Mme la présidente. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, auteur de la question n° 562, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
M. Marc-Philippe Daubresse. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la métropole européenne de Lille s’est fortement engagée dans la préservation de son environnement. Dans ce cadre, j’ai coordonné l’élaboration du SCOT, le schéma de cohérence territoriale, de l’arrondissement de Lille, qui compte 1,2 million d’habitants – ce schéma a d’ailleurs été voté à l’unanimité. Au premier rang de nos préoccupations, bien sûr, figurent la protection de l’environnement et de la biodiversité et la prévention des risques d’inondations concernant notamment la rivière frontalière franco-belge de la Lys.
Beaucoup de temps et d’argent ont été consacrés à cette mission.
Pourtant, le maire de Deûlémont, commune située sur les bords de cette rivière, est venu me trouver voilà quelques mois, affolé par les projets prévus sur la rive belge.
Sur la commune de Comines-Warneton, nos voisins belges ont prévu de construire une plateforme portuaire démesurée, dont l’autorisation dépend de la région wallonne – la situation est un peu complexe : on est là dans une enclave wallonne en zone flamande –, qui viendrait détruire tous les aménagements français destinés à protéger la biodiversité et l’environnement.
Parallèlement, l’entreprise agroalimentaire Clarebout, qui produit de l’huile de palme, installée à quelques mètres de la rive sur le sol belge et connue pour ses rejets de déchets polluants dans la nature, souhaite construire un deuxième congélateur pour son usine.
Si ces projets et leurs permis de construire étaient avalisés par les autorités belges, les fonds structurels européens du FEDER, le Fonds européen de développement régional, financeraient simultanément la protection de l’environnement et la prévention des inondations par des prairies humides, côté français, et la création, côté belge, d’une plateforme portuaire totalement incompatible avec lesdites protection et prévention.
De très nombreuses concertations ont déjà eu lieu avec les autorités belges compétentes, sans succès jusqu’ici. Vous comprenez donc mon inquiétude et celle des élus frontaliers français, de Deûlémont en particulier.
Le 30 octobre 2018, le préfet du Nord, qui soutient notre position, a émis un avis défavorable sur ce projet, en suivant les conclusions de la commissaire enquêtrice française.
Ma question est donc simple, madame la ministre : pouvez-vous faire quelque chose ? Avez-vous l’intention de prendre contact avec le gouvernement belge ? Pouvez-vous mettre un coup d’arrêt à ce projet ubuesque, qui pourrait réduire à néant des années de coopération transfrontalière en matière de protection de l’environnement et rendre inefficace l’ensemble du plan de prévention des inondations de Lille Métropole qui est en train d’être mis en place ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Daubresse, vous avez interrogé Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présente, elle m’a chargée de vous répondre.
Le ministère de la transition écologique et solidaire et les services de l’État dans la région Hauts-de-France sont pleinement mobilisés sur le dossier de la construction d’une plateforme multimodale sur la Lys, sur la commune belge de Comines-Warneton. Il s’agit d’un sujet d’impact environnemental transfrontalier qui fait, depuis 2016, l’objet d’échanges réguliers avec l’administration belge.
Notre ambassade en Belgique a alerté les autorités belges concernées sur les préoccupations du versant français, clairement manifestées dans le cadre d’une enquête publique, s’agissant des inconvénients de la construction de cette plateforme à proximité directe d’une zone humide. Les discussions sont menées dans un contexte particulier marqué par une concertation difficile entre les communes concernées de part et d’autre de la Lys, par des réglementations nationales différentes et par une asymétrie dans l’organisation des procédures de consultation transfrontalière environnementale entre les différentes administrations concernées des deux pays.
Au regard de la sensibilité du sujet, une enquête publique transfrontalière a été organisée sur le territoire des communes françaises de Frelinghien, Comines, Deûlémont et Warneton entre le 27 août et le 27 septembre 2018. En outre, le préfet du Nord a sollicité l’avis de la direction départementale des territoires et de la mer du Nord, de l’agence régionale de santé des Hauts-de-France et de Voies navigables de France.
Au vu de la forte opposition citoyenne, les avis défavorables des quatre conseils municipaux concernés par l’enquête publique, les dangers liés aux risques d’inondations, l’impact sur la faune et la flore et les conséquences globales du projet sur la qualité de l’eau de la Lys, la France a émis sur ce projet, le 30 octobre 2018, un avis défavorable qui a été transmis aux autorités belges.
Nous restons attentifs aux suites qui seront données à ce projet, à la lumière de cet avis, par nos interlocuteurs belges.
Par ailleurs, les services de l’État élaborent actuellement un guide de procédure de consultation transfrontière destiné à faciliter les échanges entre toutes les administrations intéressées.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, pour répondre à Mme la ministre.
M. Marc-Philippe Daubresse. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse et de la réaffirmation de la position de la France, qui est évidemment importante pour nous.
Je vous informe que nous disposons d’un district européen transfrontalier, outil de concertation créé sur l’initiative de Pierre Mauroy, lorsqu’il était sénateur, qui existe dans toute une série de zones transfrontalières, et qui permet, en l’espèce, de réunir les autorités belges et françaises, et notamment les régions concernées. Il pourrait être opportun que Mme la secrétaire d’État puisse assister à l’une de ces réunions, qui sont présidées par Mme Aubry, et y réaffirmer de manière plus solennelle, peut-être, la position de la France – cela pourrait nous aider.
Merci, en tout cas, de votre soutien.
retards de remboursement des primes à la conversion et bonus écologiques
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Piednoir, auteur de la question n° 580, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
M. Stéphane Piednoir. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention, et même vous alerter, sur les retards de remboursement des primes à la conversion et autres bonus écologiques qui sont accordés pour faciliter l’achat de véhicules vertueux en termes de pollution atmosphérique, et sur les conséquences de ces retards pour l’ensemble de la filière automobile.
Ces incitations financières constituent – vous en conviendrez – un axe fort de la politique du Gouvernement en faveur de la transition écologique, en particulier à destination des ménages modestes.
Mais, souvent, ces aides financières sont directement avancées par les concessionnaires eux-mêmes, et j’ai été alerté, dans mon département de Maine-et-Loire, sur les délais importants de remboursement de ces primes par l’État.
À ce jour, à l’échelle nationale, ces retards de paiement représentent environ 80 millions d’euros. Ces sommes, qui ne sont pas remboursées, concernent quatre-vingt-cinq groupes de concessions recensés.
Selon moi, il n’est pas normal que certaines entreprises aillent jusqu’à mobiliser 10 millions d’euros d’avances de trésorerie sur l’État, ce parfois pendant plusieurs mois. Il s’agit là d’un réel dysfonctionnement du dispositif.
De plus, dans le cadre de cette transition, les centres agréés de destruction des véhicules hors d’usage et de remplacement des véhicules polluants souffrent de congestion, ce qui est problématique : le certificat de destruction du véhicule est indispensable pour engager la démarche de remboursement des primes par l’État.
On le voit bien, nous sommes face à un système qui tourne en rond. D’ailleurs, vous avez récemment annoncé une hausse de ces primes pour l’an prochain : en toute logique, vous vous attendez donc à une augmentation des demandes. Je rappelle simplement que, l’an dernier, 200 000 demandes d’aide ont été enregistrées, alors que le Gouvernement n’en prévoyait que 100 000. Vous comprenez bien que, si l’on veut accélérer le processus, l’on risque d’accumuler des retards importants de la part de l’Agence des services de paiement, l’ASP.
Madame la ministre, en résumé, et compte tenu de cette situation extrêmement tendue, quelles solutions pouvez-vous envisager pour accélérer le remboursement de ces primes, de ces bonus ? Il convient de ne pas mettre en péril l’activité du secteur automobile, qui, on le sait, est particulièrement fragile.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Stéphane Piednoir, vous avez interrogé M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présent, il m’a chargée de vous répondre.
Tout d’abord, je vous confirme que la prime à la conversion est un levier important de la politique du Gouvernement pour accompagner les Français vers des véhicules qui consomment moins et qui polluent moins. Au reste, en 2019, le Gouvernement a doublé cette prime pour les ménages les plus modestes et pour les ménages non imposables qui font chaque jour plus de trente kilomètres entre leur domicile et le lieu de leur travail.
Un allongement des délais de paiement par l’ASP a été observé à l’automne 2018. Il est dû au succès exceptionnel de la prime à la conversion l’année dernière. Près de 300 000 demandes ont été déposées en 2018, ce qui est en effet nettement supérieur à l’objectif initial de 100 000 primes.
Le Gouvernement est attentif aux difficultés de trésorerie que ces retards de remboursement engendrent pour de nombreux professionnels de l’automobile. Les services du ministère de la transition écologique et solidaire, en relation avec la direction du budget, mettent tout en œuvre pour maintenir des délais de paiement acceptables. Ainsi, 70 000 dossiers ont été payés au mois de décembre 2018, et le délai de paiement a pu être ramené à un mois et demi à la fin de décembre dernier. Nous veillerons à maintenir une situation satisfaisante en 2019.
En outre, je tiens à vous rassurer : la filière de déconstruction automobile ne fait pas face, aujourd’hui, à des problèmes de capacité. Les 1 700 centres de traitement agréés pour les véhicules hors d’usage sont, potentiellement, à même de prendre en charge un nombre plus élevé de véhicules que les 1,1 million enregistrés en 2017.
Si certains centres agréés peuvent connaître des difficultés, ces situations restent le plus souvent localisées. Elles peuvent s’expliquer par le délai nécessaire pour que les centres agréés réalisent les opérations obligatoires de dépollution des véhicules et le démontage de leurs pièces, ainsi que le recyclage de leurs matières.
Il revient aux constructeurs automobiles, dans le cadre de leur responsabilité élargie, d’examiner les possibilités de réorganisation afin d’alléger les zones qui connaissent des tensions aujourd’hui. Les services du ministère de la transition écologique et solidaire assurent un suivi attentif de la situation, pour que les acteurs de la filière de déconstruction gèrent de manière satisfaisante, en 2019, cet afflux de véhicules hors d’usage.
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour répondre à Mme la ministre, en cinq secondes.
M. Stéphane Piednoir. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je vous invite évidemment à travailler le plus étroitement possible avec les professionnels de la filière. Pour ce qui concerne les centres de déconstruction et de destruction des véhicules, l’on pourrait envisager de donner davantage d’agréments, même localement ; il pourrait s’agir d’une solution, en concertation avec les acteurs locaux.
liaisons ferroviaires et région occitanie
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, auteur de la question n° 299, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Mme Viviane Artigalas. Madame la ministre, 86 % des Français estiment que les difficultés de transports constituent un frein à l’emploi, et la majorité d’entre eux n’a pas d’autre choix que d’utiliser un véhicule, au détriment du train ou des transports en commun. Il devient donc urgent de développer les nouvelles mobilités, et notamment le réseau ferroviaire.
Le rapport du 15 février 2018 avait suscité beaucoup d’inquiétudes dans de nombreux territoires, notamment en Occitanie, sur l’avenir des petites lignes TER et du développement du TGV.
Paradoxalement, la région Occitanie est, d’une part, l’une des plus dynamiques et, d’autre part, l’une des plus fragiles et des plus enclavées, en raison de l’inachèvement des projets de LGV, lignes à grande vitesse. Or raccorder la quatrième ville de France au réseau TGV permettrait déjà de déployer de nouveaux trains dans les zones saturées et de maintenir des trains du quotidien dans les zones plus rurales.
Alors que ces petites lignes sont un instrument de désenclavement certain, le rapport ne mentionnait aucune des créations de ligne réclamées depuis des décennies par plusieurs régions, notamment par la région Occitanie.
Pourtant, il s’agit de rendre la vie de nos concitoyens plus simple et de rétablir l’égalité entre les territoires. À cette fin, il faut mener une politique ambitieuse d’entretien des réseaux et assurer l’aboutissement des projets de grandes infrastructures encore manquantes.
Afin de développer les transports collectifs, le covoiturage et des innovations dans le domaine des transports, les finances publiques doivent mieux soutenir l’action des régions et des départements, qui assurent l’organisation du maillage territorial et la modernisation des routes secondaires.
De plus, il n’est pas possible d’imposer une fiscalité verte à nos concitoyens sans une politique d’accompagnement juste et logique. Il est donc nécessaire de réorganiser les possibilités de transports et les réseaux de circulation, en décentralisant davantage les compétences, en concertation directe avec les territoires.
La prochaine loi d’orientation sur les mobilités devra mettre en place un véritable plan d’action, qui permettra à nos territoires de sortir de l’enclavement et à nos concitoyens de circuler plus facilement au quotidien.
Quelle réponse pouvez-vous m’apporter quant à ces enjeux ? Pouvez-vous me confirmer, dans la région Occitanie, la poursuite des projets d’infrastructures essentiels au développement économique du territoire ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Madame la sénatrice Viviane Artigalas, vous me faites part des fortes attentes des territoires de la région Occitanie quant à sa desserte ferroviaire, sur les deux volets que constituent les « petites lignes », même si ce terme est impropre, et les projets de lignes à grande vitesse.
Sur le premier point, je tiens une nouvelle fois à clarifier la position du Gouvernement : il n’est en aucun cas dans notre intention d’abandonner les lignes qui font le maillage de notre territoire et sont nécessaires au transport du quotidien de nombreux Français. L’État tiendra ses engagements et demeurera au côté des collectivités territoriales pour préserver ces lignes de desserte fine, dans le cadre des contrats de plan État-région, les CPER.
À cet égard, je viens de confier à M. le préfet Philizot une mission visant à établir et partager avec les parties prenantes un état des lieux de la situation aux niveaux national et régional, à identifier les différentes solutions techniques, organisationnelles, financières et contractuelles pour assurer la pérennité des lignes de desserte fine des territoires, puis à décliner à l’échelle régionale les solutions ainsi identifiées.
Sur le second point, à savoir les projets de lignes à grande vitesse desservant l’Occitanie, les lignes nouvelles Bordeaux-Toulouse et Montpellier-Béziers représentent un montant total d’investissement considérable, qui atteint plusieurs milliards d’euros. Ces deux projets sont bien pris en compte dans la programmation des grandes infrastructures de transport, figurant dans le projet de loi d’orientation des mobilités : le débat aura lieu au Parlement.
Il s’agit là de projets de grande ampleur. Leur réalisation sera donc nécessairement phasée, en commençant par la désaturation des nœuds ferroviaires de Bordeaux et Toulouse : il s’agit là d’un préalable indispensable. La situation des dernières semaines nous rappelle l’urgence de développer les transports ferroviaires du quotidien autour des métropoles régionales.
Ainsi, ces lignes figurent bien dans la programmation, mais leur réalisation sera phasée, et l’on commencera par la désaturation des nœuds ferroviaires, au profit des transports du quotidien.
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour répondre à Mme la ministre.
Mme Viviane Artigalas. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je constate que nous avons les mêmes préoccupations. D’ailleurs, les mouvements sociaux actuels nous montrent bien que les transports sont une préoccupation quotidienne de nos concitoyens ; il s’agit même de leur principale inquiétude.
Nous devons donc, ensemble, donner une réponse d’ampleur pour ces transports du quotidien : il faut mener à bien la désaturation de nos grandes villes, afin de les rendre accessibles à tous.
conséquences du changement de statut de l’école française andré-malraux de saint-pétersbourg
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, auteur de la question n° 538, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Leconte. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les conséquences qu’aura, pour l’école André-Malraux de Saint-Pétersbourg et ses élèves, le transfert de propriété effectué en 2018 par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE.
En effet, lors du conseil d’administration du 28 juin 2018, les membres de l’AEFE se sont vu signifier, en réponse à une question d’un administrateur, une décision administrative de transfert de propriété de l’activité scolaire exercée par l’AEFE à Saint-Pétersbourg.
Alors que cette école appartenait à l’établissement en gestion directe de Moscou, la transmission à un opérateur privé, menée sans la moindre transparence, est contestable : l’on n’a lancé ni appel à manifestation d’intérêt ni procédure d’appel d’offres pour la recherche d’un repreneur, et aucune garantie n’a été offerte aux familles.
Ces dernières années, la situation financière de l’école a été progressivement dégradée par une gestion et une stratégie de communication inadaptées. Présentée ensuite comme coûteuse, l’école a été cédée à un opérateur privé, avec une partie de ses recrutés locaux. Cette décision étant prise, l’AEFE a continué à assumer les coûts de fonctionnement sur son budget durant l’été 2018, et peut-être au-delà pour le bail et les garanties offertes au propriétaire.
Cette manière de procéder impose de formuler les remarques et les questions suivantes.
Premièrement, la société de droit russe à qui bénéficie le transfert de cette activité est détenue par une autre personne que celle qui fut indiquée aux parents d’élèves par le conseiller culturel : elle est présentée comme un prête-nom, ce qui serait justifié par notre ambassade comme une pratique courante en Russie.
Deuxièmement, les licences demandées par cette société aux autorités russes pour continuer l’activité de l’école ne correspondent pas au programme d’enseignement présenté aux parents d’élèves.
Troisièmement, la base sur laquelle les détachements de titulaires de l’éducation nationale ont été mis en place dans la nouvelle structure pose des problèmes quant à la capacité de la nouvelle SARL russe d’offrir un statut légal répondant aux exigences du droit russe pour ses personnels français.
Quatrièmement, pourquoi, pour l’AEFE, n’y a-t-il pas eu officiellement de transmission d’une école publique à une structure privée, mais simplement la cession de quelques actifs mobiliers préalablement dévalorisés ?
Cinquièmement et enfin, si ce point de vue est retenu, c’est-à-dire le simple transfert de quelques actifs mobiliers, comment peut-on maintenir l’homologation ? Pourquoi cette dernière est-elle restée valable, sans contrôle, et comment a-t-on pu autoriser le détachement de titulaires de l’éducation nationale ?
Étant donné les tracas administratifs que des entités étrangères comme Business France ont vécus ces derniers mois en Russie, oublier de prendre certaines précautions au regard du droit russe peut engendrer des difficultés. Celles-ci pourraient peser non seulement sur l’école de Saint-Pétersbourg, mais aussi sur l’avenir, le statut et les charges financières de notre établissement de Moscou.
Aussi, il semblerait plus raisonnable de constater que les décisions prises dans des conditions litigieuses ne méritent pas d’être confirmées, et de donner au nouveau proviseur de l’établissement de Moscou, en poste depuis septembre 2018, un mandat clair pour trouver la solution permettant le développement de nos écoles dans le respect des droits français et russe.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Jean-Yves Leconte, vous avez interrogé Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Ne pouvant être présent, il m’a chargée de vous répondre.
Le ministère de l’Europe et des affaires étrangères est attaché au maintien d’une école française à Saint-Pétersbourg, au service non seulement de notre communauté expatriée dans la région, mais aussi de notre influence.
Cette présence était compromise : le nombre d’élèves déclinait, le budget de cet établissement était structurellement déficitaire et grevait le budget du lycée Alexandre-Dumas de Moscou, dont il dépendait. La décision de changement de statut de l’établissement et de sa reprise par une structure privée ayant fait ses preuves dans le domaine de l’enseignement français à l’étranger est une réponse assumée face à l’échec des différentes tentatives pour rétablir la viabilité de l’établissement.
C’est dans ce cadre que le changement de statut a été réalisé, en concertation étroite avec l’ensemble des acteurs impliqués, dont les partenaires de l’établissement.
La rentrée scolaire démontre la pertinence de ce choix : les élèves sont au rendez-vous, leur nombre est passé de cinquante-huit à soixante-treize en septembre 2018, signe de la confiance que les familles accordent à la nouvelle structure.
La qualité de l’enseignement est garantie par le maintien de l’homologation par le ministère de l’éducation nationale et par le recrutement d’une nouvelle équipe pédagogique composée de trois professeurs titulaires de ce ministère.
D’un point de vue financier, depuis le 1er septembre 2018, ni l’établissement en gestion directe de Moscou ni l’AEFE ne supportent plus les coûts de fonctionnement de l’école André-Malraux.
Ce transfert a été réalisé en respectant toutes les règles de droit, tant français que russe.
Seule la délivrance de la licence d’enseignement par les autorités russes a pris du retard. Ce retard s’explique par le blocage administratif lié au transfert du bail au nouveau propriétaire et par les interventions répétées de quelques compatriotes hostiles au projet qui ont pu créer un climat de suspicion auprès des autorités russes. Sans ces interventions, la licence d’enseignement aurait déjà été délivrée.
Monsieur le sénateur, soyez assuré de la vigilance constante de notre ambassade en Russie, de l’opérateur AEFE et des services du ministère des affaires étrangères.
retraite des vétérinaires sanitaires
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, auteur de la question n° 422, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le ministre, je me permets d’attirer votre attention sur le délicat sujet de l’indemnisation des vétérinaires ayant participé, dans le cadre d’un mandat sanitaire, à l’éradication des grandes épizooties entre les années 1955 et 1990.
Ces professionnels de santé animale ont effectué, à la demande de l’État, des prophylaxies collectives permettant de protéger le cheptel français. À l’époque, l’État a omis de verser les cotisations sociales correspondant aux salaires concernés, qui leur auraient ouvert des droits au titre de la protection sociale et de la retraite.
Par sa décision du 14 novembre 2011, le Conseil d’État a enjoint à l’État de régulariser cette situation. Environ 1 600 demandes d’indemnisation ont alors été recensées, et une procédure harmonisée de traitement a été instaurée.
À la date du 9 avril 2018, environ 1 000 vétérinaires auraient été indemnisés ; mais, pour les dossiers restants, on a invoqué un « dépôt tardif » et un délai de prescription, qui les a écartés du processus de régularisation.
Les vétérinaires sanitaires concernés, « hors délais », désormais constitués en association, vivent très mal cette situation particulièrement injuste. C’est donc pour pouvoir obtenir le traitement rapide, conformément au principe d’égalité, des derniers dossiers de ces praticiens désormais âgés que je me tourne vers vous.
À l’heure où la profession agricole va mal, et alors que l’aide des vétérinaires pourrait de nouveau être précieuse pour éviter la propagation d’éventuelles pathologies, la régularisation de ce dossier serait un signe fort.
Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous m’indiquer les mesures que le Gouvernement entend prendre pour résoudre définitivement cette question, dans des conditions tout simplement équitables ?
M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice Nadia Sollogoub, je vous remercie de votre question très précise, qui concerne une profession dont je sais qu’elle vous tient à cœur, et qui porte sur les demandes d’indemnisation formulées par des vétérinaires sanitaires à la suite du défaut d’affiliation au régime de sécurité sociale dont ils ont fait l’objet au titre des activités exercées avant 1990 dans le cadre du mandat sanitaire.
Tout d’abord, je tiens à souligner les efforts consentis au cours de l’année écoulée : comme vous le savez, l’ensemble des dossiers éligibles des conjoints survivants et autres ayants droit de vétérinaires sanitaires se sont vu proposer une transaction amiable. De même, la quasi-totalité des dossiers de vétérinaires retraités ont été résolus.
À ce jour, le ministère a procédé à la régularisation de 1 063 dossiers. L’année 2018 a permis la résolution de 246 d’entre eux. L’immense majorité des demandes introduites avant le 1er janvier 2018 a ainsi été traitée.
Les dernières demandes, déposées notamment en réaction à l’annonce officielle de l’imminence de la clôture du processus transactionnel, survenue au premier trimestre de 2018, sont présentement en cours d’instruction. Elles aboutiront dans les tout prochains mois ; les crédits nécessaires ont d’ores et déjà été inscrits en loi de finances initiale pour 2019.
Madame la sénatrice, comme vous l’avez évoqué, certains dossiers présentent des difficultés d’éligibilité. L’article 1er de la loi n° 68–1250 de décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l’État […] toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. »
Dans ses décisions nos 388198 et 388199 du 27 juillet 2016, le Conseil d’État a procédé à la déclinaison de la disposition législative précitée, dans le cas de figure tout à fait spécifique des vétérinaires sanitaires ayant subi un défaut d’affiliation au régime de sécurité sociale au titre des activités sanitaires – je vous accorde qu’il s’agit là d’un sujet très technique.
La Haute juridiction a jugé que les vétérinaires ne pouvaient plus être regardés comme ignorants de leurs créances à l’État au moment de la liquidation de leurs droits à pension et que, dès lors, le délai quadriennal avait pleinement vocation à courir.
En conformité avec l’esprit de la loi, seuls les vétérinaires qui relèveraient de difficultés financières d’une singulière sévérité pourraient prétendre au bénéfice d’un relèvement exceptionnel de la prescription ; il y va de l’égalité de chacun devant la loi.
Au-delà de ces difficultés, je puis vous assurer de la totale mobilisation de mes services pour la résolution des tout derniers dossiers d’ici à la fin de l’année 2019.