Mme Laurence Cohen. Je ne sais pas si cela nous rassure !

M. Gérald Darmanin, ministre. Pour ma part, je ne me considère pas comme un libéral stricto sensu, mais je pense que c’est l’entreprise qui crée la richesse. De ce fait, j’assume complètement la suppression du CICE et l’instauration d’un allégement structurel de charges.

Effectivement, monsieur Tourenne, les entreprises bénéficieront des deux dispositifs en 2019. Ce n’est pas un cadeau que nous leur faisons : j’y insiste, ce sont elles qui créent les emplois.

Mme Laurence Cohen. Cela ne marche pas !

M. Gérald Darmanin, ministre. Quand des régimes ont voulu confier à d’autres entités que les entreprises le soin de créer de la richesse et de l’emploi, cela s’est plutôt mal terminé pour les citoyens, les contribuables et les institutions des pays concernés, pardonnez-moi de vous le faire observer ! Churchill disait que ce qui distingue les pays capitalistes des pays communistes, c’est que dans les premiers on manque de parkings, et dans les seconds de voitures. (M. Bruno Sido rit.) Pour ma part, je préfère manquer de parkings plutôt que de voitures !

Néanmoins, le dispositif peut être amélioré. C’est pourquoi nous vous proposons de suivre les créations d’emplois. Nous n’aurons rien à cacher au Parlement lorsqu’il s’agira de dresser le bilan de la politique économique et fiscale du Gouvernement.

L’avis est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir pris le temps de développer votre argumentation.

Nous débattions précédemment des avantages consentis aux salariés par le biais des comités d’entreprise. On voit comme les salariés se sont enrichis grâce à ces cadeaux !

D’après les derniers chiffres dont je dispose, le CICE a rapporté aux entreprises de 110 milliards à 111 milliards d’euros. On ne s’est pas trop posé la question des contrôles !

M. Gérald Darmanin, ministre. Nous supprimons le CICE !

M. Pascal Savoldelli. Avez-vous par exemple retiré le bénéfice du CICE au groupe Carrefour quand ce dernier a supprimé des emplois ? Quand des emplois ne sont pas pourvus à La Poste, récupère-t-on le CICE ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Demandez-le à vos collègues du groupe socialiste et républicain !

M. Pascal Savoldelli. C’est à vous que je le demande, monsieur le ministre. Vous êtes tout de même au Gouvernement depuis deux ans !

Par ailleurs, où va l’argent ? Comment expliquer que deux départements captent 20 % du CICE ? Je vois mon collègue Roger Karoutchi tourner la tête, au risque d’attraper un torticolis !

M. Roger Karoutchi. Je n’ai rien, je suis un pauvre ! (Sourires.)

M. Pascal Savoldelli. Il est très bien placé, puisque les Hauts-de-Seine sont l’un de ces deux départements, l’autre étant Paris. Cette situation – le nouveau dispositif la corrigera-t-il, monsieur le ministre ? – tient au fait que ces deux départements accueillent la plupart des sièges sociaux des grands groupes.

M. Pascal Savoldelli. Mais nos territoires urbains, ruraux, périurbains ne contribuent-ils pas à l’attractivité des entreprises ? Ne sommes-nous pas à leurs côtés quand nous aménageons le territoire, quand nous construisons des crèches ou d’autres équipements ? C’est aussi pour cette raison que nous réagissons de la sorte ! En moyenne, les grandes entreprises ont touché 21,3 milliards d’euros au titre du CICE tous les ans, contre 3 900 euros en moyenne pour les petites, qui pourtant créent elles aussi de la valeur ajoutée et de l’emploi.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est pour cela que nous optons pour un allégement de charges !

M. Pascal Savoldelli. Au travers de notre critique de vos projets, nous défendons les recettes de l’État. Tout cela est une gabegie !

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Pascal Savoldelli. Chez vous, dans le Nord, monsieur le ministre, ce sont 100 millions d’euros de crédit d’impôt qui ont été accordés aux entreprises industrielles, et 294 millions d’euros aux entreprises du secteur commercial. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Tourenne. Nous sommes parfaitement d’accord, monsieur le ministre… au moins sur un point ! Je voudrais couper le cou à un canard : nous pensons nous aussi que ce sont les entreprises qui créent l’emploi !

M. Gérald Darmanin, ministre. Quelle révolution !

M. Jean-Louis Tourenne. C’est d’ailleurs dans cette perspective que le CICE a été créé.

Là où nous sommes moins d’accord, voire pas du tout, c’est lorsque l’on fait des cadeaux fiscaux aux personnes les plus riches, à ceux qui paient l’ISF. Ceux-là ne créent pas d’emplois !

M. Gérald Darmanin, ministre. Cela n’a rien à voir !

M. Jean-Louis Tourenne. Ils investissent l’argent où ils peuvent, dans des paradis fiscaux…

C’est ce qui nous différencie, monsieur le ministre, mais nous sommes d’accord sur le rôle des entreprises. C’est pourquoi nous les avons aidées, et vous avez ainsi hérité, à votre arrivée au pouvoir, d’une situation largement meilleure que celle que nous avions trouvée en 2012. Vous oubliez de le dire parce que vous avez une certaine faculté de récupération…

Vous omettez aussi de dire que si le budget de la sécurité sociale est aujourd’hui à l’équilibre, c’est grâce à la trajectoire tracée sous le précédent quinquennat et aux efforts considérables accomplis depuis 2014.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est grâce à la réforme des retraites d’Éric Woerth !

M. Jean-Louis Tourenne. Il ne serait pas mal que vous rendiez de temps en temps justice à la précédente majorité, monsieur le ministre, au lieu de vous attribuer tous les mérites !

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Vos propos sur le rôle des entreprises, monsieur le ministre, ne me choquent pas du tout.

Quand nous considérons, les uns et les autres, l’évolution de la balance commerciale de la France, en particulier hors secteurs de l’aéronautique et des produits de luxe, l’inquiétude demeure.

Nous le savons, la compétitivité des entreprises tient à deux éléments au moins : le coût du travail et la qualité.

Selon des statistiques récentes, pour l’industrie manufacturière, le coût du travail est plus élevé en France que dans la moyenne des pays de la zone euro, mais plus faible qu’en Allemagne, dont la balance commerciale est pourtant excédentaire : cherchez l’erreur !

En ce qui concerne la qualité, nous savons que les entreprises françaises produisent un peu trop cher des produits de moyenne gamme, qui ne sont pas compétitifs sur les marchés européens et mondiaux.

Ce qui nous choque, monsieur le ministre, c’est le cumul en 2019 du CICE et des allégements de charges sociales, pour un montant total de 40 milliards d’euros. Vous auriez pu éteindre le CICE en 2019, verser, du fait du décalage d’un an, 20 milliards d’euros au titre de 2018, et ne mettre en place les allégements de charge qu’en 2020. Les entreprises ne se seraient pas trouvées en difficulté, car elles auraient continué à percevoir une aide de l’ordre de 20 milliards d’euros par an, et cela aurait permis d’éviter un choc pour le budget de l’année 2019 et de consacrer, le cas échéant, 20 milliards d’euros à d’autres investissements.

C’est là que réside notre désaccord, monsieur le ministre. Je voterai la suppression de l’article 8, tout en partageant en grande partie votre argumentation économique.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. M. le ministre a sans doute oublié que le Président de la République a été l’un des grands artisans de la mise en œuvre du CICE. Je défendais, pour ma part, une position contraire à la sienne, et nous avons eu à l’époque des débats assez houleux, et en tout cas sérieux.

Le CICE a été institué non pas pour créer de l’emploi, mais pour améliorer la compétitivité des entreprises. Un débat politique assez serré s’est tenu pour savoir comment mettre en application les préconisations du rapport Gallois, qui faisait effectivement la part belle à l’amélioration de la compétitivité coût. De fait, rien ou presque n’a été entrepris pour améliorer la compétitivité hors coût, et nous enregistrons encore un retard gravissime en matière de robotisation, d’investissement, de recherche, de développement de filières industrielles. Des choix dramatiques ont été faits – je pense notamment au cas d’Alstom. On peut toujours baratiner sur la compétitivité, mais, quand on n’a plus d’entreprises, la question ne se pose plus !

Il y avait eu un débat pour déterminer si le bénéfice du CICE devait être général ou ciblé et assujetti à des critères, afin que l’argent n’aille pas à des entreprises n’en ayant pas besoin, par exemple celles de la grande distribution. Pour s’opposer à un tel ciblage, on a prétendu qu’il serait inconstitutionnel. De mon point de vue, cet argument ne vaut pas, dès lors qu’il ne s’agit pas d’un allégement de cotisations sociales. Le CICE étant un crédit d’impôt, son octroi pouvait être conditionné, par exemple, à la conclusion d’un accord de branche ou de filière garantissant une amélioration de la compétitivité.

Le choix que vous faites aujourd’hui change encore la nature de cette affaire, car le CICE pourrait être requalifié en aide publique. Je le redis, le CICE étant un crédit d’impôt, et non un allégement général de cotisations, son octroi pourrait être subordonné à certains critères. Par exemple, un remboursement partiel pourrait être demandé en cas de délocalisation. Mais dès lors qu’on le transforme en allégement de cotisations, on se prive de toute possibilité de poser des conditions, de fixer des critères, d’exiger des contreparties ou de demander un remboursement en cas de délocalisation ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 404 rectifié bis et 487.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 15 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l’adoption 89
Contre 252

Le Sénat n’a pas adopté.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2019.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l’article 8, à l’amendement n° 489.

Article 8 (suite)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 489, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est abrogé.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à supprimer les exonérations de cotisations sociales patronales sur les bas salaires, qui grèvent le budget de la sécurité sociale à hauteur de 23 milliards d’euros en 2018 et contribuent à maintenir une partie des travailleurs à de bas niveaux de rémunération et de qualification.

Le renforcement des allégements généraux de cotisations patronales sur les salaires modestes prévus par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 conduira à un tassement des salaires en dessous de 1,4 fois le SMIC pour que les entreprises puissent bénéficier des exonérations sociales.

Or 23 milliards d’euros, c’est la somme qui manque à notre enseignement professionnel et à nos universités pour former les ouvriers, cadres et techniciens de demain ; c’est aussi la somme qui manque pour financer la réinsertion sociale, la reconversion professionnelle, la renaissance même de celles et de ceux qui sont le plus éloignés de l’emploi ; c’est enfin la somme qui manque aujourd’hui pour assurer l’égalité salariale entre les hommes et les femmes ou la reconnaissance des acquis professionnels. Voilà pourquoi nous proposons l’abrogation de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale.

Mme la présidente. L’amendement n° 488, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - L’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 241-2. – I. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont également constituées par des cotisations assises sur :

« 1° Les avantages de retraite, soit qu’ils aient été financés en tout ou partie par une contribution de l’employeur, soit qu’ils aient donné lieu à rachat de cotisations ainsi que les avantages de retraite versés au titre des articles L. 381-1 et L. 742-1, à l’exclusion des bonifications ou majorations pour enfants autres que les annuités supplémentaires ;

« 2° Les allocations et revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 131-2 ;

« 3° Le produit de la contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, prévue par l’article L. 245-13 ;

« 4° Le produit de la contribution mentionnée à l’article L. 137-15.

« Des cotisations forfaitaires peuvent être fixées par arrêté ministériel pour certaines catégories de travailleurs salariés ou assimilés.

« Les cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont à la charge des employeurs et des travailleurs salariés et personnes assimilées ainsi que des titulaires des avantages de retraite et des allocations et revenus de remplacement mentionnés aux 1° et 2° du présent article.

« II. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont en outre constituées par :

« 1° Une fraction égale à 38,81 % du droit de consommation prévu à l’article 575 du code général des impôts ;

« 2° Le remboursement par la caisse nationale des allocations familiales des indemnités versées en application des articles L. 331-8 et L. 722-8-3 du présent code. »

II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Le Gouvernement souhaite remplacer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, créé en 2012, par une suppression définitive des cotisations des entreprises à la branche famille de la sécurité sociale. Or cette mesure entraînera un manque à gagner pour le budget de la sécurité sociale.

De plus, il est à craindre que le CICE, une fois qu’il aura été transformé en exonération de cotisations sociales, ne soit aussi inefficace qu’il l’a été sous sa forme actuelle de crédit d’impôt. Rien ne justifie que les entreprises bénéficient de tels cadeaux fiscaux, a fortiori lorsque, dans le même temps, le Gouvernement demande aux plus vulnérables de se serrer la ceinture en ne revalorisant quasiment pas les prestations sociales, en maintenant la hausse de la CSG pour les personnes à la retraite et en supprimant un certain nombre d’aides destinées aux personnes en situation de handicap notamment.

Le groupe CRCE estime que les entreprises doivent continuer à participer au financement de l’ensemble du régime de sécurité sociale, dans la mesure où elles sont directement bénéficiaires de prestations familiales. Cette position s’inscrit dans la logique qui a prévalu lors de la création de la sécurité sociale et selon laquelle chacun doit cotiser selon ses moyens et recevoir selon ses besoins.

Pour ces raisons, nous proposons de rétablir la version antérieure de l’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, qui prévoyait la mise à contribution des entreprises au financement de la branche famille. Une telle disposition permettrait, comme l’a précisé Mme Apourceau-Poly, de récupérer 23 milliards d’euros, une somme qui pourrait être utilisée pour mettre en place une véritable politique de protection sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 489. Les allégements généraux de cotisations sociales ont un effet favorable sur l’emploi, aux dires du Conseil d’orientation pour l’emploi et de nombreux experts économiques.

Elle est également défavorable à l’amendement n° 488, dont l’adoption nuirait de façon massive à la compétitivité de nos entreprises, que notre objectif est au contraire d’améliorer pour créer de l’emploi.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 489.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 488.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 176 rectifié ter, présenté par MM. Karoutchi, Hugonet, Poniatowski et Cambon, Mmes Gruny et Garriaud-Maylam, M. Mayet, Mme Micouleau, MM. Sol et Daubresse, Mme Berthet, MM. Courtial, Bascher, Revet, Lefèvre, Savin et Ginesta, Mme Thomas, MM. Huré, de Legge, Genest, Joyandet et Dallier, Mmes Raimond-Pavero, Renaud-Garabedian et Di Folco, MM. B. Fournier, Calvet et de Nicolaÿ, Mme Deromedi, MM. Magras, Mandelli, Meurant, Sido, Vaspart, Vogel, Regnard et Brisson, Mme Lherbier et MM. Buffet et Gremillet, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Le nombre : « 2,5 » est remplacé par le nombre : « 3 » ;

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Si je connaissais un petit succès ce soir, après mes quatre échecs de cet après-midi, je pourrais me dire que j’ai bien fait de venir… (Sourires.)

Cet amendement, sans aucun doute, va faire l’unanimité.

M. Gérald Darmanin, ministre. Non !

M. Roger Karoutchi. Mais je ne l’ai même pas encore présenté ! (Rires.)

Je n’étais pas un grand partisan du CICE à l’époque de sa création – c’est le moins que l’on puisse dire –, mais j’ai lu les préconisations du rapport Gallois concernant les allégements de charges. Ceux qui sont prévus à l’article 8 s’appliqueraient pour les salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC. Si l’on veut créer de l’emploi et attirer des talents dans un certain nombre de secteurs ouverts à la compétition internationale, il faut aller un peu au-delà. C’est pourquoi, par mon amendement, dont M. le rapporteur général dira, je le sais, qu’il coûte les yeux de la tête,…

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas faux…

M. Roger Karoutchi. … je propose de porter le plafond de salaire pour le bénéfice des allégements de charges à 3 fois le SMIC. Ce serait un beau geste, reconnaissez-le, pour la création d’emploi et les entreprises ! D’ailleurs, je ne partage pas l’opinion selon laquelle ces dernières ne feraient pas d’efforts pour contribuer au bien-être national. Si tout le monde en faisait autant qu’elles, on n’en serait pas là !

Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une situation de blocage de l’économie française. Porter le plafond de salaire à 3 fois le SMIC, ce n’est pas considérable. On va me rétorquer qu’une telle mesure est coûteuse, mais le CICE coûte 20 milliards d’euros par an. Or, au moment de sa création, personne n’a jugé qu’un tel montant était insoutenable. Vous voyez, monsieur le rapporteur général, que je suis encore petit joueur…

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. M. Karoutchi a pensé pour nous, puisqu’il s’attend à un avis défavorable ; il n’a pas tort… (Sourires.)

Le coût de la mesure est extrêmement élevé – M. le ministre nous donnera certainement des chiffres plus précis – et elle s’écarte de la logique de compensation du CICE, qui concerne les salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC.

De surcroît, les experts que je sollicitais tout à l’heure estiment qu’une telle disposition n’aurait pas sur l’emploi un effet aussi massif qu’on veut bien le prétendre. Selon eux, accorder des allégements de charges n’est vraiment opportun que pour les bas salaires.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Quand on propose une mesure d’un coût de 7 milliards d’euros, je me lève pour donner l’avis du Gouvernement… (Sourires.)

Indépendamment des arguments de fond frappés au coin du bon sens donnés par M. le rapporteur général, si cet amendement était adopté, monsieur Karoutchi, vous feriez passer à vous seul, nuitamment, le déficit du pays de 2,8 % à 3,1 % ou 3,2 %, puisque 7 milliards d’euros représentent à peu près de 0,3 à 0,4 point de déficit !

Plus sérieusement, la question des allégements de charges se pose pour les bas salaires. Bien sûr, certaines entreprises ont du mal à recruter des cadres, notamment en Île-de-France, où l’on constate une pénurie. La loi de l’offre et de la demande fonctionne à plein, la compétition pour attirer les cadres est internationale, et il n’y a pas d’armée de réserve, pour parler comme Marx. Cependant, monsieur Karoutchi, lorsque l’on hésite entre Londres, Paris, New York et Singapour, on a des prétentions salariales bien supérieures à trois fois le SMIC.

Les difficultés que nous rencontrons au sein de nos territoires industriels tiennent, d’une part, à l’inadéquation entre les qualifications des demandeurs d’emploi et les attentes des entreprises, d’où les 15 milliards d’euros que nous consacrons au plan de Mme Pénicaud pour la formation professionnelle, et, d’autre part, au montant trop élevé des charges pour les salaires proches du SMIC. C’est pourquoi nous voulons concentrer les allégements de charges sur les bas salaires.

Même si nous avions les moyens d’alléger les charges pour les salaires supérieurs à 2,5 fois le SMIC, je ne suis pas certain que ce serait une bonne utilisation de l’argent public, car ce n’est pas une telle mesure qui incitera les entreprises à recruter du personnel plus qualifié. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Décidément, la commission et le Gouvernement ne veulent pas de ma proposition… J’ai déjà été battu quatre fois, je ne vais pas risquer un cinquième échec. On diffusait, il y a longtemps, une série américaine dont le titre était Lhomme qui valait trois milliards. Je ne voudrais pas gêner en coûtant à moi tout seul 7 milliards, et je retire donc cet amendement. (Sourires.)

Mme la présidente. L’amendement n° 176 rectifié ter est retiré.

Je suis saisie de cinq amendements identiques.

L’amendement n° 38 rectifié ter est présenté par M. Delcros, Mme Billon, MM. Bockel, Cigolotti et Détraigne, Mme Guidez, MM. Henno, L. Hervé, Janssens, Kern, Laugier, Le Nay, Longeot, Moga et Prince et Mme Vullien.

L’amendement n° 100 rectifié est présenté par Mme Costes, MM. Arnell, A. Bertrand, Castelli, Collin et Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Menonville, Requier, Roux et Vall.

L’amendement n° 161 rectifié sexies est présenté par Mmes Vermeillet et Vérien, MM. Bonnecarrère et Cazabonne, Mme Loisier, MM. Médevielle, Cadic et Delahaye, Mmes de la Provôté et C. Fournier, M. Lafon et Mme Morin-Desailly.

L’amendement n° 326 rectifié ter est présenté par MM. Babary et Houpert, Mmes Lassarade et Bruguière, MM. B. Fournier, Morisset, Sido, Courtial et Chatillon, Mme Chain-Larché, M. Joyandet, Mmes Deromedi et Gruny, MM. Lefèvre, Hugonet, Brisson, Vogel, Bazin et Bonhomme, Mmes A.M. Bertrand, Raimond-Pavero et Duranton, M. H. Leroy, Mmes Delmont-Koropoulis, Lamure et Morhet-Richaud et M. Mouiller.

L’amendement n° 478 rectifié bis est présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Bas, Mmes Berthet et Bonfanti-Dossat, MM. Cardoux, Chaize, Charon, Cuypers et Dallier, Mme L. Darcos, MM. Darnaud, Genest, Grand, Gremillet et Huré, Mme Imbert, M. D. Laurent, Mme Lopez, M. Mandelli, Mme M. Mercier et MM. Perrin, Pierre, Pointereau, Raison et Sol.

Ces cinq amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 9

Après la référence :

insérer la référence :

, 4°

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 38 rectifié ter.