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Équilibre territorial et vitalité de la démocratie locale
Suite de la discussion et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, à la demande du groupe Les Républicains, de la proposition de loi relative à l’équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale, présentée par MM. Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud (proposition n° 466, texte de la commission n° 547, rapport n° 546, avis n° 539).
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.
TITRE II (SUITE)
DÉMOCRATISER L’ACTION PUBLIQUE LOCALE ET EN RENFORCER L’EFFICACITÉ (SUITE)
Chapitre IV (SUITE)
Améliorer les conditions d’exercice des mandats locaux (suite)
M. le président. Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein du chapitre IV du titre II, l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 20 sexies.
Articles additionnels après l’article 20 sexies (suite)
M. le président. L’amendement n° 9, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :
Après l’article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au II de l’article L. 237-1 du code électoral, les mots : « ou de ses communes membres » sont supprimés.
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai également l’amendement n° 10.
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 10, présenté par M. Grand et ainsi libellé :
Après l’article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 239 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, tout élu ayant été amené à démissionner de son mandat de conseiller communautaire à la suite de l’un des cas d’incompatibilité prévus au II de l’article L. 237-1 qui ne se trouve plus dans la situation d’incompatibilité ayant conduit à cette démission, durant le temps d’exercice du mandat pour lequel il a démissionné, retrouve automatiquement son mandat de conseiller communautaire. L’élu concerné doit manifester son souhait de retrouver son mandat par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au président de l’établissement public de coopération intercommunale. La personne l’ayant remplacé dans ses fonctions de conseiller communautaire est considérée démissionnaire d’office. »
Veuillez poursuivre, monsieur Grand.
M. Jean-Pierre Grand. La loi de 2013 a rendu incompatible le mandat de conseiller communautaire avec un emploi salarié au sein de l’une des communes membres. Or le mandat de conseiller municipal au sein de l’une des communes membres n’est pas, lui, incompatible avec un emploi salarié au sein de l’intercommunalité. Il s’agit là d’une inégalité flagrante, qui ne repose sur aucune considération d’intérêt général. L’amendement n° 9, qui avait été adopté par le Sénat lors d’une précédente initiative parlementaire en mars 2016, vise à y mettre fin.
L’amendement n° 10 est un amendement de repli. Il tend à prévoir un mécanisme permettant à l’élu de retrouver son mandat de conseiller communautaire dès que cesse l’incompatibilité.
Je suis déjà intervenu sur ce sujet, qui concerne des élus peu nombreux, mais riches d’une réelle expérience, car ayant exercé des fonctions administratives et électives. Apporter une solution constituerait une reconnaissance pour ces élus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Comme vient de l’indiquer notre collègue Jean-Pierre Grand, ces deux amendements ont déjà été discutés récemment, lors de l’examen de la proposition de loi de notre collègue Mireille Jouve. Ils avaient alors reçu un avis défavorable. Le même sort leur a été réservé lors de l’examen du présent texte en commission.
Je ne suis pas favorable à l’amendement n° 9, car l’incompatibilité qu’il tend à supprimer est un gage d’impartialité dans la gestion de l’EPCI.
De même, la disposition que tend à introduire l’amendement n° 10 est difficile à mettre en œuvre. Si elle était adoptée, elle forcerait le remplaçant du conseiller communautaire à démissionner d’office, ce qui ne semble pas opportun. En outre, elle pourrait menacer la stabilité des assemblées délibérantes des EPCI.
Même si je reconnais la pertinence de cet amendement – et l’astuce de son auteur ! – et si j’en comprends le sens, j’en demande le retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Comme vient de le dire à l’instant le rapporteur, ces amendements, je m’en souviens, ont déjà été déposés sur un précédent texte. Je réitère notre avis défavorable.
C’est par parallélisme que le législateur a introduit une règle d’incompatibilité selon laquelle l’élu communautaire, étant en même temps élu municipal, ne peut être salarié de l’une des communes membres.
Comme cela a été rappelé hier, un groupe de travail sur le statut des élus locaux a été constitué au Sénat. Je vous propose donc, monsieur le sénateur, si vous en acceptez le principe, de travailler à l’uniformisation des règles d’incompatibilité en les appréhendant de manière globale dans le cadre du chantier sur le statut de l’élu local que le Président de la République a indiqué vouloir ouvrir lors du Congrès des maires de France. Votre réflexion pourra ainsi utilement s’inscrire dans le cadre des travaux conduits actuellement par le Sénat en ce domaine et sur lesquels le Gouvernement souhaitera s’appuyer.
M. le président. Monsieur Grand, les amendements nos 9 et 10 sont-ils maintenus ?
M. Jean-Pierre Grand. Non, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 9 et 10 sont retirés.
L’amendement n° 54, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :
Après l’article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 7° de l’article 222-13 du code pénal est abrogé.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement porte sur le statut de l’élu. Il faut essayer d’accorder aux élus un minimum de sécurité juridique.
Actuellement, le fait d’être dépositaire d’une autorité est systématiquement une circonstance aggravante, jamais atténuante, en cas de violences.
Cet amendement a pour origine la jurisprudence de la cour d’appel de Douai qui, pour une fois, a fait exception concernant le maire de Cousolre, dans le Nord. Cet élu avait été condamné, certes de façon symbolique, pour s’en être pris à un gamin qui embêtait le voisinage et semait la panique un peu partout. Pensant qu’un maire a aussi la responsabilité de faire respecter sa fonction, il avait agrippé ce jeune et lui avait donné une gifle, qui n’avait occasionné aucune séquelle.
À la surprise générale, et à la mienne en particulier, la cour d’appel de Douai a purement et simplement relaxé le maire, arguant que la réponse qu’il avait donnée était modérée et adaptée à la provocation qu’il avait subie dans l’exercice de ses fonctions. Cette jurisprudence est nouvelle.
Pour autant, le code pénal n’a pas été modifié. Cet amendement vise donc à supprimer le 7° de l’article 222-13 du code pénal, qui prévoit des circonstances aggravantes pour les personnes dépositaires de l’autorité publique en cas de violences.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je ne reviendrai pas en détail sur cet amendement, Pierre-Yves Collombat ayant exposé de façon exhaustive les faits qui l’ont amené à le déposer.
Nous avons longuement débattu de ce sujet en commission des lois. Ayant trouvé que cet amendement était pertinent, la commission a émis un avis favorable, considérant que l’arrêt de la cour d’appel de Douai était éclairant.
Les élus doivent sans doute être exemplaires, mais dans la mesure où ils sont plus exposés que d’autres citoyens dans certains cas, comme dans l’exemple qui vient d’être évoqué, ils n’ont pas, selon nous, à être traités plus sévèrement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’avis du Gouvernement diverge cette fois de celui du rapporteur.
Une personne dépositaire de l’autorité ou de la force publique doit naturellement être exemplaire, comme tout citoyen. Elle n’a pas à être préservée particulièrement. De façon symétrique, lorsqu’un citoyen attaque un gendarme, un policier ou un maire, le code pénal prévoit une sanction plus lourde. La loi repose donc actuellement sur un équilibre.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je ne feindrai pas de m’étonner de l’attention que porte le Gouvernement à l’exercice réel des fonctions d’élu local. Je n’aurai pas cette hypocrisie-là !
Je suis tout de même étonné : l’adoption de cet amendement ne coûterait pas de « pognon » ! (Sourires.)
M. le président. Merci, cher collègue, pour cette explication de vote très courte, mais percutante !
Je mets aux voix l’amendement n° 54.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 20 sexies.
L’amendement n° 50, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :
Après l’article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 432-14 du code pénal est ainsi modifié :
1° Après le mot : « susmentionnées », sont insérés les mots : « d’avoir en connaissance de cause et en vue » ;
2° Après le mot : « injustifié », sont insérés les mots : « , octroyé cet avantage injustifié » ;
3° Les mots : « publics et » sont remplacés par les mots : « publics ou ».
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement vise lui aussi à sécuriser l’exercice de la fonction d’élu. Un élu est amené à attribuer des marchés. Actuellement, systématiquement, toute erreur de procédure dans l’attribution d’un marché est considérée comme un délit, le délit de favoritisme.
L’objet de cet amendement est d’introduire la notion d’intentionnalité – il me semble avoir lu dans le code qu’il n’y a pas de délit s’il n’y a pas d’intention de le commettre. Il s’agit d’enlever cette épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête des élus, lesquels, compte tenu de la complexité du code des marchés publics, peuvent commettre des erreurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement a lui aussi été examiné à plusieurs reprises par le Sénat. Il est conforme à la définition adoptée par le Sénat lors de l’examen de la loi Sapin II. De façon cohérente, la commission y est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet amendement, tel qu’il est rédigé, vise à atténuer, pour l’ensemble de ceux qui exercent une responsabilité publique, la portée de l’article 432-14 du code pénal relatif au délit de favoritisme.
Le Gouvernement n’est pas favorable à la modification isolée de cette incrimination, qui ne saurait être analysée, le cas échéant, que dans le cadre d’une réflexion plus générale sur le régime de responsabilité des élus.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. On pourra toujours conduire une réflexion générale sur ce sujet, mais je constate que vous ne faites pas preuve d’un grand empressement pour conduire une telle réflexion sur le statut de l’élu, madame la ministre !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 20 sexies.
Chapitre V
Procéder aux ajustements nécessaires au bon fonctionnement des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale
Article 21
Au premier alinéa de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales, après la première occurrence des mots : « collectivité territoriale », sont insérés les mots : « ou un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre lorsqu’il y est expressément autorisé par ses statuts » et, après les mots : « à fiscalité propre », sont insérés les mots : « tout ou partie d’ ».
M. le président. L’amendement n° 72, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « propre », sont insérés les mots : « tout ou partie d’ » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, lorsqu’il y est expressément autorisé par ses statuts, peut également déléguer à une collectivité territoriale tout ou partie d’une compétence qui lui a été transférée. » ;
2° Au deuxième alinéa, le mot : « délégante » est remplacé par les mots : « ou de l’établissement public délégant ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l’article 21 est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l’article 21
M. le président. L’amendement n° 20 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Grosdidier et Meurant, Mme Eustache-Brinio, MM. Paccaud, Bascher, Panunzi et Joyandet, Mme Lamure, MM. Courtial, Bonhomme, Chatillon, Vaspart et de Nicolaÿ, Mme Thomas, M. Cardoux, Mme Deseyne, M. Pierre, Mme Deromedi, MM. Longuet et Savary, Mme Garriaud-Maylam et MM. Revet, D. Laurent, Lefèvre, Bonne, Sido, Hugonet et Laménie, est ainsi libellé :
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le sixième alinéa du I de l’article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au 1° du présent I, une commune nouvelle constituée sur le périmètre d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut s’opposer au transfert de la compétence en matière de plan local d’urbanisme, de documents d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, au nouvel établissement public de coopération intercommunale qu’elle a intégré. »
La parole est à M. Stéphane Piednoir.
M. Stéphane Piednoir. Comme vous le savez, certaines communes nouvelles se sont constituées sur le périmètre intégral d’un ancien EPCI à fiscalité propre. Dans les cas où cet EPCI avait élaboré un plan local d’urbanisme intercommunal, ou PLUI, ce dernier devient alors très souvent le plan local d’urbanisme, ou PLU, de la commune nouvelle.
Dans l’hypothèse où cette commune nouvelle intègre un nouvel EPCI, il conviendrait qu’elle n’ait pas à transférer sa compétence PLU à l’échelon intercommunal et qu’elle puisse la conserver.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. En cohérence avec les positions que nous avons adoptées hier lors de l’examen d’une première série d’amendements, et à la suite de la suppression de l’article 8, nous considérons que cet amendement, qui a trait à la question des communes nouvelles, doit être renvoyé, comme l’ensemble des sujets s’y rapportant, à l’examen prochain de la proposition de loi de notre collègue Françoise Gatel. En conséquence, je demande le retrait de cet amendement.
Je précise néanmoins que la commission a trouvé particulièrement intéressant et pertinent l’amendement de notre collègue Stéphane Piednoir. Nous espérons qu’il pourra prospérer lors de la discussion de la proposition de loi de Françoise Gatel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Piednoir, l’amendement n° 20 rectifié est-il maintenu ?
M. Stéphane Piednoir. Non, je le retire, monsieur le président. Nous le redéposerons lors de l’examen de la proposition de loi de Françoise Gatel, comme nous y invite le rapporteur.
M. le président. L’amendement n° 20 rectifié est retiré.
L’amendement n° 19 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Grosdidier et Meurant, Mme Eustache-Brinio, MM. Danesi, Paccaud, Bascher, Panunzi et Joyandet, Mme Lamure, MM. Courtial, Bonhomme, Chatillon, Vaspart et de Nicolaÿ, Mme Thomas, M. Cardoux, Mme Deseyne, M. Pierre, Mme Deromedi, MM. Longuet et Savary, Mme Garriaud-Maylam, M. Revet, Mme A.M. Bertrand et MM. Lefèvre, Bonne, Sido, Hugonet, Laménie et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du II de l’article L.5214-16 du code général des collectivités territoriales :
1° Le mot : « doit » est remplacé par le mot : « peut » ;
2° Les mots : « d’au moins trois des neuf » sont remplacés par le mot : « des ».
La parole est à M. Stéphane Piednoir.
M. Stéphane Piednoir. Le présent amendement a pour objet de rendre plus souple la répartition des compétences entre les communes et les intercommunalités.
L’article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales prévoit ainsi que les communes membres d’un EPCI doivent transférer à cet EPCI au moins trois compétences sur les neuf qui sont énumérées dans l’article.
L’objet de cet amendement est de transformer l’obligation de transfert de ces compétences optionnelles en une simple faculté offerte aux communes. Une telle souplesse est souvent demandée dans nos territoires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je comprends parfaitement les motivations de notre collègue. Nous avons également déjà eu un long débat sur cette question. L’avis de la commission était plutôt favorable.
Cela étant dit, je réaffirme que nous n’avons pas l’intention de court-circuiter les travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation ni ceux de la mission de contrôle et de suivi de la mise en œuvre des dernières lois de réforme territoriale. Or, inévitablement, s’il était adopté, cet amendement, aussi pertinent soit-il, modifierait considérablement les règles du jeu et la répartition des compétences au sein des intercommunalités.
Nous ne doutons pas que la mission de contrôle et de suivi, qui étudie précisément la revitalisation des communes et le lien entre communes et intercommunalités, abordera la question de la répartition des compétences, qu’elle fera des préconisations, comme elle l’a fait dans ses précédents rapports, lesquelles viendront éclairer nos débats lors de l’examen d’un prochain texte.
Il est vrai qu’une véritable problématique se pose. Ce texte a fait l’objet de nombreuses discussions, lors des auditions et des débats en commission. Aujourd’hui, et Mme la ministre le sait, car la question a été abordée lors de l’examen de la proposition de loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération, les intercommunalités épousent des types de territoires très différents. Certains sont très ruraux, avec une faible centralité, d’autres sont plus urbains – c’est à mon sens ce qui justifie l’existence d’une communauté d’agglomération. Et je ne parle pas des communautés d’agglomération de taille XXL, qui sont au cœur du sujet que vient d’évoquer notre collègue Stéphane Piednoir.
On voit bien, s’agissant du transfert des compétences optionnelles, que, dans certains grands territoires, il faudrait différencier les compétences ayant une vocation supra-communale, voire relevant d’un niveau plus élevé, et les autres, ayant plutôt vocation à être exercées à un échelon de proximité. Il y a lieu, à mon sens, de réfléchir à ces sujets.
Dans les intercommunalités très disparates, l’exercice des compétences, en particulier des compétences optionnelles, pose problème. La commission demande donc le retrait de cet amendement, même si elle comprend pleinement les motivations de leurs auteurs.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. La position du Gouvernement est la même que celle du rapporteur.
Il est compliqué de modifier un système qui forme un ensemble. Toucher aux compétences optionnelles aurait ainsi un impact sur les questions de fiscalité. Je rappelle que nous avons récemment réduit, dans la loi de finances, le nombre de compétences optionnelles requises pour bénéficier d’une DGF bonifiée de neuf à huit.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Piednoir, l’amendement n° 19 rectifié est-il maintenu ?
M. Stéphane Piednoir. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 19 rectifié est retiré.
Article 21 bis (nouveau)
Après l’article L. 5211-4-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 5211-4-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 5211-4-4. – Tout établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut, si ses statuts le prévoient expressément, participer à un groupement de commandes mentionné à l’article 28 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics quelles que soient les compétences qui lui ont été transférées. »
M. le président. L’amendement n° 60 rectifié, présenté par MM. de Belenet, Patriat, Yung, Dennemont et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Arnaud de Belenet.
M. Arnaud de Belenet. Cet amendement vise à supprimer l’article 21 bis, qui a été introduit en commission.
Cet article permet à un EPCI de participer à un groupement de commandes – cela ne pose pas de problème – si ses statuts le prévoient, quelle que soit par ailleurs la compétence de l’EPCI.
Cette formulation nous semble poser quelques difficultés, d’autant plus si l’on veut défendre les communes. Les statuts de l’EPCI, dans lesquels figure la liste des compétences, sont soumis aux conseils municipaux, dans des conditions de majorité qualifiée qui ne permettent pas de déroger à l’attribution des compétences. Contrairement aux compétences dont la liste doit figurer dans les statuts, la précision consistant à indiquer que l’EPCI pourra participer à un groupement de commandes ne mentionnerait pas forcément les champs sur lesquels porteront les groupements de commandes.
Il s’agit de préserver la lisibilité de l’action publique locale et des compétences relevant exclusivement des communes. Il ne faut pas créer de risque juridique dans nos territoires du fait d’une imprécision.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je ne partage pas l’avis de notre collègue s’agissant de la fragilité juridique. En revanche, je réaffirme la pertinence de cet article, notamment pour les territoires comptant des intercommunalités de faible densité démographique et regroupant des communes peu densément peuplées. Dans ce cas précis, cet article prend tout son sens.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’émets un avis favorable sur cet amendement de suppression de l’article 21 bis. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Cécile Cukierman. Quelle surprise !...
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Vous connaissez tous le principe de spécialité, qui s’oppose à ce qu’un EPCI agisse hors des compétences qui lui sont attribuées et qu’il passe des marchés pour l’exercice des compétences qui relèveraient des communes membres.
Les statuts de l’EPCI qui sont soumis aux conseils municipaux dans des conditions de majorité qualifiée ne permettent pas davantage de déroger à l’attribution des compétences. Contrairement aux compétences dont la liste doit figurer dans les statuts, la précision consistant à indiquer que l’EPCI pourra participer à un groupement de commandes ne mentionnerait pas forcément les champs sur lesquels porteront les groupements de commandes.
Afin de préserver la lisibilité de l’action publique locale, il est donc nécessaire que les EPCI ne jouent pas le rôle d’acheteur au titre de compétences relevant seulement des communes.
Pour cette raison, le Gouvernement est favorable à cet amendement de suppression, qui, au fond, protège les communes.
M. le président. La parole est à M. Pierre Louault, pour explication de vote.
M. Pierre Louault. Je pense, madame la ministre, que vous faites erreur.
M. Pierre Louault. Les communautés de communes doivent de plus en plus être aussi des communautés de service pour les communes. La possibilité pour les communes de constituer un groupement de commandes pour les contrôles électriques et un certain nombre des obligations leur incombant leur permettra d’obtenir un marché groupé et donc des prix.
C’est une erreur de vouloir à tout prix séparer les communes de la communauté de communes. Cet amendement n’est pas bon. Les communautés de communes doivent pouvoir créer un lien entre les communes et doivent leur permettre de faire ce qu’elles ne peuvent pas faire seules.
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Nous voterons contre cet amendement et pour l’article, et ce pour une raison très simple. Je dois dire d’ailleurs que je m’étonne beaucoup de la réponse de Mme la ministre.
Je rappelle que la loi précise déjà qu’il est possible de mettre en place des services communs entre communes et communautés de communes hors de tout transfert de compétences. Je ne vois donc pas pourquoi il ne serait pas possible, par analogie, d’ouvrir cette possibilité dans le cadre des groupements de commandes, qui sont une très bonne chose. Ces groupements aident en effet nos communes et rendent l’action publique plus efficace et parfois moins coûteuse.