Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Julien Bargeton, rapporteur spécial. Sur l’amendement n° II-138, l’avis de la commission sera défavorable. Cela ne vous surprendra pas, monsieur Ouzoulias, s’agissant d’un amendement tendant à supprimer le dispositif du pass culture. Vous retirez les 34 millions d’euros et les ventilez sur deux programmes, sans, d’ailleurs, préciser les actions concernées.

Cette expérimentation nous apparaît nécessaire pour voir comment le dispositif va être utilisé, comment les jeunes vont se l’approprier. Il concernera 10 000 jeunes dans 5 départements : la Guyane, l’Hérault, la Seine-Saint-Denis, le Bas-Rhin…

Mme Maryvonne Blondin. …et le Finistère !

M. Julien Bargeton, rapporteur spécial. C’est exact, ma chère collègue ! À partir de là, nous envisagerons la suite.

J’indique, pour conclure, que les crédits n’ont pas été pris sur d’autres programmes ; ils ont été ajoutés au budget de la mission en vue du lancement de ce pass culture.

J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° II-138.

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Comme l’a observé notre collègue Sylvie Robert, l’amendement n° II-336 est moins radical, puisqu’il ne vise à ponctionner que 5 millions d’euros sur les crédits du pass culture. Sans remettre en cause la phase d’expérimentation qui s’engage, il tend à financer une mission qui nous paraît tout à fait utile, celle de préfiguration du Centre national de la musique.

La commission, sur cet amendement, a donc décidé de s’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Franck Riester, ministre. Encore une fois, c’est une expérimentation que nous envisageons de mener sur le pass culture. Il me semble important d’essayer de créer cette application, qui permettra, en tout cas je l’espère, aux plus jeunes et, peut-être à terme, à tous les Français d’accéder via un dispositif moderne de géolocalisation aux offres culturelles situées à proximité.

Si, en plus, il peut y avoir, dans le processus d’« autonomisation culturelle », si je puis dire, de ces jeunes citoyens, un accompagnement financier destiné à ceux qui en ont le plus besoin, cela me paraît aller dans le bon sens.

Dès lors qu’il s’agit d’une application, d’un nouveau dispositif très innovant, nous revendiquons le fait que tout ne sera pas parfait du jour au lendemain. Il y aura des points à améliorer, à conforter. Peut-être même y aura-t-il des bugs, des biais… C’est tout l’objectif de l’expérimentation de les déceler et les traiter. N’importe quelle application sur nos smartphones ou sur internet connaît des phases de montée en puissance ou de mise à jour. C’est l’esprit même de ces services innovants que de s’inscrire dans un processus d’amélioration continue.

Nous partons donc sur une version beta pour, ensuite, – c’est pourquoi j’ai évoqué dans mon intervention une ou deux étapes supplémentaires en 2019 – faire monter en puissance le dispositif.

Puis, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinerons le dossier en toute transparence ! Nous regarderons quel en est le coût ; si, oui ou non, le pass culture satisfait les attentes des jeunes ; si, oui ou non, on les atteint tous, notamment ceux qui sont le plus éloignés des offres et pratiques culturelles ; si, oui ou non, on articule bien le dispositif avec ceux qui sont mis en place par les collectivités territoriales, les associations, les offres privées ; si, oui ou non, on touche toutes celles et ceux qui proposent des pratiques culturelles – je pense, par exemple, aux professeurs de musique.

En d’autres termes, nous verrons si le dispositif est à la hauteur de nos ambitions collectives ou pas, et nous prendrons une décision.

Il n’est, bien évidemment, pas envisageable d’avoir un budget de 450 millions d’euros, à terme. Le dispositif, tel que nous l’imaginons, prévoira des partenariats avec des entreprises et des établissements culturels. Une partie des 500 euros crédités sera, en fait, une valorisation faciale, qui n’entraînera aucun décaissement du fait de ces partenariats.

Ce sont tous ces éléments que nous devons poser sur la table, mais essayons, ensemble, d’offrir aux plus jeunes et, peut-être, à tous nos compatriotes un formidable outil – moderne – d’accès à la culture.

Par conséquent, je ne suis pas favorable à la suppression de ce budget, ni même à la proposition de Mme Sylvie Robert d’en soustraire une partie au bénéfice du Centre national de la musique.

Je suis convaincu de l’importance de ce centre – comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai signé un rapport sur le sujet en 2011. Le projet, tel qu’il est imaginé aujourd’hui, est quelque peu différent, mais l’esprit est toujours le même : nous avons besoin de fédérer la filière, d’observer les pratiques, d’accompagner les acteurs à l’export.

C’est pourquoi nous dégagerons, en crédits de gestion, les 5 millions d’euros nécessaires au lancement du CNM en 2019. Ensuite, en 2020, nous prévoirons les budgets permettant à cette structure de remplir sa mission auprès des acteurs de la filière.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Leleux. Je soutiens l’amendement de Mme Robert et le coup de pouce qu’elle entend donner au Centre national de la musique.

Ce sujet est débattu de longue date. La création de ce centre, différé année après année, est fortement attendue par la filière musicale. Le projet a été enterré, puis déterré ; bref, on a beaucoup tergiversé. On l’oublie souvent, la musique est un élément important de notre industrie culturelle, notamment pour la représentation de notre pays à l’étranger, via notamment le bureau export.

Le contexte actuel permet de dire au monde de la musique qu’il doit se structurer et s’unir, même si ce n’est pas forcément très simple. En tout cas, je le répète, je voterai cet amendement de la commission de la culture.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.

Mme Sonia de la Provôté. Nous soutiendrons également l’amendement de la commission de la culture.

En 2019, comme il semblerait que les crédits de gestion prennent une place toute particulière, pourquoi ne pas considérer, finalement, que de tels crédits pourraient fort opportunément – en cours d’année, qui sait ? – accompagner le pass culture, ce qui permettrait de prévoir les crédits nécessaires pour le Centre national de de la musique ?

En outre, en 2018, les crédits prévus pour le pass culture n’ont pas été consommés compte tenu des nombreuses incertitudes qui entourent le déploiement des fameux 34 millions d’euros budgétés à cette fin. Rien ne nous permet donc de considérer que, en l’état actuel des choses, ces crédits doivent être intégralement affectés au pass, faute de pouvoir avoir un avis éclairé sur cette question.

En revanche, de nombreux rapports ont été consacrés au Centre national de la musique et un travail considérable a été mené par les acteurs de la filière, qui se sont mobilisés pour sa création. Il est donc temps de leur adresser un signal positif, d’autant que l’on sait désormais quel serait le coût de fonctionnement de cette structure.

Par conséquent, cet abondement à hauteur de 5 millions d’euros est tout à fait justifié.

Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.

M. André Gattolin. Avec mon groupe, nous ne voterons pas cet amendement.

Bien sûr, je n’ai rien contre le Centre national de la musique. J’ai entendu notre excellent collègue Jean-Pierre Leleux dire que les milieux de la musique avaient tergiversé pendant des années. Non, c’est l’État qui a tergiversé ! Je crois d’ailleurs que c’est durant le mandat de M. Sarkozy que l’initiative a été lancée. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Excusez-moi, chers collègues, mais vous êtes très prompts à abonder des budgets pour financer des projets que vous n’avez vous-mêmes jamais financés ! Un budget de préfiguration a été mis en place, et je ne vois pas l’intérêt de déshabiller le pass culture.

On entend beaucoup de choses à son sujet, et cela me fait penser à ce qu’on entendait il y a un peu moins d’un an sur le Loto du patrimoine. Or, depuis le début de ce débat, tous ceux qui se sont exprimés à son sujet ont dit qu’ils se réjouissaient de son succès. Aussi, j’espère que vous aurez l’occasion de vous réjouir tout autant du succès à venir du pass culture !

M. Antoine Lefèvre. Le pass culture, cela ne rapportera rien !

M. André Gattolin. Laissez-lui donc au moins son budget de préfiguration !

À un moment, il faut être cohérent sur le plan budgétaire. On peut reprocher à ce gouvernement de ne pas faire correctement ce que l’on n’a soi-même pas fait, mais au moins ne modifions pas les crédits prévus pour le pass culture.

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Je rappelle, monsieur le ministre, que cet amendement a été déposé par notre commission et qu’il a fait l’objet d’un large débat en son sein.

Nous pensons que le temps est venu de concrétiser ce projet de Centre national de la musique, un projet, faut-il en rappeler l’histoire, qui vous tient particulièrement à cœur et pour lequel vous vous êtes beaucoup investi dans des temps antérieurs.

Je rappelle également que ce projet a fait l’objet d’un excellent rapport, celui de Roch-Olivier Maistre, qui a pris soin de consulter l’ensemble des parlementaires et l’ensemble des acteurs de la filière. La création de ce centre mérite donc désormais d’être accompagnée de manière très concrète.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le ministre, j’ai parfaitement compris votre intention et nous la partageons parce qu’elle est généreuse. Le problème ne tient pas tant au fonctionnement du pass culture qu’à son financement.

Vous nous dites maintenant que, sur ces 450 millions d’euros prévisibles – un demi-milliard ! –, une partie sera sans doute portée par des industries.

J’en tremble ! Je nourris quelque inquiétude sur la nature des entreprises qui seraient intéressées pour entrer, par le biais de leur portable, dans la poche des futurs utilisateurs. Cela m’inquiète, et c’est pour cette raison que nous allons maintenir notre amendement. Bien évidemment, il ne sera pas voté, mais nous voterons alors celui de la commission, parce qu’il est essentiel d’envoyer maintenant un signal favorable pour permettre le développement du Centre national de la musique.

Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.

Mme Colette Mélot. Comme je l’ai dit en commission, je ne suis pas favorable à ces amendements. Les projets sont là, ils sont attendus, nous dit-on, il faut les abonder, commencer à travailler et les laisser prospérer, sinon rien ne pourra se faire.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires ne votera donc pas ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-138.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-336.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-178 rectifié bis, présenté par Mme Dumas, MM. Bonhomme, Brisson, Charon, Decool, B. Fournier, Houpert, Karoutchi, Longuet, Moga, Regnard, Revet et Sido et Mmes Boulay-Espéronnier, Bruguière, L. Darcos, Deromedi et Lamure, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

Création

1 000 000

1 000 000

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont titre 2

1 000 000

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. Cet amendement a pour objet l’éducation aux médias.

Lors de la discussion du projet de loi relatif à la manipulation de l’information, la ministre de la culture en poste à l’époque avait souligné l’importance capitale de l’éducation aux médias. L’éducation était alors présentée comme l’indispensable corollaire aux mesures répressives à l’encontre des plateformes et éditeurs de contenus d’information.

Il est donc pour le moins surprenant de réduire d’un million d’euros les crédits dédiés à l’axe 3, « décrypter le monde », au sein du programme 224, dont l’objectif est précisément de mieux apprécier le rapport à l’information dans un univers où les usages, notamment numériques, évoluent rapidement.

Cet amendement vise à transférer des crédits de l’action n° 01 du programme « Création » vers l’action n° 02 du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Julien Bargeton, rapporteur spécial. Madame Dumas, par cet amendement, vous proposez de réabonder de 1 million d’euros les crédits prévus pour « décrypter le monde », pour les porter à 13 millions d’euros.

La question que vous soulevez est légitime et importante si l’on en juge par ce qu’on lit sur le rapport aux médias et sur leur compréhension, mais ce qui me gêne, c’est que vous transfériez ces crédits depuis l’action n° 01 du programme « Création ». Je vous demanderais plutôt d’interroger le Gouvernement sur la manière dont sont utilisés ces crédits.

Même si nous savons tous ici l’importance de savoir décrypter le monde, notamment dans le contexte que nous connaissons aujourd’hui, la commission vous invite donc à retirer votre amendement, ma chère collègue.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Franck Riester, ministre. Nous partageons évidemment cet objectif, et il est bien sûr nécessaire et essentiel d’investir dans l’éducation aux médias, à l’information et à l’image.

Pour autant, le Gouvernement a fait un effort très important l’an passé en inscrivant dans la loi de finances pour 2018 quelque 5 millions d’euros de plus que ce qui était inscrit précédemment ; là, nous procédons simplement à un ajustement par rapport à ce qui a été dépensé. C’est ce qui justifie que, cette année, ce sont 4 millions d’euros qui sont inscrits, et non pas 5 millions d’euros. Mais notre volonté d’accompagner cette éducation à l’image, essentielle, demeure.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Je comprends pleinement l’amendement de notre collègue Catherine Dumas, qui a d’ailleurs été cosigné par plusieurs membres de la commission de la culture. L’éducation aux médias et au numérique, monsieur le ministre, est devenue fondamentale.

Ce qui me dérange, c’est que les crédits soient transférés à partir du programme « Création » sans que soit formulée une demande globale sur cette question.

Nous allons avoir l’occasion d’en débattre cette semaine avec le ministre de l’éducation nationale. Vous connaissez les travaux que j’ai menés sur l’éducation à l’heure du numérique, qui montrent à quel point est nécessaire un plan beaucoup plus ambitieux, stratégique et transversal sur cette question, à l’heure de la désinformation sur les réseaux sociaux, du cyberharcèlement et de tous les méfaits que nous connaissons.

L’éducation nationale est au cœur du dispositif, même si ce n’est pas sa petite structure dédiée, le Centre pour l’éducation aux médias et à l’information, ou CLEMI, que vous connaissez tous, qui peut seule assumer cette mission.

Je vous propose plutôt de développer une vision plus stratégique, en demandant au ministre de l’éducation nationale quel est son plan, en particulier en matière de formation aux médias à l’heure du numérique.

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

M. Jérôme Bascher. Un propos très important qu’a tenu notre collègue Julien Bargeton, rapporteur spécial, dans son intervention est passé totalement inaperçu  : dans deux régions, notamment en région Bretagne, un fonds mutualisé entre les programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » sera confié aux DRAC.

Tandis que nous examinons des amendements portant sur un million ou quelques milliers d’euros, il faut savoir que ce que nous votons pourra être défait par chaque direction régionale, dont les crédits seront décentralisés. À terme, nos débats et nos votes n’auront donc plus grand sens – je vous renvoie à notre débat sur les préfectures.

Nous sommes en train de vivre une transformation majeure, en toute discrétion, de la loi organique relative aux lois de finances ! On peut s’écharper sur 5 000 euros ou sur 1 million d’euros, mais cela ne sert à rien, sauf à examiner plus longuement la loi de règlement – nous savons bien que nous y consacrons, hélas, trop peu de temps.

Il serait donc bon que chacun se rende compte que de telles expérimentations dénaturent profondément la LOLF. Et pour ma part, c’est cela qui me gêne.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.

Mme Sylvie Robert. À l’instar de nos autres collègues, nous approuvons totalement, sur le fond, cet amendement. Il est d’ailleurs assez paradoxal de constater que l’on retire un million d’euros aux crédits consacrés à l’éducation aux médias alors même que vient d’être votée par l’Assemblée nationale – mais pas par le Sénat – une loi destinée à combattre les fake news.

Pour autant, le fait que cet amendement soit gagé sur le programme 131, « Création », est quelque peu ennuyeux, d’autant que ce dernier est déjà fragilisé par un certain nombre de facteurs exogènes évoqués par plusieurs collègues. Par conséquent, nous ne pourrons pas voter cet amendement, mais non pas pour une raison de fond. Nous attendons en tout cas un plan stratégique dans ce domaine.

Élue de Bretagne, j’indique qu’une expérimentation est menée par la DRAC – ainsi que par la DRAC d’une seconde région – consistant non pas à fusionner les programmes 224 et 131, mais à voir comment certains projets pourraient émarger auprès de chacun d’entre eux.

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Chaque jour qui passe nous montre l’impérieuse nécessité – j’ignore si nous allons pouvoir rattraper facilement notre retard en la matière – d’éduquer au décryptage de l’information dans un monde où la désinformation, les fausses informations et les omissions d’informations commencent à peser très lourdement sur la démocratie.

Nous assistons à un bouleversement absolu de notre fonctionnement démocratique à partir des réseaux sociaux et nous n’avons pas d’autre réponse que d’éduquer les citoyens à prendre ce recul.

Les dispositions de cet amendement répondent donc à un souci crucial. Cependant, ici et là, comme on va le voir juste après lors de notre débat sur l’audiovisuel, on s’est habitué à cette contrainte qui oblige à déshabiller Pierre pour habiller Paul.

La création, c’est absolument fondamental pour les mêmes raisons : c’est ce qui permet de créer du lien. Et le ministre a dit des choses importantes sur ce à quoi sert la culture. Il n’est donc pas possible d’entrer dans ce jeu consistant à aller chercher de l’argent pour en mettre ailleurs.

M. Roger Karoutchi. C’est le jeu de la LOLF !

M. David Assouline. Effectivement, cher collègue, et d’ailleurs nous en verrons tout à l’heure toute l’absurdité : bien que, avec l’ensemble du Sénat, j’aie réussi à mobiliser 86 millions d’euros supplémentaires pour l’audiovisuel public, nous allons examiner les crédits du compte spécial sans en tenir compte faute d’amendement de coordination du Gouvernement. C’est totalement illogique !

Pour conclure, je dirai qu’il est certainement possible, sur ces 86 millions d’euros, de dégager 1 million d’euros supplémentaire en faveur de l’éducation au décryptage du monde. C’est une mission qui relève du service public de l’audiovisuel.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.

Mme Françoise Laborde. Nous ne voterons pas cet amendement, qui, même si c’est la règle du jeu de la LOLF et même s’il sert une belle cause, tend à déshabiller les uns pour habiller les autres. Je soutiens la création artistique, qui rencontre déjà bien d’autres soucis ; je pense à la fin de la prise en charge des frais de sécurité par le fonds d’urgence.

Je veux malgré tout souligner l’évolution positive que l’on observe depuis quelques années. Il fut un temps où le ministère de l’éducation nationale et le ministère de la culture menaient chacun leurs projets, séparément. À présent, il arrive plus fréquemment qu’ils construisent des projets communs. J’ose donc espérer que ce million d’euros de moins ne changera rien à l’affaire.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Franck Riester, ministre. Le ministère de Jean-Michel Blanquer et le mien travaillent main dans la main. L’un et l’autre ont la volonté de promouvoir l’éducation artistique et culturelle, à la suite des actions engagées par ma prédecesseure.

La volonté de Catherine Dumas et de tous ceux qui se sont exprimés à sa suite est tout à fait louable. Bien sûr, il faut investir dans l’éducation à l’image, au numérique à l’audiovisuel, aux médias. C’est ce que nous faisons, et je veux vraiment insister sur ce point.

En 2018, nous avons augmenté de 5 millions d’euros les crédits qui y sont dédiés, pour les porter à 14 millions d’euros. Le temps que ces programmes d’éducation à l’image se mettent en place, nous avons dépensé uniquement 9 millions d’euros. Dans un souci de sincérisation du budget, nous réduisons ces crédits en 2019 de 1 million d’euros, lesquels sont toujours supérieurs de 4 millions d’euros par rapport à ce qui a été réalisé en 2018. Cela traduit bien notre volonté toujours très forte d’investir dans l’éducation à l’image, qui est fondamentale.

Parce que c’est un enjeu majeur, je suis allé hier à l’Agence France-Presse pour soutenir ses équipes qui, à travers le dispositif AFP Factuel, jouent un rôle essentiel dans la lutte contre la désinformation sur les réseaux sociaux et sur internet. En effet, il faut voir le nombre d’informations fallacieuses et de contrevérités qui sont véhiculées sur les réseaux sociaux à l’occasion de cette crise des « gilets jaunes » !

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous aurons l’occasion de discuter prochainement de l’avenir de l’AFP, un sujet qui nous préoccupe beaucoup. Sachez en tout cas que son système de vérification rend des services exceptionnels. Ce service public, d’une certaine façon, contribue à l’éducation à l’image et aux médias.

Mme la présidente. Madame Dumas, l’amendement n° II-178 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Catherine Dumas. Madame la présidente, monsieur le ministre, je constate tout d’abord avec grand plaisir qu’il existe un accord unanime dans cet hémicycle sur l’éducation aux médias. C’est une bonne chose. Je voulais que le débat soit engagé, et c’est une réussite.

J’adhère à l’idée du plan stratégique proposé par la présidente de la commission. Je vais en effet retirer mon amendement, mais je tiens à lever toute ambiguïté : je soutiens avec ferveur la création artistique.

Cela dit, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-178 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° II-209 rectifié bis, présenté par Mmes Boulay-Espéronnier et Deromedi, MM. Mandelli, P. Dominati, Longuet, Nachbar, Schmitz, Husson, Gremillet, del Picchia et Grosdidier, Mmes Dumas et Bruguière, MM. Brisson et Kern, Mmes Imbert et Lassarade et MM. Darnaud, Sido, Bonhomme, Savin, Paccaud, Vaspart et Le Gleut, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

25 000

 

25 000

 

Création

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

dont titre 2

 

25 000 

 

25 000 

TOTAL

25 000

25 000

25 000

25 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.

Mme Céline Boulay-Espéronnier. Cet amendement vise à doter l’association « Patrimoine maritime et fluvial » de moyens supplémentaires pour l’accomplissement de sa mission de service public, à hauteur de 25 000 euros par an.

Reconnue comme organisme compétent en matière culturelle et historique maritime, l’association PMF est le représentant officiel du ministère de la culture et du ministère de la transition écologique et solidaire pour les questions relatives à la préservation du patrimoine maritime et fluvial. Elle a notamment pour vocation d’inventorier, de sauvegarder et de promouvoir le patrimoine maritime et fluvial national non protégé par l’État.

Elle s’est également vue confier par la loi de finances pour 2006 la mission de décerner le label « Bateau d’intérêt patrimonial ». La commission d’agrément a, à ce jour, labellisé 1 160 navires, sur une flotte estimée à près de 2 500 unités – contre 100 il y a six ans ; la croissance est donc exponentielle.

Il est inutile de rappeler l’attachement des Français à la préservation de leur patrimoine national ; il en a été largement question dans cet hémicycle cet après-midi.

Cette association dispose de peu de moyens. Par conséquent, mes chers collègues, je vous remercie de voter cet amendement, qui vise des crédits d’un faible montant.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Dans le même esprit que notre collègue membre de la commission des finances Jérôme Bascher, quand il s’est exprimé sur l’amendement précédent, je vais émettre un avis défavorable, pour des raisons non pas d’opportunité, mais plutôt de méthode.

Compte tenu de la modicité de la somme en jeu au regard des problématiques budgétaires globales, il apparaît qu’une telle mesure s’apparente plus à une décision de gestion qu’à un choix budgétaire relevant de la loi de finances initiale. Si nous allons jusqu’à individualiser les subventions aux associations une par une en fonction de leurs mérites comparés, il faudra que nous entamions l’examen du prochain budget au mois de février pour avoir une chance de le voter avant les fêtes de fin d’année !

La commission émet donc un avis défavorable.