M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Longeot, rapporteur. Le présent amendement vise à supprimer l’article 4 au nom d’une opposition générale à l’ouverture à la concurrence.
L’article 4 vise justement à éviter que l’ouverture à la concurrence des lignes à grande vitesse ne repose exclusivement sur le libre accès au réseau et n’entraîne la disparition des lignes considérées comme peu rentables ou déficitaires.
L’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Monsieur le sénateur Gontard, pour la clarté des débats, je pense qu’il serait préférable que vous me laissiez exprimer la position du Gouvernement… En l’occurrence, je n’ai pas « prôné » un libre accès sans aucune régulation. Telle n’est pas la position du Gouvernement.
Comme l’ont dit MM. Bizet et Jacquin, le sujet est complexe, parce qu’il faut que l’ouverture à la concurrence soit profitable aux voyageurs, en permettant l’apparition d’offres nouvelles, sans pour autant compromettre la péréquation aujourd’hui pratiquée via l’activité TGV ni empêcher la SNCF de poursuivre son activité, ce qui sera le cas si l’on recourt à des contrats de service public.
Les discussions sur ce sujet sont en cours ; à ce stade, je m’en remets à la sagesse de votre assemblée.
M. le président. L’amendement n° 62 rectifié, présenté par MM. Cornu, Vaspart, Pointereau, Mandelli, Chaize, Huré, de Nicolaÿ, Pellevat et Chevrollier, Mme Bories et MM. J.M. Boyer, Ginesta et Revet, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
territoire
insérer les mots :
et préserver des dessertes directes
La parole est à M. Gérard Cornu.
M. Gérard Cornu. Je me félicite de cet article, qui porte la marque de l’attachement du Sénat à l’aménagement du territoire, notion assez vaste que le présent amendement vise à préciser.
Nous souhaitons que, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, les opérateurs ne s’intéressent pas qu’aux seules lignes à grande vitesse, les plus rentables, au détriment de la desserte de certains territoires.
Nous proposons donc de préserver la desserte directe par TGV, sans rupture de charge pour les voyageurs, des villes moyennes. Actuellement, la force de l’offre de TGV tient à ce qu’elle irrigue l’ensemble du territoire. Ainsi, la liaison TGV Paris-Lyon-Marseille se prolonge jusqu’à Nice, même si la ligne n’est pas à grande vitesse entre Marseille et Nice. Pour prendre un autre exemple, cher au rapporteur, le TGV Paris-Dijon dessert aussi Besançon, bien que la section Dijon-Besançon soit moins rentable. Je crois que cet amendement pourrait faire l’objet d’un consensus, et que même M. Gontard pourrait le voter…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Longeot, rapporteur. Comme vient de le dire notre collègue, cet amendement a pour objet de préciser expressément pourquoi nous proposons la mise en place de contrats de service public pour les services TGV : il s’agit de préserver la desserte directe des villes moyennes par ces derniers. L’avis de la commission est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Pour les raisons exprimées précédemment, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je respecte le travail de fond accompli par la commission, mais ma position reste marquée par une grande prudence et une profonde inquiétude. Je voterai cet amendement, qui vise à maintenir la desserte directe par TGV des villes moyennes.
Dans nos départements respectifs, nous sommes tous concernés par l’aménagement du territoire. Des inquiétudes légitimes se sont exprimées à cet égard ces derniers temps. À côté des 2 000 kilomètres de lignes à grande vitesse, un certain nombre de lignes classiques sont empruntées par des TGV. Ainsi, le TGV Est dessert non seulement Reims, mais aussi Charleville-Mézières et Sedan, dans les Ardennes : deux ou trois TGV directs circulent chaque jour à 120 ou à 130 kilomètres par heure sur la ligne classique. Il serait tout à fait dommage que, demain, il y ait une rupture de charge. Cette observation vaut également pour des villes comme Bar-le-Duc, dans la Meuse, et Saint-Dié-des-Vosges, Épinal ou Remiremont, dans les Vosges, également desservies par le TGV Est. Des élus se sont battus pendant de nombreuses années pour la réalisation de ces liaisons TGV et les collectivités territoriales ont participé à leur financement.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour explication de vote.
M. Guillaume Chevrollier. Je voterai bien entendu cet amendement, dont je suis cosignataire.
Je tiens à insister sur la nécessité, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du système ferroviaire de notre pays, de maintenir la desserte directe des villes moyennes.
Depuis juillet dernier, grâce à la ligne à grande vitesse, Laval est à seulement soixante-dix minutes de Paris. Cette liaison directe est extrêmement importante pour l’attractivité du territoire mayennais et de l’agglomération de Laval. Il est impératif qu’elle puisse être maintenue à l’avenir, car s’il faut passer par Rennes puis, de là, rejoindre Laval en TER, le trajet depuis Paris dure près de deux heures et demie…
Le maintien de liaisons directes est vraiment capital pour l’aménagement du territoire.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Émorine, pour explication de vote.
M. Jean-Paul Émorine. Ayant représenté notre assemblée au sein du conseil d’administration de la SNCF pendant plusieurs années, je voudrais témoigner de mon expérience.
Il faut avoir conscience que 90 % des trains circulent sur 50 % du réseau. Que nos collègues se rassurent, eu égard à la place prépondérante qu’occupe la SNCF dans le paysage du transport ferroviaire, l’ouverture à la concurrence ne pourra intervenir que lentement. Par ailleurs, j’imagine que personne n’est opposé à ce que les 920 ou 930 filiales de la SNCF proposent leurs services dans d’autres pays européens. En tant qu’européen convaincu, je pense que l’ouverture à la concurrence est une très bonne chose.
Je salue le travail de la commission, de son président et de notre ancien collègue Louis Nègre. Il va tout à fait dans le bon sens. Quant à l’amendement n° 62 rectifié présenté par Gérard Cornu, son adoption permettra de préserver des interconnexions indispensables à nos territoires. Il est de nature à rassurer l’ensemble de nos concitoyens. Je le voterai donc.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Monsieur Cornu, rassurez-vous, nous voterons votre amendement ! Bien qu’il ne soit guère que déclaratoire, il a le mérite de mettre en exergue la problématique de l’aménagement du territoire.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 30 rectifié quater, présenté par MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Fouché et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
conclut
insérer les mots :
, après avis de la Conférence nationale des territoires et du Commissariat général à l’égalité des territoires et de ses services,
L’amendement n° 28 rectifié ter, présenté par MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Fouché et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
conclut
insérer les mots :
, après avis de la Conférence nationale des territoires,
L’amendement n° 29 rectifié ter, présenté par MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Lagourgue, Guerriau, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Fouché et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
conclut
insérer les mots :
, après consultation du Commissariat général à l’égalité des territoires et de ses services,
La parole est à M. Jérôme Bignon, pour présenter ces trois amendements.
M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, je retire les amendements nos 30 rectifié quater et 29 rectifié ter. En effet, à la réflexion, il n’est pas pertinent d’inscrire dans la loi que le Gouvernement sollicite l’avis du Commissariat général à l’égalité des territoires ou le consulte, cette instance relevant directement de son autorité et pouvant de ce fait être mise à contribution par d’autres voies dans le processus d’élaboration des décisions.
M. le président. Les amendements nos 30 rectifié quater et 29 rectifié ter sont retirés.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Jérôme Bignon. L’amendement n° 28 rectifié ter vise, quant à lui, à prévoir la saisine de la Conférence nationale des territoires. Notre brillant rapporteur lui a opposé l’argument selon lequel la Conférence nationale des territoires n’existant pas juridiquement, elle ne saurait être consultée. Il me semble pourtant difficile d’arguer que la Conférence nationale des territoires n’existe pas, puisqu’elle s’est réunie à maintes reprises ! Cette instance existe donc bien, de fait sinon en droit. Je maintiens qu’il serait intéressant que l’avis de la Conférence nationale des territoires soit recueilli.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 28 rectifié ter ?
M. Jean-François Longeot, rapporteur. La Conférence nationale des territoires joue un rôle important dans nos institutions et nous ne sommes pas opposés à sa saisine, mais cela ne relève pas du domaine de la loi. Le Gouvernement la consultera sans doute de sa propre initiative.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Bignon, l’amendement n° 28 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Jérôme Bignon. J’entends bien les explications de M. le rapporteur, mais je ne vois pas pourquoi une consultation non prévue institutionnellement ne pourrait pas être inscrite dans la loi. Cela n’aurait pas pour effet de conférer une existence législative à cette instance, qui existe de fait, puisqu’elle s’est déjà réunie, sous la présidence de personnalités éminentes, et a été consultée à maintes reprises. Pourquoi ne la consulterait-on pas sur une matière essentielle ?
Je maintiens l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 44 rectifié bis, présenté par MM. Bizet, Raison, Perrin et Reichardt, Mme Troendlé, MM. Bazin, Chaize, Dallier et Danesi, Mmes Deromedi, Di Folco, Eustache-Brinio et Garriaud-Maylam, M. Huré, Mmes Lassarade et Lavarde, MM. H. Leroy, Meurant et Milon, Mme Puissat, MM. Rapin, Savary et Sol, Mme Bories, MM. B. Fournier et Husson, Mmes Imbert, Lamure et Lanfranchi Dorgal, MM. Le Gleut et Lefèvre, Mme Morhet-Richaud, MM. Pointereau, Pierre, Panunzi, Savin, Gremillet, Laménie, Cuypers, Longuet, Kennel, Revet et Priou et Mme Chain-Larché, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Remplacer le mot :
incluant
par les mots :
pouvant inclure
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les services faisant l’objet du contrat peuvent inclure des services couvrant leurs coûts et des services ne couvrant pas leurs coûts.
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. J’ai déjà suffisamment explicité l’objet de cet amendement en intervenant sur l’article, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Longeot, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Je le redis, l’ambition du Gouvernement est que l’ouverture à la concurrence conforte le modèle d’un TGV qui dessert tous les territoires. Tel est le sens des discussions et réflexions en cours.
Il faudra aussi prendre en compte le cas des régions qui conventionnent un certain nombre de dessertes TGV ; je pense aux Hauts-de-France et à la Bretagne. Nous serons amenés à proposer que les régions puissent continuer de le faire.
En attendant que les réflexions en cours aboutissent, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. L’amendement n° 31 rectifié bis, présenté par MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Fouché et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans la perspective de la signature des contrats susmentionnés au premier alinéa du présent article, l’État présente à la Conférence nationale des territoires, à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, et à la commission à l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, la stratégie et le bilan de ces contrats de promotion de l’aménagement du territoire. »
La parole est à M. Jérôme Bignon.
M. Jérôme Bignon. Il nous paraît nécessaire que la concertation prévue par la nouvelle rédaction de l’article 4 implique la Conférence nationale des territoires, ainsi que les commissions de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale et du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Longeot, rapporteur. Les auteurs de l’amendement proposent que l’État présente à la Conférence nationale des territoires et aux commissions compétentes du Parlement sa stratégie pour la conclusion des contrats de service public.
Je rappelle que la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire a créé un schéma national des transports, censé fixer les orientations de l’État en ce qui concerne les services de transport ferroviaire de voyageurs d’intérêt national, en particulier ceux qu’il conventionne dans un objectif d’aménagement et d’égalité des territoires. Ce document est censé être actualisé et présenté au Parlement au moins une fois tous les cinq ans ; nous l’attendons avec impatience, madame la ministre : quand avez-vous l’intention de nous le présenter ?
Le dispositif proposé étant redondant avec ce schéma, je sollicite le retrait de l’amendement ; si celui-ci est maintenu, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Monsieur le rapporteur, ce schéma sera présenté au Parlement une fois que nous aurons stabilisé le futur cadre du ferroviaire. Sur l’amendement, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Monsieur Bignon, l’amendement n° 31 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jérôme Bignon. Compte tenu des explications de M. le rapporteur et de l’annonce de Mme la ministre, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 31 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. L’article 4 revêt une très grande importance, puisqu’il précise les conditions d’ouverture à la concurrence des lignes TGV.
Comme nous l’avons déjà indiqué à plusieurs reprises, notamment lors de la discussion générale, nous voulons éviter que cette ouverture à la concurrence ne se fasse au détriment des territoires ou du client-usager, via une baisse de la qualité de service. Sur quelque travée que nous siégions, je crois que nous partageons tous ce souhait. Nous différons en revanche sur la manière de prévenir la réalisation de ce risque.
Madame la ministre, j’ai cru comprendre que le Gouvernement souhaitait plutôt que les contrats de service public ne concernent que les seules lignes déficitaires. Cela nous inquiète, car, comme l’a souligné notamment Gérard Cornu, on risquerait alors des ruptures de charge, les voyageurs se trouvant par exemple dans l’obligation de changer de train à Marseille pour rejoindre Nice.
J’ai cru comprendre aussi que l’ARAFER prônait pour sa part la mise en place de péages très incitatifs, de sorte, par exemple, qu’il soit moins coûteux pour un opérateur d’assurer une liaison Paris-Chambéry qu’une liaison Paris-Lyon. Peut-être un tel dispositif peut-il fonctionner, mais nous ne disposons aujourd’hui d’aucune indication à cet égard ni d’aucune étude d’impact.
Le dispositif que nous préconisons ne s’oppose pas à celui que propose l’ARAFER : il s’agit plutôt d’une garantie supplémentaire, d’un « dispositif parachute » – pour dire les choses de façon triviale, c’est un peu « ceinture et bretelles »… Si, malgré les péages incitatifs, il apparaît qu’un certain nombre de bouts de ligne ou de lignes sont moins bien desservis, nous voulons être sûrs que des contrats de service public pourront être conclus pour l’ensemble d’une ligne, et pas seulement pour la partie déficitaire, d’autant que l’on ne sait jamais vraiment très bien, comme l’ARAFER l’a souligné, ce qu’il en est de la réalité du déficit.
Madame la ministre, je ne vois pas bien en quoi ce dispositif pénaliserait la SNCF, sauf à postuler qu’elle perdra tous les appels d’offres en matière de contrats de service public.
Mes chers collègues, je vous invite à adopter, si possible à l’unanimité, cet article très important, que l’adoption des amendements de MM. Bizet et Cornu a permis d’améliorer considérablement.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote sur l’article.
M. Marc Laménie. Si tous les articles de cette proposition de loi sont bien sûr importants, l’article 4 l’est particulièrement.
Qu’entend-on par « lignes excédentaires », par « lignes secondaires déficitaires » ? Malheureusement, on oppose en permanence le rail à la route ; pour ma part, cela m’a toujours choqué. Toujours est-il que, dès les années soixante et soixante-dix, on a commencé à remplacer des dessertes ferroviaires par des liaisons par cars, ce que l’on ne peut que déplorer. Parle-t-on de routes déficitaires ? On n’entend jamais cette expression, alors que les routes, qu’il s’agisse de voies communales, de routes départementales, de routes nationales ou d’autoroutes, ont aussi un coût pour les collectivités territoriales…
En matière d’aménagement du territoire, le rail a toute sa place. Le transport ferroviaire a de nombreux mérites : nous devons nous battre pour son maintien sur nos territoires !
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote sur l’article.
M. Frédéric Marchand. Avec cet article 4, nous sommes au cœur du réacteur ; prenons garde que celui-ci ne nous explose à la figure !
Arrêter aujourd’hui un modèle précis, avec une obligation de service public, me paraît être une fausse bonne idée. Comme je l’ai souligné dans la discussion générale, nous devons susciter l’offre pour que la demande suive.
Les préconisations de l’ARAFER en matière d’incitations tarifaires me semblent devoir être suivies. Une clause de revoyure est prévue. Dans l’immédiat, nous voterons contre l’article 4.
M. le président. Je mets aux voix l’article 4, modifié.
(L’article 4 est adopté.)
Article 5
I. – Le code des transports est ainsi modifié :
1° L’article L. 2121-12 est ainsi modifié :
a) Les deux premiers alinéas sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Toute entreprise ferroviaire autorisée à exploiter des services de transport de personnes peut assurer de tels services dans les conditions prévues au présent article.
« L’entreprise déclare son intention d’assurer le service auprès de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières au plus tard dix-huit mois avant l’entrée en vigueur de l’horaire de service auquel la demande de capacité formulée auprès du gestionnaire d’infrastructure pour ce service se rapporte. L’autorité publie sans délai cette déclaration et en informe concomitamment toute autorité organisatrice ayant conclu un contrat de service public pour assurer un ou plusieurs services ferroviaires ayant la même origine et la même destination et toute entreprise ferroviaire exécutant un tel contrat de service public.
« Toute autorité organisatrice de transport ferroviaire compétente peut limiter ou, le cas échéant, interdire un service annoncé en application du deuxième alinéa, sous réserve que l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières ait, par une décision prise en application de l’article L. 2133-1, estimé que ce service compromet l’équilibre économique d’un ou de plusieurs contrats de service public, en se conformant à cette décision. » ;
b) Le dernier alinéa est complété par les mots : « , pris après avis de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières » ;
1° bis (nouveau) L’article L. 2122-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« On entend par “horaire de service” les données définissant tous les mouvements programmés des trains et du matériel roulant, sur l’infrastructure concernée, pendant la période de validité de cet horaire. » ;
2° L’article L. 2133-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 2133-1. – Afin de permettre à l’autorité organisatrice compétente de limiter ou, le cas échéant, d’interdire un service en application du troisième alinéa de l’article L. 2121-12, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières se prononce, par une décision, sur l’existence éventuelle d’une atteinte à l’équilibre économique d’un ou de plusieurs contrats de service public par un service annoncé en application du deuxième alinéa du même article L. 2121-12, à la demande de l’autorité organisatrice qui a attribué le ou les contrats de service public, de l’entreprise ferroviaire qui exécute ce ou ces contrats de service public ou du gestionnaire d’infrastructure, formulée dans un délai d’un mois à compter de la publication, par l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, de la déclaration mentionnée au même deuxième alinéa.
« Lorsque l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières décide que le service annoncé en application dudit article L. 2121-12 compromettrait l’équilibre économique d’un contrat de service public, elle indique les changements qui pourraient être apportés à ce service pour que l’entreprise puisse assurer ce service sans compromettre l’équilibre économique dudit contrat.
« La décision de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières est prise dans un délai de six semaines à compter de la réception de toutes les informations utiles à l’instruction et notifiée au demandeur. Elle précise les conditions dans lesquelles l’autorité organisatrice qui a attribué le ou les contrats de service public, l’entreprise ferroviaire qui exécute ce ou ces contrats de service public, le gestionnaire d’infrastructure ou l’entreprise ferroviaire ayant déclaré son intention d’assurer le service faisant l’objet de la décision peuvent demander le réexamen de ladite décision dans un délai d’un mois après sa notification. La décision est susceptible de recours devant le Conseil d’État. » ;
3° Le 8° de l’article L. 1263-2 est ainsi rédigé :
« 8° À la création de services de transport de personnes librement organisés en application de l’article L. 2121-12. »
II. – (Supprimé)
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l’article.
M. Claude Bérit-Débat. Mon collègue Olivier Jacquin a déjà exposé de façon convaincante la position de notre groupe sur les articles 4 et 5.
M. le président de la commission a fait référence aux propositions de l’ARAFER en matière de péages pour l’utilisation des sillons. Il s’agit là, me semble-t-il, d’une piste particulièrement intéressante à explorer. J’espère que nous pourrons avoir sur ce sujet un débat serein et ouvert, qui permettra de répondre aux questions que nous nous posons. (M. Frédéric Marchand opine.)
M. le président. L’amendement n° 16, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. L’article 4 de la proposition de loi permet la conclusion de contrats de service public pour les services non conventionnés et organise l’attribution de droits exclusifs, en contrepartie de la réalisation d’obligations de service public. L’article 5, qui en est le corollaire, est destiné à garantir l’équilibre de ces contrats de service public en limitant l’accès aux services concernés pour les autres entreprises ferroviaires.
Ce dispositif vise à corriger la tendance naturelle du marché à l’écrémage : vous organisez une sorte de mix pour prendre en compte les exigences d’aménagement du territoire.
Pour notre part, nous pensons que cette tentative de trouver un équilibre entre marché libre et service public est vaine, dans la mesure où ces deux régimes sont incompatibles, tant leurs objectifs sont différents !
Seule une entreprise publique, chargée de missions de service public, peut satisfaire des exigences d’aménagement du territoire, en mettant en œuvre un principe de péréquation nationale pour garantir en tout point du territoire un service public assurant l’effectivité du droit à la mobilité pour tous. Sans une telle implantation nationale, les entreprises n’auront pas les reins assez solides pour assumer l’exploitation de lignes fortement déficitaires.
En outre, en l’absence d’étude d’impact, nous ne voyons pas très bien quels tronçons seront concernés, quel sera le volume des lots, etc. Il y a trop d’incertitudes pour que nous puissions ratifier le principe proposé.
S’agit-il au fond de revenir au conventionnement pour les TGV, ou ces dispositions et les limitations à la concurrence qu’elles induisent seront-elles utilisées avec parcimonie ?
M. le rapporteur nous a donné des éléments de réponse en commission, puisque l’article 4 a été récrit afin d’expliciter que l’objectif n’est pas de couvrir l’ensemble du réseau. Nos craintes s’en trouvent confirmées : si l’ensemble du réseau n’est pas couvert par les lots, nombre de dessertes qui seront jugées non rentables seront désertées. À l’inverse, sur les portions plus intéressantes d’un point de vue financier, le renforcement de l’offre rendra celle-ci incohérente et sera même source d’accidents.
Pour ces raisons, nous proposons la suppression de l’article 5.