Mme Éliane Assassi. Un peu de respect ! Vous êtes quoi ?
M. Claude Malhuret. Camarades… (Les protestations redoublent sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
Mme Éliane Assassi. Nous ne sommes pas vos camarades ! Pas ici !
M. le président. Mes chers collègues, un peu de calme !
Mme Éliane Assassi. Que notre collègue nous respecte, monsieur le président !
M. Claude Malhuret. Savez-vous ce que disait Lénine des siffleurs ? (Les protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste couvrent presque la voix de l’orateur.)
M. le président. Encore une fois, mes chers collègues, un peu de calme !
M. Claude Malhuret. Qu’ils ont une tête d’oiseau ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – Vives protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
Ce n’est pas, disais-je, en annonçant chaque semaine des chiffres toujours plus irréalistes concernant le nombre de manifestants que les jusqu’au-boutistes parviendront à masquer la dure réalité. Le PCF, la CGT, SUD, la FSU réunis, pour finir à 30 000 manifestants à Paris ! Encore moins que pour la fête à Macron !
Mme Éliane Assassi. Que pensez-vous du texte ?
M. Claude Malhuret. Ce n’est pas avec un référendum bidon, des urnes en carton trimbalées d’un dépôt à l’autre, des feuilles volantes en guise de listes d’émargement et, à la sortie, un score digne de l’élection de Brejnev au Politburo – comme disait Staline, ce qui compte ce n’est pas le vote, c’est la façon dont on compte les votes…(Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste) –, ce n’est pas avec cette ultime et dérisoire tentative qu’on fera oublier la réalité de sondages convergents : les deux tiers des Français sont pour la réforme et contre la grève.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Tous les syndicats étaient pour la grève !
M. Claude Malhuret. Pourquoi cela ? Parce qu’après des années d’enfumage sur le thème de la grève par procuration, les Français se posent les vraies questions : pourquoi est-ce dans le secteur public, dont l’une des justifications principales est la continuité, que les grèves, donc l’interruption du service pour les usagers, sont les plus fréquentes ? Pourquoi, pour s’opposer au Gouvernement, ses adversaires ne trouvent-ils pas d’autre solution que de s’en prendre aux usagers ?
Les jusqu’au-boutistes déguisés en défenseurs de la veuve et de l’orphelin n’étaient pas uniquement dans la rue. Ils étaient aussi ici. J’ai entendu, avec plus d’amusement que de colère, le discours de certains de ceux qui m’ont précédé à cette tribune. Ils continuent à se réclamer d’une idéologie archi-décédée (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.), comme ces personnages de bandes dessinées qui continuent de marcher sans s’apercevoir qu’ils sont déjà au-dessus du vide et qu’ils vont tomber dans le ravin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
Ils ont parfaitement le droit de s’exprimer. Mais il y a un règlement au Sénat, comme à l’Assemblée nationale, et ce n’est pas par hasard. Je le dis solennellement devant l’ensemble de nos collègues, monsieur le président : se présenter dans l’hémicycle déguisé avec des chasubles de cheminots revêtues par-dessus des costumes et des cravates, en brandissant des pancartes, de même que venir à l’Assemblée nationale avec le maillot de l’Olympique d’Haudricourt n’est pas compatible avec la dignité de nos assemblées. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
Si nous acceptons ce précédent sans réagir, il ne faudra pas s’étonner, dans la société du spectacle dans laquelle nous vivons, que, demain, d’autres viennent en maillot de bain ou avec leur caniche en laisse. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Martial Bourquin. Et le projet de loi ?
M. Claude Malhuret. Je voudrais en revanche féliciter ceux grâce auxquels notre assemblée est parvenue à produire un texte équilibré et enrichi.
Merci à Mme la ministre d’avoir été à l’écoute de nombreuses propositions du Sénat. Merci à M. le rapporteur, Gérard Cornu, qui a réussi un exercice difficile en permettant de rassembler des positions souvent diverses, afin d’aboutir au texte que nous allons voter aujourd’hui.
Permettez-moi de saluer également la détermination d’Alain Fouché, qui a défendu au nom de mon groupe de nombreux amendements, dont plusieurs ont été retenus. Enfin, merci à ceux de nos collègues qui ont bien voulu les cosigner et les voter.
Cette réforme aurait sans doute pu aller plus loin, et surtout plus vite. Car il faudra attendre encore plusieurs années pour que le nouveau système soit réellement installé, et l’on peut compter sur les embusqués pour mettre à chaque étape des bâtons dans les roues. Mais je me garderai bien de reprocher sa timidité au premier gouvernement qui aura eu le courage de s’attaquer à l’une des vaches sacrées de l’immobilisme français. Il savait qu’il prenait des risques majeurs. Et l’on peut lui pardonner d’avoir dû faire quelques génuflexions bien-pensantes devant des adversaires d’autant plus menaçants qu’ils sont faibles.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi crée enfin les conditions de la concurrence dans le transport ferroviaire. Il donne enfin la possibilité à la SNCF de se réformer pour aborder cette concurrence dans les meilleures conditions et protège les salariés en encadrant les conditions de leur transfert. Surtout, il permettra aux premiers concernés, à savoir les usagers, de retrouver l’espoir d’un service de transport ferroviaire digne de notre temps et digne de notre pays. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
Bien entendu, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Jean-Pierre Corbisez. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous arrivons aujourd’hui au terme d’une réforme qui s’inscrit au cœur du quotidien des Françaises et des Français et concerne un service public historique, partie intégrante de notre patrimoine.
Cette réforme est complexe et sensible. Elle souligne la difficulté de concilier des intérêts et des attentes sinon contradictoires, à tout le moins incompatibles parfois. Je veux parler de ceux des usagers, des cheminots, des territoires, ou encore du marché.
Ainsi en est-il de l’attachement légitime de la commission aux enjeux d’aménagement du territoire et du développement durable, réaffirmés comme étant au cœur des missions de la SNCF, ou de ma sensibilité, partagée d’ailleurs sur toutes les travées, à la protection de ses salariés.
Dans le même temps, le secteur ferroviaire ne peut faire abstraction des mouvements qui animent notre monde, qu’il s’agisse des changements sociétaux, de l’évolution de notre contexte politique – je pense bien évidemment à l’Europe –, ou des transformations de notre environnement qu’il est de notre responsabilité partagée de protéger. Sur ce point, je salue la pugnacité des membres du groupe du RDSE, qui auront su renforcer en séance le texte issu des travaux de la commission par l’adoption d’un amendement.
Permettez-moi d’illustrer mon propos en rappelant le discours prononcé par François Mitterrand en 1990 à Clermont-Ferrand, à l’occasion de l’inauguration d’une nouvelle ligne. Il disait ceci : « Je crois à l’essor du chemin de fer, dès lors qu’il sait s’adapter à l’évolution des besoins et de la concurrence […] ; je crois à la capacité du secteur public pour mener de telles missions en alliant efficacité économique et progrès social. […] Mais […] une grande entreprise publique est aussi celle qui sait associer son personnel à ses propres progrès. »
Je souhaite souligner le travail remarquable mené par la commission, présidée par Hervé Maurey, et par son rapporteur, Gérard Cornu. La commission a su améliorer le texte de nos collègues députés, preuve, s’il en est, dirai-je avec un peu de provocation, comme mon collègue Olivier Jacquin, de l’intérêt d’un bicamérisme équilibré, et signe d’un Sénat en pleine vitalité et jouant complètement son rôle de législateur.
Notre assemblée a ainsi su répondre à un certain nombre d’inquiétudes exprimées ces dernières semaines, notamment au travers du mouvement de grève que nous connaissons actuellement.
On peut ainsi se féliciter de l’inscription dans le projet de loi de l’incessibilité du capital de la SNCF et de garanties certaines apportées à la protection des cheminots. Je n’en citerai que quelques-unes : réaffirmation du statut particulier des personnels, maintien des conventions et accords collectifs, inscription de garanties en cas de transfert d’activité et encadrement des modalités de rupture du contrat de travail en cas de refus du salarié, notamment en matière de mobilité professionnelle.
Certains, dont je fais partie, auraient souhaité aller encore plus loin, en particulier s’agissant des limites régionales de la mobilité. Les débats ne l’ont pas permis, mais le texte n’en constitue pas moins une réelle avancée pour les agents concernés en comparaison de sa version initiale.
Fidèle à son ADN, la Haute Assemblée a également renforcé la place des collectivités, tout comme celle des usagers, dans un certain nombre d’instances, y compris au bénéfice des personnes en situation de handicap.
Attachés à l’équilibre des pouvoirs, nous avons collectivement entériné sur de nombreux points le rôle prépondérant de l’ARAFER, afin que celle-ci puisse jouer pleinement son rôle de garant et de suivi de la mise en œuvre comme de l’impact de cette réforme.
Est renforcé également le rôle du Haut Comité du système de transport ferroviaire. Nous espérons toutes et tous, madame la ministre, que celui-ci puisse enfin se réunir. La vigilance s’imposera aussi au Sénat, puisque nous avons souhaité que le Gouvernement nous rende compte régulièrement de la situation, même si le rapporteur a raison de dire que trop de rapports tuent le rapport. Il aurait été intéressant que l’ARAFER actualise, tous les deux ans, son estimation du coût du transport ferroviaire pour les collectivités territoriales.
Enfin, soucieux de ne pas hypothéquer l’avenir, nous avons établi quelques principes financiers pour sécuriser l’évolution de la dette et assurer la soutenabilité pour les opérateurs de l’évolution des redevances.
Soulignons encore l’encadrement des dérogations à la concurrence ou du transfert des matériels roulants, même si mon groupe aurait souhaité aller plus loin dans l’intérêt des régions et ancrer l’égalité territoriale au cœur du texte. Car, madame la ministre, où se placera le curseur de la solidarité nationale ?
Alors que le président de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand, propose de financer à hauteur de 50 % les coûts de rénovation de la ligne Abbeville-Le Tréport, l’État va-t-il se réfugier derrière la règle du retour sur investissement calculée par SNCF Réseau ou suivre la collectivité prête à s’engager ? Et je n’évoquerai pas la ligne Brive-Aurillac !
Que se passera-t-il pour les régions les plus pauvres sans péréquation favorable ? Nous devons, mes chers collègues, rester vigilants à ce qu’on ne crée pas des régions à deux vitesses.
Je terminerai par un élément qui me tient particulièrement à cœur en ma qualité d’élu local – j’espère que la commission mixte paritaire ne reviendra pas sur ce point –, à savoir la confirmation des contrats de service public de transport ferroviaire. Introduits en commission, ces contrats contribueront à préserver les dessertes TGV cruciales en matière d’aménagement et de dynamisme des territoires, pour des lignes moins rentables.
J’oserai une dernière citation, empruntée à Jules Renard, dont le père a travaillé à la construction de la ligne Laval-Caen : « Le train, l’automobile du pauvre. Il ne lui manque que de pouvoir aller partout. » N’abandonnons donc pas les lignes secondaires !
En conclusion, le groupe du RDSE votera à une large majorité en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour le groupe Les Républicains.
Notre collègue a été le rapporteur de ce texte, ce dont je tiens à le remercier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Gérard Cornu. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, vous le savez tous, le Sénat était très attendu sur cette réforme ferroviaire. Je crois pouvoir dire qu’il a été à la hauteur de l’enjeu, fidèle à son sens du dialogue et de la concertation.
Le débat a été de grande qualité, et chacun a pu défendre ses convictions dans le respect et l’écoute de l’autre.
La volonté du Gouvernement de présenter un projet de loi d’habilitation à légiférer par ordonnances, tout en promouvant le dialogue social pour introduire au fur et à mesure des dispositions concrètes devant le Parlement, a été mal comprise et a eu le don de mécontenter à la fois les parlementaires et les syndicats.
La majorité sénatoriale avait le choix entre deux attitudes : soit une opposition stérile au Gouvernement, laissant pourrir le conflit entre celui-ci et les grévistes ; soit une attitude plus responsable, pour sortir par le haut de cette épreuve, pour la France et les Français.
Le Gouvernement a adopté une attitude méprisante envers les sénateurs auteurs de propositions de loi de grande qualité, votées parfois à l’unanimité (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.), mais balayées d’un revers de main par le pouvoir exécutif.
M. Bruno Sido. C’est un scandale !
M. Gérard Cornu. Circulez, il n’y a rien à voir ! Vos propositions sont certes de grande qualité, mais tout doit se passer à l’Assemblée nationale. Un député du groupe La République En Marche reprendra vos textes. Je me tourne vers Mathieu Darnaud, pour ce qui concerne l’eau et l’assainissement, vers Françoise Cartron et Michel Vaspart s’agissant du trait de côte et de la loi Littoral, ou encore vers Patrick Chaize au sujet du numérique.
Malgré cette situation, nous avons choisi la seconde option parce que c’est l’ADN du Sénat d’agir avec responsabilité, en dépassant les clivages politiques.
Je voudrais à cet égard remercier personnellement notre président de groupe, Bruno Retailleau, de sa confiance et de son soutien total. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Un climat de confiance réciproque s’est également instauré entre la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable et la ministre des transports, Élisabeth Borne, qui a permis une véritable coconstruction de la loi. J’espère, madame la ministre, que votre attitude positive envers le Sénat servira d’exemple à certains de vos collègues du Gouvernement. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.) Le Premier ministre a été satisfait de l’attitude responsable du Sénat. Gageons qu’il s’en souviendra dans le cadre de la réforme constitutionnelle.
M. Philippe Dallier. Ça, c’est moins sûr !
M. Gérard Cornu. Nous avons plus que jamais besoin de la sagesse du Sénat, d’un bicamérisme moderne face aux humeurs et aux tensions.
L’examen du présent projet de loi a permis d’améliorer ce dernier, une attention toute particulière ayant été prêtée au volet social de cette réforme et à son impact sur la desserte des territoires.
Nous avons repris les dispositions qui figuraient dans la proposition de loi d’Hervé Maurey et de Louis Nègre, adoptée par le Sénat en mars dernier. Nous avons veillé à supprimer au maximum les ordonnances, en ne conservant que celles qui avaient un caractère purement technique. Nous sommes restés fermes sur le cap, à savoir l’ouverture à la concurrence, la fin du statut de cheminot et la transformation juridique de SNCF et de ses deux filiales. Toutes les avancées importantes figurent dans le projet de loi, et je ne doute pas que nous pourrons aboutir à une CMP conclusive sur la base du texte voté par le Sénat.
L’aménagement du territoire a été au cœur de nos préoccupations, notamment les petites lignes et les dessertes directes TGV sans correspondance pour des villes moyennes qui auraient pu être menacées dans le contexte d’ouverture à la concurrence.
Les avancées sociales sont importantes. À cet égard, je veux saluer le rôle déterminant, le soutien total et l’implication du président du Sénat, Gérard Larcher (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.), dans le maintien d’un dialogue constant et fructueux avec les syndicats réformistes.
Il fallait lever les inquiétudes légitimes des salariés du groupe public ferroviaire, dont je tiens à saluer l’engagement pour le développement du transport ferroviaire. Nous avons précisé le cadre du transfert de personnel et renforcé les droits garantis aux salariés transférés, notamment en favorisant le volontariat à l’échelle de la région et en permettant le droit au retour sur une période déterminée, dont la durée initiale était de trois ans à six ans et que nous avons portée à huit ans en séance, grâce à l’adoption d’un amendement du rapporteur voté à l’unanimité et approuvé par la ministre. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Nous avons voulu faire taire les rumeurs injustifiées de privatisation de la SNCF, en inscrivant dans la loi que le capital de la société SNCF et de ses deux filiales serait intégralement détenu par l’État et incessible.
Pour conclure, je veux m’adresser aux syndicats et aux grévistes. Le groupe Les Républicains votera ce texte issu des travaux du Sénat. Je ne doute pas qu’il sera approuvé à une large majorité par notre assemblée, qui a mis la réforme sur de bons rails.
M. David Assouline. Si c’est la droite qui le dit !
M. Gérard Cornu. En raison de toutes les avancées sociales validées par la ministre, j’ai la certitude que le texte ne sera pas dénaturé par la commission mixte paritaire. J’y veillerai personnellement.
Comme le disait Maurice Thorez (Sourires.), il faut savoir arrêter une grève ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe La République En Marche.) Le texte issu des travaux du Sénat vous en donne une véritable opportunité ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. Ce n’est pas l’auteur le plus cité dans cet hémicycle ! (Sourires.)
La parole est à M. Frédéric Marchand, pour le groupe La République En Marche.
M. Frédéric Marchand. En terminant mon intervention le 29 mai dernier, j’évoquais l’injonction lancée par Victor Hugo le 21 juin 1877 à notre assemblée : « Sénateurs, prouvez que vous êtes nécessaires. »
Mme Éliane Assassi. Il siégeait ici ! (Mme Éliane Assassi désigne l’une des travées du groupe républicain citoyen et écologiste.)
M. Frédéric Marchand. Après plusieurs jours de débats sur le projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, nous pouvons, sans forfanterie aucune, affirmer que nous le sommes.
Dire que le Sénat était attendu sur ce texte est un doux euphémisme. Nous n’avons pas failli. Le train est parti à l’heure indiquée et, après un parcours que certains pensaient parsemé d’embûches, il est arrivé en gare, sans retard, après un voyage sans doute harassant, mais ô combien passionnant !
La qualité de nos discussions fait honneur à la vie parlementaire. Oui, le débat a eu lieu. Les uns et les autres ont pu s’exprimer en fonction de leurs sensibilités. Voilà quelques semaines, certains nous avaient annoncé un débat confisqué par le Gouvernement, sous couvert d’ordonnances, et une réforme menée à la hussarde. Aujourd’hui, les mêmes tentent de nous expliquer que le débat n’a été rendu possible que par la pression exercée depuis le début du mouvement social.
Et si nous arrêtions, pour une fois, de raisonner de manière aussi manichéenne ? Pourquoi cette réforme n’aurait-elle pas été rendue possible par une seule et même volonté, à savoir l’attachement collectif au service public ferroviaire ?
Cette réforme ferroviaire n’est ni une victoire pour les uns ni une défaite pour les autres. C’est d’abord et avant tout la volonté, partagée sur l’ensemble de ces travées, de préserver notre service public ferroviaire à la française en l’armant de la meilleure façon qui soit face à l’ouverture à la concurrence.
Notre expression a été diverse et variée. C’est toute la force de la démocratie, empreinte parfois d’outrance et de mauvaise foi, qui a permis à toutes les sensibilités de s’exprimer en toute liberté de ton et de parole.
Je qualifiais le débat de passionnant, car tous les sujets de la réforme ont été abordés, grâce au formidable travail préalable effectué par le rapporteur, Gérard Cornu, et par le président de la commission, Hervé Maurey, qui ont mis leur énergie et leurs compétences au service de la réussite de cet exercice collectif.
Oui, l’exercice a bel et bien été collectif ! Sénat et Gouvernement ont travaillé en bonne intelligence, et nous avons particulièrement apprécié, madame la ministre, l’état d’esprit avec lequel vous avez souhaité, d’emblée, appréhender l’examen de ce texte. Nous nous félicitons également du travail de concertation effectué en amont avec celles et ceux qui ont souhaité discuter et échanger.
Vous avez, à de nombreuses reprises dans la discussion, évoqué la notion de coconstruction, et c’est bien cette démarche positive que nous retenons aujourd’hui.
Nous allons nous prononcer sur un texte équilibré, qui nous permettra de réinventer la réalité du fait ferroviaire dans notre pays. Nous partageons en effet le même constat : notre système ferroviaire est aujourd’hui en bout de course. Nous avons beau nous réfugier derrière tous les argumentaires possibles et imaginables, la vérité est bien celle-ci : l’ouverture à la concurrence qui se profile à l’horizon nous donne l’occasion unique de repenser complètement, de refonder notre logiciel ferroviaire, dans un souci d’efficacité, de modernité et de justice sociale.
L’efficacité, c’est d’abord et avant tout la qualité du service proposé aux usagers, en remettant les collectivités territoriales au cœur de la mêlée s’agissant des trains conventionnés.
Notre discussion et les amendements adoptés font des régions des acteurs incontournables de l’aménagement territorial du ferroviaire, dans le cadre d’un « pacte de confiance passé avec l’État », pour reprendre vos propres termes, madame la ministre.
La modernité, c’est celle de cette grande octogénaire qu’est la SNCF et sa transformation en société anonyme à capitaux intégralement publics. Certes, on peut jouer sur les peurs, mais on ne saurait jouer impunément avec les mots et la réalité.
La vérité est pourtant simple ; l’incessibilité et l’inaliénabilité sont bien les deux mamelles de notre service public ferroviaire et le resteront. Dire le contraire, c’est mentir à nos concitoyens ; c’est mentir aux cheminots ! Le texte est suffisamment clair. Le moment est donc venu d’en finir avec ces petites polémiques.
Forte de cette garantie, notre société nationale a tous les atouts pour se réinventer et se projeter vers l’avenir dans le cadre d’un projet d’entreprise partagé.
C’est la justice sociale, enfin, qui est le cœur de tout le dispositif. Nous avons vu à quel point, sur l’ensemble des travées de cet hémicycle, nous partagions la volonté d’offrir au monde cheminot des perspectives d’avenir.
Agiter là aussi le spectre du statut en tentant d’opposer les uns aux autres ne me paraît pas digne des enjeux du monde ferroviaire. Vous avez en effet réaffirmé tout au long de la discussion, madame la ministre, la ferme volonté du Gouvernement d’accompagner les négociations entre l’UTP, l’Union des transports publics et ferroviaires, et les organisations syndicales pour l’élaboration de la convention collective de la branche ferroviaire. C’est un engagement fort, que vous tiendrez, nous le savons.
Des avancées significatives figurent désormais le texte. Elles ont été élaborées en lien étroit avec les organisations syndicales qui ont souhaité s’inscrire dans le travail de coconstruction que j’évoquais tout à l’heure : le recours au volontariat à l’échelle régionale en cas de transfert, la portabilité des droits, le maintien intégral de la rémunération en cas de transfert, l’unité sociale au sein du groupe, le retour au statut entre la troisième et la huitième année pour un cheminot qui retourne à la SNCF sont autant de mesures significatives qui donnent sens à la réforme.
Il est faux de dire que cette réforme se fait au détriment du monde des cheminots. Ce sont eux les acteurs essentiels de notre grand service public ferroviaire, et des engagements forts ont été pris par le Gouvernement et la représentation nationale.
Il n’appartient bien sûr à personne de dicter leur conduite aux organisations syndicales, mais il semble que le moment soit désormais venu d’ouvrir une nouvelle page de notre grande histoire ferroviaire et de réconcilier les Français de tous bords et de tous horizons avec le chemin de fer.
Vous le savez, nous le savons tous, l’ouverture à la concurrence est une chance dont nous devons nous saisir collectivement. Il convient là aussi de dire les choses sans agiter de chiffons rouges. Je m’en remets sur ce point à notre régulateur, l’ARAFER, et à son excellent rapport sur le sujet : « Lorsque les pays européens ont utilisé l’ouverture à la concurrence comme un instrument visant à relancer le transport ferroviaire de voyageurs, cet instrument a, de manière générale, porté ses fruits et contribué à une amélioration parfois spectaculaire de l’offre, des performances, de la qualité de service et du prix payé par l’usager. » Parce que « là où il y a une volonté il y a un chemin », le groupe La République en marche votera sans hésiter ce texte pour un nouveau pacte ferroviaire. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
Ouverture du scrutin public solennel
M. le président. Mes chers collègues, il va être procédé, dans les conditions prévues par l’article 56 du règlement, au scrutin public solennel sur l’ensemble du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, dans le texte de la commission, modifié.
Ce scrutin, qui sera ouvert dans quelques instants, aura lieu en salle des conférences.
Je remercie nos collègues Éric Bocquet, Agnès Canayer et Yves Daudigny, secrétaires du Sénat, qui vont superviser ce scrutin.
Une seule délégation de vote est admise par sénateur.
Je déclare le scrutin ouvert pour une demi-heure et je suspends la séance jusqu’à quinze heures cinquante-cinq, heure à laquelle je proclamerai le résultat.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures cinquante-cinq.)