M. le président. La parole est à M. Arnaud de Belenet.
M. Arnaud de Belenet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues – cher Loïc Hervé –, une proposition de loi du Sénat nous revient en deuxième lecture. Je n’ai pas une grande expérience de cet hémicycle, mais je crois que c’est suffisamment rare pour le souligner. Il faut aussi souligner la sagesse de Mme la rapporteur, qui nous propose – chose également rare – de voter ce texte conforme afin qu’il entre en vigueur sans délai.
En constatant la grande convergence qui existe entre le Gouvernement, l’Assemblée nationale et les différentes travées de la Haute Assemblée, le groupe La République En Marche adhère pleinement à cette démarche. Les collectivités ont besoin que nous adoptions un texte qui soit opérationnel, même si nous savons qu’il faudra le compléter.
Comme cela a été indiqué, un certain nombre de dispositions adoptées par le Sénat ont été supprimées par l’Assemblée nationale. J’avais émis, pour plusieurs d’entre elles, des réserves, tout en partageant les objectifs du texte initial. Je regrette évidemment certaines de ces suppressions, mais je suis d’accord avec d’autres.
S’agissant de l’article 1er, j’avais exprimé ma circonspection quant à exclure du schéma départemental près de la moitié des intercommunalités, celles qui ne comptent aucune commune de plus de 5 000 habitants.
En revanche, je regrette qu’ait été supprimée la disposition introduite au Sénat sur l’initiative de notre collègue Dominique Estrosi Sassone, permettant de comptabiliser les emplacements d’une aire permanente en logements sociaux. Toutefois, nous pouvons nous réjouir de la clarification, nécessaire, de la répartition des compétences entre communes et EPCI, qui inclut la création des aires et terrains d’accueil dans les obligations des EPCI.
Je partage le regret de ne pas avoir pu maintenir la suppression de la procédure de consignation de fonds à l’encontre des EPCI défaillants, procédure qui, en effet, pose la question de l’application du principe de libre administration des collectivités territoriales.
L’article 3 est une avancée pour les élus locaux, qui pourront, grâce à ce mécanisme d’information préalable, s’organiser pour accueillir les gens du voyage lors des grands passages et des grands rassemblements.
De même, l’article 4 satisfait aux préoccupations des élus, que le Gouvernement a entendues. Désormais, les maires d’une commune dotée d’une aire d’accueil pourront interdire le stationnement des résidences mobiles sur le reste du territoire communal, même si l’intercommunalité n’a pas satisfait à ses obligations.
Je suis également satisfait du positionnement de l’Assemblée nationale, qui me semble assez équilibré, en ce qui concerne, d’une part, le doublement des peines encourues en cas d’occupation illicite d’un terrain et, d’autre part, la création d’une amende forfaitaire délictuelle – cette mesure proposée par Loïc Hervé constitue une innovation importante.
La suppression par nos collègues députés de la confiscation des véhicules d’habitation me paraît conforme au principe d’inviolabilité du domicile. J’avais exprimé mes réserves sur cette disposition en première lecture.
L’arsenal pénal existant pour réprimer les destructions, dégradations ou détériorations d’un bien d’autrui étant suffisant selon plusieurs avis recueillis, il ne nous paraissait pas indispensable de le renforcer. La suppression de l’article 7 par l’Assemblée nationale peut donc nous convenir.
L’article 8, qui prévoit la création d’un délit de fraude d’habitude d’installation, s’il n’est pas dépourvu de fondement, soulève des difficultés d’application, qui ont déjà été évoquées. Nous aurons certainement l’occasion de revenir sur ce sujet à l’occasion d’un nouveau texte – Loïc Hervé nous a dit qu’il avait l’intention de prendre une initiative allant dans ce sens.
Je vous disais, au début de mon propos, que le groupe La République En Marche approuvait la position de la commission des lois, qui a été adoptée à l’unanimité. Comme plusieurs collègues qui se sont exprimés, j’espère que le Sénat votera ce texte de manière unanime. Notre groupe comprend les préoccupations qui s’expriment dans un certain nombre d’amendements déposés à l’occasion de cette deuxième lecture, mais il sera encore temps d’y répondre dans une prochaine proposition de loi. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Cyril Pellevat. Je veux tout d’abord vous adresser toutes mes félicitations, madame la ministre, pour vos nouvelles fonctions à la tête de ce grand ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Je vous souhaite de réussir pleinement votre mission pour le bien-être de nos collectivités, vous savez qu’elles attendent beaucoup !
Je suis heureux de voir – enfin – revenir au Sénat cette proposition de loi relative à la lutte contre les installations illicites des gens du voyage, après un an d’attente. Mais je suis aussi très déçu de la réduction de son contenu. L’Assemblée nationale a supprimé les deux tiers des dispositions de notre texte. J’en déduis que l’ampleur de la situation sur le terrain est clairement sous-estimée par certains députés.
Je l’ai maintes fois répété : en Haute-Savoie, comme dans bien d’autres départements, nous sommes assis sur une véritable poudrière, qui peut s’embraser à tout moment. Les exemples d’altercation avec les élus et les agriculteurs sont trop nombreux.
Non, nous ne stigmatisons pas les gens du voyage, comme cela a pu être dit sur les bancs de l’Assemblée nationale ! Nous faisons une différence entre les gens du voyage qui respectent les règles – ils représentent une très large majorité – et ceux qui, au contraire, se comportent comme des délinquants et ne respectent ni les lois de la République ni les arrêtés des communes ou des EPCI. Bref, des vrais-faux gens du voyage, qui restent sur un périmètre d’une trentaine de kilomètres ! Ce sont ces derniers qui posent problème.
Avec mes deux collègues sénateurs, Loïc Hervé et Sylviane Noël, nous nous faisons les porte-parole des nombreux élus qui subissent des installations illicites, sans disposer de réels moyens d’action, et qui nous interpellent régulièrement tout au long de l’année.
Les installations n’ont pas seulement lieu pendant l’été ; elles se font durant des périodes qui sont de plus en plus longues, et la tension monte en puissance, allant parfois jusqu’à des incidents majeurs, comme nous en avons connus en Haute-Savoie où un maire et un gendarme ont été menacés avec une arme à feu.
Madame la ministre, les élus du territoire et les services de l’État sont investis dans leurs missions. La plupart des élus respectent les obligations légales décidées dans le cadre du schéma départemental des gens du voyage, mais certains groupes semblent s’affranchir des droits fondamentaux, tels que le droit de propriété, qui est régulièrement bafoué.
Des groupes se sont imposés dans le département par le nombre et la force, bien qu’un refus de séjour leur ait été notifié en début d’année, puis réitéré lorsqu’ils se sont annoncés la veille pour le lendemain. D’autres arrivent aussi à leur convenance, méconnaissant les dates officielles de réservation.
Les élus locaux sont condamnés à passer nuit et jour à gérer les installations illicites, à subir les invectives, les menaces, les intimidations et à constater des dégradations sur des terrains de foot ou des aménagements municipaux, sans jamais pouvoir se retourner contre ceux qui dégradent volontairement ces espaces. Ils doivent aussi gérer les interrogations de la population, qui fustige une justice à deux vitesses et estime nos lois trop permissives.
Les propriétaires de terrains privés, chefs d’entreprise ou particuliers, ne comprennent pas que l’on puisse s’installer en toute impunité sur leur terrain et qu’il leur revient d’entamer des procédures longues et coûteuses.
Les agriculteurs subissent des dégradations de leur outil de travail avec toutes les nuisances que cela entraîne : pertes de récoltes, dégâts dans les champs dus aux détritus – lames de rasoir, déchets plastiques, etc. – qui peuvent nuire aux appellations d’origine contrôlée…
Nous sentons également sur le terrain l’exaspération des forces de gendarmerie, qui sont mobilisées avec des effectifs limités, face à de grands groupes et pendant des périodes de plus en plus longues.
Devant ce constat, tous les acteurs concernés espéraient un vote rapide et conforme dans chaque chambre. La proposition de loi n’était pas partisane et comportait des mesures utiles. Je souhaite remercier, à cet instant, ma collègue Catherine Di Folco pour la qualité de son rapport.
Malheureusement, l’examen à l’Assemblée nationale fut surprenant : le texte a été entièrement détricoté. La proposition de loi qui nous revient en deuxième lecture est donc bien différente de celle que nous avions votée. Les députés de la majorité ont choisi de la vider en grande partie, je ne peux que le regretter.
Mme Sylvie Goy-Chavent. Nous aussi !
M. Cyril Pellevat. Néanmoins, je soutiens pleinement les quelques dispositions qui restent, car elles constituent des avancées. J’insiste sur ce point : la situation est si critique que nous devons adopter ces mesures au plus vite.
J’ai été maire d’une commune rurale de 1 500 habitants de 2008 à 2016 et pas une année ne s’est écoulée sans que je sois concerné par des installations illicites. Combien de dimanches ou de soirées passés sur les terrains de sport communaux plutôt qu’en famille ! En huit ans, je n’ai vu aucune amélioration. Il est donc plus que nécessaire d’adopter ce texte et de veiller à son application.
Les quatre mesures qui constituent cette proposition de loi comblent un vide législatif et apportent des réponses concrètes. Je ne vais pas les détailler, mais soyez certains que leur adoption constituera un premier pas. Nous devrons toutefois veiller à leur suivi ; les élus, les chefs d’entreprise, les citoyens, les agriculteurs le demandent. Comme l’a indiqué Loïc Hervé, nous demanderons chaque année au Gouvernement un suivi de l’application de cette loi et, pour juger de son efficacité, nous analyserons le nombre d’amendes distribuées.
Je regrette bien sûr que n’ait pas été retenue par les députés la possibilité que nous avions donnée aux communes de moins de 5 000 habitants de ne pas installer d’aires d’accueil, hormis si elles étaient membres d’un EPCI comportant au moins une commune dépassant ce seuil.
En raison du temps qui m’est imparti, je ne citerai pas toutes les autres mesures supprimées par l’Assemblée nationale.
Vous l’aurez compris, je voterai bien sûr ce texte, qui aidera déjà un peu les élus locaux. Nous essaierons, dans une prochaine proposition de loi, de faire adopter les mesures rejetées, en tâchant de les améliorer et en proposant aussi, le cas échéant, de nouvelles dispositions, et nous espérons davantage de compréhension. Nous devons avoir le courage de nous retrouver, tous partis confondus, lorsqu’il s’agit de soutenir les élus locaux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. Serge Babary. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Serge Babary. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, s’il appartient à l’État de permettre aux gens du voyage de vivre selon la manière qu’ils ont choisie, ce mode de vie doit s’exercer dans le respect des lois de la République.
En séance publique, les députés de la majorité présidentielle ont affirmé que « les manquements persistants concernant la réalisation d’aires d’accueil ont pour conséquence une installation massive sur des emplacements illicites ». S’il y a des occupations illicites, c’est donc la faute des communes, qui n’auraient pas réalisé un nombre d’aires d’accueil suffisant. Le raccourci était facile, la situation est bien plus complexe !
Dans la métropole Tours Val de Loire, où je suis élu, le taux d’occupation des aires d’accueil était d’environ 47 % en 2017. La même année, un minimum de 150 caravanes était identifié sur le territoire de la métropole en stationnement illicite durable.
N’est-il pas totalement ubuesque de continuer à imposer des investissements supplémentaires aux collectivités, alors que les aires existantes sont occupées à moins de la moitié de leurs capacités ? Surtout, il faut ajouter à cet investissement les sommes déboursées pour entretenir les aires existantes, engager les procédures judiciaires d’expulsion des occupations illicites, puis nettoyer et réhabiliter les lieux libérés.
Serait-il totalement incohérent de corréler la réalisation des aires d’accueil au taux d’occupation de celles qui existent ? Rappelons qu’une partie de la subvention versée par l’État est elle-même calculée en fonction de ce même taux d’occupation.
De plus, pourquoi une commune respecterait-elle ses obligations et poursuivrait-elle son effort si, malgré des investissements colossaux, les campements illicites perdurent et sont même en constante augmentation ?
Plus encore, comment expliquer au contribuable qu’il vaut mieux investir dans une aire d’accueil inoccupée plutôt que dans un service public de proximité ? Comment lui expliquer que, s’il est mal garé, il paiera une amende et que sa voiture partira sur-le-champ à la fourrière, mais qu’il faudra plusieurs semaines pour faire cesser une occupation illicite de gens du voyage qui, finalement, s’installeront cent mètres plus loin ?
La population est excédée ; le climat devient délétère.
Dépourvus de moyens d’action, abandonnés par l’État, les maires font l’objet d’attaques verbales, parfois physiques.
Cet été, dans mon département d’Indre-et-Loire, réputé paisible, comme le Loir-et-Cher, madame la ministre (Sourires.), à Luynes plus précisément, 200 caravanes ont occupé les terrains de sport. Le maire de cette commune, qui avait investi 800 000 euros dans une aire d’accueil, a été la cible de jets de pierre, de coups de poing et s’est fait bousculer par une voiture. Tel autre maire, à Neuillé-Pont-Pierre, a subi une hospitalisation de huit jours après avoir été molesté par des gens du voyage à qui il demandait d’évacuer un terrain communal.
Ce climat contribue à alimenter l’amalgame que peut faire la population entre les auteurs de ces pratiques illicites, dangereuses, et la grande majorité des gens du voyage, dont l’installation sur les aires d’accueil n’engendre pas de troubles.
Non seulement l’effort de construction de places d’accueil doit être corrélé au taux d’occupation des aires existantes, mais sa contrepartie doit être l’évacuation rapide des campements illicites.
Tel était l’objet des propositions de loi de notre ancien collègue Jean-Claude Carles et de notre collègue Loïc Hervé, à savoir rétablir un équilibre entre les droits et les devoirs des gens du voyage et des collectivités territoriales, mais aussi permettre aux policiers, aux gendarmes, aux élus locaux de cesser d’être de simples spectateurs de ces occupations illicites, dépourvus de tout moyen d’action, et de redevenir acteurs.
L’État de droit existe lorsque la loi votée par le Parlement est appliquée et que les décisions administratives sont rapidement exécutées. La majorité gouvernementale a cependant voulu que, sur les dix articles que comportait la proposition de loi sénatoriale, il n’en reste que quatre. Selon l’aveu de Mme la rapporteur de la commission des lois, seule une adoption conforme de ces quatre articles, minimalistes, mais essentiels, permettra de donner une réponse rapide aux élus locaux. Cela n’est pas satisfaisant, mais il semble que nous n’ayons d’autre choix que de voter ce texte conforme. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sylviane Noël. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en dépit de la généralisation d’aires d’accueil des gens du voyage dans les communes depuis de nombreuses années, les installations illicites demeurent un problème récurrent, à l’origine de lourds dommages aux propriétés publiques et privées, ainsi que de tensions parfois vives entre riverains et gens du voyage. « Tous ces efforts, tous ces investissements coûteux pour rien », nous disent nos collègues maires et élus. « À quoi bon, si la loi n’est pas respectée ? », ajoutent-ils.
Voilà tout juste un an, la proposition de loi de mon prédécesseur, Jean-Claude Carle, était adoptée à une très large majorité par le Sénat. Inscrit dans une niche parlementaire du groupe Les Républicains, ce texte répondait en effet aux attentes fortes des élus locaux, régulièrement démunis face à certaines occupations illicites.
Cette proposition de loi a malheureusement été vidée de sa substance en première lecture par le groupe majoritaire, La République En Marche, à l’Assemblée nationale. À l’issue de cette première lecture, il ne subsiste que quatre mesures, la principale étant le doublement des peines en cas d’occupation illicite d’un terrain et la création d’une amende forfaitaire délictuelle de 500 euros. La création de cette amende forfaitaire est, certes, une avancée positive que j’approuve, mais celle-ci me semble insuffisante à plusieurs titres.
Tout d’abord, l’amende forfaitaire ne s’appliquera que si la commune ou l’EPCI respecte les obligations lui incombant en vertu du schéma départemental. Or, comme vous le savez, les schémas départementaux seront en révision à partir de 2019, ce qui rendra de fait la mesure inopérante dès l’an prochain. Nous ne sommes pas là pour défendre les territoires qui n’ont rien fait, mais, dans de nombreux cas, les collectivités sont déclarées en non-conformité avec le schéma, parce qu’il ne leur manque que deux ou trois places. Pourtant, l’amende forfaitaire ne sera pas applicable dans ces cas.
Ensuite, il faut noter que cette amende ne s’appliquera pas aux caravanes.
Enfin, élément très important, l’amende ne sera pas répétitive, conformément à une jurisprudence constante de la Cour de cassation, dont la dernière décision date du 30 janvier 2018. Il en résultera que les campements illégaux ne pourront se voir infliger qu’une seule amende, ce qui entraînera un risque fort de sédentarisation et une multiplication des campements illégaux, sans oublier l’insolvabilité très couramment évoquée par ces communautés pour échapper à tout type de sanction financière.
Par ailleurs, l’amende forfaitaire ne résoudra pas tous les problèmes, notamment celui des « sauts de puce ».
Aussi, mes chers collègues, face à un problème aussi crucial, nous ne pouvons pas nous contenter de ces maigres avancées. Les élus que nous représentons attendent mieux que cela.
Cette deuxième lecture doit être l’occasion d’enrichir ce texte et de tenter d’obtenir des avancées supplémentaires pour doter les élus locaux d’outils efficaces. Nous avons la chance d’avoir entre les mains un texte spécifique, et nous savons tous que cette occasion ne se représentera probablement pas.
Nous avons obtenu des garanties très fortes de la part du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale pour que le texte soit inscrit rapidement en deuxième lecture, nous permettant ainsi d’organiser cette navette parlementaire et d’avoir un texte abouti pour la saison prochaine. Aussi ai-je décidé de déposer plusieurs amendements, cosignés par une cinquantaine de mes collègues, visant à rétablir les principales dispositions du texte initial. L’adoption de ces amendements permettra notamment de rétablir un dispositif pour éviter les « sauts de puce », d’autoriser la saisine des véhicules non affectés à l’usage d’habitation pour les transférer vers des aires d’accueil existantes du département, de comptabiliser les aires permanentes d’accueil des gens du voyage sédentaires dans l’évaluation de la proportion de logements sociaux comptabilisés en application de la loi SRU et, enfin, d’instaurer une période transitoire pendant laquelle ces dispositifs pourraient s’appliquer pour une commune ou un EPCI qui aurait cessé d’être en conformité avec le schéma départemental à la suite de la révision de celui-ci.
Ces agissements délictueux sont fort heureusement le fait d’une minorité, mais parce que ces agissements peuvent entraver l’activité économique, contraindre l’exploitation agricole, empêcher le bon fonctionnement des services publics, porter une atteinte grave au droit de propriété ou à la liberté de circulation, ils deviennent absolument intolérables pour tous : élus, citoyens, professionnels, agriculteurs, force de l’ordre. Comme le disait l’écrivain et conseiller d’État Eugène Marbeau : « La liberté, c’est le respect des droits de chacun ; l’ordre, c’est le respect des droits de tous. » Plus que le droit, nous avons aujourd’hui le devoir d’agir ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sylvie Goy-Chavent applaudit également.)
M. le président. Je vous ai laissé vingt secondes de plus…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi relative à l’accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites
Chapitre Ier
Clarifier le rôle de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements
Article 1er
(Non modifié)
I. – La loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Le second alinéa du III est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il est tenu compte, lors de sa révision, des évolutions du schéma départemental de coopération intercommunale mentionné à l’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales. » ;
c) À la première phrase du premier alinéa du IV, le mot : « public » est remplacé par le mot : « publics » ;
2° Les I et II de l’article 2 sont ainsi rédigés :
« I. – A. – Les communes figurant au schéma départemental et les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de création, d’aménagement, d’entretien et de gestion des aires d’accueil des gens du voyage et des terrains familiaux locatifs définis aux 1° à 3° du II de l’article 1er sont tenus, dans un délai de deux ans suivant la publication de ce schéma, de participer à sa mise en œuvre.
« B. – Les communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale compétent remplissent leurs obligations en accueillant sur leur territoire les aires et terrains mentionnés au A du présent I.
« L’établissement public de coopération intercommunale compétent remplit ses obligations en créant, en aménageant, en entretenant et en assurant la gestion des aires et terrains dont le schéma départemental a prévu la réalisation sur son territoire. Il peut retenir un terrain d’implantation pour une aire ou un terrain situé sur le territoire d’une commune membre autre que celle figurant au schéma départemental, à la condition qu’elle soit incluse dans le même secteur géographique d’implantation.
« L’établissement public de coopération intercommunale compétent peut également remplir ses obligations en contribuant au financement de la création, de l’aménagement, de l’entretien et de la gestion d’aires ou de terrains situés hors de son territoire. Il peut, à cette fin, conclure une convention avec un ou plusieurs autres établissements publics de coopération intercommunale.
« C. – Les communes qui ne sont pas membres d’un établissement public de coopération intercommunale compétent remplissent leurs obligations en créant, en aménageant, en entretenant et en assurant la gestion des aires et terrains dont le schéma départemental a prévu la réalisation sur leur territoire. Elles peuvent également contribuer au financement de la création, de l’aménagement, de l’entretien et de la gestion d’aires ou de terrains situés hors de leur territoire. Elles peuvent, à cette fin, conclure une convention avec d’autres communes ou établissements publics de coopération intercommunale compétents.
« II. – Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents assurent la gestion de ces aires et terrains ou la confient par convention à une personne publique ou privée. »
II. – (Non modifié)
III. – (Supprimé)
M. le président. La parole est à M. François Grosdidier, sur l’article.
M. François Grosdidier. Nous sommes face à un dilemme, après que l’Assemblée nationale a vidé cette proposition de loi d’une grande partie de sa substance : nous sommes partagés entre l’idée de rétablir le texte tel qu’il était, pour donner une véritable efficience aux principes de droit, qui n’ont pas été modifiés, mais dont nous nous rendons compte sur le terrain qu’ils restent purement virtuels, ou d’accepter le texte de l’Assemblée nationale. Or, nous le savons, sans vote conforme, la proposition de loi n’aboutira pas et les quelques avancées qui subsistent resteront lettre morte.
À l’article 1er, je regrette que nous n’ayons pas pu définitivement dispenser les communes de moins de 5 000 habitants de l’obligation d’accueil. Dois-je rappeler que la loi Besson ne visait que les communes de plus 5 000 habitants ? Si toutes ces communes respectaient leur obligation d’accueil, les besoins seraient satisfaits à l’échelle nationale. Si elles ne le font pas, c’est parce qu’elles savent très bien que, même lorsqu’elles le font, ça ne sert souvent à rien. Ça n’empêche pas les installations sauvages ! J’ai vu dans mon département des communes rendre les clés de leur aire intercommunale au préfet, car le coût de fonctionnement d’une telle installation, proche du million d’euros, était une dépense en pure perte.
Je le répète, je regrette que l’obligation d’accueil ne soit pas supprimée pour les communes de moins de 5 000 habitants. Même si les investissements et les coûts de fonctionnement sont supportés, depuis la loi NOTRe, par la solidarité intercommunale, une aire de stationnement, ce sont des dépenses pour la commune, en matière scolaire, sociale, voire de police municipale, dépenses qui sont souvent hors de portée des petites communes.
Il faudrait exclure complètement ces collectivités du dispositif, mais la loi ne le fera pas. J’espère au moins que la pratique administrative le fera. Il faut savoir que nous sommes tous très attentifs dans nos départements, lorsque nous élaborons les schémas départementaux, à ce que cette obligation ne pèse pas sur les petites communes.
Ces regrets, que je voulais exprimer, ne doivent pas nous empêcher d’avancer lorsque nous le pouvons.
M. le président. La parole est à M. Michel Raison, sur l’article.
M. Michel Raison. Je voudrais souligner un problème récurrent, celui de l’occupation des aires d’accueil par des gens du voyage quasi sédentaires ou en voie de sédentarisation. La conséquence en est que les itinérants ne peuvent plus y stationner, ce qui crée des conflits, parfois graves. Ils se retrouvent alors à occuper des stationnements complètement illégaux. Or l’État, qui a pour habitude de beaucoup centraliser dans notre pays, laisse complètement tomber les présidents de communautés de communes. Dans la loi ÉLAN, grâce à l’excellente rapporteur, nous avons pu introduire une disposition aux termes de laquelle les bailleurs sociaux ont pour mission de faire stationner ces gens du voyage sédentaires sur des terrains familiaux.
Madame la ministre, je souhaiterais que l’État donne des consignes à ses préfets pour aider tous ces présidents de communautés de communes, en particulier dans les territoires ruraux, à mieux s’organiser, à mutualiser. C’est en effet ingérable pour les petites intercommunalités, qui n’arrivent pas à privatiser la gestion de ces aires de gens du voyage. Ils ont besoin d’aide.
Nous le savons tous, lorsqu’il faut évacuer des occupants illégaux, les préfets ont plus ou moins pour consigne de s’abstenir afin d’éviter des incidents. Plutôt que de critiquer les maires, il faut absolument que le Gouvernement donne des consignes plus précises aux préfets pour aider tous ces élus à mieux gérer ces situations très compliquées, car ils n’en peuvent plus. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)