plusieurs reprises défavorable à ces amendements, qui concernent non pas les seuls Français établis hors de France, mais l’ensemble des non-résidents.

Il ne s’agit pas ici des conséquences de l’arrêt de Ruyter, comme le disait M. Le Gleut : cet arrêt concernait, je le rappelle, un résident fiscal en France de nationalité néerlandaise, affilié à la sécurité sociale dans son pays d’origine.

Le produit de ces prélèvements, qui représente environ 300 millions d’euros par an, est actuellement affecté à la CADES, à la CNSA et, surtout, au FSV.

Notre commission n’était pas hostile à ce que ces revenus du patrimoine et des produits de placement, dégagés en France, puissent contribuer au financement des dépenses de solidarité. Je précise que le produit de ces prélèvements n’est pas affecté aux régimes obligatoires de base de la sécurité sociale.

Il n’en demeure pas moins que le problème de double imposition soulevé par les auteurs de ces amendements est réel. Nous avons déjà demandé, dans le passé, au gouvernement de s’emparer de cette question. Plutôt que de se priver de recettes, il serait préférable de s’assurer que les personnes concernées ne paient pas deux fois l’impôt sur le même revenu, ce qui serait en effet préjudiciable à notre pays.

La commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Qu’il faille réfléchir sur la double imposition, c’est une évidence. L’engagement de campagne du Président de la République sur ce point a été rappelé.

La question soulevée est d’importance, mais, comme l’a indiqué M. le rapporteur général, les auteurs de ces amendements ne se fondent pas sur un bon argument juridique quand ils invoquent l’arrêt de Ruyter. Ce qui était condamnable, c’était l’affectation du produit des cotisations : c’est pourquoi le gouvernement de l’époque l’a finalement fléché vers le FSV. Si cette mesure était inconstitutionnelle, le Conseil constitutionnel l’aurait déjà censurée, de nombreux débats parlementaires s’étant tenus sur cette question, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale.

M. Lescure, président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, a été invité par le Gouvernement à engager une réflexion sur la double imposition, à laquelle pourraient utilement s’associer la commission des finances et la commission des affaires sociales du Sénat. Le Gouvernement fournira toutes les informations nécessaires et se tient à votre disposition.

J’indique que l’adoption de ces amendements amputerait le financement de la sécurité sociale de 300 millions d’euros.

L’avis du Gouvernement est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Je ferai trois remarques.

Premièrement, monsieur le ministre, vous dites que l’arrêt de Ruyter n’a rien à voir avec le sujet qui nous occupe : c’est totalement inexact ! C’est sur la base de cet arrêt, en date du 26 février 2015, que le Conseil d’État a rendu, le 25 juillet de la même année, une décision qui a conduit le gouvernement de l’époque à proposer, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, un changement de nature de l’imposition.

Vous ne pouvez donc pas dire que l’arrêt de Ruyter n’a rien à voir avec cette affaire ! À cette occasion, le Conseil d’État a modifié complètement l’interprétation qui prévalait jusqu’alors : alors que la CSG était considérée, en droit français, comme une imposition de toute nature, il a considéré, à la suite de l’arrêt de Ruyter, qu’elle était, dans le cas d’espèce, une cotisation sociale.

Mme Claudine Lepage. Tout à fait !

M. Jean-Yves Leconte. Deuxièmement, l’article 4 du règlement européen que je citais établit la liste des prestations sociales auxquelles s’applique ce règlement : qu’elles soient contributives ou non contributives ne change rien ! Je vous invite à le consulter, monsieur le ministre. En tenant de tels propos, vous ne faites que renvoyer à plus tard la nécessaire résolution du problème : un jour ou l’autre, l’État devra faire son devoir envers tous les contribuables concernés.

Troisièmement, monsieur le ministre, je vous informe que vos services travaillent déjà depuis un an sur la question de la double imposition. Selon les conventions fiscales bilatérales, il peut être possible de déduire les cotisations sociales acquittées à cette occasion. Les notes fiscales émises par vos services depuis un an précisent les choses, mais la situation ne change pas, parce que l’on s’acharne à prétendre que l’on est dans les clous. Or l’interprétation européenne est très claire : il s’agit d’une cotisation sociale. Dès lors que vous n’êtes pas assujetti à un régime de protection sociale français, vous payez une cotisation sociale sans bénéficier d’aucune prestation, et ce que vous résidiez dans l’Union européenne ou pas. Dans tous les cas, un jour ou l’autre, la Cour de justice de l’Union européenne, pour ceux qui résident dans l’Espace économique européen, ou le Conseil constitutionnel imposeront de procéder à un remboursement.

Comme sur d’autres sujets, n’attendons pas d’être mis au pied du mur ! On observe là exactement le même syndrome et la même irresponsabilité qu’à propos de la taxe sur les dividendes ! On en reparlera dans dix ans !

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour explication de vote.

M. Ronan Le Gleut. Nous ne faisons pas la même analyse que le Gouvernement, et je ne peux qu’inviter celui-ci à provisionner les sommes qu’il va indûment percevoir et qu’il devra tôt ou tard rembourser. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

M. Olivier Cadic. Je ne puis qu’abonder dans le sens de mes collègues. Cette disposition, c’est un boulet supplémentaire que nous devrons traîner. De multiples procédures sont en cours. Les résidents de pays de l’Union européenne ont bénéficié de remboursements, au contraire de ceux qui résident hors de celle-ci ; là aussi, des procédures sont en cours.

Vous dites, monsieur le ministre, que vous allez mettre en place une mission sur la double imposition, renvoyant ainsi à demain le traitement du problème, mais cette double imposition, cela fait cinq ans que certains non-résidents la subissent en payant de l’impôt sur la CSG qu’ils acquittent…

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Il y a effectivement cinq ans que cela dure, monsieur Cadic. À cet égard, il est dommage que les bonnes idées émanant du groupe socialiste et républicain n’aient pas été appliquées quand vos amis étaient au pouvoir, monsieur Leconte ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Quant à la taxe à 3 % sur les dividendes, j’observe qu’il est facile de donner des leçons de morale lorsque l’on est dans l’opposition… Il est regrettable que vous n’ayez pas fait bénéficier les gouvernements qui se sont succédé durant le quinquennat précédent de l’acuité et de la force d’analyse juridique que vous déployez aujourd’hui !

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour explication de vote.

Mme Claudine Lepage. Monsieur le ministre, il est tout à fait inexact d’affirmer que nous n’avons rien dit, que nous avons laissé faire. Depuis plusieurs années déjà, les services aujourd’hui placés sous votre autorité travaillent sur cette question. Nous les avons rencontrés régulièrement et avons cherché ensemble des solutions qui, visiblement, n’ont pas été trouvées ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié, 185 rectifié bis et 275 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7, et l’amendement n° 183 n’a plus d’objet. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

L'amendement n° 450, présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Après le 5° bis de l’article L. 213-1, il est inséré un 5° ter ainsi rédigé :

« 5° ter Le recouvrement de la contribution mentionnée à l’article L. 245-17 ; »

2° Le chapitre 5 du titre 4 du livre 2 est complété par une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières

« Art. L. 245-17. – Les revenus financiers des prestataires de service mentionnés au livre V du code monétaire et financier entendus comme la somme des dividendes bruts et des intérêts nets reçus, sont assujettis à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisation salariale et patronale d’assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l’article L. 241-3 du présent code.

« Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, à l’exclusion des prestataires mentionnés au premier alinéa du présent article, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisations salariale et patronale d’assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l’article L. 241-3 du présent code.

« Les contributions prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.

« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes caisses d’assurance vieillesse. »

II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Au travers de cet amendement, nous renouvelons une proposition de recette que nous défendons depuis plusieurs années. Il s’agit de mettre les revenus du capital à contribution pour le financement de la sécurité sociale.

Nous avons conscience d’être légèrement à contre-courant des politiques d’exonération et d’exemption de cotisations de sécurité sociale mises en place au bénéfice des entreprises, mais nous avons vu l’échec de dispositifs tels que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, ou le crédit d’impôt recherche, le CIR. Ces crédits d’impôts de plusieurs milliards d’euros n’ont eu qu’un effet relatif, pour ne pas dire minime, sur les créations d’emplois.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, nous persistons à penser que, plutôt que de vouloir toujours réduire les dépenses, il conviendrait d’envisager des recettes alternatives, notamment en mettant à contribution les dividendes, cet argent qui ne sert ni l’emploi ni l’entreprise, mais seulement les actionnaires. Cela procurerait d’importantes rentrées financières et surtout permettrait de mener une politique sociale audacieuse pour répondre aux besoins actuels et futurs, car nombreux sont les défis à relever.

Enfin, je précise que les dispositions du présent amendement s’articulent avec celles de l’amendement n° 451 : le premier vise à dissuader l’accumulation du capital, le second à moduler les cotisations des employeurs en fonction de leur politique de salaires, d’emploi et d’investissement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La notion de « contribution d’assurance » est contradictoire : il s’agirait d’ouvrir des droits qui n’auraient pas de bénéficiaires.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 450.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 451, présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, est ainsi rétablie :

« Section 2

« Cotisations assises sur la masse salariale

« Art. L. 242-7-2. – I. – Pour l’application du présent article :

« La répartition des richesses des sociétés à l’échelle nationale est définie annuellement par le calcul de la masse salariale par rapport aux dépenses de formation sur la valeur ajoutée augmentée des produits financiers au sens de l’article L. 245-16 de l’ensemble des sociétés ayant leur siège sur le territoire français.

« La répartition des richesses d’une société est définie annuellement par le calcul de la masse salariale augmentée d’une part pour les dépenses de formation sur la valeur ajoutée et d’autre part pour les produits financiers au sens de l’article L. 245-16 de la société ;

« Les sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce s’acquittent annuellement d’une cotisation additionnelle d’assurance vieillesse dont le taux est égal à l’écart entre, d’une part, les dépenses de formation et de la masse salariale et, d’autre part, la valeur ajoutée créée.

« Les cotisations additionnelles prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.

« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes caisses d’assurance vieillesse.

« II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Dans le prolongement de l’amendement n° 450, nous proposons de moduler les cotisations patronales selon la politique des entreprises. En fait, plutôt que de laisser filer des comptes sociaux en accordant des milliards d’euros d’exonérations aux entreprises, nous suggérons de valoriser les politiques vertueuses menées par les sociétés.

Dans cette optique, nous proposons de calculer la répartition des richesses d’une entreprise en tenant compte de sa masse salariale, de ses dépenses de formation et de sa valeur ajoutée. Ce dispositif est complexe, mais pas forcément beaucoup plus que le mécanisme de contribution des entreprises productrices de médicaments.

Au travers de cet amendement d’appel, nous entendons inciter le Gouvernement à mettre en place un autre financement de la sécurité sociale, visant à encourager les entreprises vertueuses qui pratiquent une politique salariale et sociale positive, notamment en privilégiant une répartition des richesses favorable à l’emploi, aux salaires, à la formation professionnelle et à l’égalité salariale plutôt qu’au capital.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous ne sommes pas à même d’évaluer les effets que l’adoption de cette mesure complexe aurait sur les entreprises.

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 451.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 449 rectifié, présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 3 du chapitre 2 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 242-… ainsi rédigé :

« Art. L. 242-… – Les entreprises d’au moins vingt salariés dont le nombre de salariés à temps partiel de moins de vingt-quatre heures est égal ou supérieur à 20 % du nombre total de salariés de l’entreprise sont soumises à une majoration de 10 % des cotisations dues par l’employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales pour l’ensemble de leurs salariés à temps partiel de moins de vingt-quatre heures. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement est un classique de notre groupe… Nous avons changé de gouvernement : peut-être la qualité de l’écoute a-t-elle également changé ? Je n’y crois pas, mais on peut toujours rêver… (Sourires.)

L’objectif est double : d’une part, réduire le recours au travail à temps partiel ; de l’autre, augmenter les cotisations des entreprises, afin de donner davantage de souffle à notre système de sécurité sociale.

Comme vous le savez, le travail à temps partiel est largement subi, voire imposé, notamment aux femmes. Bien évidemment, qui dit temps partiel dit salaire partiel, retraite partielle. Le constat est, me semble-t-il, partagé, mais aucun gouvernement jusqu’à présent n’a voulu faire reculer le travail à temps partiel, qui explique notamment la persistance d’inégalités salariales profondes entre les femmes et les hommes.

En France, selon les chiffres du ministère, le travail à temps partiel représente 20 % des emplois, contre 10 % dans les années quatre-vingt. Or près de 80 % des travailleurs à temps partiel sont des femmes. Au total, près d’un tiers des femmes travaillent à temps partiel.

Ce phénomène n’est pas dû au hasard, mais à des discriminations sexistes qui existent dans les sphères privée et publique : en particulier, ce sont très majoritairement les femmes qui s’occupent des enfants hors temps scolaire.

Les ordonnances de M. Macron, dans la droite ligne de la loi éponyme et de la loi El Khomri, vont malheureusement accentuer cette tendance, puisque le plancher minimal de vingt-quatre heures hebdomadaires est totalement dérogatoire. Nous pensons au contraire qu’il est essentiel de mettre fin aux pratiques, aux dérives de certaines entreprises, qui ont assez facilement tendance à recourir au travail à temps partiel.

Pour ce faire, nous proposons d’instaurer une majoration de 10 % des cotisations pour les entreprises d’au moins vingt salariés dont le nombre de salariés travaillant à temps partiel est au moins égal à 20 % de l’effectif total.

L’objectif est de dissuader de recourir au temps partiel et, parallèlement, de dégager des recettes supplémentaires pour notre système de sécurité sociale, si jamais certaines entreprises continuaient à développer les contrats dénoncés.

Mes chers collègues, il est plus que temps d’agir concrètement. Selon le dernier rapport du Forum économique mondial, si l’on continue ainsi, l’égalité salariale entre hommes et femmes ne sera atteinte qu’en 2186. C’est vrai que les femmes sont patientes, mais il y a des limites ! (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame Cohen, vous l’avez dit, il s’agit là d’un amendement habituel. Au nom de la commission, j’apporterai la réponse habituelle : avis défavorable.

Mme Laurence Cohen. Mais la répétition a une vertu pédagogique !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Pourquoi fixer la majoration à 10 % ? Pourquoi établir les seuils à vingt salariés et à 20 % de travailleurs à temps partiel ?

M. Dominique Watrin. Et pourquoi donner un avis défavorable ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’aimerais entendre une argumentation plus rationnelle !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. J’ai été convaincu par les arguments très forts de M. le rapporteur général… (Sourires.)

Avis défavorable !

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. L’heure est tardive, certes, mais il s’agit là d’un sujet extrêmement grave. Les arguments de M. le rapporteur général comme de M. le ministre sont courts – je dis « courts » pour rester courtoise, car ils sont en fait inexistants.

Au cours de cette séance, nous avons subi, sur d’autres thèmes, des démonstrations longues et extrêmement redondantes du Gouvernement. À présent, sur un sujet grave, qui concerne la moitié des salariés en France et, plus largement, la moitié de l’humanité, on nous répond : « Circulez, il n’y a rien à voir ! »

Il est possible que les seuils retenus dans notre amendement ne soient pas les bons, mais c’est au Gouvernement, qui dispose des moyens nécessaires et peut s’appuyer sur des cabinets étoffés, de trouver les moyens de résoudre les difficultés, au lieu de proposer toujours les mêmes recettes inefficaces, qui pénalisent toujours les mêmes !

Franchement, ce sujet de l’exploitation des femmes et des inégalités professionnelles et salariales mérite mieux que d’être expédié en quelques mots à minuit vingt ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 449 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Madame la présidente, avant que vous ne leviez la séance, je voudrais remercier le Sénat de cette première soirée de débat.

Mesdames, messieurs les sénateurs, en moins de quatre heures, nous avons dégradé les finances publiques de plus de 6 milliards d’euros…

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Sans compter la levée du gage !

M. Gérald Darmanin, ministre. En effet, monsieur le rapporteur général, mais je préfère ne pas parler du gage : à cette heure avancée, il ne serait pas raisonnable de faire de la provocation ! (Sourires.) En tout état de cause, il est toujours difficile de faire en même temps des économies et des dépenses supplémentaires !

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons examiné 56 amendements au cours de la journée ; il en reste 436.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Articles additionnels après l'article 7 (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Discussion générale

8

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 15 novembre 2017, à quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2018 (discussion des articles) (n° 63, 2017-2018) ;

Rapport de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Catherine Deroche, MM. Bernard Bonne, Gérard Dériot, René-Paul Savary et Élisabeth Doineau (n° 77, 2017-2018) :

- Tome I : Exposé général ;

- Tome II : Examen des articles ;

- Tome III : Tableau comparatif ;

Avis de M. Alain Joyandet, fait au nom de la commission des finances (n° 68, 2017-2018).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 15 novembre 2017, à zéro heure vingt-cinq.)

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD