M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Vous l’avez bien compris, je suis défavorable à l’amendement présenté par Éric Bocquet.
Je rappelle tout de même que les décisions prises par le Gouvernement sur la prestation d’accueil du jeune enfant, la PAJE, et les allocations familiales sont malheureusement très défavorables pour les familles.
L’amendement n° I-96, qui vise à relever le plafond du quotient familial, a précisément pour objet de compenser ces décisions. Sous le précédent quinquennat, ce plafond a été abaissé à deux reprises. Pour ce qui nous concerne, nous voulons revenir à un peu plus de justice pour les familles, fussent-elles de la classe moyenne supérieure !
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. J’irai dans le sens du secrétaire d’État. L’amendement n° I-96 ne constitue pas une mesure générale pour les familles : celle-ci bénéficiera uniquement aux plus aisées d’entre elles. Les chiffres nous ont été donnés, ils parlent d’eux-mêmes !
Nous aurions pu être sensibles, dans un premier temps, au principe général de cet amendement, mais à bien y regarder, nous ne pouvons pas le voter, car il vise seulement à redonner du pouvoir d’achat aux familles qui, sans aller jusqu’à dire qu’elles n’en ont pas besoin – qui n’en a pas besoin ? –, sont parmi les plus aisées de notre pays.
M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton, pour explication de vote.
M. Julien Bargeton. Tout d’abord, si vous êtes favorables à l’augmentation du pouvoir d’achat des classes moyennes, alors ne votez pas la suppression de la réforme de la taxe d’habitation ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je vous invite donc à voter l’article 3.
M. Claude Raynal. Chaque chose en son temps !
M. Julien Bargeton. Ensuite, d’après un rapport de la Cour des comptes bien documenté, il faut savoir que le quotient familial représente à peu près le tiers de la politique familiale.
Enfin, pour rebondir sur ce qu’ont dit M. le secrétaire d’État et M. Raynal à l’instant, je m’étonne que vous proposiez une mesure qui coûte 550 millions d’euros, alors que vous êtes habituellement très soucieux des dépenses publiques… Et gager ces 550 millions par les 700 millions qui découlent de l’amendement de M. Requier constitue un mouvement anti-redistributif. Cela veut dire que vous élargissez l’imposition à des gens qui, aujourd’hui, ne paient pas d’impôt sur le revenu, c’est-à-dire les moins favorisés, pour avantager les familles les plus aisées.
Nous ne pouvons évidemment que voter contre ce double mouvement.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Je viens de découvrir un adepte de la finance magique ! Monsieur Bargeton, vous nous expliquez que supprimer la taxe d’habitation va améliorer le pouvoir d’achat, mais vous oubliez tout simplement le fait qu’il va bien falloir trouver les 10 milliards nécessaires quelque part – et ce sera peut-être 20 milliards dans quelques années… Comme les dépenses ne seront pas supprimées, ce sont les contribuables de l’État qui paieront en lieu et place des contribuables locaux. Cela ne créera donc pas de pouvoir d’achat, ce sera simplement une répartition différente de la charge.
Sur le fond, pour répondre à M. le secrétaire d’État de manière plus sérieuse, la progressivité de l’impôt sur le revenu, telle qu’elle a été définie à plusieurs reprises par le Conseil constitutionnel, a en effet pour objet de redistribuer des richesses entre ceux qui gagnent bien leur vie et ceux qui gagnent moins. Il me semble que cette idée est assez largement partagée.
Quant à la politique familiale, elle vise, depuis sa généralisation en 1945 par le gouvernement de la Libération, à égaliser la situation, à l’intérieur de catégories qui ont des revenus identiques, entre ceux qui font le choix d’avoir des enfants et de contribuer ainsi à la vitalité de notre pays et ceux qui – heureusement, ils sont de moins en moins nombreux ; c’est d’ailleurs un état d’esprit qui s’efface –, choisissent de ne pas avoir d’enfant pour avoir une vie plus confortable.
Il s’agit donc non pas de redistribuer de l’argent entre ceux qui sont riches, ceux qui le sont moins et ceux qui ne le sont pas, …
M. Julien Bargeton. Mais si !
M. Gérard Longuet. … mais d’égaliser les conditions de vie entre les familles qui font le choix et ont la chance d’avoir des enfants et les autres, qui n’ont pas fait ce choix pour différentes raisons.
Nous revenons en permanence sur ce débat, car nous avons besoin d’une politique familiale qui favorise la naissance d’enfants. L’Allemagne, qui ne connaît pas une telle politique, en souffre cruellement. Le meilleur investissement de la IVe et de la Ve République – elles ont été constantes sur ce point – réside justement dans cette politique familiale qui, à l’intérieur des catégories sociales, égalise les chances entre ceux qui font le choix d’avoir des enfants et ceux qui, pour des raisons qui leur sont propres, n’en ont pas.
M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 2
M. le président. L’amendement n° I-135, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 5 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sont redevables d’une contribution de solidarité sur le revenu les fonctionnaires internationaux qui ne sont pas assujettis à l’impôt sur le revenu. Cette contribution est fixée à 10 % du revenu des personnes assujetties. »
II. – Le Gouvernement remet avant le 1er juin 2018 un rapport au Parlement établissant la liste complète et l’affectation exacte des fonctionnaires internationaux de nationalité française.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le secrétaire d’État, les temps changent… Aussi je présente de nouveau cet amendement devant notre assemblée.
La convention de 1961 portant sur les fonctionnaires internationaux a aujourd’hui plus de cinquante-six ans. Alors que nous venons de parler d’une répartition plus juste des richesses et d’une contribution de chacun au budget des nations, on pourrait tout de même imaginer que les fonctionnaires internationaux, qui – je le rappelle – ne payent absolument pas d’impôts, soient effectivement amenés à le faire un jour ou l’autre.
D’ailleurs, l’un des directeurs de l’OCDE, Pascal Saint-Amans, a récemment évoqué la position acrobatique qui est la sienne : en tant que fonctionnaire international, il ne paye pas d’impôt alors qu’il est chargé de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ! C’est la même chose pour les fonctionnaires du FMI ou pour ceux du Bureau international du travail, par exemple.
L’amendement que je présente vise à créer une imposition forfaitaire. Je sais pertinemment que cela est contraire aux traités internationaux tels qu’ils sont aujourd’hui rédigés, mais je crois que les temps changent et qu’il serait opportun de réfléchir, malgré tout, à une contribution des fonctionnaires internationaux au fonctionnement des États dans lesquels ils vivent.
Je connais l’histoire des fonctionnaires internationaux ; en m’épinglant, Gérard Longuet l’avait longuement rappelée la dernière fois que nous avons évoqué cette question. J’ai bien retenu la leçon : à l’origine, les gens n’étaient pas très enclins à travailler dans les organisations internationales et il fallait les attirer. Mais je crois que ce problème ne se pose plus du tout aujourd’hui en ces termes et que c’est même le contraire qui se produit : on est plus confronté à un trop-plein qu’à un vide.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !
Mme Nathalie Goulet. J’ai parfaitement conscience des limites de mon amendement, mais, à une époque où tout évolue, il s’agit clairement d’un problème que le contribuable moyen ne peut pas comprendre, compte tenu du niveau des revenus des fonctionnaires internationaux. Je ne conteste évidemment pas la qualité de leur travail, qui est de très bon niveau.
Il est vrai aussi que ceux d’entre nous qui seraient battus aux élections feraient vraisemblablement la queue pour entrer dans l’une de ces organisations internationales, aux conditions qu’elles fixent. (Sourires.) Néanmoins, nous devons vraiment réfléchir à la taxation des revenus des fonctionnaires internationaux.
Tel est l’objet de mon amendement, dont je connais évidemment le sort…
M. le président. Mes chers collègues, je vous demande instamment de respecter votre temps de parole, car beaucoup d’amendements ont été déposés sur la première partie du projet de loi de finances.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je salue la constance, mais aussi le réalisme de Nathalie Goulet quant au sort de cet amendement. Comme elle le dit elle-même, celui-ci est contraire aux articles 34 et 38 de la convention de Vienne.
Le débat est légitime. On peut en effet se demander pourquoi des fonctionnaires qui travaillent à l’OCDE à Paris ne payent pas d’impôts. Cette différence de traitement est parfois difficilement admise par nos concitoyens. Néanmoins, elle est conforme aux traités internationaux.
Le Gouvernement nous dira, dans quelques instants, s’il souhaite s’engager sur la voie d’une modification de la convention de Vienne, qui constitue une question sensible et complexe, car elle traite de beaucoup d’aspects relatifs au statut diplomatique, à l’exonération fiscale des résidences, à l’immunité diplomatique, etc. Mais je doute que nous puissions le faire de manière unilatérale.
Vous le voyez, cet amendement va bien au-delà des prérogatives de notre modeste assemblée. C'est pourquoi la commission des finances ne peut y être que défavorable – peut-être à son grand regret, mais je vous en ai expliqué les raisons.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, vous l’aurez compris, pour les mêmes raisons que le rapporteur général et même si les temps changent – ce dont je conviens ! –, il est difficile à ce stade de modifier les traités de manière unilatérale.
Le débat peut évidemment être ouvert, mais il dépasse largement le cadre de l’Hexagone, a fortiori celui de cette auguste assemblée. Il doit avoir lieu au sein des organisations et institutions internationales concernées, mais j’ai bien peur que les différents traités, dont celui de Vienne, ne résistent à vos assauts répétés et constants, madame la sénatrice…
Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Madame Goulet, l’amendement n° I-135 est-il maintenu ?
Mme Nathalie Goulet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-135 est retiré.
L’amendement n° I-602, présenté par M. Gremillet et Mme Deromedi, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 154 bis A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les indemnités temporaires, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les prestations et rentes viagères, servies aux victimes d’accidents du travail ou à leurs ayants droit, en application des articles L. 752-5 et L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime, ne sont pas prises en compte pour la détermination du revenu imposable de leur bénéficiaire. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Cet amendement vise à corriger le régime d’imposition applicable aux indemnités journalières et aux rentes d’incapacité versées aux exploitants agricoles victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle et à défiscaliser les indemnités journalières ATEXA, l’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés agricoles, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les rentes ATEXA versées aux victimes, comme cela est le cas pour les salariés.
En effet, conformément au 8° de l’article 81 du code général des impôts, les indemnités journalières, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les rentes viagères servies aux victimes d’accident du travail ou à leurs ayants droit, sont exonérées de l’impôt sur le revenu.
En revanche, les indemnités journalières et les rentes d’incapacité permanente servies par le régime d’accident du travail des exploitants agricoles sont passibles de cet impôt.
Il apparaît que cette imposition, même compensée, entraîne de vraies difficultés pour les exploitants agricoles, qui, outre les problèmes de gestion de leur exploitation liés à leur arrêt d’activité consécutif à l’accident de travail ou à la maladie professionnelle, connaissent une diminution considérable du niveau de leur rente d’incapacité.
Aussi, cet amendement tend à rétablir le principe d’égalité devant l’impôt.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mme Deromedi entend remédier à une différence de traitement entre les salariés et les non-salariés. Je peux évidemment l’entendre, car, c’est vrai, il y a une différence, puisque, dans un cas, les indemnités pour accident du travail seraient exonérées de l’impôt sur le revenu, tandis que, dans l’autre cas, ils ne le seraient pas. De ce fait, elle souhaite exonérer de l’impôt sur le revenu les indemnisations au profit des exploitants agricoles.
Si nous adoptions cet amendement, nous créerions une seconde inégalité, non pas entre les salariés et les non-salariés agricoles, mais entre les travailleurs indépendants en général et les travailleurs indépendants agricoles que sont les exploitants agricoles. Cette différence poserait une vraie difficulté. Il faut que non seulement tous les salariés soient traités sur le même plan, mais également tous les travailleurs indépendants, qu’ils relèvent ou non du statut agricole.
C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas introduire une différence de régime fiscal entre les indemnités versées aux travailleurs indépendants en général et celles qui sont versées aux travailleurs agricoles indépendants que sont les exploitants.
Aussi, j’invite notre collègue à retirer son amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, vous le savez, le Gouvernement est évidemment sensible aux risques auxquels les agriculteurs sont exposés dans le cadre de l’exercice de leur travail. Néanmoins, pour les raisons qu’a évoquées M. le rapporteur général, je vous demanderai, de manière bienveillante, de bien vouloir retirer votre amendement.
Bruno Le Maire s’est engagé à ouvrir, dès le début de l’année prochaine, une réflexion globale portant à la fois sur la question de la fiscalité agricole et sur celle des prestations sociales agricoles. À cette refonte globale seront associés les organisations représentatives, la Mutualité sociale agricole, ainsi que les élus, parlementaires et élus des territoires ruraux. Il s’agira d’aborder tant l’aspect fiscal que le traitement social de la question agricole.
Ce domaine a trop fait l’objet de sédimentation, avec des niches qui se sont additionnées les unes aux autres, ce qui ne donne pas beaucoup de lisibilité. Au contraire, la complexité du sujet demande du temps aux exploitants. Or ceux-ci ont déjà suffisamment de temps à passer sur leur exploitation sans, en plus, devoir essayer de s’y retrouver dans le labyrinthe de l’environnement fiscalo-social.
C’est pourquoi je vous invite, avec bienveillance, je le répète, à retirer cet amendement, pour le verser par la suite au débat général qui va s’ouvrir, dès le printemps prochain, sur ce sujet.
M. le président. Madame Deromedi, l'amendement n° I-602 est-il maintenu ?
Mme Jacky Deromedi. Compte tenu de ces explications, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° I-602 est retiré.
L’amendement n° I-217, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 199 quindecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « d’une réduction d’impôt égale » sont remplacés par les mots : « d’un crédit d’impôt égal » ;
2° À la seconde phrase, les mots : « à la réduction » sont remplacés par les mots : « au crédit ».
II. – Le I du présent article n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Nous souhaitons passer d’une réduction d’impôt à un crédit d’impôt pour les dépenses d’hébergement en établissement de long séjour.
En l’état actuel des choses, il existe deux dispositifs bien connus : la réduction d’impôt accordée au titre des emplois dits familiaux et la réduction d’impôt liée aux dépenses d’hébergement en établissement de long séjour.
Le premier de ces dispositifs intéresse plus de 3,8 millions de ménages, ce qui n’est pas du tout négligeable, et devrait coûter 4,74 milliards d’euros en 2018, faisant de cette dépense fiscale l’une des plus importantes du budget.
Nous devrions donc passer d’une réduction d’environ 636 euros par ménage et par an à un crédit d’impôt environ deux fois plus important.
Le second représente une dépense fiscale de 288 millions d’euros, au bénéfice d’un peu plus de 460 000 ménages, soit une réduction d’impôt moyenne de 620 euros par ménage et par an.
Par conséquent, nous avons, d’un côté, un dispositif plutôt encore sous-dimensionné au regard des besoins, avec une dépense annuelle moyenne de 3 000 euros environ pour un plafond de 10 000 euros, et, de l’autre, un dispositif, à l’inverse, plutôt surdimensionné, avec moins de 1 500 euros de dépenses retenues pour un plafond minimal de 12 000 euros.
Les dépenses d’hébergement en établissement de long séjour s’élèvent à près de 8 milliards d’euros pour environ 400 000 ménages, soit une dépense moyenne de près de 16 700 euros par ménage, bien supérieure, donc, au plafond de 10 000 euros.
Un certain nombre de familles modestes, confrontées au problème de l’accompagnement du vieillissement de leurs aînés, se trouvent aujourd’hui contraintes de recourir au placement de leurs parents sans pouvoir réellement bénéficier d’une prise en compte, même limitée, de leur situation.
Nous proposons donc de procéder à la transformation en crédit d’impôt de la réduction d’impôt relative aux dépenses d’hébergement en établissement de long séjour, eu égard au caractère très imparfait encore de la solidarité nationale en la matière. Nous sommes en l’occurrence confrontés à un double problème que tout le monde connaît ici : allongement de la durée de vie – et c’est tant mieux ! – et, en même temps, des difficultés pour les aidants et les accompagnants de nos aînés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La question du coût de la dépendance ne se limite pas au débat fiscal. On pourrait parler aussi de l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie. On aborde très souvent ce sujet très compliqué, dont les coûts vont en effet augmenter avec l’allongement de la durée de la vie. Il mérite donc d’être posé.
En transformant la réduction d’impôt en crédit d’impôt, nous doublerions le coût du dispositif, qui serait à peu près de 300 millions d’euros, d’après les estimations de la commission. Malheureusement – à notre grand regret ! –, nous ne pouvons pas nous permettre de dégrader le solde de la sorte.
C’est donc uniquement, j’y insiste, pour des raisons de coût de cette mesure que la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État. Je partage l’idée que l’outil fiscal n’est sans doute pas le plus adapté pour tenir compte de la réalité des charges liées à la dépendance et pour proportionner au mieux l’aide aux besoins des personnes et des familles.
A été également évoquée par le rapporteur général la question du coût de la mesure, à savoir la transformation de cette réduction d’impôt en crédit d’impôt. Compte tenu de la trajectoire de nos finances publiques et des engagements pris par le Gouvernement de s’inscrire dans le respect du critère de 3 % de déficit public dès la fin de cette année et pour l’année 2018, vous comprendrez que je demande le retrait de votre amendement.
M. le président. Monsieur Savoldelli, l’amendement n° I-217 est-il maintenu ?
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le rapporteur général, monsieur le secrétaire d’État, vous avancez l’argument, certes avec souplesse, d’un surcoût de 300 millions d’euros pour une dépense globale de 4,74 milliards d’euros ! Mais nous parlons de nos aînés et de leurs accompagnants. Je veux bien entendre l’argument purement comptable, mais je pense que vous auriez dû prendre en compte cet amendement, que je maintiens.
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Cet amendement aborde un vrai sujet, comme M. le rapporteur général et M. le secrétaire d’État l’ont indiqué. Or, à mon sens, la réponse purement financière qui est faite sur ce sujet-là me paraît un peu juste, je dois le dire, surtout dans le cadre d’un PLF où, par ailleurs, on abandonne entre 5 milliards à 6 milliards d’euros de recettes fiscales. En l’espèce, on parle, pour rester prudent, de 300 millions d’euros.
De manière générale, il me semble que la question des réductions d’impôt pose en soi un problème. En effet, celles-ci ne touchent, par nature, que ceux qui paient des impôts. Elles ne concernent donc pas forcément ceux qui ont des revenus limités. Cela ne veut pas forcément dire qu’il faut tout rebasculer sous la forme de crédits d’impôt ; il faut regarder au cas par cas. S’agissant de la question posée, qui sous-tend une difficulté sociale, que nous connaissons tous, je pense que la navette pourrait faire son œuvre. Nous pourrions adopter ici l’amendement – c’est ce que j’aurais proposé ! –, pour que le Gouvernement réfléchisse sur le sujet avant la deuxième lecture afin de trouver une solution satisfaisante.
En tout cas, sincèrement, la réponse purement financière me paraît un peu courte.
M. Didier Guillaume. Très bonne intervention !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je ne cherche pas du tout à évacuer le débat. Comme je l’ai dit – M. le secrétaire d’État a aussi un peu esquissé cette idée –, et, eu égard au temps qui nous est compté, nous ne pouvons pas développer longuement notre argumentation : la réponse en matière de prise en charge de la dépense n’est pas que fiscale.
Voilà quelques jours, j’étais encore président d’un conseil départemental, et il y a ici des élus départementaux qui savent que les départements consacrent une part très importante de leur budget à la dépendance. On entend suffisamment parler de l’APA et du reste à charge.
Il y a également l’intervention du budget de la sécurité sociale, les services d’aide à la personne. Un tel amendement mériterait pour le moins que l’on étudie la question du reste à charge par personne, une fois toutes les aides prises en considération.
Il y a notamment l’APA, qui prend en compte non pas les patrimoines, mais les revenus. Concrètement, une personne à faibles revenus a une allocation plus élevée – c’est normal – qu’une personne ayant des revenus élevés. Je le répète, la réponse au problème de la prise en charge de la dépendance ne peut pas être exclusivement fiscale et se traiter uniquement au travers d’un crédit d’impôt. J’attire aussi votre attention sur le fait qu’avec l’amendement suivant on va être amené à parler d’un autre crédit d’impôt, voté sous le précédent gouvernement.
M. Claude Raynal. Cela n’a rien à voir !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La réponse au problème de la prise en charge de la dépendance doit être aussi regardée sous le prisme des prestations assurées par la CAF ou le département. Il faut également, à tout le moins, prendre en compte le niveau de revenus, le reste à charge et le degré de dépendance.
Encore une fois, sur un sujet aussi vaste, avec une prise en charge multiforme, la réponse ne peut pas être que fiscale.
M. le président. L’amendement étant maintenu, le Gouvernement est-il défavorable à l’amendement ?
M. le président. L'amendement n° I-381, présenté par MM. Capus, Malhuret, Bignon, A. Marc, Chasseing, Wattebled, Decool, Guerriau, Fouché et Lagourgue et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 3 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
2° Au deuxième alinéa, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » et le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 18 000 € » ;
3° Au troisième alinéa, le montant : « 20 000 € » est remplacé par le montant : « 23 000 € » ;
4° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
b) À l’avant-dernière phrase, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » et le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 18 000 € » ;
c) À la dernière phrase, le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 18 000 € » et le montant : « 18 000 € » est remplacé par le montant : « 21 000 € ».
II. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Emmanuel Capus.