M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Madame la secrétaire d’État, cet amendement a fait l’objet de nombreux échanges entre nous, entre les services et avec bon nombre de collègues ici présents.
Vous avez rappelé l’accident qui a eu lieu dans le Gers, accident qui aurait pu être dramatique, nous en convenons.
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Toutefois, ce qui importe, c’est l’interprétation qui sera faite demain de la mesure proposée.
Cet accident sert en quelque sorte de référence, même si l’on sait que d’autres accidents sont malheureusement à déplorer ici ou là. Parallèlement aux suites judiciaires de cette affaire, le Gouvernement exprime, par le biais de cet amendement, une préoccupation légitime, que partage le monde de la chasse, concernant les sanctions administratives applicables en matière de détention de permis de chasser.
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Soyons réalistes, nous avons tous des responsabilités à ce niveau, notamment les chasseurs présents dans l’hémicycle.
Il paraît judicieux que la suspension et la rétention administratives puissent être décidées sans délai par l’autorité administrative, indépendamment de l’enquête judiciaire et des délais propres qui lui sont attachés – c’est ce qui s’est produit pour l’accident du Gers.
Toutefois, l’amendement étant en grande partie commandé par un fait divers, la commission a voulu se montrer prudente et a voulu que soit défini un cadre juridique adéquat, qui ne serait pas de nature à pénaliser indument les chasseurs de façon préventive. C’est pour cette raison qu’elle a tenu à ce que soit explicitement qualifié de « grave » l’incident matériel ayant pu mettre en danger la vie d’autrui et pouvant conduire à la suspension et la rétention administratives.
L’ajout de ce terme permet d’être vigilant, de donner une autre image du monde de la chasse et de réprimander ceux qui ont commis un délit, qui, bien souvent, n’est pas intentionnel, mais met en péril la vie d’autrui.
En conséquence, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. J’ai écouté avec attention les propos de mon collègue Jean-Claude Luche et je suis sur la même longueur d’onde que lui.
Permettez-moi toutefois de rappeler que le nombre des accidents de chasse est en nette diminution depuis des années. Si, avec la recrudescence du nombre de sangliers, on le rapportait au nombre de balles tirées il y a dix ans, il serait encore moindre. Il est même anecdotique. Certaines activités causent beaucoup plus de dommages, même mortels, aux personnes que les accidents de chasse. Je citerai à titre d’exemple les collisions entre les personnes âgées et les trottinettes sur les trottoirs parisiens, mais ces accidents sont beaucoup moins médiatisés. Dès que se produit un accident de chasse, les médias s’emparent du sujet, non pas spécialement pour apporter de l’information, mais pour, une fois de plus, en rajouter une couche antichasse. Telle est la remarque liminaire que je tenais à faire.
Sur le fond, vous avez tout à fait raison, madame la secrétaire d’État. Nous sommes confrontés à un phénomène de société. Le grand public est saisi, et il faut réagir. En approuvant et en votant en faveur de cet amendement, les chasseurs témoignent de leur esprit de responsabilité et de leur volonté d’aller de l’avant.
Nous en avons discuté et Jean-Claude Luche l’a dit, vous avez respecté, je le signale, l’engagement que vous aviez pris en introduisant le terme « grave ».
Dans ces conditions, je ne peux qu’inciter tous les membres de mon groupe à voter en faveur de votre amendement sans arrière-pensée.
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.
M. François Patriat. J’irai dans le sens de Jean-Noël Cardoux.
Adopter cet amendement revient à défendre la chasse. S’il y a bien un sujet sur lequel nous sommes tous toujours critiqués, vilipendés, voire, parfois, menacés de nous faire disparaître, c’est celui-là ! Chaque fois que se produit un accident de chasse, l’opinion publique s’empare aussitôt du sujet. Un seul accident suffit à créer un émoi terrible.
La chasse – je suis chasseur, mais aussi cycliste – n’est pas un sport banal ; c’est un sport qui permet à des personnes de porter des armes à feu, de les transporter, de tirer des balles. Jean-Noël Cardoux a tout à fait raison pour ce qui concerne les statistiques et la logique suivie, mais il n’empêche qu’un accident de chasse, c’est toujours un accident de trop. Les chasseurs ont pris en compte les mesures de sécurité – ils le font déjà depuis plusieurs années. Ces mesures ont été multipliées, et elles portent aujourd’hui leurs fruits. On voit qu’il y a une forme d’acceptation de toutes les dispositions prises. Celle qui nous est aujourd’hui proposée est le fruit d’un accord entre les chasseurs, et je remercie la commission de l’avoir soutenue.
C’est la raison pour laquelle j’appuie totalement le Gouvernement, qui a la volonté de montrer par le biais de ce projet de loi, qui traite non pas de la chasse, mais de la biodiversité, que la chasse peut exister dans notre pays, qu’elle a le droit d’être défendue et qu’elle est responsable.
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne Chain-Larché, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Nous avons travaillé en bonne intelligence, et nous en sommes très heureux.
Nous savions que vous souhaitiez, madame la secrétaire d’État, apporter des garanties supplémentaires en termes de sécurité – nous avons-nous aussi largement contribué à le faire – et s’agissant des sanctions qui peuvent être infligées à ceux qui, malheureusement, mettent la vie des uns et des autres en danger.
Dans le cadre des autres articles que contient ce projet de loi, nous avons souhaité apporter notre pierre. Ainsi, nous avons ajouté un délit d’entrave à l’égard de ceux qui mettent en danger la vie des promeneurs, la vie des chasseurs et leur propre vie. Ce sujet sera abordé un peu plus tard lors de l’examen d’un amendement de Jean-Noël Cardoux. Toutes ces mesures permettent d’assurer un bon équilibre entre le respect d’autrui par les chasseurs et le respect d’autrui vis-à-vis des chasseurs. Tels sont les éléments que je souhaitais ajouter.
J’apporte bien sûr mon entier soutien à cet amendement. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Kerrouche applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je soutiens également cet amendement, dont le dispositif, comme cela a été rappelé, dans l’intérêt de la chasse et des chasseurs, est intransigeant sur la sécurité et la manière d’exercer la chasse.
Je demande néanmoins un petit peu de respect pour les victimes. Cela fait plusieurs fois que je l’entends, vous comparez une victime d’un accident de trottinette à quelqu’un qui se prend une balle dans la tête quand il fait du VTT ou de la randonnée. Je vous invite à un peu plus de mesure, monsieur Cardoux ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Cela allait sans dire !
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Les chasseurs ont fait un effort important pour limiter les accidents, dont le nombre a considérablement diminué au cours des années passées.
Toutes les mesures allant dans le sens d’une meilleure responsabilisation collective de la chasse et des pratiques de chasse vont dans le bon sens et permettent une meilleure transparence de ces pratiques et, sans doute, une meilleure compréhension.
En l’espèce, cet amendement constitue une avancée, et nous le soutenons.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Perrot, pour explication de vote.
Mme Évelyne Perrot. Le groupe Union Centriste soutient cet amendement, qui va dans le sens de la sécurité.
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour explication de vote.
M. Franck Menonville. Le groupe du RDSE le soutient également.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2 bis.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 148 rectifié est présenté par M. Cardoux, Mme Chauvin, MM. Grand, Le Nay et Vaspart, Mme Ramond, MM. Mayet et Panunzi, Mmes Estrosi Sassone et Bruguière, M. Danesi, Mme Thomas, MM. Regnard et Lefèvre, Mme Deroche, MM. Menonville, Milon, A. Marc, Pointereau, Calvet, Pellevat et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Savary, Bascher, Bizet et Bouchet, Mmes Puissat et Bories, MM. D. Laurent, Sido et B. Fournier, Mme Lopez, MM. Buffet et Decool, Mmes Berthet et Deseyne, M. Rapin, Mmes Lassarade et Gruny, MM. Priou, Charon, Pierre, Laménie et Cuypers, Mme Lamure et MM. Raison, Gremillet, Revet et Poniatowski.
L’amendement n° 191 rectifié est présenté par MM. Prince, D. Dubois, Canevet et Janssens et Mme Guidez.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la sous-section 3 de la section 1 du chapitre VIII du titre II du livre IV du code de l’environnement, il est ajouté un article L. 428-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 428-3-…. – Est puni d’un an d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait de s’opposer à un acte de chasse en commettant un ou plusieurs des faits suivants :
« – empêcher, entraver ou gêner l’acte de chasse ou le déroulement d’une action de chasse en cours, individuelle ou collective, par quelque moyen ou agissement que ce soit ;
« – utiliser des produits ou substances destinés à empêcher l’action normale des chiens de chasse ou à les détourner de leur utilisation cynégétique ;
« – bloquer les véhicules des chasseurs, leurs chiens ou leurs chevaux afin d’entraver une action de chasse à venir ou en cours. »
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 148 rectifié.
M. Jean-Noël Cardoux. Monsieur le président, permettez-moi de répondre tout d’abord à M. Gontard. J’ai le sens de la mesure. L’année dernière, se sont produits trois accidents mortels de chasse sur des non-chasseurs, contre cinq accidents mortels de personnes âgées…
M. Guillaume Gontard. Non, on ne peut pas comparer !
M. Jean-Noël Cardoux. Si, monsieur ! Ce n’est pas la peine de dire « non », lisez les statistiques !
M. Guillaume Gontard. Je ne dis pas « non », je dis que l’on ne peut pas faire cette comparaison !
M. Jean-Noël Cardoux. Ouvrez internet et consultez Google : cinq accidents mortels de personnes âgées par collision avec des trottinettes !
Mme Éliane Assassi. Et la voiture ? L’avion ? Le train ?
M. Jean-Noël Cardoux. Vous n’êtes jamais d’accord !
Mme Éliane Assassi. Comparaison n’est pas raison !
M. Jean-Noël Cardoux. Vous ne savez que hurler !
Mme Éliane Assassi. Sur la route aussi, il y a des morts !
M. Jean-Noël Cardoux. Allez consulter ces statistiques ! Mais passons aux choses sérieuses.
Anne Chain-Larché vient d’évoquer le délit d’entrave, et je souscris tout à fait à ses propos. Les chasseurs font des efforts importants, on vient de le voir, en matière de sécurité, mais il faut aussi que les autres en fassent autant, même s’ils sont antichasse – je conçois parfaitement que, d’un point de vue philosophique, on condamne la chasse. Dès lors que la chasse est une activité qui se pratique paisiblement en respectant les règles, elle a le droit de se développer.
Or, depuis des années, on constate des entraves permanentes concernant la vénerie en particulier – mais d’autres secteurs sont concernés –, qui vont jusqu’à des attaques à l’intégrité des personnes et des animaux. Certains antispécistes perturbent les chasses à courre ; ils ont provoqué la chute, en Bretagne, d’un homme de vénerie à cheval qui a eu deux membres fracturés et est resté des mois à l’hôpital. Parallèlement, ces mêmes personnes tentent d’empoisonner les chiens qui chassent.
On peut être antichasse et plaider en faveur des animaux, mais il faut mettre ses actes en corrélation avec ce que l’on préconise.
Je le répète, la vénerie n’est pas le seul secteur concerné. Je l’ai dit dans mon intervention liminaire, dans l’est de la France où la chasse à l’affût à partir d’un mirador se pratique beaucoup, les installations sont sabotées, quitte à provoquer des accidents corporels. Sur les littoraux où nombre de chasseurs chassent le gibier d’eau à la hutte, les huttes sont vandalisées, voire, parfois, brûlées. Ce sont là des entraves.
Nous sommes dans un pays de droit : chacun a le droit d’exprimer ses opinions et de dire qu’il n’est pas d’accord, mais personne n’a le droit d’empêcher quiconque par la force et la violence d’exercer une activité légalement autorisée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Prince, pour présenter l’amendement n° 191 rectifié.
M. Jean-Paul Prince. La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres : on ne peut impunément empêcher la chasse.
Le reclassement en délit est devenu nécessaire pour permettre aux agents chargés de la police de la chasse, ainsi qu’aux forces de l’ordre, d’intervenir pour sanctionner les auteurs d’obstructions violentes dont sont victimes les chasseurs.
La répression de l’acte d’obstruction à un acte de chasse, considéré comme un délit, suppose d’adopter un texte de loi, conformément à l’article 111-3 du code pénal, et de supprimer par décret en Conseil d’État l’article R. 428-12-1 du code de l’environnement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Je n’ai rien à ajouter à ce que viennent de rappeler M. Prince et le président Cardoux. Je ferai miens leurs arguments, puisque l’ensemble des membres de cet hémicycle et de la commission les partagent.
La commission émet évidemment un avis favorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur Cardoux, vous avez déposé le 9 octobre dernier une excellente proposition de loi tendant à réprimer les entraves à l’exercice des libertés ainsi qu’à la tenue des événements et à l’exercice d’activités autorisés par la loi. Elle pose la question de savoir comment on peut créer un délit d’entrave sur toutes les activités légales, qui doivent pouvoir être exercées de façon paisible dans ce pays et qui, pour une raison ou une autre, font l’objet d’entraves.
Je soutiens l’inscription rapide de ce texte à l’ordre du jour des assemblées, parce que je pense qu’il est de nature à permettre de traiter la question que vous posez aujourd’hui. La chasse est évidemment une activité légale qui doit pouvoir être exercée en toute tranquillité, mais il me semble que le sujet, qui soulève une question juridique importante, peut et doit être traité de façon transversale.
En attendant, une contravention de cinquième classe d’obstruction à la chasse existe déjà ; elle sanctionne à hauteur de 1 500 euros d’amende – montant qui peut être doublé en cas de récidive, soit 3 000 euros d’amende – les actes d’obstruction les plus graves.
Les faits que vous avez mentionnés, qui sont évidemment répréhensibles, peuvent être poursuivis selon des incriminations de droit commun, dès lors qu’il y a violence physique ou même en cas de menace. Le passage d’une contravention à un délit puni d’une peine d’emprisonnement peut présenter un intérêt procédural, mais peut aussi être considéré comme disproportionné.
Dès lors, le Gouvernement demande à leurs auteurs de bien vouloir retirer leurs amendements au profit de l’inscription rapide de la proposition de loi de M. Cardoux à l’ordre du jour des assemblées, afin qu’elles puissent en délibérer de manière transversale. (Marques de scepticisme sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. Je soutiens évidemment ces amendements.
Dans l’Oise, dans une circonscription que vous avez bien connue, madame la secrétaire d’État (Mme la secrétaire d’État opine.), des chasseurs – il s’agit de personnes âgées de soixante-dix ans, dont un élu de la République ! – sont tombés de leur cheval après avoir été désarçonnés par des individus organisés, agissant selon des méthodes que je qualifierai de terroristes, des méthodes qui ressemblent, aux dires de tous les spécialistes, à celles des Black Blocs. C’est la même chose : l’objectif est de blesser, de tuer, non pas l’animal, mais le chasseur ! Cela suffit ! Mon département en souffre.
Je le répète, je ne suis pas chasseur mais, au nom de la liberté, je défendrai toujours la liberté de chasser ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. le rapporteur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Genest, pour explication de vote.
M. Jacques Genest. Je soutiens bien entendu ces deux amendements.
Pour que la justice soit juste, il faut que la balance soit équilibrée. Or, actuellement, la balance va toujours dans le même sens. On vit dans une société où tous ceux qui sont contre tel ou tel projet ont raison : ils peuvent tout faire et tout casser. D’ailleurs, il s’agit souvent de grands défenseurs des libertés, enfin de la leur surtout…
Dans une société, il importe bien sûr de respecter les gens qui sont contre, mais il ne faut pas accabler sans arrêt, et en tout domaine, ceux qui sont pour, et les rendre responsables de tous les maux. Je pense en particulier aux propos d’une partie de l’hémicycle, que l’on retrouve dans les rues !
Mme Éliane Assassi. C’est un fantasme éveillé !
M. Jacques Genest. La chasse est populaire !
Mme Éliane Assassi. Qui vous dit que nous sommes contre la chasse ?
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne Chain-Larché, rapporteure pour avis. Nous vivons dans une société qui dérive et dans laquelle, quelle qu’en soit la raison et quel que soit le sujet, on surréagit.
Les manifestations actuelles contre la chasse, on les observe aussi contre les boucheries ; il y en aura bientôt contre tout !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Contre les agriculteurs !
Mme Anne Chain-Larché, rapporteure pour avis. Oui, les exemples sont multiples, et la situation va dégénérer.
Le droit existe, le droit de chasser en particulier, à la condition bien sûr que l’on chasse selon les normes et dans le respect du droit. On est justement en train de définir ce droit, notamment pour faire en sorte qu’il respecte la biodiversité, dont on sait bien que les chasseurs sont un acteur essentiel.
Si vous nous demandez de voter ce texte aujourd’hui, madame la secrétaire d’État, alors même que vous ne faites que promettre un financement ultérieur des mesures, nous acceptons de vous suivre.
Alors, quand nous, nous vous demandons d’envoyer un signal fort en direction d’individus qui font courir des dangers démesurés à eux-mêmes, d’abord, aux chasseurs, ensuite, mais aussi – il faut y penser – aux animaux, puisque les chevaux peuvent être blessés, et à n’importe quel promeneur, il faut le faire plutôt que de renvoyer ce sujet aux calendes grecques et à l’examen de la proposition de loi déposée par Jean-Noël Cardoux !
Nous vous adressons des signaux, madame la secrétaire d’État, preuve de notre compréhension, de notre souci de travailler en bonne intelligence et de notre volonté de recherche du consensus. Alors, s’il vous plaît, faites ce geste, d’autant que cela ne vous engage pas considérablement : si les choses doivent être améliorées par la suite, elles le seront dans le cadre de l’examen du texte de M. Cardoux. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. Non, madame la secrétaire d’État, je ne retirerai pas mon amendement, et je vais vous expliquer pourquoi.
D’abord, je vous remercie d’avoir fait référence à ma proposition de loi. Elle était inscrite à l’ordre du jour du Sénat au mois de décembre dernier, mais, compte tenu de ce qui se passait dans les rues de notre pays à cette époque-là, nous avons jugé plus sage de la retirer.
On nous a en effet accusés de faire de la provocation alors que, en fait, le texte ne visait pas du tout les manifestations des gilets jaunes ; il découlait simplement de ce qu’évoquait Mme Anne Chain-Larché, à savoir les attaques de boucheries, de charcuteries, de poissonneries par des mouvements autoritaires.
J’ai lu dans une revue agricole que certaines associations antispécistes appelaient à la désobéissance civile. À la désobéissance civile, j’y insiste ! Ce n’est pas admissible !
Bien sûr, on peut attendre que ma proposition de loi soit de nouveau inscrite à l’ordre du jour de notre assemblée. Dans le meilleur des cas, elle le sera en juin prochain. Mais ce n’est pas certain : je suppose en effet que notre ordre du jour sera engorgé de textes après la clôture du grand débat. Peut-être le sera-t-elle en septembre ? Il faudra ensuite qu’elle soit transmise à l’Assemblée nationale, puis inscrite à son ordre du jour : cela prendra donc un certain temps !
Si je maintiens mon amendement, c’est que j’ai parlé avec certains acteurs de la chasse, en particulier le président de la Société de vénerie, et les chasseurs de l’Est que j’ai rencontrés à Strasbourg dans le cadre de ma mission sur la régulation des populations de grand gibier, et que j’ai ressenti un grand désarroi.
Le président de la Société de vénerie m’a notamment dit que certains équipages, en particulier dans la région francilienne et en Bretagne, ne savent même pas s’ils auront envie de recommencer à chasser cet automne, tant ils ont peur d’un incident. Comme vous le savez, la vénerie est une chasse populaire, pour laquelle de nombreux suiveurs sont associés aux équipages : ces derniers craignent que l’un de leurs suiveurs ne commette un jour un geste inconsidéré. Il y a donc urgence !
Quant aux chasseurs de l’Est, ils nous disent vivre dans l’insécurité permanente et devoir surveiller les barreaux de leurs échelles de peur de faire une chute de quatre mètres de haut.
Le dispositif de mon amendement, s’il est adopté, sécurisera tous les chasseurs dès la rentrée prochaine. Ensuite, si ma proposition de loi est inscrite à l’ordre du jour – madame la secrétaire d’État, j’ai bien compris que vous y étiez favorable –, nous essaierons d’avancer, ce qui permettra de remettre à plat l’ensemble du système de répression des entraves à l’exercice d’activités autorisées. Mais, dans l’immédiat, je maintiens mon amendement !
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Madame la secrétaire d’État, revenez sur votre position ! Ne pas le faire et ne pas être favorable à ces amendements, c’est achever de nous convaincre – tout le monde le pense tout bas – que la création de cet office français de la biodiversité n’a d’autre objectif que de faire diminuer la pression de la chasse en France !
Ainsi, vous vous inscririez dans la droite ligne de ce que vous suivez par ailleurs, à savoir, encore une fois, le dogme environnementaliste et écologiste, qui s’invite dans la totalité de débats ! (M. Ronan Dantec et Mme Angèle Préville protestent.) On voit bien ce qui se passe aujourd’hui à l’AFB, l’Agence française pour la biodiversité. On le voit sur tout un tas de sujets, comme l’hydroélectricité : les décisions sont prises de façon dogmatique !
Être défavorable à ces amendements démontre ce que j’évoquais hier et dont je suis certain – c’est comme cela que je le ressens en tout cas : vous êtes en train d’appliquer à la chasse les recettes qui expliquent la situation de plus en plus préoccupante de l’agriculture aujourd’hui. Les chasseurs qui pourraient céder à ces belles sirènes en seront totalement déçus !
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.
M. Dominique de Legge. Je remercie Jean-Noël Cardoux d’avoir déposé l’amendement n° 148 rectifié, mais aussi de le maintenir.
Madame la secrétaire d’État, vous nous dites que la proposition de loi de notre collègue est excellente et appelez de vos vœux son examen au Parlement. Mais on a déjà donné !
M. Laurent Duplomb. Bien sûr !
M. Dominique de Legge. Que vaut la parole du Gouvernement ? Je me souviens de votre collègue ministre qui nous expliquait il y a quelque temps, la main sur le cœur, qu’elle était toute prête à prendre en considération la position du Sénat sur la proposition de loi relative au transfert des compétences eau et assainissement.
Je me souviens aussi d’une excellente proposition de loi sur les communes nouvelles, adoptée dans cette enceinte sur l’initiative de Françoise Gatel : la même ministre nous certifiait qu’il s’agissait d’une excellente initiative, qui serait reprise à l’Assemblée nationale. Or, après qu’il a été transmis à l’Assemblée nationale, ce texte n’a – comme par hasard – pas pu être inscrit à l’ordre du jour.
Alors, madame la secrétaire d’État, c’est bien gentil de faire des promesses, mais ces promesses ne sont plus crédibles aujourd’hui. Vous êtes en train de récolter ce que vous avez semé ; vous promettez toujours pour demain sans jamais respecter votre parole. C’est ça le problème !
Je le répète : je remercie Jean-Noël Cardoux, non seulement d’avoir déposé son amendement, mais aussi de le maintenir. Et rien ne vous interdit, madame la secrétaire d’État, de reprendre cette proposition de loi à votre compte, puisque vous venez de nous dire qu’elle était excellente. Mettez une fois pour toutes vos paroles en conformité avec vos actes ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme la rapporteure pour avis applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour explication de vote.
M. Franck Menonville. Je soutiens ces amendements, parce qu’ils assurent un meilleur équilibre à ce texte. En effet, on renforce ainsi la nécessaire obligation de sécurité liée à l’exercice de la chasse ; à l’inverse, nous devons absolument garantir les libertés inhérentes à la chasse, et ce dans un cadre réglementé.