M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour la réplique.
Mme Valérie Létard. Je serai brève, car mon temps de parole est presque écoulé.
Monsieur le secrétaire d’État, le mécanisme que vous évoquez n’est vraiment pas satisfaisant. Selon les indicateurs, les Hauts-de-France sont parmi les régions qui connaissent le plus de difficultés en France. Nous nous situons nettement au-dessous de la moyenne nationale. Vous pouvez envisager toutes sortes de correctifs, le fait est qu’il faut revoir le zonage. Il y va de la vie de milliers d’habitants des Hauts-de-France, qui ne sont pas pris en charge aujourd’hui.
maintien de la maternité du centre hospitalier de dinan
M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, auteur de la question n° 693, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
M. Michel Vaspart. Monsieur le secrétaire d’État, ma question s’adressait à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Elle porte sur l’avenir de la maternité du Centre hospitalier René-Pleven à Dinan.
Appartenant au territoire de santé Saint-Malo-Dinan, qui couvre 138 communes pour 264 000 habitants, soit 8 % de la population bretonne, sur l’est des Côtes-d’Armor et le nord de l’Ille-et-Vilaine, l’hôpital de Dinan fait partie, depuis 2011, de la communauté hospitalière de territoire Rance Émeraude.
Avec une capacité de 603 lits, l’hôpital de Dinan est un établissement de proximité centré sur les activités de médecine, de gynécologie-obstétrique et de prise en charge des personnes âgées. Il compte 7 plateaux techniques.
Un projet de fusion des 3 centres hospitaliers de Dinan, de Cancale et de Saint-Malo est en cours d’élaboration à la demande de l’ARS Bretagne. Cette fusion devrait officiellement voir le jour au 1er janvier 2020.
À l’occasion de la cérémonie des vœux au personnel hospitalier en janvier 2019, la chef de service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital de Saint-Malo a mis le feu aux poudres en déclarant que cette fusion ne pourrait avoir lieu que si la maternité de Dinan était fermée, ou du moins si elle ne pratiquait plus d’accouchements.
Cette déclaration a suscité un vif émoi dans la communauté médicale dinannaise, chez les personnels de l’hôpital, auprès de la population locale et chez les élus du pays de Dinan, bien entendu.
Le territoire de santé a enregistré 2 457 naissances en 2017, dont près de 700 dans la seule maternité de Dinan, contre 778 en 2014. Certes, seules 59 % des parturientes du bassin de vie de Dinan accouchent à la maternité de Dinan, mais des marges de manœuvre existent pour faire augmenter ce taux, notamment en proposant des services complémentaires comme l’accouchement naturel.
Par ailleurs, si la situation financière de l’hôpital de Dinan est assez difficile – hausse des dépenses de gestion de 1 % chaque année depuis 2014, augmentation des charges de personnel de 1,7 % en moyenne annuelle, endettement croissant, déficit du service gynécologie-obstétrique –, des efforts de redressement ont été conduits en partenariat avec l’ARS.
Il semble par ailleurs que l’ARS soutienne le maintien de la maternité de Dinan et qu’elle souhaite que des investissements soient réalisés pour renforcer l’attractivité de la maternité.
Monsieur le secrétaire d’État, il est indispensable de rassurer les personnels et la communauté médicale de l’hôpital de Dinan, la population, ainsi que les élus locaux : quel est l’avenir de la maternité de Dinan ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Michel Vaspart, le socle populationnel de votre territoire permet d’envisager le maintien à Dinan d’un centre hospitalier de référence attractif, en mesure de couvrir les besoins des patients.
L’objectif est effectivement de conforter le Groupement hospitalier de territoire, le GHT, et de tendre vers la fusion des établissements, afin de renforcer la démographie médicale et de permettre une répartition et une graduation des soins adaptées aux besoins du territoire et de ses populations.
C’est dans ce cadre que l’agence régionale de santé, en liaison étroite avec les trois présidents des conseils de surveillance, respectivement maires des trois communes, avec la direction du GHT et les trois présidentes des commissions médicales d’établissement, a décidé d’acter cette fusion, qui doit s’appuyer sur la construction d’un projet médical partagé.
Ce projet s’inscrit dans le cadre d’une situation financière du Centre hospitalier de Dinan effectivement dégradée, vous l’avez rappelé, et doit permettre de développer son activité.
Concernant la filière périnatalité, le projet médical partagé du Groupement hospitalier de territoire Rance Émeraude, approuvé par le directeur général de l’ARS Bretagne en 2017, affiche trois objectifs : assurer l’accès géographique aux soins dans deux bassins relativement étendus ; veiller à assurer la sécurité de la prise en charge sur les deux sites existants ; formaliser une réelle collaboration entre les deux sites.
Le projet de territoire, et j’en viens à votre question précise, monsieur le sénateur, ne remet aucunement en cause l’avenir de la maternité de Dinan, ce que confirme le deuxième projet régional de santé publié par l’ARS en juin 2018. Ce dernier prévoit pour le territoire de Saint-Malo-Dinan deux maternités. Par ailleurs, la sécurité et la qualité des soins n’ont pas été mises en cause.
Enfin, la part des accouchements réalisés à Dinan, bien qu’elle ait connu une baisse de 13 % entre 2014 et 2017, se situe en réalité dans le même ordre de grandeur que la moyenne du département des Côtes-d’Armor et du territoire de Saint-Malo-Dinan sur la même période, qui a été, elle, de 11 %. En outre, elle correspond encore en 2018 à plus d’un tiers des accouchements réalisés sur le territoire concerné.
Le projet de territoire vise ainsi à conforter l’image de la maternité de Dinan, qui dispose d’un véritable potentiel de développement, et à donner plus de visibilité aux futurs parents sur l’offre proposée par l’établissement.
création de places supplémentaires dans les établissements publics accueillant des personnes âgées dépendantes
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, auteure de la question n° 702, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Monsieur le secrétaire d’État, alors que la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement a apporté des améliorations sensibles pour la prise en charge de nos aînés dépendants à domicile, le sujet de la prise en charge en établissement reste pendant. Lorsque le maintien chez soi a atteint ses limites, les familles sont trop souvent, hélas ! confrontées à la difficulté de trouver une place en Ehpad.
Aussi aimerais-je savoir quels moyens le Gouvernement entend dégager afin d’autoriser la création de places supplémentaires dans ces établissements, singulièrement dans les territoires tels que mon département de la Haute-Vienne, où les besoins sont les plus criants au regard de la pyramide des âges, et ce afin d’accueillir convenablement les personnes âgées en situation de grande dépendance qui ne peuvent malheureusement plus rester à leur domicile.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Perol-Dumont, en 2050, on le sait, car cela suscite un certain nombre de débats, près de 5 millions de Français auront plus de 85 ans, soit trois fois plus qu’aujourd’hui. Le nombre d’aînés en perte d’autonomie aura pour ainsi dire doublé.
Votre question porte donc sur un défi majeur qui nous concerne tous et que notre société doit relever aujourd’hui : comment bien accompagner nos aînés demain ?
Le rapport remis par Dominique Libault le 28 mars dernier aborde ce sujet dans tous ces aspects.
Comment améliorer la qualité de prise en charge des personnes ? Comment faire en sorte que chacun puisse choisir librement où il vieillira, sans que la question financière soit le premier critère, sinon ce ne serait plus un choix, sans avoir le sentiment d’être un fardeau pour ses proches ? C’est la question des aidants.
Vous posez en particulier la question du nombre de places en Ehpad et de leur accessibilité, mais la difficulté est aussi, et parfois surtout, celle du coût de l’entrée en Ehpad pour les personnes, cette question renvoyant à celle des financements publics apportés aux Ehpad comme aux personnes âgées.
Dans son rapport, Dominique Libault aborde dans le détail ces questions et formule des propositions ambitieuses.
Des mesures fortes ont également été engagées dès 2018, je le rappelle, avec une feuille de route destinée à répondre très vite à l’urgence qui s’exprimait dans ces établissements.
Les principales mesures de cette feuille de route portaient bien entendu sur le financement des Ehpad : moratoire dans la mise en œuvre de la convergence du tarif dépendance, accélération a contrario de la convergence sur le tarif soins pour permettre aux établissements de recruter plus de personnels soignants.
Aujourd’hui, sur la base des propositions de Dominique Libault, nous devons répondre à un double enjeu d’accessibilité et d’hétérogénéité de l’offre, à domicile comme en établissement. C’est donc à une réelle transformation de l’offre entre domicile et Ehpad que nous devons nous atteler, pour trouver la solution la plus adaptée aux besoins et aux budgets de chacun de nos aînés.
Pour cela, des mesures structurantes devront être prises dans une grande loi, laquelle sera présentée en conseil des ministres à l’automne, conformément à la volonté annoncée et réaffirmée du Président de la République. Les débats parlementaires seront ainsi l’occasion d’aborder prochainement, et dans le détail, ces sujets majeurs pour l’avenir de notre société.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, pour la réplique.
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. J’entends votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, mais la réalité, c’est que, actuellement, les demandes de création de places portées par les conseils départementaux se heurtent très souvent – trop souvent ! – au refus des ARS, qui ne disposent pas des moyens financiers suffisants pour autoriser la création de lits. Les listes d’attente s’allongent et les familles sont dans le plus grand désarroi. Nous pouvons tous ici en témoigner, nous en recevons régulièrement.
Si le sujet du coût du reste à charge, vous l’avez évoqué, est explosif, celui des délais d’attente avant d’obtenir une place en établissement ne l’est pas moins. Les deux appellent conjointement une réponse rapide sur les moyens précis, car c’est bien une question de moyens financiers, que le Gouvernement entend consacrer à la solidarité générationnelle.
Il est essentiel, monsieur le secrétaire d’État, que la loi annoncée prenne en compte la question du financement et qu’elle apporte des solutions pérennes pour que les familles ne soient pas pénalisées par une double peine : la difficulté à trouver une place, celle ensuite à faire face financièrement.
C’est toute la question de la solidarité et de la prise en charge de la solidarité à l’échelon national qui est posée et à laquelle cette loi devra répondre. Or, pour l’instant, cette solidarité repose beaucoup trop sur les départements.
nécessité de reconnaissance des auxiliaires de vie
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, auteure de la question n° 709, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Martine Berthet. Monsieur le secrétaire d’État, le rapport Libault remis à Mme la ministre des solidarités et de la santé le 28 mars dernier pointant fortement la nécessité de mettre en œuvre un plan national pour les métiers du grand âge, permettez-moi de vous parler ce matin de la situation d’extrême urgence dans laquelle se trouvent les structures d’aide à domicile en zone de montagne. Celles-ci sont en effet confrontées à une baisse plus qu’importante de leurs effectifs salariés, la rémunération de ces personnels étant déconnectée de la réalité et des nécessités de leur travail.
C’est ainsi que l’ADMR – pour Aide à domicile en milieu rural – de Bozel, en Savoie, vient d’être confrontée au départ de 26 auxiliaires de vie sur 30, sans qu’il ait été possible de les remplacer. Ces baisses importantes de personnels et leurs conséquences sur la prise en charge des patients ont conduit à la démission de l’ensemble du conseil d’administration de cette antenne du réseau ADMR le 9 février dernier. Celle-ci est, dans l’attente, gérée par sa fédération départementale, mais le problème du recrutement reste intact.
En premier lieu, ces départs s’expliquent notamment par le planning à la minute, source de beaucoup de stress et de précipitation. Parallèlement, la rémunération n’est pas attractive, alors même que ces professionnels ont de lourdes responsabilités.
En Savoie, particulièrement en Tarentaise, la question de la rémunération est d’autant plus primordiale que le coût de la vie en station est important, mais également car cette vallée connaît une situation de quasi-plein emploi.
En second lieu, et cela constitue un élément majeur, le montant des frais kilométriques n’est pas adapté à nos zones montagneuses où les déplacements se comptent en temps et non en kilomètres, d’autant que ceux-ci ne sont désormais plus pris en compte pour les trajets retours.
Alors que les Ehpad sont surchargés, qu’il est indispensable de garder nos personnes âgées le plus longtemps possible dans leur environnement familial, que les classes de formation ouvertes n’arrivent plus à être remplies, il devient plus qu’urgent de reconsidérer le mode de recrutement, la rémunération et les conditions de travail des auxiliaires de vie.
Aussi, je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d’État, dans quels délais sera nommée la personne chargée des métiers du grand âge annoncée par Mme la ministre et si, dans le séquençage des mesures présentées, celle qui concerne les métiers du grand âge sera une priorité.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Berthet, le Gouvernement partage votre préoccupation sur la situation des salariés du secteur de l’aide à domicile, secteur qui connaît un fort déficit d’attractivité. Agnès Buzyn avait ainsi annoncé, le 30 mai 2018, lors de la présentation de la feuille de route pour les personnes âgées, une refonte du système de financement des services à domicile.
Les travaux menés en concertation avec les acteurs ont bien avancé et le rapport remis par Dominique Libault à l’issue de la concertation « grand âge et autonomie » qu’il a pilotée entre octobre 2018 et mars 2019, que vous avez évoqué, s’est appuyé sur ces travaux et sur les propositions de schéma de financement rénové pour faire des propositions ambitieuses et améliorer la qualité du service et l’attractivité pour les salariés du secteur. Ce rapport évoque justement les difficultés rencontrées par les professionnels que vous avez soulevées, à savoir la durée d’intervention, le temps de déplacement et les indemnités kilométriques, notamment dans certaines zones spécifiques.
Nous devrons désormais travailler sur la base du rapport à la meilleure façon de procéder pour que les financements apportés au secteur permettent réellement de mieux rémunérer les personnels et d’améliorer l’attractivité du secteur.
Au-delà de ces sujets sur l’aide à domicile, le Gouvernement a indiqué vouloir engager rapidement un grand plan Métiers pour revaloriser tous les métiers du grand âge. Il s’agit de travailler notamment sur quatre leviers de changement majeurs concernant les métiers du grand âge.
Le premier concerne les effectifs, qui doivent augmenter pour accroître le temps de présence auprès des personnes. Le deuxième a trait à la prévention de la pénibilité du travail. Le troisième porte sur les formations et les compétences, qui doivent évoluer pour mieux préparer les professionnels aux attentes nouvelles. Cette montée en compétence, cette évolution des métiers devront s’accompagner, me semble-t-il, de revalorisations salariales. Enfin, quatrième levier, des perspectives de carrière diversifiées doivent être ouvertes à ces professionnels.
À cette fin, je vous réaffirme l’engagement de Mme la ministre de la solidarité et de la santé : une personnalité qualifiée sera nommée très rapidement, sans que je puisse vous communiquer plus précisément la date, pour animer toutes les parties prenantes concernées par cette question des métiers du grand âge.
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour la réplique.
Mme Martine Berthet. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le secrétaire d’État. J’insiste sur le fait que les structures, qu’elles soient publiques ou privées, attendent la réalisation concrète des annonces qui ont été faites. Elles comptent sur vous pour que celles-ci n’en restent pas au seul stade de l’annonce.
application du plan pauvreté en outre-mer
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, auteur de la question n° 561, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
M. Dominique Théophile. Monsieur le secrétaire d’État, le 13 septembre 2018, le Président de la République présentait les grandes lignes de la stratégie nationale de lutte contre les « inégalités de destin » et annonçait que 8 milliards d’euros seraient consacrés à sa mise en œuvre. Je salue plusieurs des initiatives de ce plan, notamment celles qui touchent à la protection de la petite enfance et au soutien apporté aux crèches : ce sont des sujets qui me sont chers et importants pour nos territoires.
Toutefois, aucune mention n’a été faite des outre-mer dans ce discours affirmant qu’il fallait « faire plus pour ceux qui ont moins ». La pauvreté y est pourtant bien plus massive qu’en Hexagone puisqu’elle touche une personne sur cinq en Martinique et huit personnes sur dix à Mayotte, par exemple. Une déclinaison classique du plan est prévue dans les territoires ultramarins comme dans les autres collectivités, mais, au-delà, aucune mesure prenant acte de cette situation particulière ne semble avoir été décidée.
Aussi faut-il rappeler que les revenus de solidarité active, dits RSA, versés par les conseils départementaux d’outre-mer ne sont pas compensés par l’État dans leur intégralité. Le nombre de personnes au RSA représente ainsi près de 22 % de la population en Guadeloupe. Si de nouvelles charges sont attribuées aux départements dans le cadre du plan national, il sera nécessaire de prendre en compte les coûts existants.
Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous expliciter les modalités de déclinaison du plan Pauvreté dans les outre-mer ? Des mesures spéciales sont-elles prévues pour ces territoires ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Théophile, vous le savez, et j’espère vous en convaincre si tel n’était pas le cas, la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté prévoit un investissement fort de l’État dans les outre-mer. Les spécificités ultramarines ont été pleinement prises en compte, dès le départ, lors de son élaboration et de sa conception.
Il en est ainsi de l’île de la Réunion, retenue comme territoire démonstrateur, avec qui nous sommes en train de finaliser l’élaboration de la convention de lutte contre la pauvreté et d’accès à l’emploi, ou encore de la Guadeloupe, sur la base du volontariat, qui pourra dans les mois à venir faire l’objet d’une convention ad hoc. Celle-ci traduira l’investissement nouveau de l’État en matière de prévention et de lutte contre la pauvreté, aux côtés du conseil départemental. Près de 3 millions d’euros sont ainsi prévus en 2019.
Cette convention portera sur deux volets : d’une part, des engagements sur les objectifs « socles » de la stratégie, avec la prévention des sorties dites « sèches » de l’aide sociale à l’enfance, la création des référents de parcours pour un meilleur accompagnement des RSA, le lancement du premier accueil social inconditionnel et l’amélioration de l’orientation et de l’insertion des allocataires du RSA ; d’autre part, des initiatives nouvelles portées par votre collectivité permettant d’apporter des réponses spécifiques aux besoins de votre territoire.
Au-delà de cette contractualisation entre l’État et le département, le déploiement de la stratégie Pauvreté sur l’île de la Guadeloupe, porté par les territoires, se poursuivra.
La conférence régionale des acteurs se tiendra le 15 avril prochain. Cette rencontre devra permettre une appropriation des enjeux de la stratégie et la mise en place de l’animation de cette stratégie par les acteurs concernés, car c’est bien la spécificité et la force de la méthode adoptée par le ministère et son délégué interministériel, à savoir les collectivités territoriales, les associations et les personnes en situation de précarité. Ensuite, sur la base d’un diagnostic local coconstruit, des priorités seront définies en matière d’enfance, de jeunesse, d’insertion ou d’accès au droit.
Nous déploierons les mesures de la stratégie avec l’ouverture de nouvelles places de crèche sur l’île, la création de points conseil budget pour lutter contre le surendettement, le lancement des petits-déjeuners dans les écoles volontaires, la création de centres sociaux, le renforcement des interventions des éducateurs spécialisés, l’aide aux communes pour la tarification sociale dans les cantines, le développement de centres de santé ou encore le déploiement de la garantie jeunes pour les jeunes les plus éloignés de l’emploi.
Enfin, je vous confirme qu’aucune charge nouvelle ne sera attribuée aux départements. Au contraire, des moyens nouveaux seront apportés aux outre-mer par la stratégie Pauvreté dans l’objectif effectivement de faire plus pour ceux qui ont moins.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour la réplique.
M. Dominique Théophile. Je vous remercie de ces explications, monsieur le secrétaire d’État. La situation, vous le savez, est quelque peu dégradée dans nos territoires. Je serai particulièrement attentif aux conclusions de la conférence des acteurs. Vos dernières annonces, que je suivrai attentivement, me semblent plus positives.
inscription de la verrerie de givors sur la liste des sites amiantés
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, auteure de la question n° 676, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le secrétaire d’État, je débuterai mon intervention par un chiffre : 92 cas de cancers détectés parmi les 208 anciens verriers de Givors interrogés. Si cela ne suffisait pas à vous convaincre, j’ajouterais celui des maladies diverses contractées en rapport avec l’exposition des salariés aux matières toxiques utilisées par la verrerie de Givors, soit 82 !
C’est énorme. Pourtant, seize ans après la fermeture de cette verrerie, les salariés sont toujours en attente d’un reclassement du site en zone amiantée… Ce reclassement permettrait à ces femmes et à ces hommes d’obtenir un certificat d’exposition, de bénéficier d’un suivi post-professionnel et, le cas échéant, de voir reconnaître leurs pathologies comme des maladies professionnelles, accompagnées d’une indemnisation du préjudice d’anxiété pour les expositions diverses.
À l’heure actuelle, l’absence de certificat d’exposition aux agents chimiques cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques, dits CMR, constitue une entrave à leurs démarches de demande de suivi et de reconnaissance en maladies professionnelles auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie, la CPAM.
Monsieur le secrétaire d’État, sur les 645 anciens verriers membres de l’association des victimes, 211 sont décédés et 73 sont aujourd’hui malades. L’âge moyen des décès est de 70,5 ans, soit neuf ans de moins que la moyenne des hommes en France. Douze maladies professionnelles ont été reconnues, mettant en cause l’exposition au benzène, à l’arsenic, à la silice, à l’amiante, aux huiles minérales, aux hydrocarbures et aux solvants.
Plus que ce constat chiffré, je déplore le véritable parcours du combattant de ces victimes, souvent seules face à leurs maladies, à qui l’on veut faire croire qu’elles sont les seules responsables en accusant leur hygiène de vie, leurs radios des poumons ayant d’ailleurs étrangement disparu des dossiers médicaux. Au-delà de la question humaine, c’est d’une question de justice sociale et de rétablissement des responsabilités qu’il s’agit.
Dans cette perspective et compte tenu de ces éléments, quand le Gouvernement compte-t-il prendre des dispositions afin de reclasser cette zone mortifère en site amianté ? Ce reclassement, s’il n’a pas le pouvoir de soigner, aurait au moins le mérite d’apaiser la souffrance des victimes et de leurs familles.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Cécile Cukierman, vous avez voulu appeler notre attention sur la situation des verriers de Givors, dont vous avez rappelé le parcours difficile et dramatique pour la plupart d’entre eux.
Dès 2012, la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail, ou Carsat, de Rhône-Alpes, qui avait été sollicitée par les représentants des salariés des verreries dans le cadre du comité technique régional n° 3, a mené une étude afin d’évaluer l’exposition aux produits chimiques du personnel en verrerie de verre creux de la région et de définir les mesures de prévention adaptées, qu’il s’agisse de la formation des personnels à l’usage des équipements de protection individuelle ou d’une meilleure information sur les risques.
Ces résultats ont été diffusés auprès de l’ensemble des acteurs de la prévention : les entreprises concernées, via le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, puis leur comité social et économique, ainsi que les préventeurs de la Carsat et les équipes des centres de consultations de pathologies professionnelles de la région.
Par ailleurs, les anciens salariés du régime général ayant été exposés à des substances ou des procédés cancérogènes pendant leur vie professionnelle peuvent, sur leur demande, bénéficier d’un suivi médical post-professionnel. Ce suivi, pris en charge par le Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, est accordé par la Caisse primaire d’assurance maladie sur production par l’intéressé d’une attestation d’exposition remplie par l’employeur et le médecin du travail.
Toutefois, ce qui arrive souvent, dans le cas où l’assuré est dans l’impossibilité de fournir cette attestation, notamment parce que l’entreprise a disparu, l’assurance maladie se chargera de vérifier l’effectivité de l’exposition avant de proposer à l’intéressé le suivi médical adapté. Les anciens salariés des verreries de Givors qui le souhaitent peuvent ainsi prendre contact avec leur caisse afin de mettre en place ce suivi, si tel n’est pas encore le cas.
En outre, les salariés et anciens salariés peuvent demander la reconnaissance du caractère professionnel de leur maladie. Ils disposent pour ce faire d’un délai de deux ans à compter du certificat médical les informant du lien possible entre leur maladie et leur activité professionnelle ou à compter de la date de cessation d’activité si elle est postérieure.
Enfin, la convention d’objectifs et de gestion 2018-2022 de l’assurance maladie-risques professionnels prévoit d’améliorer l’accompagnement des personnes dans leurs démarches visant à la reconnaissance du caractère professionnel de leur maladie, ayant conscience de l’enjeu. Une expérimentation sera ainsi lancée, d’ici à l’été 2019, pour mieux informer les personnes sur l’origine potentiellement professionnelle de leur pathologie. En outre, l’information sur la procédure de reconnaissance sera améliorée, en mettant en place un accueil physique ou en diffusant un guide des droits et démarches des assurés, afin d’annihiler à l’avenir les parcours du combattant que vous évoquiez.