Mme la présidente. La parole est à M. Serge Babary. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Serge Babary. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la mission « Cohésion des territoires » rassemble désormais les programmes précédemment rattachés aux missions « Égalité des territoires et logement » et « Politique des territoires ».
Pour cette mission, qui comporte six programmes, 16,4 milliards d’euros sont inscrits en autorisations d’engagement et 16,5 milliards d’euros en crédits de paiement.
Globalement, le budget de la mission « Cohésion des territoires » est en baisse : les autorisations d’engagement diminuent de 11,45 % et les crédits de paiement de 9,5 %.
Quant aux crédits du programme 147, « Politique de la ville », ils sont en diminution de 16 % en autorisations d’engagement, mais demeurent stables en crédits de paiement.
Le Gouvernement s’est toutefois engagé à porter les crédits du NPNRU de 5 milliards d’euros à 10 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sur la durée du programme. Cet engagement est inscrit à l’article 52 sexies. Nous y sommes favorables.
Nous ne pouvons en effet que nous réjouir du fait que certaines des recommandations émises par nos collègues Annie Guillemot et Valérie Létard dans le rapport d’information qu’elles ont remis en juillet dernier aient finalement été suivies.
Toutefois, certaines interrogations demeurent.
Ainsi, si le présent projet de budget acte le retour de l’État dans le financement du renouvellement urbain aux côtés d’Action Logement et des bailleurs sociaux, ce retour reste balbutiant. L’État participera au financement du NPNRU à hauteur de 1 milliard d’euros sur la durée du programme, dont 200 millions d’euros pendant le quinquennat.
Or comment compte-t-il tenir cet engagement alors que, pour 2018, seuls 15 millions d’euros sont inscrits en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ?
Il est difficile de ne pas se montrer sceptique quant à la réalisation des engagements de l’État. Il ne faut en effet pas oublier que, cet été, le décret d’avance du 27 juillet 2017 a annulé les 100 millions d’euros inscrits en autorisations d’engagement ainsi que les 15 millions d’euros de crédits de paiement inscrits dans le budget pour le NPNRU – soit l’intégralité des budgets pour l’année 2017 !
Au total, ce sont 130,4 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 46,5 millions d’euros de crédits de paiement qui ont été annulés, ce qui est considérable. Par ailleurs, si l’article 52 sexies porte le NPNRU à 10 milliards d’euros, se pose encore la question du financement de cette augmentation.
Comment l’État va-t-il trouver les 4 milliards d’euros qui manquent pour financer le NPNRU ?
Ne l’oublions pas non plus, en parallèle à ces mesures, l’article 52 du projet de loi de finances pour 2018 impose, en contrepartie de la baisse des APL dans le logement social, une réduction des loyers de solidarité finalement étalée sur trois ans. Pour l’année 2018, la baisse des loyers correspondra à une perte de pas moins de 822 millions d’euros, qui devra être absorbée par les 254 offices publics de l’habitat qui détiennent 2,5 millions de logements.
À cela s’ajoutent plusieurs autres mesures qui vont peser principalement sur les bailleurs comme la hausse de leur participation au Fonds national des aides à la pierre. Ces mesures, qui interviennent en pleine négociation du futur NPNRU 2018-2024, vont directement impacter la capacité d’autofinancement des organismes d’HLM, et nécessairement fragiliser la politique locale en faveur du logement social.
C’est l’ensemble des projets de rénovation urbaine déjà engagés ou simplement prévus qui pourraient être remis en cause. Un accord a été trouvé le 21 novembre dernier avec Action Logement, qui financera 2 milliards d’euros supplémentaires. Le financement du NPNRU sur l’ensemble du quinquennat n’est cependant pas encore bouclé.
Dans ces conditions, nous ne pouvons qu’être inquiets sur l’avenir du logement social et la concrétisation des contrats de ville qui ont été signés et qui préfigurent la conclusion des conventions pluriannuelles de renouvellement urbain.
La brutalité de l’ensemble de ces mesures et l’absence de concertation laissent à penser que la seule ligne directrice du Gouvernement est la réalisation de 1,7 milliard d’euros d’économies, et ce sans véritable politique du logement et de la mixité sociale.
Tout en saluant le relèvement du taux de TVA à 10 % comme premier élément positif, le groupe Les Républicains s’en remet à l’issue des discussions à venir conformément à la proposition de M. le rapporteur spécial Philippe Dallier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Létard. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Valérie Létard. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’irai droit au but sur le logement, puisque les questions relatives à la ville ont été présentées par Annie Guillemot, qui a largement rappelé combien, concernant les crédits de cette mission budgétaire, les objectifs étaient clairs.
Une mesure adoptée à l’Assemblée nationale vise à augmenter de 5 à 10 milliards d’euros le passage du NPNRU dans sa nouvelle génération et à donner les moyens de mener véritablement cette politique. À ce stade, j’attire votre attention sur le fait que cette augmentation, avec 1 milliard d’euros de l’État, souffrirait – pour ne pas dire plus – de l’application stricte de l’article 52 tel que l’a adopté l’Assemblée nationale. Nous y voilà !
Vous imaginez bien que, lorsque l’opérateur principal de la rénovation, l’organisme de logement social, qui assure la réhabilitation ou la reconstruction de logements, verra son autofinancement diminuer de 1,7 milliard d’euros, il devra forcément opérer des choix sur les investissements.
M. Antoine Lefèvre. Il y a des chances !
Mme Valérie Létard. L’ANRU pourrait en être l’une des victimes collatérales.
Voilà pourquoi le travail collectif engagé depuis plusieurs semaines au Sénat et visant à trouver une solution commune dans l’intérêt général nous paraît essentiel. En effet, M. le rapporteur spécial Philippe Dallier et Mme le rapporteur pour avis Dominique Estrosi Sassone ont rappelé le travail qui a déjà été mené en première partie, aboutissant au vote des 700 millions d’euros de TVA.
Aujourd’hui, au travers de leurs deux amendements – le groupe centriste a déposé un amendement identique à celui de Mme Dominique Estrosi Sassone –, nos deux rapporteurs nous donnent le champ des possibles pour cette discussion.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, faut-il espérer de la part du Gouvernement l’aboutissement d’un compromis sur la baisse de 800 millions d’euros des loyers dès 2018, allant jusqu’à 1,5 milliard d’euros en 2020, telle que l’a votée l’Assemblée nationale au risque de mettre à bas le monde du logement social, mais aussi avec son lot de conséquences sur les collectivités, avant même l’examen de la loi qui doit arriver au printemps et dont l’objet est d’établir une véritable réforme du logement partagée ?
Faut-il plutôt saisir la main tendue par le Sénat au travers des amendements de M. Philippe Dallier et de Mme Dominique Estrosi Sassone, sous réserve qu’ils soient sécurisés par les représentants du Gouvernement ?
La mesure budgétaire proposée par l’État, si elle peut se comprendre sur le fond, n’est pas acceptable quant à la méthode, trop brutale et sans concertation. Où sont les collectivités dans ce débat ? PLH, cofinancement des aides à la pierre, stratégies de peuplement, garanties d’emprunt, NPNRU, article 55 : l’ensemble de ces sujets devront être assumés par les collectivités, et toutes les décisions qui seront prises dans ce budget vont entraîner de lourdes conséquences pour ceux-ci. La politique locale de l’habitat peut être complètement détruite en fonction des choix que nous ferions !
Impact économique sur les territoires, équilibre entre les zones tendues et détendues, baisse des aides à la pierre, rezonage et critères de la loi Pinel pour le PTZ : bref, vous l’aurez compris, nous avons ici, au Sénat, la possibilité de trouver une voie de passage. Sécurisez-la, bâtissez-la avec nous, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mais laissez la possibilité aux collectivités, aux organismes et à nous, parlementaires expérimentés, de vous aider à aller au bout de votre réforme, de votre volonté, au rythme nécessaire afin de ne pas tout faire exploser, et en prenant les précautions requises pour réussir cette ambition partagée. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Françoise Gatel. Très bien !
Mme Valérie Létard. Suivez cette méthode : écoutez la voix des différents territoires que nous représentons ; il ne faut pas les oublier ! Tel est le message que nous voulons vous adresser aujourd’hui. Partagez vos décisions, construisez-les avec nous, mettez les choses dans le bon ordre. On commence la maison par les fondations, pas par le toit. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli.
M. Xavier Iacovelli. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce budget pour 2018 est malheureusement marqué du sceau de l’incohérence. Je dis bien : « malheureusement ». En effet, en septembre dernier, lorsque vous présentiez la stratégie du Gouvernement pour le logement, j’y ai trouvé des ambitions que nous pouvions avoir en partage.
Ces ambitions s’inscrivent dans une logique de justice comme la volonté de favoriser l’accession à la propriété dans le cadre d’un parcours résidentiel efficace, comme la volonté d’accélérer la rénovation ou de relancer la construction de logements. Nous les partageons d’autant plus facilement que ce « choc de l’offre », nommé ainsi par vos soins, nous l’avions réalisé lors du quinquennat précédent avec des résultats probants,…
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. C’est un peu gonflé !
M. Xavier Iacovelli. … puisque, en 2017, 400 000 logements ont été construits, dont 130 000 dans le parc social.
Ces ambitions partagées, dans un contexte où le système redémarre, vous risquez de les détruire avec votre méthode exclusivement guidée par une logique comptable. Ce que vous présentez, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, va à l’encontre des ambitions que vous prétendez poursuivre, car force est de constater que les choix budgétaires du Gouvernement montrent que vous aggraverez la situation du logement et des moins aisés.
Mesurez les effets de cette baisse de 1,5 milliard d’euros supportés par les bailleurs sociaux. Les coupes opérées sont bien des coupes claires et non des coupes sombres, comme l’aurait précisé Jean d’Ormesson. (Sourires.)
M. François Grosdidier. Bonne référence !
M. Xavier Iacovelli. Par cette décision, vous obérez d’une manière irréversible et inacceptable le modèle économique du logement social avec des effets dévastateurs sur la construction de logements, sur la réhabilitation des logements, et après avoir organisé le plus grand plan social par la remise en cause des contrats aidés, vous continuez votre forfait sur l’emploi dans ce secteur, avec plus de 140 000 emplois concernés.
Cette perte de recettes de 1,5 milliard d’euros, c’est 70 % de la capacité d’investissement des organismes d’HLM, c’est 54 000 logements qui ne seront pas construits, c’est plus de 100 000 logements qui ne seront pas réhabilités.
Nous ne sommes pas dogmatiques : faire des économies n’est pas un problème en soi.
M. Philippe Pemezec. C’est nouveau !
M. Xavier Iacovelli. Je vous le confirme, monsieur le sénateur : nous ne sommes pas dogmatiques, contrairement à vous ! (Rires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Il a de l’humour !
M. Xavier Iacovelli. Encore faut-il éviter de casser l’écosystème dans sa globalité. Dans le cadre d’une conférence de consensus, nous ne sommes d’ailleurs pas opposés à une évolution de ce modèle. Et le Sénat, dans sa grande sagesse, sur toutes ses travées, avait accepté la recherche d’un compromis qui, notamment, prenait la forme d’une augmentation de la TVA applicable aux opérations réalisées dans le logement social, un compromis qui tenait compte des revendications de l’Union sociale pour l’habitat, un compromis qui intégrait même votre cadre budgétaire de 1,5 milliard d’euros, mais qui préservait le modèle économique du logement social en France.
Ce compromis, vous tenterez de le balayer dans quelques instants en faisant porter vos réductions de crédits par une baisse des loyers irréversible de 800 millions d’euros sur la RLS, comme l’indique l’amendement que vous avez déposé à treize heures.
Que reste-t-il d’une stratégie politique lorsqu’elle est animée par une logique budgétaire ? Quelle est votre vision pour permettre à tous de vivre dans un logement décent et abordable ? Vous diminuez les aides à la personne, avec la baisse des APL, la suppression de l’APL-accession, et, dans le même temps, les aides à la pierre, avec le désengagement de l’État à hauteur de 75 % du Fonds national aux aides à la pierre, avec la suppression de l’aide aux maires bâtisseurs qui entraînera inévitablement un frein à la construction de logement. Peut-être avez-vous une vision ? Peut-être, après la destruction de ce modèle, souhaitez-vous lui substituer un autre système ? Dans ce cas-là, dites-le-nous, dites-le aux bailleurs, dites-le aux professionnels de la construction et aux Français en général. Vous leur devez de la transparence. (M. François Patriat proteste.)
À l’écoute de tous les acteurs du secteur du logement, nous sommes face à vous pour porter des propositions afin de lui redonner de la justice et de la solidarité, pour rendre une cohérence économique à la politique du logement présentée dans cette seconde partie du projet de loi de finances.
Par amendement, le groupe socialiste et républicain défendra la suppression de l’article 52, le rétablissement de l’aide aux maires bâtisseurs et l’augmentation de la contribution de l’État à l’aide à la pierre pour maintenir le niveau d’engagement de 2017.
Face à vous, nous prenons notre place de défenseurs de ce modèle qui protège les ménages les plus modestes, grâce à un modèle économique et social qui les a notamment protégés lors de la crise de 2008.
Permettez-moi une dernière remarque : il est des choix qui ont le mérite de clarifier toutes les ambiguïtés. En supprimant l’ISF, vous avez fait un cadeau de 3,5 milliards d’euros aux plus fortunés,…
M. Philippe Pemezec. Tiens, tiens, tiens…
M. Xavier Iacovelli. … et en demandant, dans le même temps, aux plus modestes de se serrer la ceinture en baissant les APL, vous faites le choix des inégalités. Eh bien, nous, socialistes, nous avons fait le nôtre, nous choisissons la justice sociale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Bories. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Pascale Bories. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai écouté attentivement le ministre de l’économie durant la discussion générale. Il disait : « La France qui trompe, c’est fini ! » Pourtant, au regard de vos ambitions en matière de cohésion des territoires et du budget prévu pour y faire face, j’ai bien peur que nous soyons confrontés à un double langage. Car, malheureusement, l’instauration d’un ministère spécifique et la volonté de créer une agence des territoires ne s’accompagnent pas des crédits nécessaires. Si quelques bonnes dispositions figurent dans votre budget, le sentiment général est proche de la déception.
La mise en place de la conférence des territoires avait suscité des attentes de la part des élus et des citoyens qu’ils représentent. Je rappelle que le Président de la République avait, en juillet, indiqué : « Ce que demande la ruralité […], c’est d’avoir les mêmes chances de réussir. »
La création d’une agence des territoires, telle l’ANRU, devait être porteuse de ce souffle nouveau. Mais au regard des chiffres, notamment la forte baisse des crédits dédiés au Commissariat général à l’égalité des territoires, le CGET, le souffle est inexistant.
Au-delà des chiffres, il y a bien un sentiment d’abandon, je dirai même de défiance, de la part des ruraux. Lors du dernier congrès des maires de France, ce sentiment est remonté jusqu’à vous. En effet, les motifs de préoccupation sont nombreux : fin de la dotation d’action parlementaire, suppression de 209 millions d’euros de crédits consacrés à la DETR, réforme de la taxe d’habitation, objectif de baisse de 13 milliards d’euros sur les dotations de l’État aux collectivités, absence de réforme de ces dotations, qui pénalise les communes rurales, réduction du nombre d’élus locaux et de parlementaires. Bref, la ruralité est inquiète, et votre budget en matière de cohésion des territoires ne pourra pas la rassurer.
Mais revenons au projet de loi de finances, plus précisément aux programmes 162 et 112.
D’abord, j’aimerais indiquer que les changements de périmètre de la mission n’ont pas facilité la compréhension de votre politique.
Concernant le programme des interventions territoriales de l’État, le PITE, les crédits sont en légère hausse. Je ne peux que m’en réjouir, car cela touche directement ma région et mon département avec le plan Littoral 21. L’État se grandit d’avoir une continuité sur des projets environnementaux d’envergure. Nous serons néanmoins vigilants dans l’application réelle de vos ambitions.
En revanche, sur l’autre programme, le 112, celui qui concerne directement la politique d’aménagement du territoire, on assiste à un désengagement. Les crédits sont en net retrait par rapport aux budgets antérieurs, déjà faiblement dotés. En décidant de réduire de 58 % les autorisations d’engagement pour ce programme, vous désincarnez toute une politique qui a fait ses preuves.
Au sujet des contrats de ruralité, les projets à venir ne trouveront pas les crédits nécessaires. Dans le Gard, le représentant de l’État a signé, à grand renfort médiatique, six contrats de territoire. Ces accords-cadres, portés notamment par les pôles d’équilibre territoriaux et ruraux, les PETR, risquent ainsi de devenir des coquilles vides. Je le regrette, car au-delà de la déception des élus, des projets d’avenir visaient des territoires en difficultés.
La ruralité peut être une terre de croissance et de développement, si on lui en donne les moyens. Mais ceux-ci manquent terriblement à votre budget. Le Gouvernement aura beau indiquer que ces contrats seront financés autrement, cette confusion ne grandit pas vos ambitions en matière territoriale. À cela s’ajoute la division par deux, depuis cinq ans, de la dépense fiscale consacrée aux ZRR et le flou persistant pour les communes rurales intégrées à de grands EPCI.
Dans mon département, une bonne partie des communes cévenoles sont rattachées à la communauté d’agglomération d’Alès qui compte 73 communes depuis les fusions imposées par la loi NOTRe. Si elles perdent le bénéfice du classement en ZRR, ces communes, dont certaines sont en grande souffrance, verraient leur attractivité réduite.
Bien qu’il ne relève pas de cette mission, j’aurais pu aussi parler du Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, dont les crédits sont en baisse. La présence de services à la personne, comme celle des services publics, est la condition sine qua non du développement de la ruralité.
Ainsi, je me réjouis que vous décidiez d’accroître légèrement les financements des maisons de services au public. Néanmoins, cette évolution ne doit pas être le bras armé de la dévitalisation des secrétariats de mairie, qui sont la première interface, et souvent la seule, pour nos concitoyens.
Mme Sophie Primas. Absolument !
Mme Pascale Bories. La question du maintien des services publics en zone rurale est un vrai sujet, et nous serons vigilants.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mis à part quelques évolutions positives, la mission n’a, dans son ensemble, pas de dynamique ni même de sens. C’est profondément décevant.
Je reprendrai ainsi les recommandations du rapport élaboré par le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, M. Maurey, et le rapporteur pour avis, M. de Nicolaÿ. Il faut absolument « simplifier et rendre plus équitables et transparentes les dotations et subventions aux collectivités territoriales ».
Plus largement, je regrette que l’État ne soit plus stratège et n’ait plus aucune ambition en matière d’aménagement du territoire en zone rurale. En effet, au-delà de la baisse des crédits, il faut souligner l’absence de vision et de grands projets publics ruraux.
Pour toutes ces raisons de fond, mais aussi de forme, je voterai, comme mes collègues du groupe Les Républicains, contre la validation de ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Maurey. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. Hervé Maurey. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits consacrés à l’aménagement du territoire au sein de la mission « Cohésion des territoires » sont, pour 2018, en légère augmentation en crédits de paiement – de 2 % exactement –, mais en très nette baisse en autorisations d’engagement – leur montant sera inférieur de 53 % aux autorisations d’engagement votées pour 2017.
Pour la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, cette division par deux des crédits pour les années à venir n’est évidemment pas un bon signe ; nous en sommes extrêmement inquiets.
Certes, on peut trouver des explications à cette situation, en particulier le transfert des crédits des contrats de ruralité vers un autre programme. Toutefois, cette évolution de périmètre ne comporte aucune garantie sur le maintien d’une enveloppe dédiée aux contrats de ruralité pour les années à venir dans le cadre de cette autre mission.
De nombreux territoires se sont organisés pour faire appel à cet instrument, mis en place voilà à peine plus d’un an. Je le rappelle, près de 500 contrats sont conclus ou en cours de négociation aujourd’hui. Cette incertitude n’est pas acceptable, car les élus ont besoin d’une stabilité du cadre et des règles qui leur sont applicables.
Mon groupe est d’autant plus sensible à cette question qu’il a été à l’origine de la réflexion sur ces contrats, inspirés des contrats de ville, mais adaptés au monde rural. Je vous rappelle en effet la proposition de loi de Pierre Jarlier, reprise par Bernard Delcros et rapportée par Annick Billon devant notre commission voilà deux ans. À l’époque, le Gouvernement s’était montré défavorable à cette idée, pour la reprendre ensuite à son compte un an plus tard.
Nos autres interrogations sur votre budget, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, rejoignent celles qui ont été exprimées par notre excellent rapporteur Louis-Jean de Nicolaÿ, que je salue.
Il s’agit d’abord de la baisse de moitié de ce qui restait de la prime d’aménagement du territoire, heureusement légèrement amoindrie lors du débat à l’Assemblée nationale.
Il s’agit ensuite de l’avenir très incertain de la dynamique des pôles de compétitivité dont la troisième phase doit s’achever en 2018. Nous aimerions savoir, monsieur le ministre, si vous allez poursuivre cette politique qui a eu un rôle structurant pour le développement d’écosystèmes régionaux, et selon quelles priorités.
Il s’agit enfin de la politique des centres-bourgs, un sujet majeur pour les territoires et pour le Sénat, et sur lequel un groupe de travail piloté par Rémy Pointereau et Martial Bourquin doit réfléchir au cours des prochains mois.
Mais, nous le savons tous, il ne peut y avoir de politique d’aménagement du territoire digne de ce nom si les deux priorités de nos concitoyens et des élus locaux sur les territoires ne sont pas mieux traitées : la couverture numérique et l’accès aux soins.
Sur l’accès au numérique par les réseaux fixes et mobiles, qu’il s’agisse du haut débit fixe, du très haut débit fixe ou de la téléphonie mobile, le Gouvernement a fixé des objectifs. Nous les partageons. Malheureusement, les moyens concrets de leur mise en œuvre nous paraissent pour le moins incertains.
Je redis ce que j’ai déjà dit en commission et dans cet hémicycle, je suis malheureusement convaincu, et cela sera gravé dans le marbre du Journal officiel, que l’objectif de couvrir 100 % de la population en téléphonie mobile en 2020 ne sera pas tenu. Cela créera, une fois de plus, la déception et la colère des territoires.
M. Jean-François Husson. Très bien !
M. Hervé Maurey. Sur l’accès aux soins, il devient lassant d’entendre sans arrêt les gouvernants successifs faire un constat et annoncer des plans qui se limitent à des mesurettes totalement inutiles. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
Malheureusement, ce gouvernement est dans la droite ligne de ses prédécesseurs. Le plan qui a été annoncé par Mme Buzyn voilà maintenant quelques semaines n’est absolument pas à la hauteur des enjeux. Là aussi, je fais le pari, inscrit au Journal officiel, que le plan de la ministre de la santé en matière de déserts médicaux ne réglera rien du tout.
M. Ladislas Poniatowski. Très bien !
M. Hervé Maurey. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, Louis-Jean de Nicolaÿ et moi-même l’avons clairement dit dans notre rapport intitulé Aménagement du territoire, plus que jamais une nécessité : nous attendons le retour d’un État stratège. Or nous n’avons pas le sentiment que ce budget s’inscrit dans cette perspective. C’est pourquoi nous ne pourrons pas voter ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Franck Montaugé. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, rétrospectivement et hors PNRU, la remarquable stabilité des crédits du programme 147 atteste que le Gouvernement inscrit son action dans le prolongement de la refondation opérée en 2014 par la loi Lamy et, en 2017, par la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté.
Pour l’ensemble des acteurs de la politique de la ville, l’efficience doit être le maître mot de l’action publique dans les quartiers, au service des habitants et avec eux, dans la conception de l’agenda qui les concerne directement et dans l’évaluation, avec eux toujours, de l’action menée. Les acteurs de la politique de la ville ont besoin de visibilité et de garanties. Le chef de l’État a pris des engagements à Tourcoing. Nous serons vigilants sur leur respect.
Dans le peu de temps qui m’est imparti, je voudrais aborder les conditions d’engagement du NPNRU dont les crédits d’engagement ont été portés à 10 milliards d’euros sur la durée du programme 2014-2024.
Au-delà de la participation de l’ANRU au financement de ces programmes, la capacité contributive des collectivités locales interroge, tant leur contribution forte au rétablissement des comptes publics réduit incontestablement leur niveau d’intervention. Le modèle national du logement social étant également mis à mal par les mesures de baisse des loyers et des APL, les organismes d’HLM s’interrogent aussi sur leur propre engagement dans la durée.
Dans ce contexte de difficulté et d’incertitude, les 200 millions d’euros de crédits de paiement prévus sur le quinquennat apparaissent comme insuffisants pour créer auprès des autres partenaires l’effet de levier nécessaire. C’est la raison pour laquelle nous proposons un amendement portant à 100 millions d’euros les crédits de paiement pour 2018 de l’action n° 04, Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie, du programme 147.
En conséquence, trois mesures apparaissent indispensables pour que le NPNRU s’engage dans un cadre partenarial efficace et durable : d’abord, la révision du calcul de la participation de l’ANRU, le fameux scoring, pour tenir compte objectivement de la situation des collectivités qui veulent s’engager ; ensuite, la redéfinition des règles de participation des bailleurs sociaux, notamment pour les démolitions ; enfin, dernier point lié aux deux autres, le relèvement de la participation financière de l’ANRU qui devrait se situer au même niveau que celle d’Action Logement.
L’efficience de la politique de la ville sera aussi fonction de la pertinence des stratégies territoriales développées en matière de logement et de peuplement. Dans un contexte sociologique et culturel aujourd’hui très différent, et souvent plus compliqué, ne répétons pas les erreurs d’hier que nous tentons aujourd’hui de corriger avec des moyens somme toute considérables.
Concrètement, les ménages les plus pauvres ne doivent pas être systématiquement orientés vers les quartiers engagés dans un programme de renouvellement urbain. La politique de peuplement doit être définie à l’échelle de territoires d’habitat dépassant largement le périmètre des quartiers et des villes abritant ces quartiers. C’est à ce prix que la mixité sociale pourra prendre une dimension spatiale et géographique adaptée aux enjeux de long terme.