Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. La commission des finances a porté un regard attentif sur l’amendement présenté par le rapporteur pour avis de la commission de la culture, M. Jean-Claude Carle. Elle a exprimé sur celui-ci un avis favorable, et ce pour deux raisons.
Premièrement, ses auteurs mettent le doigt sur un point que nous ne comprenions pas très bien. Nous nous sommes évidemment nourris de la compétence de la commission des affaires culturelles pour pousser la réflexion plus loin et je suis certain que M. le ministre pourra nous expliquer comment l’on peut passer d'une somme relativement importante à un montant beaucoup plus modeste.
Deuxièmement, cet amendement tend à gager la dépense proposée sur une économie sur le système d'information de gestion des ressources humaines de l'éducation nationale, dont nous savons qu'il ne parvient pas à trouver son harmonie et son équilibre. En effet, nous en sommes aujourd'hui à 520 % du budget initial !
Pour connaître le domaine informatique, je sais qu’il n’est jamais facile de réussir dans ce type de projets et je suis le plus mal placé pour jeter la pierre, ayant mis en œuvre, avec un succès mitigé, le projet de logiciel unique à vocation interarmées de la solde, le projet LOUVOIS… Mais tout de même, nous voudrions savoir jusqu'où ira le projet de système d’information de gestion des ressources humaines et des moyens de l’éducation nationale, dit « SIRHEN ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
La commission émet donc un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je vais bien évidemment développer de nouveau les arguments que j’ai avancés tout à l’heure à la tribune.
Tout d’abord, je dois dire que le chiffre de 300 millions d’euros qui a été évoqué tout à l’heure me semble sortir de nulle part, si vous me permettez l’expression. Je ne vois pas à quoi il fait référence.
Ce qu’il est très important de souligner, c’est que, en raison d’une coutume justifiée, on prévoit des crédits supplémentaires lorsque les programmes changent, ce qui est survenu il y a deux ans. De fait, 150 millions d’euros en 2016 et 110 millions cette année ont été budgétés à ce titre, soit 260 millions d’euros au total sur deux ans. Encore une fois, nous avons pris comme référence ce qui s’était passé lors des précédents changements de programmes, même si cette fois-ci, la situation était quelque peu inédite puisque les changements ont porté d’un coup sur quatre ans.
Il y a trois ans, 10 millions d’euros étaient donc inscrits au budget, et c’est ce qui reste pour moi la vraie référence. Par conséquent, les 16 millions d’euros que nous dégageons dans ce budget représentent une augmentation assez nette par rapport à la période antérieure.
Il faut le dire, cette question des manuels scolaires draine des intérêts importants : les intérêts des élèves, mais également ceux des éditeurs, par ailleurs tout à fait respectables. Certes, je ne néglige pas ces derniers, mais je ne suis pas obligé de les considérer aveuglément, car l’argent public doit être bien utilisé.
Tout d’abord, les choses ont évolué. Je profite de l’occasion pour dire, à vous-mêmes ainsi qu’aux éditeurs, que je suis très attaché aux manuels en papier, et donc il ne s’agit pas de les faire disparaître, tant s’en faut. Je rappelle souvent que, aujourd’hui, moins de la moitié des élèves de l’école primaire – environ 40 % – disposent d’un manuel en papier, ce qui est un problème, car ce taux devrait être de 100 %.
Les manuels doivent évoluer dans leur conception de manière qu’ils soient moins épais, plus clairs, plus explicites, tout en bénéficiant d’un prolongement numérique, comme le permet la technologie. C’est un sujet de dialogue avec les éditeurs. Sur cette question comme sur d’autres, nous ne devons pas avoir une vision simplement budgétaire et quantitative. Mettre plus d’argent n’améliorerait rien.
Enfin, je l’ai déjà dit, mais je le rappelle avec force, il n’y a de notre part aucune volonté de transférer des charges aux départements. Si telle était notre intention, il faudrait d'ailleurs une modification législative du code de l’éducation, et nous ne poussons aucunement dans ce sens. Ce qui est vrai, c’est que, en l’espèce, nous promouvons une dépense publique raisonnable.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Didier Guillaume. M. Carle a été convaincu ; il va le retirer !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. Monsieur le ministre, en général, quand vous vous exprimez, je bois du petit-lait. Mais là, vous n’y êtes pour rien : ces 300 millions d’euros ont été promis par la ministre précédente.
Lors de la réforme des programmes, tous les éditeurs scolaires ont dû en un an éditer les manuels des quatre niveaux, alors qu’il faut en général quatorze mois pour traiter un niveau d’école ou de collège. Cela a été une gageure absolument incroyable pour eux. Ce travail de rédaction des manuels a été réalisé, fort bien, par des groupes de professeurs réunis en collectifs éditoriaux, et il est en général on ne peut plus proche de ce que fait le Conseil supérieur des programmes.
Je vous félicite d’avoir changé l’ancien président, pour le remplacer par son actuelle présidente, qui a l’air d’être en effet une personne remarquable. Toutefois, vous savez très bien qu’on ne peut pas éparpiller la pédagogie et qu’on a besoin d’avoir un socle. Ces éditeurs s’y emploient.
Mon collègue Jean-Claude Carle parlait du papier, mais vous le savez, les éditeurs privés œuvrent également dans le numérique. De fait, en version papier ou en version numérique, les éditeurs scolaires existeront toujours, et l’on aura toujours besoin d’eux.
Là où je vous suis, en revanche, c’est dans la nécessité d’une remise à plat de l’ensemble des crédits. Comme vous l’avez dit, plus de la moitié des élèves du primaire n’ont jamais eu leurs manuels entre les mains, parce que les communes n’ont pas les moyens de les leur payer. Les départements, quant à eux, sont complètement exsangues et ils n’ont pas non plus les moyens de payer les manuels de collège, tandis qu’au lycée, les besoins en manuels s’amenuisent, et ce n’est donc plus le même problème.
Il serait intéressant de remettre à plat, avec les éditeurs et, pourquoi pas, avec les parents d’élèves, les crédits consacrés aux manuels et le socle de connaissances.
Bien évidemment, je soutiendrai l’amendement de mon collègue Jean-Claude Carle.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.
M. Jacques-Bernard Magner. Effectivement, on aurait pu entendre les arguments du rapporteur pour avis, Jean-Claude Carle, si l’inquiétude quant à un éventuel transfert de charges par l’État était justifiée, celui-ci ne voulant pas prendre à sa charge une nécessaire augmentation des moyens.
Toutefois, M. le ministre vient de nous rassurer : premièrement, cette augmentation des moyens n’a pas lieu d’être, puisque la récente réforme des programmes a été menée à son terme ; deuxièmement, il nous a bien précisé qu’il n’y avait aucune volonté de la part du Gouvernement de transférer ces charges aux collectivités départementales si elles devaient augmenter.
Par conséquent, cet amendement n’a pas d’intérêt et le groupe socialiste et républicain ne le votera pas.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
Articles additionnels après l'article 55 bis
Mme la présidente. L'amendement n° II-140 rectifié bis, présenté par M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Malhuret, est ainsi libellé :
I. – Après l'article 55 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er janvier 2019, un rapport sur le dispositif dit des « classes bilangues » dans les collèges.
Ce rapport évalue le coût et les résultats de la réapparition des classes bilangues au collège à la rentrée 2017. Il en mesure l’impact en termes de classes créées, de mixité au sein des classes bilangues, d’établissements proposant ce cursus, de répartition par académie des classes bilangues, et de public touché.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’un intitulé ainsi rédigé :
Enseignement scolaire
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Lors de la campagne présidentielle, le futur Président de la République s'était engagé à rouvrir les classes bilangues au collège, pour promouvoir un enseignement renforcé des langues étrangères. Cet engagement a été tenu en septembre 2017.
Par cet amendement, nous proposons que soit remis un rapport afin d’évaluer l’impact de cette décision.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Sagesse !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Rendre compte du rétablissement des classes bilangues ne me pose aucune difficulté, et je suis prêt à répondre à toute question, quelque forme qu’elle prenne, qu’un parlementaire me poserait à ce sujet ; simplement, je redoute quelque peu l’inflation des rapports.
Mon avis est donc défavorable sur la forme, mais favorable sur le fond. Le mieux serait que cet amendement soit retiré…
Mme la présidente. Madame Mélot, l'amendement n° II-140 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Je vais le retirer, madame la présidente, mais je souhaite que M. le ministre nous tienne informés de l’évaluation qui sera faite de cette mesure.
Je retire donc cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II-140 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° II-141 rectifié bis, présenté par M. Capus, Mme Mélot et MM. A. Marc, Wattebled, Lagourgue, Malhuret et Bignon, est ainsi libellé :
I. – Après l'article 55 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er janvier 2019, un rapport sur le dispositif « Devoirs faits » dans les collèges.
Il évalue le coût de ce dispositif et son effectivité en matière de progression pédagogique des élèves, ainsi que les modalités d'encadrement (personnels mobilisés, lieux affectés, temps dédié).
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’un intitulé ainsi rédigé :
Enseignement scolaire
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Là encore, il s’agit d’une demande de rapport, en l’occurrence sur le dispositif « Devoirs faits », qui a été mis en place à la rentrée des vacances de la Toussaint 2017 et qui bénéficie d'une enveloppe de 220 millions d'euros. Est-il possible d’être informés de l'utilisation qui est faite de celle-ci ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Sagesse ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Madame la sénatrice, je m’engage à fournir les éléments nécessaires pour vous éclairer et vous rassurer.
En attendant, je sollicite le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Madame Mélot, l'amendement n° II-141 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Je remercie par avance M. le ministre de bien vouloir nous apporter des précisions sur l’utilisation de cette enveloppe.
Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-141 rectifié bis est retiré.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Sport, jeunesse et vie associative
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » (et article 65).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, en tant que rapporteur spécial, mon regard se porte naturellement sur les crédits de la mission. De ce point de vue, elle constitue la vingt-sixième du budget général. Sa dotation progresse de 22 % à périmètre constant et s’élève, à l’issue du vote de l’Assemblée nationale, à 962,3 millions d’euros.
Cependant, cette analyse ne saurait suffire, pour trois raisons.
La première résulte du caractère central des politiques publiques qu’elle porte. La mission incarne le cœur de notre société : son présent, avec la cohésion sociale portée par les mouvements sportif et associatif ; son avenir, avec le soutien à la jeunesse, et je me réjouis que le Gouvernement poursuive dans la réussite du service civique en 2018, avec un objectif de 150 000 jeunes réalisant une mission l’an prochain. Je m’interroge toutefois sur l’articulation qui sera définie avec le service national voulu par le Président de la République.
La deuxième raison s’explique par les perspectives exceptionnelles qui se dessinent à l’horizon. L’attribution récente de la coupe du monde de rugby à la France s’est ajoutée à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Ces décisions sont récentes, mais leurs conséquences sont immédiates. Un programme spécifique pour l’Olympiade de 2024 a été créé après le dépôt du projet de loi de finances, doté de 48 millions d’euros de crédits. J’approuve cette démarche, d’ailleurs préconisée par notre collègue Didier Guillaume dans son rapport publié l’année dernière, qui permettra de distinguer les crédits dédiés à cet événement exceptionnel des crédits indispensables au sport pour tous.
De même, je note qu’il nous est demandé dans le collectif budgétaire de permettre au comité d’organisation des jeux Olympiques, le COJO, de bénéficier de la garantie de l’État. Cependant, ce comité n’est pas encore constitué et plusieurs interrogations demeurent s’agissant de sa composition et de son fonctionnement. Sa définition doit intervenir avant le 13 février prochain. Sans doute pourrez-vous, madame la ministre, nous donner des précisions à ce sujet.
Nous devons donc travailler rapidement sur des dossiers emblématiques, mais aussi coûteux pour nos finances publiques. Dans cette perspective, il est indispensable, madame la ministre, que l’ensemble des documents, en particulier les engagements fiscaux pris par la France auprès du Comité international olympique, nous soit transmis. Je souhaiterais que vous nous assuriez de la pleine collaboration de vos services à ce sujet.
Le dispositif national de lutte contre le dopage a favorablement contribué à la réussite française dans ces différents dossiers. Or l’Agence française de lutte contre le dopage doit actuellement faire face à la suspension par l’Agence mondiale antidopage du laboratoire d’analyse de Châtenay-Malabry. Alors que la subvention prévue pour l’AFLD en 2018 est réévaluée afin de prendre en compte l’assèchement de son fonds de roulement, cette suspension pèsera sur les ressources propres de l’agence.
Il importe donc de soutenir les capacités françaises de lutte contre le dopage, afin de promouvoir les compétences françaises en la matière et de répondre aux exigences croissantes de l’agence mondiale.
La troisième raison pour laquelle une simple analyse fondée sur les crédits ne saurait suffire résulte des modifications opérées par rapport à 2017. Je pense à la suppression de la réserve parlementaire et au Centre national pour le développement du sport, le CNDS.
Le précédent gouvernement a progressivement rétabli les comptes du CNDS, alors que celui-ci était en grave difficulté financière en 2012. Vous proposez, madame la ministre, une clarification des rôles entre les crédits budgétaires et le CNDS, ce que j’approuve.
Néanmoins, votre choix s’accompagne d’une atrophie de ses ressources allant au-delà de cette clarification. Le CNDS devra réaliser près de 64 millions d’euros d’économies en 2018. Le compromis proposé par le Gouvernement vise à assurer que le CNDS ne sera plus sollicité pour financer les grands événements sportifs et soutiendra exclusivement le sport dans les territoires.
De plus, le Gouvernement s’est engagé à ouvrir près de 30 millions d’euros dans le collectif budgétaire de fin d’année pour le CNDS. Il s’agit d’un choix risqué. Nous estimons absolument primordial de préserver coûte que coûte les moyens alloués au sport dans les territoires. C’est pourquoi le Sénat, lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, a relevé le plafond de recettes affectées au CNDS, afin de maintenir le même niveau de ressources en 2018.
Ce choix est d’autant plus risqué que, initialement, le Gouvernement entendait ne pas compenser la suppression de la réserve parlementaire. Au-delà des débats sur la réserve elle-même, je tiens à souligner que celle-ci constituait une ressource traditionnelle et essentielle de nombreuses petites associations. En 2017, elle représentait 10 % des crédits destinés à la jeunesse et à la vie associative hors service civique.
Une solution de rechange a finalement été définie, consistant à majorer les ressources du fonds de développement de la vie associative de 25 millions d’euros. Cependant, le fonds se concentre pour l’instant sur le soutien à la formation des bénévoles associatifs. De surcroît, ces crédits conduiront à quadrupler la dotation initiale du fonds.
Je m’interroge donc naturellement sur les modalités qui seront définies pour l’attribution de ces crédits. Le Gouvernement a précisé qu’un groupe de travail serait constitué pour en décider, afin de permettre un financement dès le début de 2018.
En tout état de cause, il importe, madame la ministre, que les petites associations puissent en bénéficier, sans difficultés administratives.
La programmation de la mission a donc beaucoup évolué entre le texte initial et le texte transmis par l’Assemblée nationale. Un programme supplémentaire a été créé, et les crédits ont été majorés de plus de 8 %. Compte tenu de ces éléments, et sur ma recommandation, la commission des finances s’est finalement prononcée pour l’adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche. – M. Michel Savin applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, pour le sport. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, notre commission a donné un avis favorable, avec vigilance, aux crédits du sport dans le projet de loi de finances pour 2018.
Notre choix se veut d’abord un signe de confiance dans votre action, madame la ministre, vous qui avez démontré par vos résultats sur les pistes d’escrime votre maîtrise du très haut niveau olympique. Vous savez ce qui est nécessaire pour nos athlètes et votre attachement au développement du sport pour tous illustre votre vision globale des enjeux du sport.
Cependant, ce budget n’est pas complètement satisfaisant, car il comporte quelques artifices et surprend par l’absence de moyens véritablement nouveaux pour accompagner nos athlètes.
Concernant les artifices, nous avons entendu que la baisse des crédits avait été contenue à 1 % par l’annonce d’un abondement du fonds de roulement du CNDS à hauteur de 27 millions d’euros dans le projet de loi de finances rectificative. Outre que cet engagement doit encore être tenu, il n’apporte pas les mêmes garanties qu’une inscription dans le projet de loi de finances. Le débat budgétaire aurait mérité que l’on puisse mesurer dans la globalité l’effort de la Nation pour le sport.
Par ailleurs, la réforme du périmètre d’intervention du CNDS est-elle complète, à la suite de la réduction de moitié de ses moyens et du transfert de ses missions et crédits au programme 219, ou bien faut-il s’attendre à une rebudgétisation supplémentaire ou totale l’année prochaine ?
Nous manquons de visibilité sur les intentions à moyen terme du Gouvernement, compte tenu en particulier de l’enjeu que représente la tenue des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, même si je sais que ce sera l’un des éléments du débat que vous venez de lancer sur la gouvernance du modèle sportif français.
Certes, la préparation de ces jeux semble présenter de nombreuses garanties, dont nous discuterons prochainement à l’occasion du projet de loi olympique. Les critiques émises récemment par la Cour des comptes concernant l’organisation de l’Euro 2016 ne semblent pas de mise pour cet événement, compte tenu, en particulier, de la distinction des missions et des responsabilités entre le COJO et la SOLIDEO, la société de livraison des ouvrages olympiques.
Toutefois, il existe tout de même quelques défis à relever, qu’il s’agisse du milliard d’euros de parrainages privés à trouver pour le COJO ou des surcoûts éventuels liés à la rénovation de certains équipements, comme le Stade de France.
Ce qui nous inquiète ici, au Sénat, tient moins aux équipements, dont on ne doute pas qu’ils seront livrés à temps, qu’à l’accompagnement de nos athlètes. L’INSEP, l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance, en particulier, a besoin de moyens nouveaux, notamment pour construire plusieurs équipements manquants – un dojo de karaté, une salle multisport pour le handball et le volley-ball et un mur d’escalade pour l’épreuve de vitesse.
Les crédits d’accompagnement des athlètes de haut niveau doivent nécessairement augmenter pour permettre d’atteindre les objectifs que vous avez fixés, et il existe un risque que cet effort soit tardif et insuffisant.
Enfin, l’AFLD est confrontée à des enjeux cruciaux, avec la nécessité de construire rapidement un nouveau laboratoire et de retrouver une activité normale à l’issue de la période de suspension qui devrait s’achever, nous l’espérons, en janvier prochain.
Comme souvent pour ce qui concerne le sport dans notre pays, on constate un hiatus entre les ambitions, qui sont grandes, et les moyens mobilisés toujours avec parcimonie. D’où notre soutien à l’amendement n° I-311 rectifié, relatif au CNDS, adopté lundi dernier lors de l’examen des articles de la première partie.
Notre pays aura l’honneur d’organiser les jeux Olympiques en 2024 et la coupe du monde de rugby en 2023. Vous avez raison de considérer que l’héritage doit aussi viser l’augmentation du nombre de pratiquants, mais cela passe par un développement du sport scolaire, du sport en entreprise, du sport santé, etc.
Pour répondre véritablement aux enjeux, nous sommes nombreux dans cette assemblée à appeler de nos vœux la mise en chantier rapide d’une loi de programmation budgétaire pour la période 2019-2024, qui seule permettrait au Parlement de jauger et juger l’effort produit par le Gouvernement.
La création d’un programme spécifique dédié aux jeux au sein du projet de loi de finances constitue une première étape, mais celui-ci ne tient pas compte aujourd’hui de l’accompagnement des athlètes et des autres aspects que j’ai évoqués – CNDS, AFLD, etc.
La quasi-stabilité des crédits consacrés au sport a suscité une quasi-unanimité pour faire preuve de bienveillance à l’égard de votre action, madame la ministre. Nous souhaitons que ces encouragements vous permettent, dans les mois qui viennent, de porter « plus vite, plus haut, plus fort » les moyens consacrés au sport dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Didier Guillaume. Joli !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, pour la jeunesse et la vie associative. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018, les crédits consacrés au programme 163, « Jeunesse et vie associative », se caractérisent par la poursuite de l’effort en matière de service civique et la reconduction des crédits en faveur des autres actions hors réserve parlementaire.
Certes, la fin de cette réserve, qui représentait 60 millions d’euros pour les associations en 2017, a une conséquence non négligeable sur leur équilibre financier. Toutefois, le vote de l’amendement gouvernemental par l’Assemblée nationale a permis d’abonder le fonds pour le développement de la vie associative de 25 millions d’euros supplémentaires, faisant croître d’autant le budget du programme 163, qui, du coup, n’a jamais été aussi élevé. La commission de la culture ne pouvait donc qu’émettre un avis favorable sur le programme 163, que je réitère aujourd’hui.
Cependant, la politique de la jeunesse et de la vie associative ne se limite pas aux crédits de ce programme.
Les signaux négatifs envoyés au milieu associatif par le Gouvernement s’accumulent. Déjà touchées par la suppression de la réserve parlementaire, les associations ont été fortement déstabilisées par le changement brutal de politique décidé par le Gouvernement en juillet dernier concernant les contrats aidés. En raison de la fixation d’un plafond largement inférieur aux 400 000 contrats aidés enregistrés les années précédentes et du durcissement des critères d’attribution, de nombreuses personnes dont le renouvellement du contrat pour 2017 avait été considéré comme acquis ont dû être licenciées.
Les conséquences humaines furent désastreuses, car, il ne faut pas l’oublier, les contrats aidés visent les personnes les plus éloignées de l’emploi et représentent souvent pour elles leur dernier espoir d’insertion sociale ! Du jour au lendemain, elles se sont retrouvées sans perspective.
Au-delà de cet aspect humain, le non-renouvellement brutal des contrats aidés remet en cause la pérennité des associations les plus petites et donc les plus fragiles financièrement, qui ont proportionnellement plus recours aux emplois aidés et ne bénéficient pas du crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires.
En réalité, le Gouvernement ne pourra pas s’exonérer d’une réflexion sur le financement d’activités reconnues utiles socialement, mais qui ne sont pas rentables économiquement, ou alors seulement si elles sont réservées à une minorité. Il est donc temps de reconnaître que la plupart des contrats aidés du secteur non marchand répondent à une demande sociale qu’il conviendrait surtout de financer correctement.
Au-delà de la suppression des contrats aidés, d’autres mesures figurant dans le projet de loi de finances pour 2018 risquent de mettre à mal le modèle économique des associations.
C’est le cas de la réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune : 220 millions d’euros avaient bénéficié aux fondations en 2015. La forte réduction de la base d’imposition de ce nouvel ISF, surtout pour les patrimoines les plus élevés, risque de faire chuter le montant des dons.
La diminution structurelle des concours financiers de l’État en direction des collectivités territoriales a également un impact négatif sur les associations.
Faute de mesures concrètes, le plan de développement pour la vie associative, annoncé par le Premier ministre en début du mois, n’a pas dissipé les inquiétudes.
En ce début de quinquennat, il me paraît important d’affirmer que la reconnaissance du secteur associatif, de l’engagement de ses bénévoles et du travail fourni, qui constitue une véritable plus-value sociale, devra se traduire par une valorisation du bénévolat et des financements, notamment au service de la capacité d’innovation sociale des associations. Ces dernières ont également besoin d’une meilleure visibilité financière et de la poursuite de la simplification des procédures.
Enfin, la revalorisation des salaires dans le milieu associatif, dans lequel on trouve une part non négligeable de « salariés pauvres », devrait faire partie des chantiers prioritaires des pouvoirs publics.
Madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous rappelle notre vote favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)