M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Bertrand, pour la réplique.
Mme Anne-Marie Bertrand. Comprenez bien, madame la secrétaire d’État, que les salariés des entreprises concernées ont pleinement conscience de la nécessité de changer de modèle de consommation. Consommateurs, salariés, citoyens sont les mêmes personnes, et nous devons tous pouvoir, à défaut d’en être signataires, adhérer à ce pacte. En d’autres termes, cette transition écologique est l’affaire de tous et elle doit le rester !
M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat.
M. Cyril Pellevat. D’après la Banque mondiale, 2 milliards de tonnes de déchets sont produits par an dans le monde, dont 33 % ne seraient pas traités correctement. Le plastique est l’une des matières qui posent le plus de problèmes, étant difficile à recycler, comme cela a été rappelé. Les chiffres de 2016, pour la France, ont été évoqués ; au niveau mondial, ce sont 242 millions de tonnes de déchets plastiques qui ont été produites. Or seulement 9 % de ce volume est recyclé.
Le plastique mettant en moyenne quatre siècles à se dégrader – des exemples récents montrent que même le plastique dégradable ne l’est pas vraiment –, la majorité du plastique fabriqué par l’homme se trouve dans la nature, dans les décharges sauvages ou dans les océans, causant d’importants dommages à la biodiversité marine.
Si certains emballages plastiques ne se recyclent pas, c’est essentiellement en raison du coût de l’opération, soit que les produits, tels les pots de yaourt, par exemple, trop légers, ne contiennent pas assez de matière pour que le recyclage soit rentable, soit que le recyclage soit jugé trop complexe, comme dans le cas des jouets.
Nous devons réussir à recycler tous les emballages, y compris les pots de yaourt, les barquettes ou les sacs plastiques. À ce titre, je rejoins les propos tenus sur la nécessité de développer des solutions innovantes.
Élu de Haute-Savoie, département très touristique dans lequel vous vous êtes rendue, madame la secrétaire d’État, je suis fortement sensibilisé à cette problématique de la lutte contre la pollution plastique, que nous pouvons constater dans nos montagnes et nos lacs.
Mais il n’y a pas que le recyclage. En amont du recyclage, il reste beaucoup à faire.
La lutte contre le suremballage, qui concerne neuf produits sur dix et irrite les consommateurs, me semble ainsi essentielle. Nous devons aussi lutter contre le « jetable », tous ces produits à usage unique qui ne sont pas indispensables et pour lesquels il existe des alternatives.
Enfin, j’aimerais souligner l’importance de la sensibilisation des enfants à l’école. L’éducation à l’environnement est primordiale pour favoriser la prévention de la production des déchets. Les bons gestes en matière de recyclage peuvent être appris dès le plus jeune âge. Des supports pédagogiques ou équipements pour sensibiliser les enfants au recyclage existent ; j’en avais acheté lorsque j’étais maire. Ils pourraient être davantage développés. L’État pourrait-il s’engager à éduquer à l’environnement dans tous les établissements scolaires ? Sensibiliser la jeunesse au développement durable, notamment au recyclage, me semble être une voie intéressante, car les enfants pourront, à leur tour, éduquer leur entourage.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, votre question manifeste un souci sincère pour la lutte contre la pollution plastique et la protection de la nature.
L’objectif du Gouvernement est triple.
Il est, d’abord et avant tout, de supprimer les plastiques inutiles. Vous avez évoqué le suremballage ou les plastiques jetables. C’est exactement dans cette voie que nous nous engageons : nous avons déjà supprimé toute une série d’objets en plastique à usage unique et, dès l’année prochaine, ce seront les gobelets et couverts en plastique, par exemple, qui seront interdits.
Nous voulons ensuite développer massivement le recyclage, en mettant en place toute une série d’incitations visant à favoriser l’écoconception, mais aussi à améliorer la collecte des plastiques, afin qu’ils entrent plus largement dans la boucle vertueuse du recyclage. J’ai déjà parlé du lancement d’appels à manifestation d’intérêt de façon à identifier de nouveaux systèmes de collecte innovants, par exemple des systèmes de consigne.
Enfin, nous entendons encourager très largement le réemploi de certains objets en plastique.
Nous n’avons pas attendu le projet de loi qui sera présenté avant l’été pour commencer à agir. Nous avons ainsi lancé un pacte sur les emballages plastiques, qui réunit treize entreprises ayant pris des engagements très significatifs pour réduire drastiquement le suremballage et commercialiser des produits entièrement élaborés à partir de matières premières recyclées d’ici à 2025. Des ONG vérifieront l’avancée de la mise en œuvre de ce pacte.
La sensibilisation des enfants dans les écoles est absolument fondamentale. J’ai rencontré des maires ayant mené, aux côtés des écoles, des actions tout à fait remarquables en la matière. Le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, réfléchit actuellement à des mesures à mettre en œuvre pour encourager de telles initiatives. Pour ma part, au cours d’une visite de deux jours dans l’Ain, non loin du pôle de compétitivité dédié au plastique, j’ai pu étudier très concrètement ce que nous pourrions faire. Nous aurons l’occasion d’en reparler. Je serai ravie d’apprendre de vous, monsieur Pellevat, ce que vous avez fait dans votre municipalité.
Conclusion du débat
M. le président. Pour clore ce débat, la parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jean-Michel Houllegatte, pour le groupe socialiste et républicain. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il me revient donc de conclure, au nom de mon groupe, ce débat fort utile, qui fut riche d’enseignements. Il aura permis de souligner, s’il en était encore besoin, l’urgence de la situation, et donc la nécessité d’agir rapidement pour éviter une catastrophe écologique et sanitaire, comme nous l’a rappelé, avec beaucoup d’émotion, notre collègue Angèle Préville.
Rappelons les chiffres : selon un rapport de mars 2019 du WWF, il a été produit dans le monde autant de plastique entre 2000 et 2016 qu’entre 1950 et 2000. Plus de 310 millions de tonnes de déchets plastiques ont été produites en 2016, dont un tiers se sont retrouvées dans la nature, les océans recueillant 150 millions de tonnes de plastique. Si rien n’est fait, la production mondiale de déchets plastiques pourrait augmenter de plus de 40 % d’ici à 2030 et la quantité accumulée dans l’océan pourrait alors doubler. En 2050, il pourrait ainsi y avoir plus de plastique que de poisson dans la mer !
Rappelons également que la France a encore de gros progrès à faire en matière de recyclage, puisque seulement 22 % des plastiques y sont recyclés, contre 31 % à l’échelle européenne.
Une prise de conscience semble néanmoins naître dans l’opinion. Les discours se multiplient pour bannir les plastiques superflus et réduire l’usage unique. Une sorte de plastique bashing se développe de plus en plus, avec lequel, comme l’a indiqué notre collègue Patrick Chaize, il faut toutefois prendre ses distances.
Certes, le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures. Ainsi, madame la secrétaire d’État, le pacte national sur les emballages plastiques que vous avez signé le 21 février dernier va dans le bon sens. Les entreprises et les grands groupes signataires s’engagent en effet à cesser d’utiliser le polychlorure de vinyle, ou PVC, pour la fabrication des emballages ménagers, commerciaux et industriels d’ici à 2022, et à éliminer les emballages plastiques problématiques ou inutiles d’ici à 2025, à commencer par le polystyrène expansé.
Ce pacte fixe également l’objectif de 60 % d’emballages plastiques effectivement recyclés à l’horizon 2022 et d’incorporer en moyenne 30 % de matières plastiques recyclées dans les emballages.
Mais ces mesures semblent insuffisantes eu égard aux enjeux. L’approche volontariste sur laquelle repose le pacte et l’absence de contraintes risquent d’en limiter les effets. Aucun objectif chiffré n’est donné, en outre, quant à la réduction de la quantité d’emballages à la source. Par ailleurs, le recyclage ne peut être la seule solution apportée au problème, d’abord parce que le recyclage du plastique n’est pas infini : contrairement au verre, au papier et au métal, les plastiques ne se biodégradent pas. Ensuite, parce que le meilleur déchet, c’est avant tout celui que l’on ne produit pas, il faut intervenir autant que possible à la source, en produisant moins de plastique.
L’aspect international du problème doit également être pris en compte. S’il est vrai que les principales sources du plastique des océans sont les pays en voie de développement, de nombreux autres pays, dont la France, exportent une partie de leurs déchets plastiques vers ces régions. C’est aussi en raison du caractère transnational du phénomène que de nombreuses organisations demandent la mise en place d’un traité international juridiquement contraignant pour enrayer cette pollution.
Il existe, me semble-t-il, un large consensus sur nos travées concernant ce sujet. Nous souscrivons, madame la secrétaire d’État, aux trois piliers que vous avez présentés : la suppression des plastiques inutiles, le recyclage de 100 % des plastiques utiles et la préparation, par l’innovation, de l’« après-plastique ».
Nous souhaitons que ce débat permette d’enrichir la feuille de route sur l’économie circulaire et vous pouvez compter sur notre implication, ainsi que sur celle des collectivités locales, dans sa mise en œuvre.
C’est sans doute toute une palette de mesures cohérentes et ambitieuses qu’il faut mettre en œuvre : des mesures coercitives, certes, mais aussi des mesures incitatives.
Au-delà, vous avez évoqué avec force, madame la secrétaire d’État, l’outrance de notre société de consommation. C’est donc un autre modèle de consommation et de développement que nous devons promouvoir. Sachez que nous prendrons toutes nos responsabilités à cet égard ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Quelle politique de lutte contre la pollution et de recyclage du plastique et, plus généralement, quelle utilisation du plastique en France ? »
9
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 2 mai 2019 :
De quatorze heures trente à dix-huit heures trente :
(Ordre du jour réservé au groupe La République En Marche)
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé (procédure accélérée ; texte de la commission n° 441, 2018-2019).
Proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral (texte de la commission n° 444, 2018-2019) et proposition de loi organique visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral, présentées par M. Alain Richard et les membres du groupe La République En Marche (texte de la commission n° 445, 2018-2019)
De dix-huit heures trente à vingt heures et de vingt et une heures à minuit :
(Ordre du jour réservé au groupe socialiste et républicain)
Proposition de loi relative à l’affectation des avoirs issus de la corruption transnationale, présentée par M. Jean-Pierre Sueur et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n° 406, 2018-2019).
Proposition de loi portant reconnaissance du crime d’écocide, présentée par M. Jérôme Durain, Mme Nicole Bonnefoy, MM. Marc Daunis, Patrick Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain (texte n° 384, 2018-2019).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.)
nomination de membres de commissions mixtes paritaires
La liste des candidats établie par la commission des lois a été publiée conformément à l’article 12 du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat aux commissions mixtes paritaires chargées de proposer, d’une part, un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française et du projet de loi organique portant modification du statut d’autonomie de la Polynésie française ont été publiées sont :
Titulaires : MM. Philippe Bas, Mathieu Darnaud, Mmes Muriel Jourda, Lana Tetuanui, MM. Jean-Pierre Sueur, Jérôme Durain et Thani Mohamed Soilihi ;
Suppléants : Mmes Esther Benbassa, Maryse Carrère, Catherine Di Folco, Jacqueline Eustache-Brinio, Jocelyne Guidez, MM. Victorin Lurel et Vincent Segouin.
nomination des membres d’une mission d’information
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 8 du règlement, la liste des candidatures préalablement publiée est ratifiée.
Mission d’information sur le thème « transports aériens et aménagement des territoires » (vingt-sept membres)
MM. Joël Bigot, François Bonhomme, Jean-Marc Boyer, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Mme Josiane Costes, MM. Pierre Cuypers, Jean Luc Fichet, Jacques Genest, Jordi Ginesta, Joël Guerriau, Éric Gold, Jean-Michel Houllegatte, Benoît Huré, Mme Victoire Jasmin, M. Henri Leroy, Mme Marie-Noëlle Lienemann, MM. Jean-Claude Luche, Didier Mandelli, Sébastien Meurant, Cyril Pellevat, Mme Sonia de la Provôté, MM. Didier Rambaud, Claude Raynal, Jean Sol, Rachid Temal et Dominique Théophile.
Direction des comptes rendus
ÉTIENNE BOULENGER